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[RP]Carrie face son destin...*

Carensa.


Poitiers – Automne 1462 - Dans la matinée

Le voyage se déroulait sans encombre fait d'arrêts dans les villes lorsque ça devenait nécessaire pour le ravitaillement. Ils avaient un programme bien précis et devait rejoindre rapidement le bateau qui les mènerait dans les Flandres.

D'un voyage plaisant et enthousiaste, il ne restait chez la rousse, qu'une amère déception. Elle s'était trompée, une fois de plus, sans doute devait elle s'y résoudre cette fois. L'histoire se répétait inlassablement et la fatiguait à un point qu'on ne pouvait deviner.

Depuis quelques heures la rousse s'était perdue dans les ruelles de la forteresse. La ville lui paraissait étrangement immense et puis surtout elle se sentait oppressée. Sans doute que les derniers entretiens avec le Colosse n'y étaient pas pour rien.

Elle les avait laissé au campement. Le Seigneur et ses employées dormaient à poings fermés. Un bref débarbouillage à la rivière, un feu préparé et l'eau mise à chauffer, elle avait choisi de s’éclipser, non pour visiter la ville, Carensa n'était pas de ceux à s'émerveiller devant des détails architecturaux. Ce jour elle souhaitait trouver un petit présent pour ses « petits », peut être un bijou pour Niki, un vêtement pour Sasha.

La brume se levait lentement et la plaque d'une taverne claquant au vent lui fit relever la tête. « A l'auberge du Marteau et de l'Epée ». Elle n'aurait pu trouver mieux pour prendre un repas. Poussant la porte elle pénétra dans le lieu et s'attabla. Devant un bol de soupe elle entama un courrier pour Kheldar. Incapable de lui parler, elle avait décidé de poser les mots sur un velin, chose étrange pour la rousse qui n'avait pas pour habitude d'avoir sa langue dans sa poche. C'était le signe d'un profond changement et elle n'imaginait pas encore ce qui allait suivre. La missive pliée, elle fût confiée à l'un des gosses du quartier bien trop content de se faire quelques écus.


- Tu emmènes ça à l'écart d'la ville là bas désignant la route qui menait au point d'attache et tu l'donnes à Kheldar, t'verras c't'un colosse, t'peux difficilement l'rater.

Elle détailla le gamin qui paraissait en bonne santé pour un gosse de la rue puis s'arrêta sur un petit écusson qu'il portait sur sa chemise trop courte pour lui. Un détail la gênait, elle n'aurait su comment l'expliquer. Le gamin remarquant son regard afficha un large sourire


- Je vis à l'Orphelinat Sainte Mathilde, tu connais ?

Sainte Mathilde, le nom lui parlait, errant momentanément dans ses souvenirs jusqu'à faire non de la tête.
- Non j'crois pas, j'suis jamais v'nue par ici ou juste passer..et encore j'suis même pas certaine.

Déposant les quelques piécettes dans la main du garçon, elle le remercia et, le ventre plein, reprit sa route. Toute la matinée ce nom trotta dans sa tête incapable de se concentrer sur autre chose. Sainte Mathilde..Sainte Mathilde...ça lui parlait mais d'où et comment..mais surtout pourquoi ?

Le destin parfois est bien surprenant et alors qu'elle bifurquait dans une rue bien plus large que celles empruntées jusqu’alors, un immense bâtiment fourmillant, grouillant de vie s’éleva devant elle. Sans qu'elle ne sache pourquoi, son cœur se serra et c'est à la paroi d'une maison qu'elle dû se rattraper pour ne pas chuter.


Et bien Damoiselle, tout va bien ?

Relevant les yeux vers la voix qui venait de l'interpeller, la jeune femme ne comprit pas encore toute l'importance de cette rencontre fortuite.

- Allons,venez donc, vous devez avoir faim, je vais vous donner quelque chose.

La rouquine ne put que se laisser prendre par le bras par cette femme d'église qui l’entraîna dans l'immense bâtisse. Passant entre les enfants, elle avait cette impression de déjà vue, de déjà vécue.

La sœur l'installa sur une chaise devant une table et quelques autres s'approchèrent apportant pain et fromage, soupe et fruits..

Elle détaillait l'endroit, les poutres vieillissantes, les murs en torchis usés par le temps et puis ça et là quelques icônes religieuses.

Les enfants se chamaillaient, se couraient après et les sœurs riaient de cette vie régnante.

Alors que la sœur lui servait un verre d'eau, la rousse avait repris ses esprits.

- Pardonnez moi..je je n'ai pas faim, c'est juste que..enfin j'ai l'impression de connaître cet endroit et je n'arrive pas à savoir d'où cela me vient.

La religieuse s'installa à ses cotés et la regarda de cet air doux et réconfortant.


- Vous avez peut être grandi dans un orphelinat mon enfant, il y a des choses qui marquent mais qui ne resurgissent que lorsque l'on revit la même situation.
- Orphelinat ? Non non je crois pas, je n'ai pas souvenir de mes parents à vrai dire mais j'ai grandi avec quelqu'un qui m'avait pris sous son aile, enfin ..une petite partie de ma vie en tout cas.


Sœur Angélique puisque c'est ainsi qu'on la nommait l'écouta sans l'interrompre.

- Et puis c'est c't écusson sur la chemise du petit..enfin l'même que c'lui ci

Pointant son doigt vers le plafond où l'une des poutres était ornée de l'emblème de l'orphelinat.

- Il..enfin j'ai ..j'ai l'impression de m'en souvenir.

La religieuse fronça légèrement les sourcils et sembla réfléchir un long moment avant que la rousse ne l'interrompt dans sa réflexion.

- J'vais vous laisser, j'suis désolée du dérangement.

Soeur Angélique se releva et au moment où la rousse prenait le départ, la rattrapa par le bras.


- Vous ne m'avez pas dit votre prénom..et vous logez où ?
- J'm'appelle Carensa et notre campement est à la sortie du village.., mais on repart c'soir

La nonne acquiesça et ajouta


- Ayez confiance, vous trouverez.

D'un haussement d'épaules la rousse engagea le pas et quitta les lieux. Cette bonne sœur était étrange. Elle n'avait rien à trouver..enfin pas qu'elle sache....





(*titre honteusement inspiré d'un grand classique )

_________________
Carensa.


Un peu plus tard dans l'après midi

A moitié remise des ses émotions, la rousse chercha son bonheur, ou plutôt celui des siens, à travers les vitrines des diverses échoppes. Nikita se verrait gratifiée d'une fine chainette en or et Sasha d'une nouvelle paire de braies et chausses. Le petit bonhomme avait tellement grandi qu'il fallait songer à trouver plus grand.

Une fois ses emplettes faites, la rousse remonta la route menant au campement. L'automne, la saison préférée de la jeune femme. Elle aimait marché dans les feuilles qui craquaient sous ses pieds, les arbres encore parés de leurs couleurs aux milles éclats. Dans la petite prairie, à l'abris d'un bois, ils s'étaient installés pour quelques heures. Le campement était rudimentaire mais le confort n'était pas le but recherché.

Un regard posé sur Kheldar qui paraissait encore songeur. Depuis quelques jours il s'était enfermé dans un silence lourd et pesant pour la rousse, il faut dire qu'elle ne l'avait pas ménagé. Elle en connaissait la cause mais s'était refusée à en reparler. La lettre du matin devait cloturée cette conversation stérile. S'il avait pu émettre certains doutes la nuit dernière sur ses choix, la rousse elle ne pouvait plus en avoir. Elle devait se protéger comme elle le faisait depuis des années ans réellement y arriver d'ailleurs.

Autour du feu de bois, elle retrouva ses comparses de chemin. Ils partagèrent dans un calme quasi religieux, le repas du midi confectionné avec soin par la blonde Brune.
Il fallait le reconnaître, Brune était un vrai cordon bleu, agrémentant les plats avec un rien, trouvant toujours de quoi faire pour remplir les estomacs. Pas qu'ils manquaient de victuailles, non ils s'assuraient toujours de prévoir large, mais les conditions du voyage ne facilitaient en rien cet exploit culinaire.

Elle préféra ne rien dire sur cette étrange rencontre songeant que demain tout serait oublié. Prostrée dans son coin, elle repassait la scène matinale en boucle, ne sachant pas vraiment quoi en penser. Finalement, les paupières lourdes, la digestion et la nuit de voyage eurent raison de son sommeil.

L’après-midi était bien entamé lorsque le gamin rencontré le matin, déboula dans le campement. Se campant devant la rousse, il la regardait dormir jusqu'au moment ou la petite voix encore fluette insista :



- La sœur Angélique a dit qu'il fallait que t'viennes vite à l'orphelinat. Elle a quelque chose à t' dire.


Le temps d'ouvrir une paupière, puis l'autre et d'être certaine qu'elle ne rêvait pas..

- Qu'est ce qu'elle veut 'core celle ci..elle est complètement débringuée j'crois


- Rooh mais non dis pas ça ! Elle est gentille, c'la plus gentille d'Sainte Mathilde, elle p't'être une surprise pour toi !


- Ronchonnant de devoir sortir de dessous sa couverture, bon gré, mal gré, la rousse accompagna le gosse jusqu'à la dite Angélique.

- Ahhh vous voilà jeune fille s'exclama la religieuse en la voyant arriver. La prenant par le bras elle lui fit traverser tout l'orphelinat, prenant des escaliers ici, tournant à droite là, parcourant quelques mètres pour tourner de nouveau à gauche. Un vrai labyrinthe.

- Vous allez m'dire c'qui s'passe là ? Pis pourquoi v'voulez qu'j'vous suive...

La rousse était prise d'un doute, se demandant si elle ne devait pas faire demi tour et puis, en regardant la nonne elle songea qu'elle ne craignait pas grand chose à la suivre.



Quelques longues minutes plus tard, qui lui parurent interminables, elles arrivèrent dans une immense salle qui devait être une bibliothèque. Des livres et des livres..et des livres et..de la poussière s'entassaient dans la grande pièce. C'était à se demander comment elles pouvaient s'y retrouver dans tout ce fatras. Restée sur le pas de la porte, le regard posé sur les étagères, la rousse fût interpelée par la religieuse.

- Venez..

La rousse s'approcha alors d'une table où de lourds registres étaient empilés. L'un d'eux était ouvert sur une page. Ils n'étaient pas de prime jeunesse, le velin jauni, l'encre était à certains endroits, à peine lisible.

La religieuse pointa alors son doigt sur la page

- Regardez..je crois savoir pourquoi vos souvenirs se sont réveillés en voyant l'écusson.

Carensa ne comprenait rien, après l'avoir baladé dans l'enceinte de l'Orphelinat, elle voulait qu'elle lui fasse la lecture. Sans doute une blague..pourtant en regardant sœur Angélique qui affichait un sourire ravi, la rousse se pencha et commença de lire.

Peu à peu son visage se transforma. Les traits fatigués paraissaient plus inquiets. Tirant la chaise qui se trouvait devant la table, elle s'y installa. Les coudes posés sur la table, les poings dans les joues, elle déchiffrait petit à petit ce qui se livrait devant elle.

La lecture terminée, elle resta de longues minutes, interdites ne sachant s'il fallait rire, pleurer ou se mettre en colère. Se penchant en arrière, elle s'enfonça un peu plus dans le siège. Elle semblait annéantie, paralysée par cette nouvelle incroyable.

La main posée sur l'épaule de la jeune femme, la sœur savourait cet instant qu'elle aurait aimé pouvoir offrir à tous les enfants de l'orphelinat. Ce genre de joie était rare, bien trop rare à son goût.

Alors qu'elle allait ajouter quelque chose, une autre sœur, les bras chargés entrait dans la pièce.


- Ah Soeur Augustine, vous avez trouvé ? Tout y est ?


- Oui ma Soeur ! Tout y est ! Ça pour une surprise.., jamais on aurait pu imaginer que la propriétaire de ces affaires passerait par chez nous !!

Carensa, toujours aussi dépitée releva les yeux vers les deux femmes. L'Augustine tenait dans ses bras un gros ballot de belle taille qui termina sur les cuisses de la rousse.

- Carensa, voici tes affaires mon enfant, tu peux les prendre, elles t'appartiennent.

Elle venait de la tutoyer. Bien sur, puisque aujourd’hui elle était certaine que la jeune femme avait passé quelques mois au sein de leur établissement.

Lorsqu'elle s'était éveillée quelques minutes plus tôt, elle n'avait pas imaginé ce qui allait arriver dans sa vie. Carensa se souvenait peu de son enfance, voire pas du tout. Elle avait encore quelques vagues souvenirs du boiteux. La vie pour elle avait débuté à Sion lorsqu'au détour d'une taverne Natasha s'était présentée. Oui sa vie avait débuté à cet instant et aujourd'hui sa famille se composait de Sasha, Niki et Nikolaï.

La rousse en plein désarroi posa ses mains sur le balluchon, elle resta là, totalement perdue et indécise sur la suite...

_________________
Carensa.


Quelques minutes plus tard

Les deux sœurs cessèrent leurs jacassements et posèrent leurs regards sur Carensa. La jeune femme, les yeux humides restait hésitante quant au sort du balluchon.


- Eh bien allons mon enfant, ouvre le voyons !! tu as tout ton passé là dedans ! Tu n'es donc pas pressée de le découvrir.

Était-elle vraiment pressée de connaître son passé et de comprendre pourquoi son père n'avait pas voulu d'elle ?. Était elle pressée d'ajouter un peu plus de douleur à celle déjà présente ?. Elle venait de découvrir des noms..des prénoms.

- C'est un cauchemar, c'est ça hein, j'vais m'réveiller, j'vais retrouver mes enfants et tout s'ra pareil..c'est ça hein ?


Les sourires paisibles des deux religieuses ne mentaient pas. Il n'y avait nul cauchemar là dedans. Que tout ce qu'elle venait de découvrir était vrai, bien réel..tout, y compris deux points majeurs pour lesquels elle avait une aversion totale.

La boucle fût défaite et bientôt le précieux contenu découvert en partie. Quatre petites robe à la dentelle délicate et à l'initiale « A » brodée sur la poitrine, un châle de petite fille et des rubans, des dizaines de rubans de toutes les couleurs.

Caressant du bout des doigts les étoffes soyeuses, elle ne pouvait imaginer que ces robes, elle les avait porté alors qu'elle n'était qu'une toute petite fille. Elle les déposa sur la table et poursuivit son inspection.

Des dizaines de lettres adressées à celle qui lui avait donné la vie étaient soigneusement enrubannées entre elles. Elle les respira un instant comme si le temps n'avait pas eu d'influence sur l'odeur qu'elles auraient pu dégager..Mais non, elles sentaient la poussière et le temps ..perdu. Elle les ajouta aux vêtements sur la table, elle prendrait le temps de les lire plus tard, une par une.

Un coffret en noyer attira son attention mais elle ne prit pas le temps de l'ouvrir immédiatement. Elle voulait être seule pour entrer dans cette intimité qui n'appartenait, désormais, qu'à elle. Il était décoré avec soin et on pouvait lire sur le couvercle « A & A ». Des initiales qui ne manquèrent pas de faire briller les yeux de la rouquine. La pulpe des doigts dessina les boucles arrondies comme si le simple fait de faire ce mouvement lui permettrait de revenir en arrière. Il fallait s'y résoudre, sa mère était morte et enterrée depuis longtemps et ne reviendrait pas dans sa vie..

Un velin était soigneusement roulé, il était dit que son père avait reconnu l'enfant..Avait il besoin de le faire, ou en avait il eu vraiment envie ? Comme si le faire avait pu laver sa conscience. Qui était cet homme ? Pourquoi avait il eu un enfant avec sa mère ? L'avait il seulement aimé ou bien était ce juste une maîtresse de passage ?. Tant de questions qui ne trouveraient peut être jamais réponses.

Elle posa sa main sur une bourse en cuir, tira sur les liens, et en versa le contenu sur la table avant de repousser les pièces vers les deux sœurs qui paraissaient intriguées de sa réaction.

- C'pour les gosses, j'ai pas b'soin moi..prenez ça.

Leurs regards ne manquèrent pas, malgré la situation, de faire sourire Carensa. L'Orphelinat vivait essentiellement de dons et avec l'arrivée de l'hivers, bon nombre d'enfant allait arriver, des estomacs supplémentaires à remplir, des fièvres à faire soigner, des vêtements chauds à acheter.

Se relevant la rousse pris soin de tout ranger dans le linge protecteur et les liens furent rattacher solidement, il était hors de question de perdre quoi que ce soit, elle avait encore tellement de choses à découvrir.

La sœur Augustine lui tendit un document soigneusement roulé et cacheté.


- On a pensé que tu voudrais un exemplaire de ce que tu as pu lire là dedans, sœur Marie Agnès l'a retranscrit à l'identique. Garde le précieusement et merci de ton geste. Dit elle en regardant la bourse dans les mains de sa consœur.

- Bah de rien, ça m'fait plaisir, et j'm'attendais pas vraiment à trouver tout ça par ici..le Destin parfois fait bien les choses moi j'dis, enfin j'sais pas encore si c'bien ou pas c'que j'sais aujourd'hui mais mon fils pourra connaître l'nom d'ses grands parents. termina t'elle en prenant le précieux document.

Elle ne savait pas encore si tout cela allait changer sa vie. Après tout, sa mère était morte et sans doute que son père avait suivi..Qu'importait, elle pourrait expliquer à Sasha.

Les bras chargés de souvenirs, elle remercia encore les religieuses et quitta les lieux.

A la sortie de l'établissement, elle eut l'impression qu'un poids se retirait de ses épaules. Libérée, oui elle était libérée de toutes ces incertitudes, à défaut d'avoir été aimée d'un père, elle l'avait été de sa mère. Et de penser à ce qu'elle vivait avec Sasha, un sourire naquit sur ses lèvres pourpres.

Telle une enfant au matin de noël, elle était impatiente de lire toutes ces lettres et puis aussi de découvrir ce qu'il se cachait dans le petit coffret en noyer...

_________________
Carensa.


Plus tard dans la soirée

Installée dans le fond de la charrette, elle s'était assurée que tout ses comparses avaient quitté l'endroit. Ressortant une nouvelle fois le coffret, elle prit grand soin de le disposer sur ses genoux comme si elle tenait entre ses mains, un trésor d'une valeur inestimable.

Le petite clef argentée fût tournée et les pièces du puzzle commencèrent à se dévoiler sous ses yeux ébahis.

Légèrement tremblante elle prit délicatement un tout petit portrait représentant une enfant d'environ un. Dans ses yeux azurs, le peintre avait capté un brin de malice et dans son cou flottait de jolies boucles rousses.

C'en était trop, la rousse laissa ses sanglots éclater, le trop plein d'émotions avait eu raison d'elle. De grosses larmes roulaient sur les joues diaphanes, des grelots lui arrachaient la gorge et sa poitrine se soulevait sous la douleur de la retenue.

Le cadre ovale avait été protégé du temps et chacune des couleurs semblaient être intactes. La petite fille portait l'une des robes qu'elle avait vu plus tôt dans l'après midi et dans ses cheveux flottaient un ruban blanc. La rousse songea à son fils, finalement il lui ressemblait, ce présent du passé apportait une nouvelle pierre à son histoire.

Le retournant elle put y lire quelques mots gravés dans le bois : « Anaïs – 17 mai 1444 ». Elle déposa le précieux objet sur le couvercle et prit le second portrait placé à l'envers.

Dans le bois avait été inscrit « Ensemble – Avec tout mon amour – 1er juillet 1443 ». Lorsque la peinture fût découverte, un nouveau pincement au cœur multiplia les larmes. Une mère et son enfant installés dans un large fauteuil. La femme d'une rousseur éblouissante ressemblait en tout point à ce qu'elle était devenue aujourd'hui. Elle semblait toutefois beaucoup plus mince que Carensa. Ses cheveux savamment coiffés en chignon, laissait quelques mèches divaguer ici et là sur sa nuque et son cou. Et puis surtout elle était d'une féminité tout autre que sa fille. Une longue robe à la dentelle fine, quelques poudres sur les joues et les lèvres. Elle arborait une mine heureuse mais fatiguée. L'enfant, roulé en boule contre ses seins, dormait profondément.


- Maman, murmura t'elle d'une voix tremblante

C'était la première fois qu'elle prononçait ce mot et c'est le cœur rempli d'émotion qu'elle porta le cadre à ses lèvres puis son cœur.

Le cadre pressé contre sa poitrine elle avança ses doigts dans le coffre. Ici une bague assez épaisse, finement ciselée et sertie d'un saphir assorti à leurs yeux à toutes les deux, là une broche incrustée d'ambre. Par ici deux peignes à cheveux, l'un en nacre et l'autre en argent. Le coffret était un vrai nid à trésors et la rousse ne se lassait pas de découvrir ces souvenirs que sa mère avait sans nul doute touché et chéri.

Après de longues minutes à passer et repasser son regard sur les deux peintures, il était temps de prendre connaissance des lettres. En les libérant de leur cordon, elle remarqua que l'une d'entre elle lui était adressée et c'est les mains tremblantes qu'elle entreprit de la lire.

Citation:
Mon enfant, mon amour,

Lorsque tu liras cette lettre c'est que la maladie aura eu raison de moi. J'espère qu'une bonne famille pourra t'accueillir comme tu le mérites. Comme j'aimerai pourvoir leur expliquer tout ce que tu représentes pour moi, tout ce que tu es déjà malgré ton jeune âge.

Je me nomme Abigaïl de Chatterton et je suis née le 7 septembre 1427 à Londres. J'ai perdu mon père alors que je n'étais qu'un bébé, je crois que ma mère ne s'en est jamais remise. Elle est morte de chagrin quelques années plus tard. Ma tante Adélaïde m'a élevée et m'a faite rejoindre le couvent de Sainte Mathilde à Poitiers en France. A 14 ans, j'ai quitté ce couvent, entrant au service d'une noble dame. C'est là que j'ai rencontré ton père deux ans plus tard.

De quelques vingtaine d'années mon aîné, j'ai cru à ce bonheur qui fût bien éphémère. Tu es née un an plus tard. Ton père t'a reconnu mais n'a pas souhaité être prés de nous. C'était un officier et son poste avait sa préférence. Il n'a cependant jamais oublié de m'envoyer de quoi te nourrir et t'habiller comme il répondait à mes besoins financiers depuis notre rencontre.

Au gré de ses envies de parler, chose bien rare, il m'avait raconté avoir été marié et être père de trois grands enfants. Je ne sais s'il avait parlé de toi mais je doute fortement qu'il l'ait fait. Je n'ai plus leurs prénoms en tête, mais si un jour tu souhaites les rencontrer, peut être que l'hérauderie saura t'orienter. Tu pourras leur présenter l'avis de reconnaissance de paternité au cas où.

Tu as été la plus belle chose qui me soit arrivée. Cette nuit d'avril fût la plus belle de ma vie lorsque j'ai vu cette frimousse ronde aux éphélides délicates.

Bébé tu appréciais que je te chante des berceuses, en grandissant tu attendais ton histoire. Bien souvent nous allions nous promener près du kiosque sur la place, là quelques troubadours nous offraient musique et chants, je crois que tu aimais à voir tes yeux pétillants.

J'aimais la peinture, le chant, la musique et la lecture, je gage que tu apprécieras tout ces passes temps.

Si les peintures ne sont pas trop vieillies, tu pourras constater que je suis rousse je pense que tu le seras également, comme ma mère et ma grand mère.

Mon plus grand rêve serait que tu réussisses ta vie, que tu te maries et que tu puisses donner grande descendance à ton époux.

Aujourd'hui si je t'écris c'est que je sais que mes jours sont comptés. La maladie m'emporte peu à peu et je prends la plume avant de ne plus avoir de force pour t'écrire. Si tu savais comme j'ai mal de penser que je te laisse seule derrière moi. Tu es ma plus belle trace sur Terre et je suis déjà si fière de toi ma petite fille.

Mon enfant, mon délicat trésor. Promets moi de ne jamais faiblir devant l'adversité, et de mener ta vie tambour battant comme je n'ai pu le faire.

Je demeure près de toi depuis cet instant où je t'ai donné la vie et même la mort ne pourra jamais rompre ce lien qui nous uni.

Avec tout mon amour,
Ta mère Abigaïl

Fait à Poitiers le 11 avril 1445



La tête bascula en arrière contre le fond de la charrette et les yeux se fermèrent. Sa mère avait vécu cette situation par obligation ce que elle même avait choisi. Le destin semblait se répéter comme une malédiction sur les têtes rousses de la famille....

Elle songea à Kheldar et à sa demande..à Kheldar et à ses plans. Il rêvait de titres, il n'avait que cette idée en tête et Carensa était loin d'avoir ce désir. Aujourd'hui elle l'accompagnait, elle ne savait plus vraiment pourquoi..enfin si, elle lui "devait" quelque chose pour avoir participer aux retrouvailles avec son fils et puis les avoir tiré d'un mauvais pas. Même si elle n'arrivait pas à oublier les mots qu'il avait prononcé, elle avait choisi de tirer un trait sur tout ça.

Elle rangea son fabuleux trésor, n'enfilant à son doigt que ce merveilleux anneau au saphir brillant et planqua le reste avec ses affaires.

Pour l'heure tout était trop tôt pour en parler à qui que ce soit, d'ailleurs pouvait elle faire totalement confiance à ceux qui l 'accompagnait....

_________________









Carensa.


Le lendemain


Le voyage avait repris. En charge du gûet, ce qu'elle préférait, la rousse repensait à toute la journée, à toutes ces informations qu'elle avait reçu en se rendant à l'orphelinat et surtout en ouvrant le coffret.

Saphir luisant sous la lune apaisante, elle repensait à sa mère. Que dirait elle si elle la voyait aujourd'hui ? Que serait elle devenue si elle avait grandi auprès d'elle ? Serait elle devenue sage, bien pensante ? Aurait elle aimé la peinture, les chants, la botanique et tout ces trucs qu'elle trouvait chiants à mourir..

Assise à coté du cocher, les yeux rivés sur les alentours, même perdue dans ses pensées, elle n'en demeurait pas moins aux aguets. Ecoutant chacun des bruits que la nuit offrait. A leur parallèle, un chevreuil qui détale, au milieu de la route un lièvre venant sécher ses pattes qui s'enfuit en vitesse.

La route fût calme et au petit matin les fumées de la nouvelle ville s'élevaient dans l'horizon. Une main sur l'épaule, le Géant était réveillé.

- C'est bon, je termine, on est arrivés, repose toi.

La voiture bougea légèrement lorsqu'il se réinstalla. Il serait bien reposé et donc forcément de meilleure humeur. Elle serait fatiguée et éviterait donc de ruminer en allant se glisser sous l'épaisse couverture.

Elle jouait avec son anneau, l'admirant avec une étincelle dans les yeux. Le cocher le remarqua


- Bah dis donc c't'une belle bague qu't'as là. J'sais pas qui t'la offert mais s'est pas moqué d'toi.

Relevant son regard sur l'homme elle lui adressa un large sourire

- Ça oui, c't'un merveilleux cadeau, il a une valeur inestimable à mes yeux. C't'un saphir..tu vois dit elle en lui montrant de plus prés. D'la même couleur que mes yeux !

Le vieux acquiesça songeant que jamais il ne pourrait offrir une bague pareil à sa vielle compagne Louison. Oui..une vache ne porte pas de bague !!

Elle espérait bien que le géant entendrait malgré tout la petite discussion et que cela éveillerait sa curiosité, que soit dit en passant, elle n'était pas prête à assouvir.

Une heure plus tard ils avaient enfin franchi les portes de la ville et lorsque la rousse sauta de son siège c'est heureuse qu'elle retrouva le sol, les jambes engourdies.

Ils devaient rester ici deux jours. Ils s'attelèrent donc à trouver une auberge. Cette nuit ils dormiraient – on entrera pas dans les détails  - dans un bon lit après avoir pris un délicieux bain avec de l'eau merveilleusement chaude ! Un luxe que le nouveau Seigneur offrait à la rousse et ses gens.

Quelques heures plus tard après quelques ablutions généreuses et parfumées, la rousse redescendit dans la salle de la taverne. Dans un coin de celle ci, elle s'installa à une table et, armée d'une plume, d'un encrier, d'un vélin et de talc se décida à écrire à l'Hérauderie.

Dans cette missive très particulière elle demandait simplement si l'Hérauderie avait connaissance d'enfants portant le nom de son père, voir éventuellement si son père était encore vivant... Elle cacheta le pli et le remit au bureau postal. Il n'y avait désormais plus qu'à attendre.

Elle profita de ces quelques instants de repos pour écrire à ses petits. Ils lui manquaient, elle aurait aimé les serrer dans ses bras et conter à Niki tout ce qui venait de lui arriver.

Citation:
Ma blondinette, mon petit ange,

Bonjour à vous deux. Nous sommes à deux jours de prendre le bateau. Le voyage s'est bien passé et je me porte pour le mieux. Je suis impatiente qu'il se termine.

J'ai fait une étrange et bouleversante rencontre. J'ai retrouvé quelques affaires ayant appartenu à ma mère et je connais désormais le nom de mes parents.

Niki..imagines tu le changement dans ma vie ? J'ai même une famille de sang..enfin peut être, s'ils ne sont pas morts. Bien sur, tout comme Sasha, tu restes comme ma fille, je préfère le souligner, je te connais.

Bref, j'ai tant de choses à vous dire, à vous raconter. Je vous ai aussi acheté quelques petites choses mais vous les aurez à mon retour.

Ici c'est superbe, nous avons longé la côte et les soirées resteront dans ma mémoire, je crois qu'il n'y a rien de plus beau que l'Ocean..

J'ai hâte de vous serrer dans mes bras et de vous raconter tout ça.

Je vous embrasse très fort.

Carensa et maman !!!



Après relecture de son écrit, elle se demanda comment Niki allait prendre la chose..D'abord la tournure de la missive n'avait rien à voir avec celles qu'elles pouvaient envoyer avant. Carensa avait simplement pris conscience de l'importance de dire à ses « petits » comme elle les aimait..chose qui semblait si évidente avant mais qu'elle ne disait que très rarement. Ensuite, Niki n'en aurait surement pas assez pour être satisfaite et lui demanderait plus d'informations. Pour l'heure elle était incapable d'en dire plus dans la missive, craignant qu'elle tombe entre de mauvaises mains.

C'était étrangement sa première lettre de « maman » comme si aujourd'hui elle se découvrait vraiment en tant que telle, comme si aujourd'hui elle s'affirmait enfin.

La journée passa à une allure vertigineuse. Tandis que les autres préparaient la suite de leur voyage, la rousse avait sombré dans un sommeil des plus réparateurs. Ses rêves s'étaient peuplés de visages inconnus et avait apporté à son cœur un apaisement rarement connu.

C'est donc de forte bonne humeur qu'elle s'éveilla en fin d'après midi. Le repas prit autour d'une bonne table, une cheminée offrant une chaleur confortable et des compagnons de voyage toujours prêts à discuter. Quoi de mieux pour terminer une journée ?

Une engueulade...

Dans la soirée, le géant avait informé la rousse qu'il voulait lui parler. Le moment venu, elle avait longuement hésité, redoutant une énième dérobade de l'un ou l'autre. Ce fût le cas.
A la taverne alors qu'il était attablé depuis un moment, la divine enfant s'installa en face de lui, sans suivi quelques cordiales salutations jusqu'au moment où le géant s’inquiéta de sa condition de  « mère-célibataire »

- Ta recherche de mari avance t'elle ? Lui demanda t'il en pianotant sur la table
La rousse ne comprenait pas très bien pourquoi il la questionnait sur le sujet. Après tout il avait fait le choix de se fiancer à une Vicomtesse..pour certaines raisons. La rousse n'avait absolument pas l'intention de se marier, elle avait à l'heure qu'il était bien plus d'émotion dans le cœur qu'une future mariée. Mais nous savons tous ce qu'une femme trahie et en colère est capable de faire pour faire souffrir l'être aimé..

- Oui, je te remercie Kheldar indiqua t'elle sans sourciller.
C'était honteusement jouissif de lire dans son regard si souvent « impassible » ce que l'annonce venait de faire. Le colosse était amer, mais pas assez au goût de la rousse.

- Est-ce vrai ? Ajouta t'il sur un ton plus inquisiteur

- Oui ça l'est
ajouta t'elle avec autant d’aplomb, n'est ce pas ce que tu voulais ? Demanda t'elle en souriant légèrement, quasi certaine que cela ferait mouche. Après tout il l'avait cherché..elle ne voulait qu'une chose..mais elle n'était pas prête à attendre.


- Je saurai me rendre seul dans les Flandres, va donc le retrouver. Balança t'il, l'air un tantinet vexé..
Il venait d'abattre la dernière carte, celle qui ferait de leur relation..une rupture douloureuse. Lui ne reviendrait pas sur ses choix, elle ne rentrerait pas dans son jeu. La boucle était bouclée avec toutes les conséquences que cela impose. Il était hors de question qu'il puisse remarquer un millième de la douleur qu'il venait de lui infliger. Elle aurait préféré cent fois une lice où ils se seraient mis sur la trogne histoire de calmer leurs nerfs que ce coup bas qu'il venait de donner.

- Comme tu voudras, si tel est ton choix..ajouta t'elle en tentant de garder son « impassibilité » bien submergée par leur échange.

D'un «
 Je te souhaite une bonne soirée.. » il ponctua la discussion et claqua la porte..

Le calme..après la tempête qui venait de s'abattre comme la foudre sur un clocher. La rousse attrapa son verre, le porta à ses lèvres et resta à lorgner la fenêtre une bonne partie de la nuit, espérant sans doute, en vain..son retour
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Carensa.


Un jour plus tard..

La nuit n'avait pas été aussi réparatrice qu'elle l'aurait aimé. D'abord le sommeil avait tardé à venir et au petit matin elle faisait encore les cent pas en taverne. Finalement c'est à l'heure où les uns se levaient pour rejoindre les champs qu'elle se dirigeait vers sa chambre..vide.

Ne prenant même pas le temps de se dévêtir, elle s'était allongée sur le duvet et somnolait dans un demi sommeil. Pas tout à fait dans ses rêves, à ressasser sans cesse les événements de la maudite soirée.

Finalement c'est vers quinze heures qu'elle était sortie du lit et qu'elle avait profité du luxe de l'auberge pour prendre un long bain vaporeux.

Mi-allongée, mi-assise dans le baquet, elle profitait de la chaleur de l'eau. Par transparence on pouvait apercevoir les quelques cicatrices qui ornaient son corps. Riche héritage des combats sur les chemins, dans les mairies ou bien dans les lices. Tant que ça bastonnait, la rousse aimait ça. C'était cette adrénaline qui jusqu'à maintenant la tenait en vie. Une pure jouissance lorsque son adversaire se trouvait à terre.

Mais ça..c'était avant..

Les yeux fermés, elle bullait tranquillement, tentant vainement de penser à la tenue qu'elle porterait pour l'éventuel grand jour. Prête à accéder à la bonne, on frappa vaillamment à la porte.


- Un pli pour Dame Carensa !.

Un pli, deux plis, trois..mais non pas les plis de la robe bougre d'andouille ! Un pli à la porrrrteuuhh !

Sautant du baquet elle s'approcha de la porte et l'ouvrit


- Bon..

Attrapant le document, elle remarqua alors le rouge aux joues de l'homme en face d'elle et se rendit seulement compte qu'elle avait omis de prendre une..serviette.

Dégoulinant d'eau, elle esquissa un sourire bien moins gêné que lui et lui claqua la porte au nez avant de filer au bureau pour y poser sa missive.

Glissant une chemise sur ses épaules, elle s'essuya brièvement les mains dans un linge puis vient s'installer au bureau.

Le sceau de l'hérauderie était apposé sur le velin. Inspirant une grande bouffée d'air, elle décacheta la réponse et en prit connaissance.

Les quelques premières lignes furent parcourues avvec impatience et c'est submergée de bonheur qu'elle découvrit les noms de ses « frères et soeurs ». Cette fois, il n'y avait plus de doute, elle avait bien une « famille de sang ». La poursuite de la lecture lui permis d'apprendre que son « géniteur » était, lui aussi, décédé. Etrangement, l'annonce du décès de son père la bouleversa plus qu'elle n'aurait pu l'imaginer.

Ainsi donc elle ne connaitrait ni son père, ni sa mère. Terrible évidence, qu'il fallait accepter. Même si jamais jusqu'à il y a quelques jours elle n'avait eu envie de connaître sa famille, aujourd'hui c'était un pincement au cœur de savoir que celui qui avait honoré, au moins financièrement, n'était plus de ce monde. Jusqu'à maintenant elle avait fait sans, mais si proche du but, c'était une brèche de plus qui ne se refermerait pas avant longtemps.

Depuis son enfance, s'était une écorchée vive, Bella lui avait offert ce que toute famille aurait pu lui donner, et plus encore, mais il avait toujours manqué ce petit quelque chose à sa vie et elle n'avait jamais su quoi. Aujourd'hui elle le savait.

Décidée, elle attrapa velin, plume et s'appliquant à faire de belles lettres légères, entama son courrier


Citation:
Bordeaux,
le vingt-sixième jour de novembre 1462

A vous que j'ose contacter.

Je me nomme Carensa et je souhaite vous parler d'un sujet qui nous lie l'un à l'autre.
Je ne sais si vous connaissez mon existence mais j'ai en ma possession un document prouvant notre lien de sang.

Ne croyez pas que je veuille vous incommoder, loin de moi cette idée.

Je n'ai pas eu la chance de connaître ma défunte mère et vous êtes, avec votre frère et vos sœurs, les seuls membres qu'il me reste.

Je suis actuellement pour quelques jours à Bordeaux.

J'espère que vous donnerez réponse favorable à ma requête et si tel n'était pas le cas, alors je comprendrais.

Avec mon plus profond respect,
Anaïs Carensa Coleen



Un sourire se dessina lorsque les trois noms furent écrits sur le velin. C'était la première fois qu'elle les utilisait. Elle n'ajouterait rien, ne voulant pas l'effrayer plus que nécessaire. Elle espérait juste que sa demande était claire et puis qu'elle ne s'était pas trop plantée sur la façon d'écrire. Après tout elle n'avait pas l'habitude à tout ça..mais si il connaissait ses prénoms alors c'est qu'il connaissait son existence et les liens qui les unissaient.

Relisant une dernière fois la missive, elle l'agita pour la faire sécher puis la plia soigneusement. Une simple empreinte de cire scellant le pli.

Houppelande enfilée, elle trouva bien vite un coursier qui une heure après quittait Bordeaux pour..la Savoie.

Errant dans les ruelles, la rousse avait aperçu le colosse en taverne. Poussant la porte une dernière fois, elle venait voir si sa colère était passée. Ne semblant pas vouloir entamer un dialogue avec elle, elle s'éclipsa une première fois. Serait-ce leur dernière rencontre.. La suite de la soirée lui prouverait que non. Finalement la nuit leur appartiendrait, autour d'un verre, près d'un feu, mot après mot.. Elle n'irait pas en Flandres, s'éloignerait un peu, jugeant tous les deux que ce serait mieux comme ça et resterait sur la désagréable sensation que malgré son discours, inexorablement, il lui échappait...
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Carensa.


Un jour en plus..encore un jour..

Elle l'avait accompagné jusqu'au bateau et sur le quai elle s'était installée. La bruine matinale effaçant les traces des pleurs.. Longtemps, si longtemps, toute la journée elle était restée là, assistant au largage des amarres. Les marins s'agitant sur le pont et dans les voiles, tel une colonie de fourmis dans son nid. Elle n'arrivait pas à quitter l'endroit comme si cet instant, les séparait à tout jamais. On ne pouvait présager de rien. Il rejoignait celle qui deviendrait sa femme, elle attendait réponse de celui qui était son frère. Les promesses s'oublient..il oublierait sans doute.

Brune allait lui manquer aussi. Elle s'était prise d'amitié pour cette jeune femme peu commune. Carensa avait une sainte horreur des personnalités "lisses" et Brune était tout sauf "lisse". Elle avait trouvé chez elle, une complice amicale et bienveillante..elle lui avais juste souhaité juste d'être heureuse là bas et de prendre soin du géant en veillant sur lui. La rousse n'avait aucun doute sur elle, elle y veillerait.

Midi annonçait son apogée et le plein soleil automnal eut raison de sa vision, bientôt le bateau ne fût plus qu'un point sur le tapis d'argent. Elle songea aux présents que le géant trouverait dans la poche de son mantel.. et esquissa un sourire.

Elle se releva, remonta son mantel et rejoignit sa chambre. La journée serait longue, bien trop longue.

Se laissant tomber sur son lit, les draps portant encore "son" odeur, elle se laissa aller aux rêves. Son départ, l'attente des réponses à ses missives, elle tuerait le temps comme elle pourrait. Trouver un partenaire de lice serait peut être une idée..Il y avait si longtemps qu'elle n'avait pas combattue.

Bientôt le sommeil l'emporta, les joues creusées par la tristesse, elle paraissait si fragile..



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Carensa.


Bordeaux – Vingt-neuvième jour de l'an quatorze cent soixante deux


coule
vas-y sur mes joues roule,
essaie de noyer mon chagrin
coule
autant que je suis saoule,
d'avoir un coeur qui se retient*


Deux jours que le bateau avait quitté le port, deux jours qu'elle attendait des voyageurs pour repartir à Saumur. Quelques jours qu'elle attendait le retour de la missive envoyée à celui qui était son demi-frère.

Ce matin là, elle avait longuement traîné dans les draps du colosse, relisant sa lettre, souriant bêtement à ce qu'elle imaginait être des mensonges, mais de doux mensonges auxquels malgré tout elle se rattachait inconsciemment.

Tard dans l'après midi elle avait rejoint la grande salle de l'auberge, y trouvant de quoi se sustenter sobrement. Le regard perdu dans son bol de soupe, elle ne remarqua pas l'entrée d'un coursier et bientôt il se retrouva devant sa table.

Élancé, les cheveux blonds, il devait avoir une vingtaine d'année. Ses vêtements de bonnes factures, laissait soupçonner son appartenance à une maison de haut rang.

-Anaïs Carensa Coleen de

Elle ne lui laissa pas terminer sa phrase

- Oui c'est moi, vous m'voulez quoi ?

Même si elle se doutait des intentions du jeune homme, elle paniquait à l'idée que la nouvelle soit mauvaise.


- Un pli pour vous, j'imagine que vous vous doutez de la personne qui vous l'adresse.

Elle acquiesça alors qu'il sortait le dit pli de son veston pour lui tendre. Le parchemin en sa possession, elle invita le messager à s'installer et héla le tavernier pour lui passer une nouvelle commande.

Bientôt l'adonis pu remplir son ventre vide pendant qu'elle prenait connaissance du message.


Citation:
Damoiselle,

Je savais que ce jour arriverait tôt ou tard. Je connais votre existence, Père vous a déclaré comme bâtarde. Je sais de vous uniquement ces choses la.

Vous partagé avec moi une partie de mon sang mais cette partie est impure et je la renierai chaque seconde de mon existence. Oui comme vous l'aurez compris j'ai eu des problèmes relationnels avec Père.

Si vous avez la capacité à faire taire le sang que nous avons en commun, vous pourrez rentrer en mon domaine. Sachez que votre frère aîné de la fratrie est décédé il y a quelques temps déjà et que je n'ai pas de nouvelles de mes sœurs.

Quant à ma personne vous ne pourrez voir une quelconque chose ressemblance avec notre géniteur.

Respectueusement,



Le visage de la rousse s'assombrit. Il y avait dans ces mots une froideur qu'elle exécrait, surtout quand elle était directement concernée. Encore un de ces nobliaux qui se prenait pour le nombril du monde..voilà pourquoi elle les détestait. Son frère ne pouvait pas être comme ça..

Elle roula le parchemin et le glissa à son tour dans sa besace. Reprenant son repas, elle regardait le jeune homme qui se régalait de cette épaisse soupe aux lentilles assortie d'une crème fraîche.


- Vous repartez quand ?


- Le plus tôt possible damoiselle, il attend une réponse.

- Pouvez vous lui dire que..je viendrai le voir, il me faudra juste un peu de temps. J'dois rentrer à Saumur avant et si possible, j'aimerais que nous nous rencontrions à mi-chemin, en terrain neutre. Pensez-vous qu'il y verrait un inconvénient ?


- Je ne sais damoiselle, je ne suis pas lui, je ne puis me permettre de répondre à sa place mais je lui ferai part de vos souhaits. C'est un homme compréhensif et bon, il devrait y répondre favorablement, enfin j'imagine.



- Dites lui le 10 décembre à l'Hôtel Voguë à Dijon. S'il ne vient pas, je conclurais qu'il ne veut pas me rencontrer auquel cas, le sujet sera clos
.


Ils terminèrent leur repas en échangeant quelques mots sur la Savoie. Carensa ne connaissait pas bien ce duché, elle n'y était restée que peu de jour, et bien souvent pour quelques raisons « commerciales ». Trois heures plus tard, ils rejoignirent chacun leur chambre, lui partirait dès le lendemain matin, elle resterait là encore quelques jours soumise à une solitude qui lui paraissait de plus en plus difficile à supporter.

A la tombée de la nuit, l'envie lui prit d'une balade à cheval et c'est sur le dos d'Ira qu'elle découvrit la campagne avoisinante sous les lueurs des étoiles et de la lune. La rousse aimait la nuit, tel un chat elle écoutait, observait chaque bruit, chaque mouvement délicat et presque invisible pour celui qui n'y prêtait pas attention.

C'est au petit matin qu'elle retrouva son lit et s'endormit, les joues davantage creusées que la veille....




*armen Maria Vega - Oser les larmes

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Carensa.


Dijon – Hôtel de Voguë– Dixième jour de l'an quatorze cent soixante deux 

« Il y a souvent plus d’angoisse à attendre un plaisir qu’à subir une peine. »de Colette - Extrait de Belles Saisons


Le voyage n'avait pas été de tout repos. Sa famille « russe » étaient venue la chercher puis ils étaient remontés pour une célébration peu commune en Limousin, pour finalement rejoindre Saumur.

Ses bagages prêtes, la rousse était repartie seule cette fois, pour Dijon. Là elle devait y rencontrer une personne qu'elle jugeait importante à sa vie, même si elle ne la connaissait pas encore.

Le Grand Jour était arrivé et u matin du 10 décembre, elle s'était présentée à l'Hôtel de Vogué pour y demander un salon d'entretien. Portant son choix sur l'un des salons les plus intimes de l'Hôtel, elle allumait les quelques bougies qui s'y trouvaient.

Tout devait être parfait, elle ne voulait rien rater même si elle n'était pas certaine de faire ce qu'il fallait.

Du vin blanc et de la liqueur avaient été préparés. Quelques mignardises ornaient délicatement un plateau d'argent. Des fleurs, les bougies, tout encourageait au calme, à la sérénité et peut être à la confidence.

Assise dans le large fauteuil en tissus, le regard perdu sur les flammes dansantes dans l'âtre, la rousse paniquait intérieurement.

Les mains moites, la tête lourde, le bout du pied frappant le sol, elle n'arrivait pas à se calmer.

Pour l'occasion, elle n'avait pas jugé nécessaire de mettre autre chose que sa tenue habituelle, braies, chemise, bottes, cuirasse et brassard en croute de cuir, la rapière à sénestre.

Voici une heure qu'elle attendait dans le salon, y faisant les cent pas quand finalement, en passant devant un psyché, elle grimaça.

Elle ne pouvait décemment pas recevoir celui qui était son frère, noble de surcroît, dans cette tenue de « guerrière »..sauf qu'elle n'avait pas vraiment prévu de robe.

Elle libéra la longue et épaisse chevelure, la laissant dévaler sur ses épaules jusqu'au bas des fesses. Les boucles rousses s'intensifiant avec l'humidité présente dans l'air. Certe elle n'en avait pas toujours l'air, mais elle était bien une femme, Kheldar l'avait rassuré à ce sujet, lui avouant même qu'elle possédait des attributs qu'il n'avait jamais vu aussi beaux ailleurs..Quand on connaissait le nombre de ses maîtresses, on pouvait imaginer qu'il avait de quoi comparer.

A quoi pouvait ressembler ce frère tant espéré. Jamais elle n'en avait parlé, ô grand jamais elle n'avait imaginé pouvoir rencontrer un jour, un membre de « sa » famille. Serait-il roux comme elle ? Ça semblait peu probable, elle tenait ça de sa mère..aurait il ses yeux d'un bleu profond ? Quelques traits ressemblants aux siens ?. Serait il aimable ? Poli ? Violent ? Bien pensant ? Tant de questions auxquelles elle pourrait répondre d'ici quelques heures.

Elle glissa une fine mèche devant son œil gauche, tentant de dissimuler la cicatrice faite par la rousse incendiaire puis alors qu'elle lissait ses braies de la paume de la main, la poignée de la porte grinça. Le cœur battant, la Sublime se retourna, tremblante...

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Nerval
Le page était revenu avec des nouvelles alors qu'il avait laissé tout cela dans un coin de sa tête. Il y avait réfléchi longuement sous son arbre frigorifié par le froid avant que Samaelle ne vienne l'en sortir pour lui rappeler ses obligations de vassal de la Savoie. Il l'avait encore mis de coté, longuement sans en parler à personne. Cela le contrariait fortement et il ne souhaitait pas donner un avantage quelconque qui lui ferait perdre la face. Il en était hors de question. Qui plus est elle lui avait donné une sorte d'ultimatum, il n'aimait pas ça. Personne n'avait la capacité à lui ordonner quoique ce soit, ce temps la était terminé depuis belle lurette. Elle voulait le rencontrer, elle n'avait qu'a venir, il ne se déplacerait pas. Qui plus est pour le rejeton de son Père qu'il haïssait fermement malgré sa mort. Il ne s'était pas non plus confié à Mère, il était inutile qu'elle s’inquiète plus qu'elle ne l'était suite à sa précédente venue.

Le matin de la fameuse journée il se leva renfrogné. Il n'adressa pas une parole à son invitée, il n'avait besoin qu'il souffle sur les braises de sa folie ce jour la. Il mettrait les choses au clair avec elle, il irait mais elle devra suivre ce qu'il lui dit au risque de retourner dans les oubliettes d'ou sa soeur était sortie. En toute discrétion et sans dire un mot à personne il indiqua le lieu à son coche ou il devait se rendre. Hôtel de Voguë... L'aller retour devrait être fait dans la journée...

Il n'avait eu nul besoin de changer ses habitudes vestimentaires, il cultivait fermement et avec acharnement son statut qui allait de paire avec des vêtements que certains auraient pu qualifier de hors de prix. Durant le voyage, il ne rêva pas, il ne le pouvait pas et il comprit une chose importante, bien qu'il ne lui l'avouerait jamais, sur un fameux voyage en Champagne ou les mensonges avaient été récurrents. Ce moment la, il devait l'affronter seul et n'avait pas émis le besoin d'en parler...

Il descendit sur le perron du lieu ou l'attendait le rejeton de son Père. Il hésita quelques secondes, entrer... ne pas entrer... il pourrait le regretter plus tard s'il ratait cette occasion de la voir même s'il n'en n'avait pas envie. Il connaissait son existence mais puisqu'elle était lié à l'homme qui l'avait rejeté car il n'aimait les armes, le Marquis avait fait une croix dessus. La raison l'emporta sur le coeur et il pénétra dans l’hôtel. Il se fit connaitre auprès du réceptionniste qui lui indiqua la porte.

Son visage était impassible comme s'il s'attendait à voir son père derrière la porte. La main se posa sur le loquet de la porte, l'entrabaillant. Les flammes des bougies entaillait le lieu qui semblait sombre. Une seconde de doute, une seconde pour remettre ses idées en place, une seconde pour prendre son visage impassible... il franchit le seuil et prit le temps de fermer la porte avant de poser son regard sur elle.

Elle était rousse ce qui le surprit quelque peu mais cela n'était pas visible. Elle ne semblait à première vue pas trop ressembler à son géniteur. Sa soeur était belle, ça il en était certain car malgré sa tenue qui était tout sauf correcte à son gout il se dégageait ce petit truc qu'il n'aurait su exprimer. Sans un mot il posait son regard sur elle, la détaillant lentement, ses yeux qui ne ressemblaient pas aux siens, ses cheveux roux, ses mains qui trahissaient le mal aise qu'elle avait.

Sans un mot il se plaça sur le fauteuil en face du sien sans la lâcher du regard... son visage n'avait trahit aucunes de ses pensées. Il ne s'était pas présenté, il n'y en avait pas besoin, il était la et sa seule présence suffisait à le nommer.

Lorsque des mots sortirent enfin de sa bouche, ils furent calmes, posés...


Plus jamais... vous ne m'ordonnerez plus jamais quoique ce soit Anaïs Carensa Coleen de Vandimion. Plus jamais...

Il fit un geste de la main comme pour effacer l'erreur qu'elle venait de commettre afin de passer à autre chose.

Je suis la Anaïs Carensa Coleen de Vandimion, que puis je pour vous?
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Carensa.


La porte s'était entrouverte mais la personne cachée derrière hésita quelques secondes. Avait-elle des doutes sur sa présence ici ? Ou la crainte d'être déçue..

Il entra enfin et les battements du cœur de la rousse reprirent lentement un rythme régulier. Ils ne se ressemblaient pas, absolument pas. Elle aurait pu le croiser à maintes reprises sans se douter qu'un infime lien de sang les liait.

Il s'installa, elle fit de même. Il était venu, sans doute après beaucoup d'hésitations. Mais le premier pas, il l'avait fait comme elle l'avait fait de son coté.


- Plus jamais... vous ne m'ordonnerez plus jamais quoique ce soit Anaïs Carensa Coleen de Vandimion. Plus jamais... 

Les mots résonnèrent dans la pièces. Catégoriques, froids, et étrangement la « grande gueule » qu'elle était ne rétorqua pas. Sans doute l'utilisation de ses trois prénoms y était pour quelque chose sans oublier ce nom qu'elle n'avait jamais porté et qu'elle n'osait pas encore prononcer.

- Je..oui..je comprends, mes termes étaient peut être un peu abrupts, je..je suis sincèrement désolée si cela vous a choqué et je vous remercie d'être venu malgré tout.

Elle replaça sa rapière correctement et s'enfonça dans le siège, son regard posé sur lui. Les azurs brillants d'une étincelle peu commune. Elle ne laissait rien transparaître mais même si elle restait incertaine de la suite de cet entretien, son bonheur était au comble d'avoir rencontré cet homme. De son apparence émanait une prestance naturelle, un calme inhabituel pour la rousse, ils étaient si différents tous les deux. Il semblait subtil et raffiné, elle était rustre et sauvage. Il semblait prendre grand soin de son apparence, elle se foutait royalement de sa condition de femme, pour autant qu'elle se sente bien dans ses vêtements. Rien ne leur était commun et pourtant dans leurs veines coulait pour la moitié, un sang paternel..


- Je suis là Anaïs Carensa Coleen de Vandimion, que puis je pour vous?

Un sourire naquit sur le minois opale. Que pouvait-il lui apporter ? Était-il venu avec l'idée qu'elle lui quémanderait quelque chose ?. La rousse prit le temps de répondre, choisissant ses mots, parlant lentement..

- Ce que vous pouvez pour moi, à vrai dire rien.. Nous avons un lien qui nous unit plus ou moins par la force des choses. J'avais envie de connaître mon....frère. J'ai à mes cotés certaines personnes qui sont comme ma fille et mon frère et j'ai un fils, Sasha, il a 3 ans.

Elle se releva, tentant d'effacer cette gêne qui la reprenait, et se dirigea vers le meuble où étaient disposés les verres et les carafes. S'empressant de remplir deux verres, du vin blanc choisi plus tôt, elle revient près de lui et lui donna l'un des deux godets d'argent.

- Nous pouvons trinquer à cet entretien, même si vous choisissez de ne pas me revoir, j'aurais eu plaisir à rencontrer un ..enfin..le..fils de l'homme que ma mère aimait.

Posant son fessier sur le bras de son propre fauteuil, elle leva le verre légèrement, trinqua puis le porta à ses lèvres pour en prendre quelques gorgées.

- Je peux comprendre que la démarche soit difficile pour vous si les relations avec notre père n'étaient pas simples. Mais comprenez que je me pose des questions sur qui était cet homme et pourquoi il agit de la sorte.. J'ai une lettre de ma mère, souhaitez vous en prendre connaissance ? Et j'ai aussi..

Elle sortit les documents remis par les religieuses quelques semaines plus tôt et lui tendit




- Je n'ai que ça et l'écrit de ma mère, le reste je ne me souviens de rien, si ce n'est une période où je devais avoir 10 ans et que je vivais de petits larcins auprès d'un homme.

Inclinant sa tête sur le coté, la mèche dévia de la cicatrice, la dévoilant légèrement.

- Je ne vous demande rien, soyez en assuré. Je vis sobrement, mais nous ne manquons de rien avec Sasha. Nous vivons à Saumur, j'ai ma forge, je voue une grande admiration aux armes, je suis une adepte de la lice..et des voyages. J'aimerais juste apprendre à vous connaître si cette envie était réciproque.

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Nerval
L'avait-elle choqué par ses mots? Celui lui importait pas, il n'allait pas s’embarrasser de cérémonial en présence de sa sœur bâtarde, qui plus est celle de son géniteur. Il hocha juste la tête à sa réponse qui lui convenait, elle devait comprendre et si elle n'y arrivait pas c'est qu'elle n'en valait pas la peine. Il l'observa longtemps en silence, sans piper un mot. Elle choisissait ses mots, cela se sentait, ce n'était pas une oratrice, elle ne semblait pas avoir cette qualité la mais ses mots venaient de son soi profond et il appréciait même s'il restait impassible comme à son habitude.

Ses pensées se brisèrent lorsqu'elle fit de nouveau allusion à son géniteur mais il la laissa parler, il la laissa prendre deux verres, les servir... comment pouvait-elle penser que cette personne en commun pouvait avoir aimé quiconque hormis son fameux fils tant chéri... elle ne comprenait pas la chance qu'elle avait de ne jamais l'avoir connu ainsi il ne pouvait lui avoir fait de mal. Sa situation, son fils, son soit disant frère qui ne l'était pas, tout cela lui passait au dessus. Le Marquis continuait de l'observer, ses manières, cet alcool qui glissait entre ses lèvres, cette manière de s’asseoir sur le bras du fauteuil.

Les documents étaient en sa possession... et durant le silence qui suivirent ses mots il hésita un instant à les jeter au feu mais... pour une fois il ne s'écouta pas. Il tenait lui même à certaines choses de Mère bien que certains n'étaient plus en sa possession. Il ne jeta pas un seul instant le regard sur les velins et d'un calme froid il se leva du fauteuil et posa les documents sur la table. Il n'en n'avait rien à faire de tout cela, ce document ne valait pas grand chose de sa part car il faisait mention du géniteur.

Très lentement il s'approcha de sa sœur et lui prit avec autoritarisme son verre. Il se retourna vers l’âtre qui rougeoyait devant eux pour balancer les deux verres à l’intérieur avec le contenu impur. Le bruit du verre se fracassant découpa le silence qui régnait. Sans aucune gêne il la regarda de nouveau avant de venir poser son séant sur le fauteuil dont le bras lui servait d'assise.


Je ferai reconnaître votre fils. Je suis votre frère et je suis l'unique encore vivant. Beuil vous accueillera quand vous le désirerez. Vous pourrez même y vivre avec votre fils. Mais il faudra ne plus parler de larcins ou autre chose de ce genre sinon je me verrai dans l'obligation de vous renier totalement et de faire en sorte que cela n'arrive plus.

Son regard se posa sur les flammes comme souvent lorsqu'il parlait de choses qu'il n'aimait pas...

Je répondrai aux questions sur notre géniteur aujourd'hui, ensuite nous le laisserons moisir la ou il est. Ensuite vous viendrez en Savoie afin d'honorer votre frère lors d'une cérémonie.

Avant de rajouter en murmurant...

Et pas de tenue qui vous ferait honte...
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Carensa.


Il l'écoutait, paraissant presque à dix milles lieues de là où ils étaient.

Il était froid, austère presque, d'un calme inquiétant, totalement détaché de tout sentiments. Elle se retrouvait un peu dans ce caractère, parfois au moins elle pouvait paraître froide, abrupte, fermée mais pourtant qu'en on avait la chance d'obtenir une place dans son cœur, c'est une femme douce, attentionnée, attentive qu'on pouvait découvrir.

Il ne prit même pas le temps de prendre connaissance des velins. Il ne remettait pas en doute sa parole pourtant, rien d'autre de la vie de sa sœur ne semblait l'intéresser. Elle se tût, jugeant qu'il ne servait à rien d'en parler puisque son frère semblait douloureusement amer en ce qui concernait leur père. D'ailleurs il ne parlait nullement de père mais bien de géniteur. Elle pensa à Sasha et eut mal pour lui.

Pourtant, pourtant oui, elle aurait aimé savoir à quoi ressemblait cet homme..Roderick de Vandimion. Une curiosité bien naturelle qu'elle ne pourrait pas assouvir immédiatement.

Son regard suivait son frère de la table à elle. Lorsqu'il prit son verre délicatement mais sans qu'elle n'ait envie de broncher, elle le laissa faire pour sursauter légèrement lorsqu'il jeta le tout dans l'atre.

Un « bah pourquoi ? » faillit être prononcé mais bien vite ravaler. Décidemment le frangin n'était pas commode, ça ne devait pas être simple de vivre à ses cotés. Prise de doute, elle ne savait pas quoi penser de cette rencontre. Avait elle eu raison de remuer leur passé ?

Elle continua de suivre son déplacement jusqu'à ce qu'il se laisse tomber dans le fauteuil sur lequel elle était installée.

Que faire ? Si elle s'éloignait, il le prendrait mal, si elle lui tournait le dos, elle ne pourrait voir son visage et elle savait que l'on pouvait en découvrir des choses sur les traits d'un visage, aussi impassible soit il.

- Je vous remercie mais je n'ai pas pour projet de vivre ailleurs qu'à Saumur pour l'instant en tout cas.

Elle inclina légèrement la tête sur le coté, le regardant par dessus son épaule

- Quant aux petits larcins j'avais 10 ans, je ne m'en suis pas contentée mais depuis près de deux ans maintenant, je me consacre à Sasha, ma forge, mes voyages et mon village et ça me va bien comme ça.

Le regard masculin s'était perdu dans les flammes.

- Je n'ai pas vraiment de questions sur lui, si un jour vous avez l'occasion de me montrer à quoi il ressemblait..ça me suffira. Peu importe ce qu'il était, ce qu'il a fait, ce qu'il est devenu et comment il est mort. Ça n'est pas lui qui m'a fait..

Elle allait se détendre un peu lorsqu'un murmure glissa jusqu'à son oreille. Branle bas de combat ! Arghh ! Il trouvait quoi ? Que sa tenue n'était pas adéquate ?

Se redressant hâtivement elle se planta devant lui, bras croisés et le scruta.

- Elle ne vous plait pas ma tenue peut être ? Parce que vous vous trouvez masculin et viril peut être dans votre chemise de soie, avec tout vos nœuds nœuds...Vous portez sur votre dos l'équivalent de ce que me coûte mes vêtements pour deux années consécutives et je m'en porte pas plus mal !

Là, elle était bougonne ! La reprendre sur sa façon de parler ou d'être passons, mais la reprendre sur sa superbe tenue de la mort qui tue..fallait pas pousser mémé dans les orties non plus.

Vrai qu'elle n'avait rien de féminin, vrai qu'elle préférait les tenues pratiques pour monter à cheval ou sortir l'épée du fourreau mais de là à lui dire de la sorte..

- C'est vous qui avez peur d'avoir honte..moi je me suis toujours assumée, et encore, je peux vous dire que je fais un effort surhumain pour vous parler correctement. Si vous avez peur que je me tienne mal ou bien que je sois mal habillée, alors ne m'invitez pas !

Elle haussa les épaules, un peu bougonne. Certes il n'avait pas tort, mais il y avait une façon de faire avec elle. On pouvait tout lui demander à condition de choisir correctement la façon..


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Nerval
Il resta impassible lors de ses réponses, elle voulait uniquement un portrait il en fera emmener un à Beuil. Alors qu'il allait lui répondre qu'il lui signifiait son interdiction définitive de brigander puisque c'est ce qu'elle lui avait annoncé de manière tordue... elle se leva comme une furie. La voila qui s'énervait sans raison apparente... mais ses paroles n'étaient sans aucune ambiguïté... la tenue...

Son visage ne bougeait toujours et se plantait sur elle... de ses braies désordonnées à ses cheveux toux en passant par sa poitrine. Il aimait les femmes de caractère alors que sa sœur puisse l’être ne le dérangeait nullement mais il était hors de question qu'elle le sache alors qu'elle croisait les bras signe qu'elle avait été piqué à vif. Un simple sourire en coin se fit sur son visage.

Et dans le silence de la pièce qui n'était brouillé que par les crépitement des flammes il lui souffla une réponse directe sans retenue dans les mots...


Vous pourriez être une très belle femme Anaïs Carensa Coleen de Vandimion. Par contre c'est la dernière fois que vous m'adressez la parole de cette manière la.

Il laissa quelques secondes de silence le temps de perdre le ton froid qui était le sien sur la fin de ses mots avant de reprendre...

Vous ne me ferez pas honte puisque vous êtes ma soeur vous saurez vous mettre à la hauteur que je souhaite. Vous n’êtes pas digne d’être vêtue ainsi.

Il se releva lentement, sans bruit et s'approcha d'elle plongeant son regard éclairé par les flammes dans le sien. Le dos de sa main venant se poser sur sa joue pour lui susurrer...

Vous êtes ma soeur, vous n’êtes pas n'importe qui, un peu de respect pour vous même.
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Carensa.


Le regard posé sur son frère, elle se faisait aussi jugeante qu'il l'était à son égard et s'attendait bien à recevoir ses foudres. Après tout, il était son aîné, même si elle n'était qu'une bâtarde, ce sang qui les unissait ne pouvait pas être oublié.

- Je suis une femme c'est déjà pas mal et vous ..enfin je..

Il l'impressionnait et la rousse savait qu'elle devrait faire certaines concessions.

- n'ai pas reçue la même éducation que vous..faudra vous y faire aussi, quant à me mettre à la hauteur, c'est que déjà vous êtes déçu que je ne sois pas aussi bien élevée et présentable que vous estimez me devoir l'être.

Lorsqu'il se releva, elle fit un pas en arrière en estimant qu'il devait en avoir terminé avec elle. Quelle ne fût pas sa surprise lorsque les doigts vinrent effleurer sa joue. Elle frissonna, était ce un piège ? oserait il la gifler. Non quelques mots furent murmurer.

- Du respect pour..moi même..

Elle ferma les yeux un instant jusqu'à de nouveau perdre son regard dans le sien et de marmonner :

- Je..ferai un effort pour vous, moi je me moque bien de ce que l'on peut penser de moi.

Un fin sourire glissa sur ses lèvres, happé par le regard gris-vert de son frère.

- Je suis heureuse d'avoir fait votre connaissance..vraiment.



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