Umbra
[Quelques notes sur une page
le long de l'eau
Laissés derrière moi]*
Elles sont Azur, Turquoise ou Cyan. Nuance de Nuit ou couleur de Roi. Elles sont vastes et immuables, nous rappelant comme nous sommes petits et insignifiants. Elles teintent l'horizon jusqu'à perte de vue, rendant les murs de notre Prison plus agréable. Le Bleu est rêveur, les barrières sont imaginaires.
Si l'Homme n'a pas encore conquis le Ciel, il tente de dompter la Mer comme un condamné creuser la terre pour fuir son cachot. L'éternelle question demeure: En ressortira-il vivant? La liberté, réfléchit l'Ombre devant un vélin fraichement décacheté, est comme le vent. Invisible et pourtant présent, à portée de main mais inaccessible. Libre comme l'air? Celui qui vous glace les os et porte la maladie? Umbra tend à penser que l'Homme est plutôt libre comme l'eau dans un verre**.
A son tour, la Bâtarde prend la plume, la trempe dans un liquide brun et songeuse, griffe un parchemin pour en ancrer ses nouvelles.
Le Bonjour, Messire Mandrain,
Les beaux jours arrivant et le timide soleil aidant, votre dernier pli m'a effectivement trouvé en bonne santé. Je profite même de ce temps clément pour reprendre la route vers de nouvelles affaires pareillement.
Vous me voyez ravie et soulagée de vous savoir en partance pour la petite Bretagne plutôt que la Grande. Bien que je n'ai rien de personnel contre les celtes d'Irlande, je préfère que vous soyez chez ceux des côtes de notre royaume (au besoin, ils sont plus proche de mon poing).
La plume pique le papier aussi caustique que le sourire étirant ses lippes mauves. Celle-ci reposée au bord de l'encrier, l'Oiseau profite de sa patte libre pour se replonger sur les écrits de son correspondant. A en lire les propos, ce dernier est, au moins, aussi sournois qu'elle. Au fur et à mesure que ses iris de jais parcourent les lignes, le rictus moqueur s'affermit sur ses traits. Il lui est divinement plaisant de converser avec Mandrain. Il est, comme elle se plait à le songer intérieurement, son Bout d'Anjou. Où qu'elle soit, il est là pour lui rappeler sa Terre de coeur. Quand le mal du pays vient lui saisir les tripes, elle se conte les nouvelles qu'il lui envoie de là-bas.
le long de l'eau
Laissés derrière moi]*
Elles sont Azur, Turquoise ou Cyan. Nuance de Nuit ou couleur de Roi. Elles sont vastes et immuables, nous rappelant comme nous sommes petits et insignifiants. Elles teintent l'horizon jusqu'à perte de vue, rendant les murs de notre Prison plus agréable. Le Bleu est rêveur, les barrières sont imaginaires.
Si l'Homme n'a pas encore conquis le Ciel, il tente de dompter la Mer comme un condamné creuser la terre pour fuir son cachot. L'éternelle question demeure: En ressortira-il vivant? La liberté, réfléchit l'Ombre devant un vélin fraichement décacheté, est comme le vent. Invisible et pourtant présent, à portée de main mais inaccessible. Libre comme l'air? Celui qui vous glace les os et porte la maladie? Umbra tend à penser que l'Homme est plutôt libre comme l'eau dans un verre**.
A son tour, la Bâtarde prend la plume, la trempe dans un liquide brun et songeuse, griffe un parchemin pour en ancrer ses nouvelles.
Le Bonjour, Messire Mandrain,
Les beaux jours arrivant et le timide soleil aidant, votre dernier pli m'a effectivement trouvé en bonne santé. Je profite même de ce temps clément pour reprendre la route vers de nouvelles affaires pareillement.
Vous me voyez ravie et soulagée de vous savoir en partance pour la petite Bretagne plutôt que la Grande. Bien que je n'ai rien de personnel contre les celtes d'Irlande, je préfère que vous soyez chez ceux des côtes de notre royaume (au besoin, ils sont plus proche de mon poing).
La plume pique le papier aussi caustique que le sourire étirant ses lippes mauves. Celle-ci reposée au bord de l'encrier, l'Oiseau profite de sa patte libre pour se replonger sur les écrits de son correspondant. A en lire les propos, ce dernier est, au moins, aussi sournois qu'elle. Au fur et à mesure que ses iris de jais parcourent les lignes, le rictus moqueur s'affermit sur ses traits. Il lui est divinement plaisant de converser avec Mandrain. Il est, comme elle se plait à le songer intérieurement, son Bout d'Anjou. Où qu'elle soit, il est là pour lui rappeler sa Terre de coeur. Quand le mal du pays vient lui saisir les tripes, elle se conte les nouvelles qu'il lui envoie de là-bas.
Citation:
Donc, pour revenir au fil de mes moutons, une fois sur St Brieuc, nous descendons sur Bayonne, une escale prévue pour et débarquer quelques passagers, quelques transactions en perspective, puis retour jusquà Saumur, ou sa proche possibilité, fonction des disponibilités damarrage.
Je vais vous le proposer, ne sachant vos intentions de rester ou non sur Marseille, mais vous pourriez profiter de notre venue sur Bayonne pour éventuellement remonter en terres natales.
Je vais vous le proposer, ne sachant vos intentions de rester ou non sur Marseille, mais vous pourriez profiter de notre venue sur Bayonne pour éventuellement remonter en terres natales.
Silence. Un long frisson lui électrise l'échine à cette idée. Comment refuser sans paraître cachotière voire mensongère? Certes, il lui reste réellement quelques contrats à régler dans le Sud mais pas au point de louper le départ du bateau tout de même. Lui expliquer que son compagnon a le mal de mer même en rivière? La belle excuse, d'autant plus qu'elle passerait pour une femme soumise et ça...Bref.
Rien que d'y songer, la Noiraude tire à nouveau à la tronche. Désirant passer à autre chose, elle s'applique à reproduire ce qu'elle fait à chaque fois pour se changer les idées soit, elle achève sa lecture mais d'un oeil plus sombre qu'au départ. Des nouvelles de l'Archiduché et des mauvaises, histoire d'enfoncer le couteau dans la plaie. Dieu que sa Terre des Fous lui manque atrocement!
En bateau, tu y serais bien plus rapidement qu'à cheval, lui susurre sa mauvaise conscience.
Tu veux ma mort, lui répond à haute voix l'intéressée.
Poule mouillée!
Vrai qu'elle n'a pas toujours tort celle-là. Surtout que la mercenaire doit se rendre sur Paris prochainement. Peut-être pourrait-il les mener jusqu'aux...Quais de Seine? La voilà repartant en déprime à cette énième pensée. Les souvenirs la brassent comme les flots en barbouille d'autres. La plume reprend son envol et poursuit sa rédaction.
Voilà, de bien mauvaises nouvelles à mon goût. Serait-il réellement temps de rentrer au bercail? Le projet semble de plus en plus judicieux en tout cas. Dans combien de temps pensez-vous amarrer à Bayonne? Je suis actuellement occupée à Nîmes, j'espère seulement que ça ne s'éternisera pas.
Faites-moi part de vos sentiments quand à votre nouvelle acquisition et tenter d'apaiser mes craintes sur les trajets navals. Les volatiles sont fougueux sur terre, heureux dans les airs mais...peureux en mer.
Dans l'espoir de vous lire prochainement,
Corneille.
Sans mauvais jeux de mots, la Mauvaise Augure vient de se jeter à l'eau en avouant la stricte vérité. Bien sûr, nous parlons d'Umbra donc c'est forcément plus tortueux et torturé qu'une simple phobie. Non, c'est un pêle-mêle de désagréables souvenirs, d'effrayantes superstitions et de jugements hâtifs. Pourvu que le S.O.S ne soit pas vain et comme une bouteille à la mer, le message est finalement lancé.
[Des sentiments qui dérivent
Et qui volent sous le vent
Le long de l'eau
Des oiseaux sauvages]*
* Paroles de la chanson "Le long de l'eau" de Cécile Corbel.
** Titre d'une chanson de Ina Ich.
** Titre d'une chanson de Ina Ich.
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