Charlyelle
Lesprit seul sait ce qui vit près du cur,
Chacun est seul juge de son âme :
Il ny a pas pire maladie pour un homme sage
De ne point aimer ni se satisfaire de ce quil possède.
(Le Havamal, 95)
Missive aux couleurs bleue et or m'était parvenu ce matin. Je n'étais pas forcément d'humeur joviale, j'avais passé une nuit sans sommeil, mais après ce que je venais d'apprendre de la main même de ma grand-mère, je gardais un goût d'incompréhension, de rage et de blessure qui me faisait me renfermer dans mon iceberg.
J'ai revêtu une simple tunique ocre par dessus mes braies d'argent, un gilet à manches longues et un long manteau de laine gris. Mon bâton est en bois avec une courte fissure allant du haut du bâton jusquen bas en faisant un grand cercle. Je le tiens de ma dextre et jamais je ne men sers en tant quappui. Jai aussi ma claymore avec moi.
L'appel de la Nature se fait entendre et j'oriente mes pas non pas au hasard, mais en direction de l'orée des arbres sombres que j'aperçois au loin. Et tout en avançant je réfléchis aux écrits de ma grand-mère qui me remmène dans ma lande sauvage natale.
Cette vallée que je connaissais par coeur. Aussi intimement que mon propre corps. J'en avais parcouru mille fois chacunes des routes et chacuns des sentiers qui sillonnent le domaine du clan familial. Je savais le nom et l'emplacement de chaque ferme, de chaque hameau.
Je me remémorais cette longue et étroite bande sombre de forêts encadrées de montagnes abruptes aux falaises d'obsidienne, dont les pics d'hermine se perdent dans les nuages.
Aux abords des lacs s'étendent des champs de blé d'or, jusqu'au point où le long ruban turquoise se resserre brusquement en des rapides sauvages dont l'écume argentée bouillonne à l'extrêmité du domaine. Sur son côté Ouest.
Mon harfang planait dans le ciel, lançant de temps à autre des cris perçants dans lequel il me semblait lire des avertissements. D'où venait le sombre pressentiment qui obscurcissait mon coeur, alors qu'il y a quelques jours encore il se réjouissait. Etait-ce dû à l'amertume de la soirée de la veille ou bien à la missive de ma grand-mère...
Je tentais de me persuader que ce n'était pas du Nord que venait le danger, mais la fonte de l'iceberg était perturbée depuis quelques jours et ce que j'avais observé hier n'était pas pour accélerer le processus.
Je ne m'inquiétais pas, je m'effrayais encore moins car après tout, j'étais déjà passé à travers un hiver glacial auquel j'avais survécu en faisant parfois des efforts surhumains.
La lettre de ma grand-mère m'emmenait irrémédiablement auprès de mon grand-père. L'homme pour lequel j'avais le plus d'estime. Mon père face à lui ne faisait pas le poids. Et la disparition d'Ilug n'y changeait rien. Il était calme, posé et réfléchi. Il parlait peu, pensait lentement mais avec justesse et il était honnête et droit, sévère envers lui-même et indulgent envers les autres, sans lintransigeance de ma grand-mère ou la brutalité de mon père.
Quelque chose avait attiré mon attention dans la missive de ma grand-mère mais je ne parvenais pas à saisir le détail, à prendre conscience de ce dont il s'agissait. Cela concernait mon grand-père, c'est la principale chose que j'avais compris.
Je m'enfonçais alors dans la forêt vers laquelle mes pas m'avait mené. J'en humais ses senteurs et l'air me parut frais et délicieux, apaisant mes sens. Aussi enivrant que le parfum d'un vin capiteux.
Le bruit de la rivière était un doux chant, quaccompagnait le murmure des oiseaux invisibles.
Debout, les pieds bien campés au sol, je lâche mon bâton pour me saisir de ma claymore. J'ai besoin de la sentir vivre entre mes mains aujourd'hui.
Mais avant, je me repais d'être simplement là et de sentir la caresse du vent sur ma peau. Douce contradiction avec la noirceur de mon âme aujourd'hui.
La Druidesse est là mais la lettre de ma grand-mère a réveillé la Mercenaire en moi. Je vais danseravec ma claymore.
Et les coupables paieront.
Ilug Jómsven Jómsvensen. Je vais te venger.
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Chacun est seul juge de son âme :
Il ny a pas pire maladie pour un homme sage
De ne point aimer ni se satisfaire de ce quil possède.
(Le Havamal, 95)
Missive aux couleurs bleue et or m'était parvenu ce matin. Je n'étais pas forcément d'humeur joviale, j'avais passé une nuit sans sommeil, mais après ce que je venais d'apprendre de la main même de ma grand-mère, je gardais un goût d'incompréhension, de rage et de blessure qui me faisait me renfermer dans mon iceberg.
J'ai revêtu une simple tunique ocre par dessus mes braies d'argent, un gilet à manches longues et un long manteau de laine gris. Mon bâton est en bois avec une courte fissure allant du haut du bâton jusquen bas en faisant un grand cercle. Je le tiens de ma dextre et jamais je ne men sers en tant quappui. Jai aussi ma claymore avec moi.
L'appel de la Nature se fait entendre et j'oriente mes pas non pas au hasard, mais en direction de l'orée des arbres sombres que j'aperçois au loin. Et tout en avançant je réfléchis aux écrits de ma grand-mère qui me remmène dans ma lande sauvage natale.
Cette vallée que je connaissais par coeur. Aussi intimement que mon propre corps. J'en avais parcouru mille fois chacunes des routes et chacuns des sentiers qui sillonnent le domaine du clan familial. Je savais le nom et l'emplacement de chaque ferme, de chaque hameau.
Je me remémorais cette longue et étroite bande sombre de forêts encadrées de montagnes abruptes aux falaises d'obsidienne, dont les pics d'hermine se perdent dans les nuages.
Aux abords des lacs s'étendent des champs de blé d'or, jusqu'au point où le long ruban turquoise se resserre brusquement en des rapides sauvages dont l'écume argentée bouillonne à l'extrêmité du domaine. Sur son côté Ouest.
Mon harfang planait dans le ciel, lançant de temps à autre des cris perçants dans lequel il me semblait lire des avertissements. D'où venait le sombre pressentiment qui obscurcissait mon coeur, alors qu'il y a quelques jours encore il se réjouissait. Etait-ce dû à l'amertume de la soirée de la veille ou bien à la missive de ma grand-mère...
Je tentais de me persuader que ce n'était pas du Nord que venait le danger, mais la fonte de l'iceberg était perturbée depuis quelques jours et ce que j'avais observé hier n'était pas pour accélerer le processus.
Je ne m'inquiétais pas, je m'effrayais encore moins car après tout, j'étais déjà passé à travers un hiver glacial auquel j'avais survécu en faisant parfois des efforts surhumains.
La lettre de ma grand-mère m'emmenait irrémédiablement auprès de mon grand-père. L'homme pour lequel j'avais le plus d'estime. Mon père face à lui ne faisait pas le poids. Et la disparition d'Ilug n'y changeait rien. Il était calme, posé et réfléchi. Il parlait peu, pensait lentement mais avec justesse et il était honnête et droit, sévère envers lui-même et indulgent envers les autres, sans lintransigeance de ma grand-mère ou la brutalité de mon père.
Quelque chose avait attiré mon attention dans la missive de ma grand-mère mais je ne parvenais pas à saisir le détail, à prendre conscience de ce dont il s'agissait. Cela concernait mon grand-père, c'est la principale chose que j'avais compris.
Je m'enfonçais alors dans la forêt vers laquelle mes pas m'avait mené. J'en humais ses senteurs et l'air me parut frais et délicieux, apaisant mes sens. Aussi enivrant que le parfum d'un vin capiteux.
Le bruit de la rivière était un doux chant, quaccompagnait le murmure des oiseaux invisibles.
Debout, les pieds bien campés au sol, je lâche mon bâton pour me saisir de ma claymore. J'ai besoin de la sentir vivre entre mes mains aujourd'hui.
Mais avant, je me repais d'être simplement là et de sentir la caresse du vent sur ma peau. Douce contradiction avec la noirceur de mon âme aujourd'hui.
La Druidesse est là mais la lettre de ma grand-mère a réveillé la Mercenaire en moi. Je vais danseravec ma claymore.
Et les coupables paieront.
Ilug Jómsven Jómsvensen. Je vais te venger.
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