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[RP] Chroniques d'une épopée : 70 jours en ballon

Azylys


Journal de voyage, jour 46 : Grand Duché de Bretagne, Rohan


Azylys s’adosse à un arbre, songeuse, comme souvent la main posée sur son ventre rond.
Thais avait raison, non seulement maintenant elle ne voit plus ses pieds mais il pourrait y’en avoir d’autres devant les siens, elle ne les verrait pas non plus.
Elle fait jouer les pendentifs sur les chainettes autour de son cou en regardant les étoiles.
Elle s’inquiétait hier soir, après ce rêve qui lui semblait bien trop parfait.
Elle craignait le retour à la réalité et sa fâcheuse tendance à être brutal.
Elle aurait pourtant tant aimé que tout ce passe comme dans ce rêve…
La brune prend la plume et son carnet, aujourd’hui comme toujours, elle écrit, elle ancre le présent pour l’empêcher de s’étioler, et pour un jour, peut-être, se souvenir…




24 Juin 1460, toujours à l’autre bout du royaume, en Bretagne, toujours Rohan, cité éternelle.
Hier soir je ne trouvais vraiment pas le sommeil. J’ai eu beau tout essayer, je n’y parvenais pas.
Le manque était plus fort, aussi fort que la peur que j’avais de ce retour à la réalité, qu’il se passe tout l’inverse de ce que j’avais pu rêver.
Je tournais en rond comme trop souvent, j’avais froid.
Et j’ai senti une main prendre la mienne et j’ai faillit sursauter tellement je ne m’y attendais pas.
En toute réponse à ma surprise, il a serré ma main dans les siennes, et il a rit. J’avoue que pendant quelques secondes je me suis sentie stupidement ridicule.
C’était un peu le chaos dans mon esprit, un espèce de chaos d’hypothèses : ‘et si…’ ‘et si…’ ‘et si…’.

Alors Illyan m’a regardée, il a ancré son regard d’azur dans le mien et il m’a fixé.
Il a tout balayé, il a fait le vide, effacé ces hypothèses et ces questions stériles.
Et il a posé sa main sur mon ventre, comme la dernière fois.
Il a pris cet air sérieux, qu’il prend toujours quand il veut me dire quelque chose d’important ou me persuader de quelque chose.
Et avec sa voix d’enfant, sa voix de sage, sa voix si sûre, il m’a dit ‘Tout ira bien, d’accord ?’.
Quatre mots, c’est ce qu’il lui a fallu pour balayer tous mes doutes.
Et comme toujours, j’ai eu envie de le croire, tellement envie de le croire, de me dire que lui qui savait tout, s’il me disait cela c’est qu’il le savait.
Alors je lui ai fait confiance, encore, toujours, j’ai ancré en moi la certitude que tout irait bien.
Il s’est évaporé comme la brume disparait avec le soleil, et je me suis couchée.
En me serrant dans mes couvertures j’ai repensé qu’il y a presque un an de cela, je faisais déjà ça chez les nonnes en pensant aux bras de l’homme que j’aime.


La brune sourit, elle a besoin d’ancrer cette certitude dans le présent, de lui donner vie, avec un peu d’encre et de papier.
Comme si elle l’écrivait en elle-même, comme si en l’écrivant elle en faisait une réalité, la vérité.
La vie est faite d’illusions. Certaines réussissent, c’est ce qu’on appelle la réalité.
En somme, en choisissant ses illusions, on choisit sa réalité.
Et ce soir, la brune a choisi de croire que pour une fois, envers et contre tout, même si ça peut paraître illusoire, utopique, ce soir elle a choisi de croire que tout ira bien.
Faites que cette illusion devienne une réalité.

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Azylys


Journal de voyage, jour 47 : Grand Duché de Bretagne, Rohan


La brune est assise sur une souche, le faucon perché sur l’épaulette qui scrute la missive comme s’il pouvait parvenir à la lire de ses yeux ambrés.
La belle parcourt les lignes de son regard de glace, sourit.
Bientôt le retour des Toulousains en migration, il était temps…
Elle tique pourtant à la fin, elle aime pas trop cette manie que son amie a de l’appeler ‘la grosse’, c’est un peu réducteur comme surnom tout de même…
Azylys range la missive et regarde le ciel ; les étoiles commencent doucement à scintiller, les mêmes que celles que Rosy doit apercevoir du pont de son bateau, les mêmes que certains Toulousains voient encore de là-bas, on a tous le même ciel après tout…
La brune prend son carnet et tourne les pages, il se remplit petit à petit, presque de plus en plus vite.
Elle prend alors la plume et trace les lettres de pourpre sur la page vierge.




Même endroit qu’hier, même lieu que demain : 25 Juin 1460, toujours le ballon à la plume.
Je me lasse un peu moins d’être ici en pensant que ce sera bientôt fini, Rosy et Mizar sont en route pour venir me chercher, ils flottent quelque part au large de Blaye il me semble.
Ils devraient être là dans cinq-six jours je pense.
Il est temps, quand moi je reviens à la maison tout le monde s’en va !
Suite à la guerre j’avoue que ça ne m’étonne pas tellement.
Pourtant je me sens déjà triste de sentir cette grande famille de cœur s’éparpiller aux quatre coins du royaume.
Je voulais vivre un peu sédentaire, pour une fois, et revenir habiter dans la maison que j’habitais, fût-il un temps, avec l’homme que j’aime.
Je pensais ça bien comme cadre pour que le petit grandisse.
Mais enfin, apparemment, ça ne sera pas dans cette maison, pourtant si riche en souvenirs, et que j’ai déjà mal de quitter.
J’ai déjà pas beaucoup de points d’appui actuellement, mais lâcher les derniers qu’il me reste pour tout recommencer ailleurs, sans rien et presque seule, ça m’inquiète.

Enfin, de toute façon je ne change rien à mon programme, il faudra bien que je repasse par Toulouse puisque j’y ai encore des affaires et des écus.
Ensuite, il vaut mieux que j’y reste jusqu’à la naissance du bébé.
J’espère que Rosy et Ev resteront avec moi, avec un peu de chance le papa n’aura pas déménagé encore et il aura la patience d’attendre.
Tout se complique d’un coup maintenant, j’aurais bien aimé un peu de stabilité pour donner naissance à mon louveteau mais il faut croire que la stabilité n’est pas encore au programme !

Sinon, en me disant qu’elle galère à trouver un prénom avec Mizar pour le futur bébé alcoolo, heureusement qu’ils ont encore huit mois pour trouver les deux-là hein, ils m’ont fait penser qu’on avait toujours pas décidé de qui le petit aurait pour parrain et marraine.
Il serait peut-être temps qu’on y réfléchisse sérieusement, encore un mois et quelques semaines et le petiot sera là !


La brune ferme le carnet et ferme les yeux.
Elle essaie encore de se l’imaginer ce bébé, elle essaie encore de l’imaginer dans ses bras, dans les bras de son papa, de voir leurs sourires à tous les deux.
La belle est heureuse, elle s’adapte à tous ces changements, elle finit par les accepter.
Mine de rien, elle est contente de son voyage, elle a atteint le but qu’elle s’était fixé, elle a vu ce qu’elle voulait voir, elle a fait ce qu’elle voulait faire.
Le faucon bat soudain des ailes, toujours sur son épaulette et manque de lui faire perdre l’équilibre.
Décidément, ce qu’elle voulait, et plus encore on dirait…

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Azylys


Journal de voyage, jour 48 : Grand Duché de Bretagne, Rohan


"En vérité les rêves comme les mythes sont d'importants messages que nous nous renvoyons à nous-mêmes."
La brune médite cette phrase depuis ce matin, la tournant dans tous les sens, en vain.
Elle ne comprend pas, pas vraiment ce qu’elle pourrait y apprendre sur son rêve de la dernière fois.
Elle réfléchit de trop, une fois encore, et le petit ne manque pas de le lui rappeler, moins on cherche et plus on trouvera !
La belle sourit et passe doucement sa main sur son ventre qui ne s’arrête plus de grossir encore et toujours.
Le bébé tape doucement au creux de sa paume, comme un signal, un moyen de dire ‘je suis là’, un langage établi entre eux depuis longtemps désormais.
Un cri perçant retentit soudain dans son dos, la faisant sursauter.
Le faucon vient de se rattraper in extremis à un perchoir, dandine sur le morceau de bois, faisant rire Azylys.
Elle prend alors son carnet de voyage, si épais, si abimé désormais et grave un nom de plus sur la couverture de cuir avant de l’ouvrir.




26 Juin 1460, même duché, même ville, même forêt, même clairière.
Le temps est clément aujourd’hui, pour une fois on voit vraiment que l’été commence.
Je passerai les détails concernant cette chaleur et le fait d’être enceinte qui rend ça non seulement insupportable mais l’accroit encore davantage.
Ce matin en allant faire un tour au marché, oui pour une fois je suis sortie tiens, j’ai entendu la prêche du curé de Rohan, et elle me trotte toujours dans la tête.
C’est bien joli mais je ne vois absolument pas quel est le message que j’ai bien pu me renvoyer à moi-même en faisant ce rêve utopique.
Le message de ce que j’aimerais bien pour l’avenir ? Le message de projets peut-être ?
Non, décidément je ne vois vraiment pas, il faudra que je demande à Illyan, je suis sûre qu’il sait lui.

En tout cas, en sortant du marché, je suis repassée par la clairière pour prendre le faucon avec moi.
Il faisait vraiment de plus en plus chaud et je n’ai pas pu résister à une ballade en forêt, là où les cimes protègent encore du soleil et garde un peu de fraicheur.
C’est fou ce qu’il y a d’arbres en Bretagne, bien plus que par chez nous.
Et bien plus hauts aussi, quand j’ai regardé vers les cimes, je me suis demandée si j’aurais réussi à monter à sommet si j’avais pu.
Qu’une seule façon de vérifier, un jour je reviendrai, et j’essayerai !
Obligé, je vais le noter dans la liste des défis plus saugrenus les uns que les autres.

Le faucon pèlerin a aussi voulu me montrer qu’il avait repris du muscle.
Il s’est envolé de mon épaulette en faisant voler mes cheveux pour aller se percher sur une branche un peu plus en hauteur.
Sur le coup j’ai pensé qu’il prenait son envol pour de bon et que je ne le reverrais plus.
Mais quand je l’ai regardé là haut, piailler à en fendre l’âme parce qu’il arrivait pas à descendre j’ai éclaté de rire.
Non non, mon bébé a encore besoin de sa maman.
Le problème étant que maman pouvait pas trop grimper pour venir le chercher, eh oui dommage, raté mon chéri.
Au bout d’une heure à l’inciter à se laisser planer pour descendre et à l’appâter avec de petites proies, il a finalement consenti à descendre pour venir se percher sur mon canon de cuir.
J’ai passé la main sur son aile pour vérifier qu’il ne s’était pas blessé, et je jure l’avoir entendu roucouler comme un pigeon heureux !
Autant dire que c’était reparti pour un nouveau fou-rire, et que j’ai compris qu’il n’allait jamais me quitter celui-là.
Du coup j’étais un peu dans l’obligation de lui trouver un nom, et pour fêter son entrée dans la famille je l’ai baptisé Haydïndril !
Maintenant nous sommes revenus à la clairière et je lui ai installé des perchoirs à un mètre du sol, plus ou moins distants les uns des autres et il s’amuse à sauter de l’un à l’autre pour s’entrainer. D’ici à ce qu’il tombe celui-là…


La brune le regarde faire : un grand battement d’ailes, puis il avance les serres, se réceptionne en agitant les ailes, passe au suivant.
Et chaque fois il la regarde de ses yeux ambrés.
Mais bien sûr qu’elle te regarde et qu’elle est fière de toi maman…
Allez saute mon poussin…

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Azylys


Journal de voyage, jour 49 : Grand Duché de Bretagne, Rohan


La brune est adossée à un tronc, le regard perdu dans les astres.
La nuit tombe déjà, seul le feu éclaire encore la clairière.
Le ciel glisse peu à peu dans le sombre, bientôt tout ne sera que nuit, une éternité de silence, un monde d’ombres et de ténèbres.
La lune ne forme encore qu’un mince croissant à l’horizon, si fin qu’on la croirait être en train de disparaitre.
Le silence règne déjà en maître, on n’entend plus que le bois qui craque dans les flammes, le vent qui souffle dans les cimes, le lourd battement d’ailes du faucon.
A peine perceptible, le battement de deux cœurs qui résonnent à l’unisson, une même voix pour deux êtres.
La brise se fait plus légère, amène la fraicheur suite à une journée bien trop chaude pour une femme enceinte.
Azylys ferme les yeux, sourit quand Brume vient souffler au creux de son cou.
Elle rouvre doucement ses yeux de glace, câline sa jument enfin retrouvée et prend son carnet.
La lueur des flammes danse sur le parchemin, ajoute de l’ambre au pourpre de l’encre, fait scintiller la plume.




27 Juin 1460, la journée d’aujourd’hui fut encore plus chaude que celle d’hier.
L’été s’installe à Rohan, il me tarde de rejoindre Vannes et de longer la mer, il y fera plus frais.
Depuis que nous sommes arrivés dans cette forêt, j’ai laissé Brume gambader où bon lui semblait, puisque je ne suis plus en mesure de galoper avec elle.
Or, il y avait déjà un bon bout de temps que je ne l’avais pas revue, et je ne m’en souciais pas vraiment.
Comme je sentais l’heure de repartir se faire de plus en plus pressante, je me suis mise à sa recherche cet après-midi.
Autant dire que j’ai eu beau la siffler aux quatre coins de la forêt, pas moyen de remettre la main dessus.
Pour une fois Haydïndril a accepté de me donner un coup main, il est parti voir s’il l’apercevait d’en haut.
Je me suis donc guidée aux cris rauques du rapace pour retrouver ma jument, et il l’a trouvée avant moi !

D’ailleurs Brume avait trouvé avant moi ce dont je rêvais depuis hier, quand je l’ai rattrapée elle était au bord d’un petit lac en train de boire tranquillement.
Je crois que je n’ai jamais été aussi bien servie qu’aujourd’hui !
Je ne sais comment exprimer le bonheur que j’avais de pouvoir me dévêtir et me glisser dans l’eau fraiche, une renaissance.
Je confirme également que tout saut, tentative de nage un peu sportive ou acrobatie est strictement impossible avec un gros ventre rond comme le mien.
C’était donc juste histoire de faire trempette et de se laisser flotter, et je pense que ce bain improvisé a fait au moins autant de bien au petit qu’à moi.
Il était beaucoup plus calme après, je crois que ce rafraichissement lui a permis de se rendormir.
En sortant, un bain de soleil s’est vite imposé, autant pour nous réchauffer un peu que pour profiter de ce temps magnifique.
Ma peau a désormais pris cette couleur un peu halée propre à l’été.
Et maintenant, après avoir ramené tout le petit monde au campement, je profite du vent du soir qui rafraichit un peu l’atmosphère.


La belle passe doucement la main sur son gros ventre rond, le petit ne dort pas, plus, ou pas encore.
La nuit vient de tomber, les étoiles scintillent une à une, pour lui il est l’heure du jeu.
Il tape doucement au creux de la paume de sa mère, comme souvent, comme toujours.
Il frappe en rythme comme s’il voulait chanter.
Azylys sourit et lui fredonne doucement une ballade bretonne qu’elle connait depuis longtemps.
Le bébé se calme, tape plus doucement, moins vite, comme s’il s’adaptait au rythme de la berceuse.
La brune sourit, il y a déjà entre eux ce lien indestructible qui les lie à jamais, à travers le temps et les mondes.

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Azylys


Journal de voyage, jour 50 : Grand Duché de Bretagne, Rohan


La brune rit aux éclats, et elle n’est pas la seule ce soir.
Une tête blonde a passé ses bras autour de son cou et, derrière elle, regarde par-dessus son épaule ce qu’elle s’apprête à écrire sur le carnet.
Il la taquine en voyant son nom sur la couverture, il l’amuse.
Il lui demande de tourner les pages, une par une, alors qu’il y en a tant désormais.
La belle sourit en pensant qu’elle vient d’échapper à la lecture à voix haute de ces presque cinquante pages.
Enfin, ils atteignent la première page vierge et la brune prend la plume.
Le gamin prend un air sérieux, comme s’il voulait lui dicter son récit du jour, puis se met à rire et la laisse écrire.




28 Juin 1460, cinquante jours ont passé déjà depuis mon départ.
Et pour fêter cela, j’ai l’honneur ce soir, et ce depuis que le soleil a disparu à l’horizon, de compter à mes côtés mon très cher Illyan.
Il faut donc que je raconte ici comment nous avons occupé notre soirée avant cet instant.
D’abord Illyan a voulu se balader sur le dos de Brume, comme autrefois, et galoper un peu.
L’ennui étant que je ne pouvais plus galoper avec lui, il a donc monté la jument tout seul.
Le pire c’est que j’ai mis à peine cinq minutes à lui expliquer comment la guider, et qu’il lui a fallu une seconde et demie pour l’appliquer comme s’il avait fait ça toute sa vie.
Après ce galop improvisé, Illyan a voulu jouer avec Haydïndril.
Un bonhomme haut comme trois pommes avec un faucon perché sur son bras je peux jurer que ça force le respect.
Le pire c’est que ça lui va si bien de porter et le canon de cuir et le rapace…
Maintenant nous nous occupons du carnet et du récit de cette journée.
Il m’a dit que c’était difficile pour lui de venir me rendre visite souvent et longtemps.
Comme je vais bien, bien mieux désormais, et que mes amis arrivent d’ici quelques jours, je n’ai plus besoin de lui.
Il passe donc la nuit avec moi avant de disparaitre pour longtemps, sûrement des mois.
Un peu comme un second au revoir, jamais un adieu.
Sur ce il a tenu à me laisser un mot écrit de sa main alors je lui laisse la plume, ne la casse pas mon ange…

Promis je ne la casserai pas ! Et tu sais que je tiens toujours mes promesses Lady Azylys…
Non, ne ris pas comme ça, je n’écrirai plus droit après, tu sais bien que je t’appellerai toujours ainsi, c’est plus fort que moi.
Tu ne me verras pas avant longtemps, peut-être des mois, c’est bien vrai.
Pourtant où que tu sois et quoi que tu fasses, moi je te verrai toujours.
Je suis et je serai toujours là, dans chacun de tes pas, derrière chaque étoile que tu regardes, dans chacun de tes sourires.
Tu sais bien que nous sommes liés à jamais, et je te promets qu’on se reverra, dans ce monde et dans l’autre.
Tout est une question de temps, tu le sais, comme tu sais que je serai toujours là quand tu auras besoin de moi.
Tu te souviens de la nuit où tu m’as tendu la main ? Et de toutes les nuits où tu as fait de même, jusqu’à la fin ?
Je serai toujours là pour te tendre la main, j’en fais le serment.
Garde-moi dans ton cœur comme je te garde dans le mien, parce que rien ne pourra jamais effacer ton nom de ma conscience.
Sois cette lumière qui m’a guidé autrefois et je serais la tienne.
Sois cette étincelle de vie que tu as toujours été, sois ce sourire éternel que tu sais si bien faire, en restant sincère bien sûr.
Tu seras cette mère exemplaire que tu voudrais tant être, tu ne peux que l’être.
Fais toi confiance, comme je te fais confiance, devient chaque jour celle que tu es.
Ne baisse jamais les bras, reste la flamme forte que tu es.
Et souviens-toi toujours que pour voir, il faut croire.
Je suis là, toujours tout près de toi, quoi qu’il arrive,
Illyan.


Azylys sourit, attrape carnet et plume et les pose à côté d’elle.
Elle prend le petit dans ses bras, le serre contre elle.
La nuit ne fait que commencer, ils ont encore tant d’heures devant eux pour se dire au revoir comme il se doit, tant à se dire.
Hier encore, elle ne pensait pas qu’il savait écrire.
Elle a encore tant à apprendre, tant à chercher, tant à trouver.
Mais quoi qu’il arrive, il y aura toujours une main dans la sienne pour la guider, toujours une main dans celle de son enfant pour le protéger.
Alors elle le croit, tout ira bien, il ne peut en être autrement, tant qu’elle aura avec elle ce regard azur qui scintille, il ne pourra rien lui arriver.
Un regard échangé, un sourire partagé, liés à jamais.

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Azylys


Journal de voyage, jour 51 : Grand Duché de Bretagne, Rohan


Le regard perdu dans le vague, la brune essaye de ne pas réfléchir, de ne pas croire, pour ne pas voir.
Comme chaque fois qu’elle se sent tomber, elle se réfugie dans le passé.
La belle ferme les yeux, repense à la nuit dernière, se fait un mur de souvenirs.
Elle prend la plume ce soir, pour raconter la fin de la nuit plus que sa journée d’aujourd’hui, elle sent qu’elle en a besoin.




29 Juin 1460, et de nouveau tout change, comme toujours, comme pour me rappeler que tout est éphémère.
Hier, quand Illyan a posé la plume et que j’ai fermé le carnet, la nuit venait à peine de tomber et il restait encore bien des heures avant le lever du soleil.
Nous avons parlé, de tout bien plus que de rien, pourtant, même s’il me laissait voir au fond de ses yeux qu’il savait bien des choses sur moi que je ne sais pas, pourtant la question n’a pas osé franchir la barrière de mes lèvres.
Peut-être n’étais-je pas encore prête à l’entendre, peut-être avais-je conscience que ce n’était pas vraiment le moment.
Pas vraiment le moment de tout chambouler, de tout changer autour de moi, et cette journée m’a donné raison.
Je crois qu’avec Illyan nous n’avions jamais autant rit qu’hier soir, je crois que nous n’avions encore jamais partagé autant tous les deux.
J’essayais de graver ses traits dans ma mémoire, pour ne jamais l’oublier, pour toujours pouvoir le trouver au fond de moi quand il ne peut pas venir.
Et il a essayé, je crois, de me transmettre autant de lumière qu’il le pouvait, de raviver ma petite flamme pour les coups durs à venir, de me grandir encore un peu peut-être.
Il a essayé de me transmettre un peu de cette force qui l’habite, de ce don presque.
Et je crois que, sans vraiment nous en rendre compte, nous nous sommes observés longtemps sans rien dire.
Il m’a regardée, il a sourit, et de sa voix d’enfant il m’a dit ‘rayonne !’, comme s’il voulait que je sois cette flamme, cette lumière.
Ensuite nous avons passé du temps tous les trois, parce que rien que moi je suis déjà deux.
Et quand je commençais à tomber de sommeil, alors que j’aurais voulu tenir éveillée jusqu’à l’aube, j’aurais tant voulu mais je n’en avais pas la force.
Quand il m’a vu bailler pour la énième fois et que mes yeux se fermaient tout seuls, il a sourit encore en disant ‘tu m’autorises à venir dormir dans tes bras encore une fois ?’.
Et je me suis endormie avec le petit prince dans les bras, comme il y a bien longtemps, et comme autrefois quand j’ai ouvert les yeux au matin, il ne restait que moi dans la clairière.

Aujourd’hui j’ai reçu une lettre de Toulouse et j’ai eu peur de ce que j’ai cru en comprendre.
Je l’ai rangée, j’ai écris encore, comme si j’espérais me tromper encore.
Et ce soir Illyan, et pour les heures à venir, pour les jours à venir, j’aurais bien besoin de ta force mon ange, j’aurais bien besoin de lire dans ton regard que tout ira bien.
Pourtant je veux te croire petit homme, et je m’efforcerai toujours, pour que tu puisses me voir encore de là où tu es, pour que tu sois fier, de rayonner comme tu me l’as demandé.
Ta lumière et la mienne petit ange, je veux qu’elles rayonnent à jamais.


La brune range le carnet et ferme les yeux, se plonge en elle-même.
Elle cherche sa force, elle cherche sa flamme au plus profond de son être.
Quand elle voit la lueur, elle ravive l’étincelle, elle souffle sur la flamme pour la faire grandir encore.
Elle lui donne sa force, ses rêves et ses espoirs, ses rires et ses sourires, pour la grandir encore et encore.
Alors elle la laisse devenir lumière pure, elle la laisse l’emporter et gommer les blessures, elle s’abandonne à sa flamme intérieure.
Elle baisse ses barrières et sa carapace, et cette lumière elle l’offre au monde, elle la laisse rayonner à travers elle.
Regarde Illyan, regarde je rayonne, regarde, cette lumière, c’est moi…

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Azylys


Journal de voyage, jour 52 : Grand Duché de Bretagne, Rohan


La brune joue avec les chaines autour de son cou, laisse tourner les pendentifs au creux de sa paume, les uns après les autres.
Ils sont chacun un symbole, de son passé et de son avenir, de leur avenir.
La belle passe la main sur son gros ventre rond, le bébé lui répond, comme toujours et elle l’imagine déjà sourire.
Elle se rend compte, peu à peu, de l’influence qu’Illyan a sur elle, de ce qu’il lui fait comprendre, jour après jour.
Première fois depuis longtemps, elle se sent forte, plus forte que jamais.
Sans le savoir, elle vient peut-être de découvrir ce qui lui permettra de tenir.




30 Juin 1460, demain ce sera déjà Juillet, bientôt je redescendrai, pour remonter peut-être.
Toujours pas de nouvelles de Toulouse, pourtant je me suis jamais sentie aussi…vraie.
C’est étrange, c’est un peu une renaissance, je change.
Je crois qu’Illyan avait raison, c’est stupide de dire ça puisqu’il a évidemment raison et que j’avais évidemment tort.
Mais disons alors que j’ai compris ce qu’il essayait de me dire, et je l’ai accepté.
Il est vrai que quand on me blesse, j’ai tendance à encaisser, à m’enfermer en moi-même, à me replier autour de ma blessure, à me réfugier dans le passé en attendant que la douleur cesse.
Et en me disant ‘rayonne’, je crois qu’Illyan n’avait pas seulement en tête de me dire de m’affirmer comme je suis, et non comme j’étais.
Je crois qu’il me l’a dit aussi pour ça, pour me dire que je devais cesser d’encaisser et de me laisser blesser.
Il voulait peut-être me dire que je suis forte, de mes erreurs, de mes échecs et de mes réussites, de tout ce que je porte.
Et que maintenant il fallait que je sois celle que je suis, que je sois cette flamme et que j’empêche ces coups de m’atteindre, non par une carapace mais par ce que je suis.
Je crois que je commence à comprendre, il m’a peut-être donné bien plus de clés que je ne le croyais.

‘Pour voir, il faut croire’, il n’avait pas tort non plus.
Parce qu’au final, à se persuader de tout et n’importe quoi, on finit par voir uniquement ce que l’on veut croire, on se borne à ce que l’on veut et on ignore le reste, on feint de ne pas le voir.
Il a raison mon petit ange, pour voir que tout ira bien, il faut déjà que je le crois, que je porte cette certitude, que je l’ancre en moi et que je la fasse rayonner.
C’est fou Illyan, c’est fou ce que tu me pousses en avant.
Quand tu reviendras, j’aurai grandi encore, pourtant tu me regarderas de nouveau, pourtant quand je croiserai ton regard, j’aurai encore l’impression de ne rien savoir, d’avoir encore tant à apprendre, tant à comprendre, j’aurai l’impression d’avoir fais des kilomètres mais de n’être encore qu’au tout début du chemin.
Et pourtant, regarde petit homme, regarde comme grâce à toi j’avance.


La brune pose la plume et le carnet, sourit en sentant le petit taper doucement dans son ventre.
Deux lumières de vie dans un seul corps, ça fait beaucoup de force en réserve, ça fait beaucoup de lueur à faire rayonner.
La belle repasse la main sur ses pendentifs. Eux aussi font partie d’elle et de sa lumière, comme souvent ils ont fait partie de son ombre.
Les étoiles scintillent à peine et déjà elle les montre du doigt.
Elle regarde celle qui brille le plus fort, comme elle l’a toujours fait, et parfois pas toute seule.
Il y a des forces autre part, d’autres flammes dans lesquelles elle peut puiser, encore et toujours, quand la sienne s’essouffle.
Et Azylys sourit de plus belle, trois flammes sont en route pour venir la rejoindre, deux grandes flammes qui n’en forment presque plus qu’une, et une troisième, encore naissante, qui ne cessera jamais de grandir, encore et toujours.

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Azylys


Journal de voyage, jour 53 : Grand Duché de Bretagne, Rohan


La brune vérifie que Brume est bien attachée à son arbre, pour rien au monde elle ne passerait la journée de demain à la chercher au lieu de retrouver ses amis.
Haydïndril saute de son perchoir et vient se poser sur son épaulette de cuir, atterrissage un peu chaotique encore mais le jeune rapace s’améliore de jour en jour.
La belle regarde autour d’elle cette clairière où elle aura passé tant de jours et de nuits déjà, cette clairière où Illyan est revenu lui tendre la main.
Un jour peut-être elle reviendra par ici, si le destin place de nouveau cette forêt sur sa route.
Azylys s’asseoit enfin et sort son carnet de voyage, bientôt il sera clôt à jamais.




Aujourd’hui est la veille d’une grande épopée, aujourd’hui et le premier jour du mois de Juillet, et demain je retrouve Rosy et Mizar.
Demain, si tout va bien, ils seront enfin là, après tant de chemin parcouru déjà.
Et moi après tant de jours passés ici, je vais enfin entamer la grande descente.
Je ne sais pas encore si nous passerons par la mer comme à l’aller ou si nous passerons par les terres, de toute façon pour moi tous les chemins sont risqués.
Rien que le cheval risque de provoquer fausse couche ou accouchement, c’est dire si prendre la route à presque huit mois de grossesse peut paraître suicidaire.
Pourtant je n’ai pas vraiment le choix, il faut bien que je rentre, en espérant qu’Illyan veille sur moi et que tout se passe bien.
Enfin s’il suffit d’y croire pour le voir, ça devrait aller…
J’ai encore des tas de missives à envoyer, des tas de personnes à prévenir, ce retour c’est du boulot n’empêche.
Enfin, bientôt viendra le calme, j’ai hâte.

J’ai reçu une lettre de Rosy aujourd’hui à défaut d’avoir confirmation ou non de Toulouse.
Elle croise tous mes amis de Vannes, et je crois avoir les oreilles qui sifflent pas mal en ce moment…
Ils me manquent tous et demain j’en retrouverai quelques-uns puis encore d’autres après-demain et encore et encore.
J’ai hâte de tous les revoir, ça me fera du bien de retrouver du monde, de retrouver les tavernes, les rires et les sourires.
Peut-être que quand le bébé sera né je reviendrais en Bretagne, c’est une région qui me plait, et Vannes surtout.
Et puis apparemment ça à l’air de plaire à Rosy aussi !
Et quand je pense qu’elle est enceinte aussi maintenant…
On aura nos enfants presque tous nés en un an de temps.
Ça fera une belle bande d’amis inséparables en grandissant ça…
Et en attendant ça fera une bande de nouveau-nés puis une bande de bambins espiègles, une bande de gamins farceurs…
Oh je sens qu’on va en voir de toutes les couleurs…
Mais enfin, on sera une bande de mères inséparables aussi, au pire on se serrera les coudes hein…
D’ici à ce que Rosy nous fasse des jumeaux ou des triplés, ou une deuxième fournée, on a pas fini…


La brune sourit et ferme son carnet, chaque soir le même rituel.
Elle passe la main sur son gros ventre rond, le petit tape au creux de sa paume, elle ne s’en lasse pas.
Elle se demande bien à quoi il ressemblera, elle imagine son caractère, elle l’imagine dans ses bras.
Elle l’imagine grandir, elle se le représente déjà petit homme comme Illyan, espiègle au possible.
Ça, elle non plus n’a pas fini d’en voir de toutes les couleurs.
Pour peu qu’il ait le caractère de son père et celui de sa mère, ça sera le leader de la bande, celui qui entraine les autres à faire les bêtises.
L’aventurier du groupe, le guerrier, peur de rien et curieux de tout.
Bientôt il sera là, bientôt, après ce retour, après ces retrouvailles, après tant de mois et de jours à l’attendre, elle pourra enfin le prendre dans ses bras.

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Azylys


Journal de voyage, jour 54 : Grand Duché de Bretagne, Rohan


La brune prend la plume et le carnet, pour une fois elle le pose sur une table.
Elle s’accoude à la table, sourit, la lumière est bien plus forte que celle qui l’éclaire d’habitude.
Autour d’elle il n’y a personne, même pas sa jument ou Haydïndril, c’est rare.
La belle passe la main sur son ventre rond, la réponse ne se fait pas attendre, le bébé ne dort pas encore.
Elle joue un peu avec lui, elle ne peut pas s’en empêcher, elle sait qu’elle renforce encore le lien déjà indestructible qui les unit.
Enfin la toulousaine pose la plume sur la page vierge et se décide à tracer les lettres à l’encre pourpre.




Aujourd’hui, 2 Juillet 1460, je suis dans une taverne de Rohan, si si, me trainer dans une taverne est encore possible on dirait.
A vrai dire, j’écris tard et pour la bonne cause, je viens seulement d’être de nouveau seule.
Enfin mes Toulousains sont arrivés à Rohan aujourd’hui !
J’avais tellement hâte de les revoir après tout ce temps passé sans les voir !
J’ai sauté dans les bras de Rosy qui m’attendait en taverne, Mizar n’a pas osé venir, il avait trop peur que je le découpe en apéricubes, je pensais pas que ma vieille menace lui ferait encore peur à ce point…
Enfin, je crois que la belle n’en revenait pas de la taille qu’avait pris mon ventre, elle arrêtait pas de le regarder !
Pis elle a collé son oreille contre pour voir si elle l’entendait, elle était émerveillée de l’entendre bouger.
Mais il fait plus que bouger mon petiot, il tape, et en cadence !
Je crois qu’on a jamais autant ri que ce soir, des rires et des sourires, je n’ai vu que ça !
C’était tellement magique de la retrouver enfin, on y croyait pas toutes les deux.

Du coup, puisqu’on a pas de nouvelles du breton, nous reprendrons la route que demain.
Et demain nous mettons le cap sur Vannes, le retour !
Tellement de monde qui m’attend là-bas !
J’ai écrit à Thim et Kara pour leur annoncer que mercredi je serais là, il est déjà prévu que Kara me prête sa chambre d’amis pour le temps de mon séjour avant de reprendre le bateau.
Ça fait du bien de retrouver des têtes qu’on connait et des amis surtout !
Je crois que ce retour va être des meilleurs, il y a de quoi, si je repasse par la même route, je recroiserais sûrement tous les amis que je me suis faits à l’aller…
C’est ça le voyage, de l’aventure, et des fous rires, avec des amis bien sûr !
J’ai aussi passé quelques écus à Rosy pour qu’elle puisse nourrir son cher et tendre et qu’on puisse avancer au plus vite, pis pour dépanner aussi, bien sûr.
Alors bon, maintenant qu’elle est partie dormir, je vais en faire de même, Brume et Haydïndril m’attendent à la clairière, ils sont déjà prêts pour le grand voyage !


La brune ferme le carnet et se lève, emportant ses affaires avec elle.
Dernière nuit en forêt à Rohan, demain c’est nuit à cheval et ensuite elle retrouve le confort d’un vrai lit.
Elle est vraiment heureuse ce soir, heureuse de cette soirée de retrouvailles, heureuse de savoir qu’elle en retrouvera un peu plus chaque jour.
Elle est heureuse de tous ces sourires sincères qu’elle a vu ce soir, heureuse d’être elle et de se montrer de nouveau comme elle est.
Et elle croit bien que ce soir en taverne, elles étaient deux à rayonner de joie, plus deux petites lueurs qui ne se connaissent pas encore…
La belle rentre à pied à travers les ruelles, l’épée toujours à la ceinture.
Même blottie dans sa cape on ne voit d’elle que son gros ventre rond, bientôt la cape ne sera plus assez grande…
Azylys en sourit et joue avec les pendentifs autour de son cou, les étoiles sont si belles aujourd’hui…

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Azylys


Journal de voyage, jour 55 : Grand Duché de Bretagne, Rohan


La brune est encore en taverne et pour une fois il n’est pas tard ce soir, pour une fois aussi elle n’est pas seule.
Elle sourit à Rosy qui la regarde sortir le carnet et la plume et lui pose des questions.
Eh oui, un journal de voyage, et non, ça ne s’envoie pas.
Dommage ? La belle n’en est pas si sûre, qui tomberait sur cet ouvrage pourrait la prendre pour une folle, et il aurait de quoi.
Elle tourne les pages jusqu’à la page vierge, elle a tellement écrit déjà.
Enfin, elle prend la plume, elle ne sera pas longue ce soir.




Malheureusement en ce 3 Juillet nous sommes toujours à Rohan, et toujours sans nouvelles de Mizar, le temps se fait long.
S’il ne passe pas nous ne pouvons pas partir puisque c’est lui qui est censé mener le groupe.
J’espère donc encore le croiser ce soir pour ne pas avoir à différer encore notre départ.
Mais je crois quand même que demain nous serons toujours là, mais enfin, j’espère quand même…
Au pire je dirai aux bretons demain que je suis encore en retard…il faudra veiller à ce que ça ne devienne pas une habitude.

A part cela je grossis encore, encore et toujours, et mes tuniques rétrécissent encore, encore et toujours.
Pourtant si ce n’était que le ventre je crois que je finirais par m’y faire, mais c’est bientôt à cause de ma poitrine qu’il faudra de nouveau refaire ma garde-robe.
C’est fou ce que le corps peut changer en huit mois, je n’en crois toujours pas mes yeux.
Si on m’avait dit un jour que je grossirais autant j’aurais répondu que c’est impossible sans éclater, on dirait bien que si pourtant…

Le petit lui va bien, comme toujours et comme pour toujours aussi je l’espère.
Il bouge moins et de moins en moins, faute de place on dirait bien, pourtant je grossis toujours plus et il en prend toujours davantage aussi.
Il se contente de taper, encore et toujours, parfois en cadence quand je chante.
Il voit la lumière je pense, puisqu’il bouge davantage quand la lumière change.
Je crois qu’il s’intéresse de plus en plus à ma vie celui là…
Il faut croire qu’il lui tarde de venir la partager avec moi sous son vrai jour…


Il se fait tard, la brune range le carnet, fait un gros bisou à sa Rosy et s’éclipse.
Si jamais l’homme vient, elle sait où la trouver de toute façon…
Retour à la clairière où tout son petit monde l’attend, ce n’est pas encore ce soir le jour du départ dirait-on.
Pourtant il lui tarde de se mettre en route comme il lui tarde de rentrer, elle a envie d’être au calme, et à l’abri.
Azylys resserre sa cape autour d’elle, elle n’aime pas trainer seule dans ces ruelles, même l’épée à la ceinture.
Le bébé tape au creux de sa paume, elle ne s’y attendait pas et sourit, il sait déjà la réconforter.

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Azylys


Journal de voyage, jour 56 : Grand Duché de Bretagne, Rohan


Toujours et encore à Rohan mais ce soir la brune fait ses bagages.
Enfin, bagages est un bien grand mot, elle rassemble ses quelques affaires et les hisse sur le dos de sa jument.
Le faucon déjà perché sur son épaulette pousse des cris stridents, comme s’il avait déjà peur de ce voyage nocturne.
La belle vérifie tout : selle, harnachement, filet, sangles, bagages, étriers, regarde autour d’elle pour vérifier qu’elle n’oublie rien.
Gael est prévenu de son départ, Kara et Thim de son arrivée demain à Vannes.
Enfin Azylys s’accorde quelques minutes de repos pour écrire et sort son carnet.




Quatrième jour de Juillet, enfin le grand départ : ce soir je quitte Rohan !
Gael est prévenu que je m’en vais avec un autre groupe, je ne voulais pas qu’il s’inquiète bien que je le croise peu, voire pas du tout.
Les bretons de Vannes sont d’ores et déjà prévenus que je serais en retard d’une journée, j’ai dû bien les faire rire à tenter de leur expliquer ça.
Enfin bon, enfin je vais pouvoir repartir, j’en ai hâte autant que j’en ai peur.
Mizar et Rosy doivent m’attendre, il faut que je me dépêche.

Je crois qu’en effet ce voyage se fait pressant et presque vital, je ne sais pas c’est un peu davantage l’instinct que le destin qui m’entraine désormais.
Je sais que c’est dangereux, je sais que tout est dangereux, je sais qu’il faut bouger encore et toujours pourtant je sens qu’il n’est plus temps.
J’ai besoin d’être au calme, et de plus en plus, sans avoir à penser ni au feu qu’il faut garder allumé, ni à ce retour qui presse, ni à m’occuper de quoi que ce soit.
Je crois que je ressens de plus en plus le besoin de passer le relai en quelque sorte.
Il est temps que je remette tout entre les mains de Nayelle pour de bon, que je n’aie plus à penser à quoi que ce soit, je me fatigue de plus en plus.
C’est étrange ce besoin que je ressens maintenant d’avoir toujours quelqu’un qui reste pas loin de moi.
J’ai vraiment pas l’habitude de préférer dépendre des autres et je me perds un peu là-dedans.

Je crois que j’ai vraiment besoin de calme, de stable, de laisser faire le temps.
Rien que de voir la selle posée sur le dos de Brume j’en ai peur, pourtant je vais y voyager toute la nuit.
J’ai de plus en plus de mal à rester assise longtemps, et pourtant le voyage est encore long.
Je crains un peu avec cette histoire de fausse couche, je n’ai pas fait tout ça pour le perdre maintenant.
Ce que je donnerais pour dormir une éternité et cesser de douter…
Un rien me fait peur, c’est affolant, je n’ai jamais été comme ça…
J’entends encore Illyan murmurer ‘je suis là’ à mon oreille, je l’entends encore me dire encore et encore que tout ira bien.
Si tu savais ce que c’est dur de rayonner mon ange, quand on est bourrée de peurs et de doutes…
Mais tu as raison petit homme, si je veux espérer le voir, il faut au moins que j’arrive à le croire, sois ma lumière mon ange…


Azylys ferme son carnet et le range dans les plis de sa cape qu’elle resserre autour d’elle.
Elle allume une lanterne qu’on lui a offerte autrefois, pour la guider sur un sentier qui depuis s’est divisé en deux chemins à peine tracés.
Elle regarde la flamme briller et danser dans les ténèbres, tentant d’y trouver cette force qui lui manque ce soir.
La belle éteint le feu, ne gardant que la petite lanterne allumée.
Elle l’accroche au harnachement de Brume et se hisse en selle, non sans une grimace de douleur.
La brune laisse Haydïndril se poser de nouveau sur son épaule et s’installe du mieux qu’elle peut.
Elle passe la main sur son ventre rond et perd son regard dans les étoiles, comme pour se rassurer.
Le petit tape doucement au creux de sa paume, ça la rassure un peu, elle aimerait bien qu’il ne cesse pas de taper ainsi pendant tout le trajet, rien que pour lui prouver que tout peut aller bien.
Elle regarde une étoile qui brille davantage que les autres, brille pour moi petit ange, j’en ai besoin…

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Azylys


Journal de voyage, jour 57 : Grand Duché de Bretagne, Rohan


La brune soupire, elle reprépare tout pour la deuxième ou troisième fois, elle a cessé de compter.
La jument est prête, le faucon est prêt, tout est prêt, et elle…plus ou moins.
La belle passe la main sur son gros ventre rond, elle voudrait déjà être à la maison.
Le bébé tape doucement au creux de sa paume, pour lui répondre, pour commencer le jeu peut-être.
Alors la brune se met à chanter et sourit en le sentant frapper en rythme, heureusement qu’il est là lui…
Sans cesser le jeu elle sort son carnet et le pose à côté d’elle, tourne les pages.
Quand enfin apparait une page vierge, elle prend sa plume et commence à écrire.




Un jour peut-être, je l’espère du moins, nous arriverons à décoller de Rohan.
Pourtant en ce moment ça semble un peu compromis, en ce cinquième jour de Juillet, nous y sommes encore.
Hier soir le groupe était formé pour de bon et il était convenu qu’on reprenne la route, tout le monde était au courant.
Finalement nous avons passé une bonne partie de la soirée et de la nuit à chercher Mizar, en vain.
Du coup, nous n’avons pas bougé d’un pouce, nous essayerons de nouveau de partir ce soir, en espérant que cette fois il soit là.
Compliqué la coordination et la synchronisation dans un groupe, et pourtant nous ne sommes que trois.
Enfin, il est largement temps de se remettre en route, le temps presse de plus en plus, et il est hors de question de rentrer trop tard.

Je ne sais pas comment expliquer ça, mais il y a un moment à partir duquel tout semble dangereux même le temps.
Hors de question de mettre le petit au monde sur la route ou sur le bateau, il faut que je sois rentrée à temps.
Etrange à dire, moi qui ai toujours pris le temps, et surtout qui ne l’a jamais vraiment compté.
Maintenant il devient pressant, comme un espèce de décompte, comme si j’avais un sablier au dessus de la tête.
Et si encore il n’y avait que la contrainte du temps je ne m’en porterais pas plus mal.
Mais il n’est pas le seul, à huit mois passés de grossesse tout se conjugue et se mêle pour que le danger soit partout.
Si je comptais les risques que je prends à chaque instant je crois que je n’y arriverais même pas tellement il y en a.
J’essaye de ne pas trop y penser et en effet je crois qu’il vaut mieux, sinon j’en deviendrais complètement folle.

J’ai hâte d’être rentrée, hâte de pouvoir fermer les yeux et laisser Nayelle gérer à ma place.
Je suis fatiguée de plus en plus et j’ai un peu mal partout, un contrecoup de la grossesse.
Heureusement que le bébé s’applique à me faire sourire encore et à me rassurer, merci mon petit cœur.
Sur ce je vais arrêter de chanter et reprendre la route pour aller retrouver le groupe et, je l’espère, me mettre en route pour Vannes, enfin.


De nouveau, la brune éteint le feu et monte en selle en grimaçant.
Elle attrape les rênes d’une main et guide la jument vers la ville, le faucon perché sur son épaule.
Une main sur les pendentifs qu’elle fait doucement glisser sur leurs chaines autour de son cou, la belle perd son regard dans les étoiles.
Elle sourit à celle qui pour elle représente Illyan, elle essaie encore de rayonner pour lui, même si elle manque un peu de force ce soir.
Elle ne sait pas de quoi son avenir sera fait, elle sait pourtant qu’elle doit retourner à Toulouse, et sa vision de l’avenir s’arrête pour le moment à la naissance du petit.
Jusque là tout est plus ou moins planifié, au-delà, c’est le grand flou, le vide total, tout n’est qu’imprévus et doutes, questions sans réponses.

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Azylys


Journal de voyage, jour 58 : Grand Duché de Bretagne, Rohan


La brune revit encore et encore le même jour qui finit toujours de la même façon, elle commence sérieusement à s’en lasser.
Au final, elle a finit par s’énerver, elle aimerait bien qu’on puisse enfin décoller.
Déjà le retard s’accumule et le temps presse de plus en plus, la belle râle un peu.
De nouveau elle fait ses bagages, de nouveau elle s’asseoit, de nouveau elle sort son carnet, de nouveau elle sort la plume, de nouveau elle ouvre à la première page vierge, de nouveau elle écrit.




Raaaaah que ça m’énerve ! Quatrième jour de retard, si c’est pas plus ! Y’a du meurtre dans l’air…
Non non, on a toujours pas décollé, à chaque fois pas moyen de mettre la main sur le breton.
Rosy lui a envoyé une missive pour le menacer presque.
Moi je me tiens en dehors de tout ça mais ça me gonfle sérieusement.
Enfin bon, elle veut retenter de le laisser en tête ce soir, je laisse faire.
Mais en tout cas si demain on est toujours là c’est moi qui prends la tête de l’expédition.
Et je préviens de suite, s’il suit pas tant pis, il restera là, moi j’avance !

Je n’ai pas osé écrire à ceux qui nous attendent, ils nous verront bien arriver demain ou après-demain, et je pense qu’il se foutrait pas mal de notre ‘coordination’ et j’en passe.
En somme ce soir c’est la dernière tentative avant que je reprenne les rênes.
Je suis prête et impatiente depuis déjà des jours, pas de nouvelles de Toulouse, quelques-unes de Vannes.
Il est grand temps de se remettre en route !
Sur ce je clos ce carnet pour ce soir, et je vais rejoindre le groupe, il se fait tard et je manque de patience.


La brune referme le carnet, le range et range la plume, se lève.
Elle éteint le feu encore une fois et rejoins sa jument à la lueur de la lanterne.
Elle se hisse difficilement en selle et attrape les rênes.
Le faucon sur l’épaulette, elle talonne la jument qui se met au pas pour rejoindre la ville et ses ruelles.
La belle soupire, le voyage n’est pas de tout repos malheureusement.
Le petit tape doucement au creux de son ventre, lui tirant un sourire, la bonne humeur est une histoire de famille on dirait…

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Azylys


Journal de voyage, jour 59 : Grand Duché de Bretagne, Vannes


La brune pose le lourd carnet sur le bois de la table, sourit en voyant tous les noms déjà gravés sur la couverture de cuir.
Elle l’ouvre et tourne les pages, elle ne se presse pas, pourtant elle a encore tant à faire, tant à écrire.
Elle sourit en voyant l’écriture d’Illyan, il lui manque déjà comme si elle ne l’avait pas vu depuis des mois.
La belle tourne encore quelques pages avant de tomber sur une page vierge.
La plupart du carnet est déjà rédigée, il n’y reste plus beaucoup de pages, comme il ne reste plus beaucoup de temps pour rentrer déjà.
Azylys passe la main sur son ventre rond, le bébé vient taper doucement au creux de sa paume.
Tournant lentement la plume entre ses doigts, la brune cherche avec lui un peu d’inspiration avant de se lancer.




Septième jour de Juillet 1460, nous sommes enfin à Vannes, le grand retour commence !
Il était vraiment temps, les jours filent à une vitesse inimaginable.
Il faut que je trouve un bateau pour nous ramener dans le Sud, un pour Mimizan a défaut d’un pour Toulouse directement.
Mais pour cela il faut d’abord que j’écrive à tous les capitaines des bateaux qui sont à quai pour me renseigner, c’est pas gagné en somme…
Et une fois que j’ai trouvé un bateau, faut-il encore que Mizar grimpe dedans à temps…
Au pire Rosy lui enverra une autre lettre n’est-ce pas, après tout celle d’hier a tellement bien marché…

Ce soir je suis seule en taverne, je voulais croiser Thim et Kara mais je crois que je ne les verrai pas avant demain.
J’étais tout à l’heure dans une taverne presque bondée et principalement de femmes, mais j’ai préféré filer.
C’est fou le boucan qu’il y avait là dedans, ça ne plaisait pas vraiment au petiot, ni à moi un peu trop fatiguée pour cette agitation.
Je commence aussi à avoir un brin mal au dos, je pense que c’est la faute au ventre qui se fait de plus en plus gros et de plus en plus lourd.
Enfin, le dos ce n’est qu’une partie du reste et le reste commence à se faire un peu douloureux aussi.

Enfin, ce n’est que le début, d’ici à ce que je sois à Toulouse, je serai sûrement un ramassis de courbatures !
Mais toujours avec le sourire bien sûr, sinon ce serait pas moi et je me ferais tirer les oreilles par Illyan voyons…
Alalalala rayonner quand on est fatiguée c’est comme demander au soleil de briller plus fort un jour de pluie.
Enfin, sur ce dommage que je n’ai pas réussi à croiser Kara et T…


La brune sursaute en entendant la porte s’ouvrir dans son dos, laissant une tache d’encre sur la page en dérapant avec sa plume.
Ça non, elle ne s’y attendait pas, pas à cette heure si tardive du moins : surprise !
Quand on parle du loup…Thimoty entre dans la taverne avec un grand sourire.
La belle ferme le carnet et le range discrètement, ou plus ou moins discrètement.
Bon ben finalement elle aura réussi à les croiser ses amis…
Azylys sourit, quand on croit qu’une journée est finie on a toujours tort, on n’est jamais au bout de ses surprises.

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Azylys


Journal de voyage, jour 60 : Grand Duché de Bretagne, Vannes


Des rires, des sourires, des cris, des gestes, des coups, des chopes et du monde.
Azylys est en taverne, bien entourée qui plus est.
Mizar se chamaille avec Rosy comme toujours, le sergent local anime la discussion, Thim est parti déjà.
La brune a déjà tant écrit ce soir, pourtant elle n’a pas fini.
Elle jette un coup d’œil au couple qui se bat à coup de baffes et de boucliers à côté d’elle et essaie de se concentrer.
Elle sort son carnet et sa plume, tourne les pages, se lance.




Aujourd’hui nous sommes à Vannes, et c’est le soixantième jour depuis mon départ, bientôt deux mois que j’ai quitté Toulouse.
Et pour fêter ça j’ai passé la journée à écrire, pas soixante lettres mais presque.
J’ai écris à Ev, à tous les capitaines de bateaux présents à Vannes, à Thim pour le convaincre de repartir avec nous.
Il est vraiment pas bien lui en ce moment, il a fallu que je le traine en taverne sinon il voulait pas venir et il est reparti en pleurant.
Je pense qu’un voyage lui ferait du bien, il faut qu’il se change les idées, il rumine de trop ici.
Je n’ai toujours pas croisé Karadoc, il faudrait qu’il se bouge un peu, je vais pas rester ici une éternité !

Enfin, à part tout cela je suis contente de voir enfin un peu du monde, même si parfois ça devient trop animé pour moi.
Je viens de servir de test de jalousie de la part de Mizar, il a fallu que je le gifle et que je menace de le découper.
Ça devient un brin dangereux pour une femme enceinte de rester avec les deux là hein, entre les bagarres et le reste…
Heureusement pour moi que je me défends bien et que je sais me servir de mon épée et des mes dents.
Ça m’épuise tout ça, je vais aller dormir ça vaudra mieux.

Illyan me manque, et l’homme que j’aime aussi, comme il manque au petit.
C’est compliqué de vouloir être à deux endroits à la fois, à deux moments à la fois…
J’ai hâte de rentrer, franchement, il se fait temps, bientôt deux mois que je suis partie.
Aucune nouvelle de Toulouse une fois encore, ils me manquent tous mes toulousains.
Plus les jours défilent et plus je me souviens de tout ce qu’il s’est passé à la même époque l’année passée.
Tout a changé depuis, malheureusement, parce qu’il est vrai que souvent j’aimerais bien pouvoir retourner dans le temps pour vivre ça à nouveau.
Mais Illyan l’a dit, maintenant il faut que j’avance, alors bon, j’essaie.
Tu vois mon petit ange, je fais des efforts quand même, j’applique tes conseils !


La brune ferme le carnet et passe la main sur son ventre rond.
Elle laisse les amoureux changer de taverne, et elle va faire un tour dehors.
Les étoiles brillent plus fort vu d’ici, tout semble différent.
La belle se promène dans les ruelles, retrouve au fil des rues le chemin du port.
Elle finit par retrouver la mer, celle dont elle a eu marre et qu’elle voulait revoir.
Elle enlève ses bottes et se promène sur la plage, les pieds dans les vagues.
Elle aimerait tellement qu’il soit là pour partager ça avec elle, pour vivre tout ça avec elle.
La brune réfléchit comme elle le fait souvent, elle imagine, elle rêve.
Son regard se perd dans les étoiles, sa main joue avec les pendentifs autour de son cou.
Elle ancre en elle tout ce qu’elle veut voir, elle se souvient de tout ce qu’elle veut revivre.
Azylys sourit et laisse ses espoirs rayonner à travers elle, elle veut croire que le plus beau reste à venir.

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