Elias_romanov Elias replia le parchemin destiné à sa soeur, tandis qu'Eliance, après une arrivée tonitruante, s'installait face à lui. C'était un peu comme éteindre son téléphone portable dans un bar avec des gens, c'était plus poli, et cela lui évitait d'être distrait.
La jeune femme décida arbitrairement qu'elle avait gagné la course depuis le campement entre Chalon et Macon, ce qui était bien entendu une tricherie tout à fait éhontée, car Elias savait parfaitement qu'il était arrivé le premier.
Les termes du pari auraient pu le motiver à argumenter et faire valoir la triste réalité à la Meringue. Au lieu de cela, il croisa les mains sur la table, posa un regard un peu malicieux sur la jeune femme, et lui laissa la victoire.
D'accord. Et qu'est ce que tu gagnes alors ?
Grande question. La Grande Question, que dis-je ! Et il fallait espérer que la réponse ne serait pas 42.
Elias_romanov Elias replia ses bras, ramenant ainsi ses mains près de son visage, dans une posture pensive, alors qu'Eliance utilisait une de ses pirouettes habituelles. Les prunelles grises enveloppaient la jeune journaliste qui retournait la problématique vers lui.
Il décida d'être tout à fait sincère, après tout, elle s'était plainte qu'il enjolivait les choses en permanence. Il eut un léger sourire.
Eliance, je suis ici parce que tu as écrit "j'ai envie".
Lorsque nous avons lancé ce pari, le gain était "ce dont le gagnant a envie", avec bien entendu la condition que le perdant soit d'accord.
Une pause.
Le tailleur savait parfaitement ce qu'il aurait demandé, et qu'elle ne lui aurait pas accordé. Mais il n'en avait cure, parce que cela ne l'intéressait pas d'obtenir ce genre de faveur sans que la jeune femme ne soit totalement consentante à cela.
Cela pourrait être n'importe quoi, finalement, que je t'offre un verre, ou que tu demandes... une étole allant avec ta robe.
Mais j'attends que tu me dises à nouveau "j'ai envie".
Elias_romanov Le sourire d'Elias s'éteignit quand Eliance formula son souhait. Surtout la seconde partie. Il venait de se faire prendre à son propre jeu, il aurait du finalement réclamer la victoire.
La vraie histoire est moins jolie que le conte.
Il pouvait refuser encore, et l'idée lui traversa l'esprit. Finalement, son regard se perdit sur les étagères supportant les bouteilles.
Il va effectivement falloir de l'alcool.
Beaucoup, surtout pour lui, en fait.
Elias_romanov Eliance partit chercher de quoi boire, et Elias entama son godet, après qu'elle l'eut servi. Il releva les yeux vers elle.
Je te demanderai de ne pas m'interrompre, parce que si tu le fais, je trouverai un moyen de ne pas finir l'histoire. Je me connais.
Oui, il serait bien trop prompt à faire dériver la conversation vers autre chose.
Elias ne regarda plus la jeune femme face à lui, préférant plutôt regarder son verre avec un air extrêmement sérieux, voire grave. Il y eut un silence, puis le russe se lança, comme pour courir un cent mètres.
Ma mère était... sicilienne, une très belle femme, passionnée et colérique. Julia.
Le prénom italien sonnait étrangement avec l'accent russe d'Elias. Depuis combien de temps n'avait-il pas prononcé ce prénom à haute voix ? Il avait oublié...
Elle tomba amoureuse d'un homme, et elle quitta son île pour lui. Vassili Romanov était un seigneur important, régnant sur la Moscovie. Ainsi, c'était un homme riche et puissant, et je pensais qu'ils étaient heureux.
Enfin je n'étais qu'un enfant.
Le jeune tailleur semblait avoir du mal à faire dans l'ordre chronologique, alors qu'il refoulait les souvenirs qui souhaitaient revenir à sa mémoire.
Et puis... un jour elle est partie, et elle a emmené ma plus grande sur, Isabella. Je ne sais pas ou elles sont parties, je ne les ai jamais revues après cela. Ca a beaucoup crié ce soir là, je me rappelle.
Le ton de voix d'Elias était devenu hésitant l'espace d'un instant.
Cyrielle et moi, sommes restés en Moscovie, quelques années. Et mon père a voulu alors se remarier. Sa nouvelle femme lui avait déjà donné un enfant, et je crois qu'elle attendait le second. Donc ma sur et moi, on était... indésirables.
Il décida de passer outre les détails, ce n'était pas si important.
Enfin depuis ce moment là, je n'aime plus trop les chevaux.
Alors il y a eu un jour ou nous avons décidé de fuir, alors qu'il se mariait. Nous avons trouvé une caravane qui partait vers l'ouest, et nous sommes allés avec elle. Et puis, nous avons fini par arriver en France.
Cyrielle et moi, on a fini par se séparer. J'ai fait... mon compagnonnage, appris le français, et prit un autre nom.
Et comme il savait qu'elle lui demanderait certainement la raison, il donna la réponse.
Parce que je lui ressemble beaucoup, à mon père, alors porter son nom, c'était...
Finalement il n'acheva pas sa phrase. Par contre il termina son verre.
Elias_romanov La gravité quitta les prunelles grises lorsqu'Eliance l'interrogea sur sa soeur, alors qu'il refoulait au loin ce passé qu'il n'aimait guère évoquer. Il estima qu'elle devait parler de celle qui était restée avec lui. Il releva les yeux vers elle, finalement.
Cyrielle ? Oh, elle voyage je crois.
Elle ne reste jamais en place bien longtemps, cela dépend si elle se plait ou non... D'ailleurs elle m'a dit qu'elle quittait la Franche Comté... pour retourner en France quelques temps.
Un silence.
Je crois qu'elle se surnomme le coquelicot.
On restait dans le thème des fleurs.
Elias_romanov Elias releva un regard surpris vers la journaliste.
Non, je ne savais pas. Tu me montreras.
Elias s'arrêtait rarement sur les chemins, pour observer les fleurs. Alors souffler sur un coquelicot, cela ne lui avait jamais traversé l'esprit.
Plus tard, Elias recevrait la missive du Louvre. Il n'habillerait pas la reine ou le roi, mais la responsable des Cérémonies, ce qui était déjà bien. Et bien sur, il avait été sous-entendu qu'il pourrait fournir la Maison Royale par la suite, ce qui serait une assurance de commandes régulières.
La conversation s'arrêterait peu après, chacun devait retourner à ses occupations, Eliance à sa famille, et Elias à son métier.