Erwelyn
[Fin février, retour à Evron après les joutes de la Chesnelière]
Ces joutes l'avaient littéralement séchée. Partie sur les chapeaux de roue, enchaînant les victoires, voilà qu'elle s'était pris le retour de manivelle en pleine poire. Lynette avait chuté, et pas qu'un peu, mais évidemment, c'était le jeu ma pauvre Lucette, et elle n'en voulait en aucun cas à la duchesse qui l'avait fait valser de Cheval pour arracher la victoire, incontestablement. Seulement maintenant, elle avait bobo, sa hanche la faisait sacrément douiller malgré le cataplasme de consoude et la préparation que Léanore lui avait fait ingurgiter pour calmer la douleur. Et puis le trajet en coche n'avait rien arrangé à la situation, même si les terres d'Evron étaient toutes proches de celles de la Chesnelière, puisque terres vassales de sa baronnie. Enfin, surtout, il y avait cette douleur lancinante dans le bas du ventre qui l'inquiétait au plus haut point, dont elle n'avait pas réussi à parler au médecin. Erwelyn avait le pressentiment que c'était grave, que ça n'annonçait rien de bon, s'imaginant déjà passer l'arme à gauche alors qu'elle n'avait toujours pas rédigé son testament. Tiens d'ailleurs, elle le ferait à peine arrivée et l'enverrait à Phylogène, comme ça elle pourrait mourir en paix. Guillaume serait confié à Lexhor et Agathe, pauvre Agathe encore une fois abandonnée par la personne qui veillait sur elle, à Rosalinde. Voilà, c'était bien ça, que sa vassale s'occupe de sa belle-fille. Elle pourrait lui apprendre des trucs de filles, à bouder, à broder, à charmer les hommes, toutes ces choses que Lynette ne savait pas faire elle-même et qu'on ne lui avait jamais appris.
Arrivée dans la cour du château, on l'aida à descendre et le regard affolé de sa camériste en regardant sa bouille défaite lui en appris beaucoup sur son état général qui ne devait pas être beau à voir. A peine eut-elle mis pied à terre que la pointe dans son bas ventre se réveilla, encore plus forte que deux heures auparavant lorsqu'elle avait chuté. Un regard inquiet fut lancé en direction de Catherine qui veillait habituellement sur elle lorsqu'elle était en séjour sur ses terres. Cette dernière fit glisser précautionneusement son bras autour des épaules de sa maîtresse, lentraînant dans sa chambre située au premier étage, l'ascension la faisant grimacer. Assise sur le bord de son lit, sa main s'accrocha au bras de sa servante, chouinant un bon coup.
Rhaaaaa nom d'un poney, ça fait maaaal !!! J'ai mal au bide Catherine, j'ai l'impression qu'on m'arrache les viscères.
Oui c'était ça, clairement, un genre de bonne gastro des familles ! Son corps s'affala sur le côté où la hanche était encore intacte, histoire de pas en rajouter une couche et de ne pas s'appuyer sur celle qui était explosée, en prime, poussant un gémissement alors que Catherine lui enlevait ses braies pour pouvoir la mettre au lit. Sa dextre alla alors se positionner au niveau de son entre-jambe pour vérifier qu'elle n'était pas en train de pisser le sang, et là, elle sentit un truc pas normal du tout. Son regard se porta sur le visage de Catherine, des yeux ronds comme des billes, qui elle-même venait de se pencher pour regarder de plus près, relevant la tête, l'air estomaqué.
Mon dieuuuu, une têêêêteeee !
Bordel ! De quoi faire flipper le poney rose qu'elle était, ça, c'était sûr, car elle aussi l'avait bien sentie. A ce moment là, une contraction violente, car c'était finalement bien ça qui la travaillait depuis des heures, lui arracha un cri et c'est dans l'incohérence la plus totale qu'elle entendit Catherine lui crier de pousser, ce qu'elle fit, automatisme retrouvé plusieurs années après la naissance de Guillaume. Après quelques poussées, l'on entendit résonner dans la chambrée le cri d'un bébé, alors que la mère s'effondrait sur sa couche, transpirante et choquée, se recroquevillant en chien de fusil et fermant les yeux pour ne plus entendre ces cris.
Plus tard, Catherine lui ramena l'enfant, et c'est une Erwelyn toujours prostrée qui lui fit face, refusant de réaliser que ce bébé était sorti de son ventre. D'ailleurs, ce n'était pas possible, il n'était pas à elle, non. Elle avait déliré à cause de sa douleur et sa femme de chambre essayait tout simplement de lui faire une blague à lui faire croire qu'elle avait accouché alors qu'elle n'était même pas enceinte. Elle sortait de ses menstrues et puis, de qui aurait-elle pu être enceinte, hein ? Alors non, il était hors de question qu'on lui fasse croire qu'elle venait de mettre au monde un bébé.
Ce manège dura les deux jours suivants, avant que Lynette ne pose un regard sur l'enfançon que Catherine, qui avait heureusement su tenir sa langue et avait fait croire que l'enfant était né d'une servante qui avait caché sa grossesse, lui présentait jour après jour. Ses prunelles s'attardèrent sur sa petite tête, ses petites mains, ses cheveux bruns en bataille, mais c'est un visage fermé qui se releva vers la femme qui le tenait dans ses bras.
Donnez-moi un parchemin et une plume, Catherine.
Et sa femme de chambre s'exécuta, dépassée par les événements. Sur le parchemin qui partit quelques instants plus tard, étaient seulement inscrits quelques mots en direction d'Agnésina Tempérance Corleone, conviée à se rendre à Evron le plus rapidement possible. Et de regard pour le bébé qui venait de naître, il n'y eut plus.
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Ces joutes l'avaient littéralement séchée. Partie sur les chapeaux de roue, enchaînant les victoires, voilà qu'elle s'était pris le retour de manivelle en pleine poire. Lynette avait chuté, et pas qu'un peu, mais évidemment, c'était le jeu ma pauvre Lucette, et elle n'en voulait en aucun cas à la duchesse qui l'avait fait valser de Cheval pour arracher la victoire, incontestablement. Seulement maintenant, elle avait bobo, sa hanche la faisait sacrément douiller malgré le cataplasme de consoude et la préparation que Léanore lui avait fait ingurgiter pour calmer la douleur. Et puis le trajet en coche n'avait rien arrangé à la situation, même si les terres d'Evron étaient toutes proches de celles de la Chesnelière, puisque terres vassales de sa baronnie. Enfin, surtout, il y avait cette douleur lancinante dans le bas du ventre qui l'inquiétait au plus haut point, dont elle n'avait pas réussi à parler au médecin. Erwelyn avait le pressentiment que c'était grave, que ça n'annonçait rien de bon, s'imaginant déjà passer l'arme à gauche alors qu'elle n'avait toujours pas rédigé son testament. Tiens d'ailleurs, elle le ferait à peine arrivée et l'enverrait à Phylogène, comme ça elle pourrait mourir en paix. Guillaume serait confié à Lexhor et Agathe, pauvre Agathe encore une fois abandonnée par la personne qui veillait sur elle, à Rosalinde. Voilà, c'était bien ça, que sa vassale s'occupe de sa belle-fille. Elle pourrait lui apprendre des trucs de filles, à bouder, à broder, à charmer les hommes, toutes ces choses que Lynette ne savait pas faire elle-même et qu'on ne lui avait jamais appris.
Arrivée dans la cour du château, on l'aida à descendre et le regard affolé de sa camériste en regardant sa bouille défaite lui en appris beaucoup sur son état général qui ne devait pas être beau à voir. A peine eut-elle mis pied à terre que la pointe dans son bas ventre se réveilla, encore plus forte que deux heures auparavant lorsqu'elle avait chuté. Un regard inquiet fut lancé en direction de Catherine qui veillait habituellement sur elle lorsqu'elle était en séjour sur ses terres. Cette dernière fit glisser précautionneusement son bras autour des épaules de sa maîtresse, lentraînant dans sa chambre située au premier étage, l'ascension la faisant grimacer. Assise sur le bord de son lit, sa main s'accrocha au bras de sa servante, chouinant un bon coup.
Rhaaaaa nom d'un poney, ça fait maaaal !!! J'ai mal au bide Catherine, j'ai l'impression qu'on m'arrache les viscères.
Oui c'était ça, clairement, un genre de bonne gastro des familles ! Son corps s'affala sur le côté où la hanche était encore intacte, histoire de pas en rajouter une couche et de ne pas s'appuyer sur celle qui était explosée, en prime, poussant un gémissement alors que Catherine lui enlevait ses braies pour pouvoir la mettre au lit. Sa dextre alla alors se positionner au niveau de son entre-jambe pour vérifier qu'elle n'était pas en train de pisser le sang, et là, elle sentit un truc pas normal du tout. Son regard se porta sur le visage de Catherine, des yeux ronds comme des billes, qui elle-même venait de se pencher pour regarder de plus près, relevant la tête, l'air estomaqué.
Mon dieuuuu, une têêêêteeee !
Bordel ! De quoi faire flipper le poney rose qu'elle était, ça, c'était sûr, car elle aussi l'avait bien sentie. A ce moment là, une contraction violente, car c'était finalement bien ça qui la travaillait depuis des heures, lui arracha un cri et c'est dans l'incohérence la plus totale qu'elle entendit Catherine lui crier de pousser, ce qu'elle fit, automatisme retrouvé plusieurs années après la naissance de Guillaume. Après quelques poussées, l'on entendit résonner dans la chambrée le cri d'un bébé, alors que la mère s'effondrait sur sa couche, transpirante et choquée, se recroquevillant en chien de fusil et fermant les yeux pour ne plus entendre ces cris.
Plus tard, Catherine lui ramena l'enfant, et c'est une Erwelyn toujours prostrée qui lui fit face, refusant de réaliser que ce bébé était sorti de son ventre. D'ailleurs, ce n'était pas possible, il n'était pas à elle, non. Elle avait déliré à cause de sa douleur et sa femme de chambre essayait tout simplement de lui faire une blague à lui faire croire qu'elle avait accouché alors qu'elle n'était même pas enceinte. Elle sortait de ses menstrues et puis, de qui aurait-elle pu être enceinte, hein ? Alors non, il était hors de question qu'on lui fasse croire qu'elle venait de mettre au monde un bébé.
Ce manège dura les deux jours suivants, avant que Lynette ne pose un regard sur l'enfançon que Catherine, qui avait heureusement su tenir sa langue et avait fait croire que l'enfant était né d'une servante qui avait caché sa grossesse, lui présentait jour après jour. Ses prunelles s'attardèrent sur sa petite tête, ses petites mains, ses cheveux bruns en bataille, mais c'est un visage fermé qui se releva vers la femme qui le tenait dans ses bras.
Donnez-moi un parchemin et une plume, Catherine.
Et sa femme de chambre s'exécuta, dépassée par les événements. Sur le parchemin qui partit quelques instants plus tard, étaient seulement inscrits quelques mots en direction d'Agnésina Tempérance Corleone, conviée à se rendre à Evron le plus rapidement possible. Et de regard pour le bébé qui venait de naître, il n'y eut plus.
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