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[RP] "Je t'aime." - "Moi non plus."

June
Et voilà. Elle était tellement prévisible, parfois. Il marmonna dans la barbe qu'il n'avait pas, râlant du moindre mot de chaque question. Qu'est-ce que ça pouvait bien lui faire qu'il ait été marié ou non, et de savoir à qui avait appartenu cette robe ! Et le pire, c'est qu'elle donne son avis, comme si on le lui avait demandé. Exaspéré, il leva les yeux au ciel et prit le temps de se lever de nouveau pour aller épousseter un peu la robe immaculée, comme si elle avait pu l'avoir salie ; et tout ça pendant qu'elle touchait autre chose dans la pièce, un livre, cette fois. Après avoir délicatement frotté le tissu blanc comme neige du vêtement, il se retourne et l'observe avec un air mécontent. Il la trouvait bien trop à l'aise. Beaucoup trop à l'aise.

"En tout cas, ça fait plaisir de voir que vous prenez votre nouvelle condition de captivité avec bonheur. Ca ne m'était jamais arrivé avant."

Et il se détourna, comme s'il allait faire un autre truc, après avoir déclamé ça d'un ton nonchalant. Bien sûr qu'il n'allait pas la garder prisonnière, la première envie qu'il avait en la regardant était de s'en débarrasser. Mais lui mettre un peu la pression ne lui ferait pas de mal. De toute façon, quand il ne menait pas sa barque lui-même, ça le perturbait toujours. Il retourna à la robe et remis un ruban en place, épousseta de nouveau l'épaule gauche de la robe et réajusta un pli. Comme si c'était un geste habituel.
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Melissandre_malemort
Un ouvrage héraldique, évidemment. Mélissandre lit quelques pages en diagonal, sans comprendre mais fascinée par chaque détail scrupuleusement rapporté par l'auteur. Jusqu'aux annotations sans doute de la main de June qu'elle effleure de la pulpe du pouce avec un petit sourire rêveur.

Le livre est dûment refermé et reposé à sa place. La princesse retire la coiffe qui retient ses cheveux et la pose sur une étagère, pivote et observe le Berrichon. Tout en lui hurle son ambivalence. Ce visage fermé opposé à la délicatesse de chacun de ses gestes quand il prend soin de robe oubliée, comme d'autres vénéreraient un reliquaire.

Alors quand il menace de la garder ici, elle se laisse tomber sur un fauteuil à nouveau, lisse pensivement ses jupes et l'observe en oblique avant de reprendre son babillage.


- Me garder ici? Riche idée. Mais j'ai faim. Et soif. Nous avons approximativement... Une heure avant que mes gardes du corps passent outre vos gardes incapables, vos murailles naines et votre blonde névrosée. Qu'allons nous faire en attendant?

Mélissandre pose ses jades sur June, se relève souplement et viens à sa hauteur pour poser les doigts sur le superbe corsage, sans penser à mal. Tout est du à une princesse, et elle est habituée à manipuler les tissus les plus précieux. C'est donc telle une connaisseuse qu'elle prend entre ses longs doigts fins le peigne en or surplombant la toilette et retenant un long voile jauni par le temps.

Sans réfléchir, avec l'impulsion de ses quatorze printemps, la Malemort pique le bijou dans ses longues boucles châtaignes et se mire dans le miroir tout proche, rêveuse. Elle n'y voit pas un manque de respect. Elle est simplement... Mélissandrienne.

- C'est si joli...
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June
Alors là.

C'est dans la tête de June une espèce de tempête, l'annonce d'un carnage, la préparation d'une offrande au nom de la Mort et tout ça en faisant le bruit de couteaux de cuisines qui gémissent parce qu'ils se font affûter pour mieux couper un doigt, une oreille ou une gorge. Nan mais, elle serait pas un peu marteau, celle-là ? Parce que là, ça y est, il a les nerfs qui commencent vraiment à vriller. Et s'il fallait le démontrer, il bondirait là, comme ça, et il lui arriverait dessus en piqué diagonal. Et ce serait à ce moment-là un hymne à la cruauté, un autel dressé au culte de la barbarie. Même le narrateur se dit : Oh putain, oh putain, oh putain ! Qu'est-ce qu'elle a pas fait là, l'inconsciente vermine ! Son sérieux va devoir vite revenir car, sans prévenir, il se précipite sur elle, se met derrière elle et la plaque contre lui de son bras puissant. Sa main fine aux longs droits étrangleurs remonte jusqu'à son cou et serre, pas assez pour lui faire perdre connaissance à cause d'un manque de respiration, mais assez fort pour la convaincre que ça y est, il ne plaisante plus. Fini la rigolade, ma mignonne, car tu as réveillé là celui que tu ne devais pas déranger.
Une chose, seulement, ne s'est pas transformée : sa voix mielleuse, menaçante et douce à la fois, qui revient à l'oreille de Mélissandre comme un murmure au creux de sa tête.


"Une heure, dites-vous ? Une heure... Largement assez pour vous violer trois ou quatre fois, si ce n'est plus, et ce par tous les horizons. Bien assez pour vous égorger ensuite sans vous tuer et vous pendre par les pieds afin de vous faire vous vider de votre sang lentement, telle une truie, et quitte à finir en beauté, je pourrais presque me vider les bourses dans votre grande gueule princière. Et promis, je penserai à votre mère quand je vous administrerai tous ces moindres plaisirs."

Ca y est, t'as peur là ? Si c'est pas assez, il en a encore dans la courge, pas d'inquiétude. Et qu'elle ne s'inquiète pas de l'absence de pilule bleue de l'époque ; même à son âge, quand il s'agit de prendre autant de plaisir, il y a toujours du monde au portillon. De sa main libre, il retira délicatement la coiffe et la posa sur un meuble à proximité. Tu vas voir, si c'est si joli.
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Melissandre_malemort
C'est un choc. Une chute dans les ténèbres, une déchirure dans son esprit, une estafilade dans son coeur. Mélissandre accuse le coup avec un cri de douleur que la pression sur sa gorge étouffe et réduit à un gargouillis. L'étreinte à un gout de déjà vue et elle panique, se tord, convulse presque pour tenter de lui échapper.

June ne rit plus, Mélissandre ne joue plus. Ses ongles s'enfoncent dans les bras qui la retiennent pour tenter de lui faire lâcher prise, de trouver un point d'appuie, n'importe quoi pour que l'air oxygène son cerveau déjà vacillant. La migraine explose entre ses tempes, les larmes jaillissent, les mots de June la plonge dans une terreur comme jamais encore elle n'avait connue. Personne, pas même Stradivarius, n'avait jamais réussi à faire perdre son self control à la Malemort.

Elle pleure de douleur, de peur, de ses nerfs qui flanchent après cette deuxième agression qu'elle ne comprend pas. Dans le jeune esprit princier, June était un ami. Ou autre chose. Une tentation. Un monde inconnu. "Je vous aime... Un peu". Elle était venue pour comprendre, mais elle se heurte à un monde délétère qui ne veut pas d'elle.

Les petits pieds glissent sur le sol. Elle est si petite que la prise de June sur son cou la soulève presque. Son corps perd peu à peu le combat. Elle n'a plus vraiment la force de se battre. C'est l'instinct de survit mêlé à une fureur latente quand il insulte sa mère qui donne à Mélissandre le courage insoupçonné de planter des dents furieuses dans le bras libre de June. Sa machoire déchire la chaire, fait jaillir le sang. Si il veut la tuer, il devra le mériter.

Il devra la regarder dans les yeux et assumer son mensonge. Assumer sa folie. "Je vous aime un peu". Traître.

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June
Le sentiment de puissance et de domination le ferait presque trembler d'envie, de plaisir. A croire que June est un psychopathe. Meuh non, meuh non, qu'allez-vous croire là. Lui, un psychopathe ? Juste un gentil fou... En un peu moins gentil et un peu plus fou. Une petite douleur vient tout de même ponctuer l'épisode, sinon ça serait trop facile. Les ongles acérés de la petite s'enfoncent dans sa peau, tentent de la griffer pour lui faire entendre une douleur ressentie qui, peut-être, lui ferait pitié et le ferait changer d'avis. C'était mal le connaître. Quand on supporte de se faire marquer au fer rouge sans hurler de tous ses poumons, rien qu'en serrant les lèvres au point de se faire saigner la bouche dans tous ses recoins, on apprend à apprécier la douleur qui va en décroissant. Elle pleure. Il sent les larmes aller jusque sur sa peau, couler le long de ses doigt et se cacher dans les poils blonds de son avant-bras. Elle aurait pu crier, pleurer tant qu'elle voulait. Kenaï était parti. Sega était dehors, et ne pouvait entendre. Les deux gardes encore moins. Et d'ailleurs, qu'est-ce qu'ils en auraient eu à faire. Il était le Maître, ici, et c'était cela qu'il rappelait à sa délicieuse invitée.
A sa façon.

Bien sûr qu'il l'aimait, un peu. Mais il l'aimait comme ça, cuisinée à la June, vraie, pas princière, pas surfaite. Il l'aimait avec ses instincts animaux, il l'aimait quand elle criait de joie ou de peine, il l'aimait quand elle ne se mentait pas à elle-même ni aux autres. Et telle un animal, elle se mit à le mordre de toutes ses forces, et le fit lâcher prise au bout de quelques secondes. June regarda son sang s'échapper de la plaie à la forme dentaire. Elle prouvait au moins qu'elle les avait toutes. Il recula de quelques pas, les yeux rivés sur son bras meurtri, puis s'arrêta, baissa la tête. Il se dirigea dans un coin de la pièce où se trouvait, par terre, un baquet encore empli d'un peu d'eau trouble. Il s'agenouilla et trempa son bras sans un bruit, tel un animal blessé physiquement autant qu'à son honneur, et ne fit plus attention à elle qui, une fois libérée, avait du retrouver un certain goût à la vie. Ce qu'elle allait faire ? Il s'en fichait bien. Elle ne pouvait sortir de la Maison Sidjéno, seul lui connaissait le bon chemin pour s'enfuir, le seul sans piège.

Le dos long du Seigneur s'affaissa et pauvre qu'il était, à genoux devant son baquet, il renifla l'eau savonneuse qu'il avait laissée du matin. Ses yeux se perdirent dans le vide, et des larmes coulèrent doucement, lentement, le long de ses joues. Des larmes salées qui, tombées jusque sur son bras, le piquèrent dans sa chair. Il n'avait pas voulu s'énerver. Elle l'avait plongé dans une rage incontrôlable que seule Sega savait en fait gérer ; et même elle, il l'avait battue plusieurs fois, avant de se rendre compte de la réalité de ses gestes. Il se sentait misérable d'avoir frappé la gamine, misérable en repensant à toutes ces fois ou Sega était passée à sa place, et à pas grand-chose de la fin. Il était un presque criminel non assumé, qui gardait sa fierté, son calme et son talent d'artiste comme bouclier contre lui-même.

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Melissandre_malemort
Lorsqu'il la libère, Mélissandre happe l'air avec un sifflement strident, comme un noyé crevant la surface d'un lac pour retrouver son souffle. Elle s'effondre le long du mur, se laisse glisser jusqu'au sol et y reste prostrée en position fœtal. Ses poumons brûlent en se remplissant d'air, lui arrachant un gémissement de douleur.

La trachée écrasée par la poigne du Sidjéno est plus embêtante. La souffrance pulse plus fort à cet endroit là, et elle porte une main nerveuse à sa gorge rougie. Ses chaires commencent déjà à bleuir. Dans quelques heures, son cou sera violacé, comme quand...

Ne pas penser à ça. Attendre que le corps s'oxygène avant de songer à fuir. Se lever maintenant ne servirait à rien, elle le sait d’expérience, cette petite princesse stupide et téméraire qui sdélectait d'approcher des bêtes sauvages. Les larmes continuent à rouler sur ses joues depuis ses yeux rougies. Les veines ont explosés et ses prunelles d'un beau noir velouté sont nimbés de sang, de ce même sang qui coule aux coins de ses lèvres.

Sa langue a prit le gout métallique de la morsure à June. Un acte désespéré auquel elle doit la vie, car elle le comprend maintenant, la Malemort. L'angevin lui aurait fait subir chacune de ses menaces jusqu'à la laisser pourrir dans ses jardins sans le moindre regret. Méli essuie ses yeux d'un geste rageur du revers de la main et fini par se lever. La station debout la fait vaciller, ses nerfs font trembler ses genoux. Un pas, un autre encore. La porte qui s'ouvre. Les yeux qui évitent de se poser sur son bourreau.

Prostré dans un coin de la pièce, June ne bouge pas. Il pourrait la retenir, attraper sa gorge à nouveau et terminer ce qu'il avait commencé. Mélissandre n'a pas peur de mourir, et c'est dans cette folie qu'elle puise son inépuisable insouciance. Alors au lieu de fuir dans le labyrinthe Sidjéno, elle referme la porte, approche du bureau et renverse un peu d'une fiole d'alcool sur un morceau de coton.

Le bras du blond est saisit entre ses mains. Il ne doit voir que son profil joliment dessiné, ses interminables cils noirs, ses lèvres trop fines, son petit nez retroussé comme celui d'un bébé, et surtout les traces indélébiles de ce meurtre avorté. la peau trop blanche de Méli est zebrée de rouge. Ses cheveux retombent sur ses hanches dans un pauvre désordre. Elle évite soigneusement de croiser son regard ou pire, de voir la robe qui l'a rendu fou.

Le coton est doucement pressé sur la morsure pour la désinfecter. Les plaies infliger de cette façon s'infectent toujours, c'est une fatalité. Elles peuvent devenir douloureuses, gonflés, suinter. La pauvre idiote à demi morte s'inquiète de ne pas laisser son meurtrier souffrir de ses spasmes d'agonies. Elle nettoie soigneusement la plaie avant d'enrouler le bras dans un pan de coton propre arraché à ses jupons, noue le tissu, se relève et s'approche du miroir devant lequel elle se pavanait quelques minutes plus tôt.

Ou est elle, la jolie princesse? Il n'y a plus qu'une gamine échevelée au regard rouge comme celui d'une folle, le menton barbouillé de sang, les veines du visage dilatées et explosées, le cou meurtri. La petite main se referme sur un coupe papier oublié sur le bureau héraldique. Elle approche dans le dos de June, les mains le long du corps, la lame nichée dans les plies de ses jupes.


- Vous auriez du m'achever du premier coup, Monsieur.

La lame se lève. Mais elle ne frappe pas. Elle en est incapable. Ce n'est pas la volonté de le tuer qui la domine, mais celle de lui faire payer son mensonge, sa trahison, ses insultes, son absence. Mélissandre était, est, sera à jamais une créature singulière jusqu'à la folie.

- Vous êtes absurde. J'étais ici pour vous. Juste pour vous.

La voix de la jeune fille est rauque, brisée. Chaque parole module douloureusement ses chaires broyées. Elle laisse tomber le couteau qui glisse le long de ses jupes et vient mourir sur le parquet.
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June
La porte s'ouvre. Il reconnaîtrait ce petit grincement à peine audible entre mille. Elle avait donc décidé de fuir, et il ferma les yeux, priant presque pour qu'elle retrouve son chemin et qu'elle parte loin d'ici. Mais soudain, son bras se soulève et l'odeur de l'alcool emplir son environnement proche. On le soigne. "On", car il ne sait pas si c'est Mélissandre qui n'est finalement pas partie ou si c'est Sega qui est revenue. Il ne la voit pas, ses yeux restant clos. Elle finit de nettoyer son bras et repart, s'arrêtant à un endroit de la pièce à quelques pas de lui. Est-ce qu'elle se regarde dans le miroir ?
La voix de la jeune femme se fit de nouveau entendre, cette fois juste derrière. L'achever du premier coup ? Dans la tête du grand blond, une voix susurre que ce n'est pas grave, que le deuxième coup pourrait être réussi, lui suggérant de se retourner d'un coup et de l'attraper par les cheveux, pour mieux la plonger dans l'eau froide et savonneuse de la baignoire et la noyer, comme un petit chiot à l'aube de sa vie dont on ne voudrait guère. Mais l'image de l'acte, apparue soudainement dans son inconscient, le ferait presque vomir. Il a eu sa dose de mal fait pour aujourd'hui. Il a l'impression d'une main douce posée sur son épaule et, au fin fond de lui-même, entend de nouveau la voix de Kerah, le rassurant et l'encourageant à aller de l'avant, après chacun de ses excès de colère. La voix de la Malemort s'invite de nouveau, brisant le court silence. Elle était ici pour lui, juste pour lui... Mais qu'est-ce que cela voulait dire ? Il s'avoua à lui-même son incompréhension, se demandant ce qu'elle pouvait bien avoir à faire de lui. Et sans qu'il ait eu le temps de songer à la réponse de sa propre interrogation, il entendit un bruit métallique, le cri d'un objet tombé sur le sol à côté de lui. Ses yeux bleus se réouvrirent doucement, et il tourna légèrement la tête vers l'origine du bruit : un coupe-papier, qu'il connaissait bien puisque c'était le sien.

Ainsi, elle avait abandonné la légitime idée de se venger, au prix de le voir regretter. Il était exténué, à cause de sa colère contre elle et de sa colère contre lui-même, à cause de ses larmes à elle et à cause des siennes.
Il releva son dos, se retourna à moitié, et leva ses yeux rougis vers le visage de Mélissandre. Il les referma aussitôt, le temps d'un instant de douleur psychologique, après avoir vu l'illustration en son visage meurtri de ce qu'il lui avait fait. D'un geste calme, doux, presque tendre, après avoir réouvert les yeux, il saisit timidement la main gauche de la princesse et la prit dans ses deux mains. Avec quelques difficultés pour retrouver sa voix, il posa les yeux sur la robe blanche au fond de la pièce, évitant finalement le regard de son interlocutrice.


"Cette robe, c'est moi qui l'ai faite. J'étais un jeune tisserand en début de carrière, et on me disait doué. A cette époque-là, aucun présent existant dans le monde - et que je pouvais payer - ne satisfaisait ma promise. Alors, j'ai décidé de lui confectionner une toilette, cette toilette, la seule qu'elle ne possédait pas déjà : une robe de mariée. Aucune ne lui convenait, pour notre union. Elle était exigeante. Alors j'ai imaginé, dessiné et confectionné cette robe nuits et jours. Plus elle était avancée, plus je la trouvais belle, et mieux je l'imaginais dedans, debout à mes côtés devant l'autel. Quand je lui ai présenté la robe, elle n'a rien dit. Mais moi, je connaissais bien son regard."

Une pause. Il fit un mince sourire, mystérieux. Celui qui écoutait de prime abord se doutait qu'elle avait accueilli la robe avec une joie mesurée, une joie noble, à sa façon. Mais lui, le blond, avenir du jeune tisserand de l'époque, se rappela facilement des yeux bruns de Cécile qui exprimaient la déception, le dégoût même, de devoir porter "ça", faite par "lui", à "ce" mariage.

"Elle l'a portée, le jour de notre mariage. Elle était belle, comme prévu. D'ailleurs, ce jour-là, elle était enceinte jusqu'aux yeux, et chaque semaine avant la cérémonie, je devais repriser le tissu pour qu'elle puisse enfiler la robe avec son ventre gros et rond. Moi, je la trouvais vraiment jolie dans cette robe, ventre ou pas ventre. Le soir de notre mariage, elle a accouché de mon fils, et elle n'a pas supporté la douleur. Elle est décédée ce soir-là, après avoir donné son prénom à Nathan, le jour où j'avais passé l'anneau à son doigt."

Il ne donna pas plus de précision sur cet épisode qui, à l'entendre, semblait encore le meurtrir. La douleur d'un tel moment restait intense, comme toujours, et il ne serait pas bienvenu de lui poser la question des détails.

"J'ai gardé la robe, et je l'ai reprise à nouveau, pour ma fille Elynne, qui souhaitait la porter à son propre mariage, le mariage dont elle rêvait. Elle la trouvait belle, cette robe. Mais finalement, elle ne l'a jamais portée, c'est comme ça. Depuis, elle est là."

Un mouvement de menton pour désigner la robe en question. Il lâche la main, sans quitter le tissu blanc des yeux. Il savait ce qu'elle allait lui dire : que ce n'était pourtant pas difficile de dire tout ça, et qu'il n'y avait pas besoin d'étrangler les gens avant de leur raconter sa vie. Surtout s'ils finissent morts, ils n'écouteront pas grand-chose. En y repensant, ses paroles auraient très bien pu être dites par sa mère, ce fameux soir où c'était arrivé. Mais elle n'avait rien dit, car elle avait découvert une autre facette de son fils, qui n'était pas finalement qu'un amateur de poésie, un adulateur de philosophie, un étudiant en médecine et un passionné de la lecture. Mais ça, c'était caché, là, au fond de la tombe de Kerah, à Saint-Aignan, et ça y resterait.
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Melissandre_malemort
Consciente du malaise de June, Mélissandre tente de couvrir son cou meutrit avec un pan de sa robe, sans succès. Elle choisi donc de se détourner pour s'approcher de la fenêtre. La dehors, le monde continue à tourner. Ses gardes éructent, peu habitués à se voir refouler. La belle Sega agite les bras en discutant avec la mesnie Sidjéno. Un vent léger agite les feuilles des arbres. Tout est paisible.

Elle passe doucement la main sur sa gorge et l'écoute sans un mot, prenant pleinement conscience de son manque de tact. Quelle idée de mettre un voile comme elle aura joué d'un simple objet sans signification? Sans excuser la violence de June, quelque chose dans le coeur de Méli l'oblige à comprendre au moins un peu ses excès.

Quelle femme était ce, cette épouse vénale et égoiste? Etait ce pour cela qu'il la méprisait tant, elle la petite princesse trop gatée et insatisfaite?

Et de s'approcher de la robe pour la regarder, sans y poser les mains. Le travail était exquis. Chaque point trahissait l'application de June à la réaliser, puis à la réadapter, encore et encore. Mélissandre l'imaginait penché sur son ouvrage, le front barré d'une ride concentrée, les yeux brillants d'imaginer sa promise heureuse de son oeuvre. Et la déception, encore et encore...


- Je vous demande pardon. Je ne savais pas.

Quelques mots. La victime qui s'excuse auprès d'une autre victime, bien que différente.
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June
Il la regarde, un bref instant. Elle s'excuse. Lui est déjà parti dans une sorte d'état second, son esprit s'est fermé, ne laissant comme possibilités que de marcher et à peine parler. Que faire, à présent ? Elle était autant traumatisée que lui. Mais, au moins, diront les mauvaises langues s'ils avaient connaissance de cet épisode, elle ne viendrait plus l'importuner, ou quoi que ce soit d'autre.

Il fit quelques pas, ouvrit la porte en grand. Sega arriva à ce moment-là, suivie d'Aimbaud et de Godefroy qui clopinaient, chacun d'une jambe. Les yeux bleus, éteints, presque sans âme en cet instant d'égarement, se posèrent sur Mélissandre.


"Partez."

Pas besoin de dire aux gardes de la raccompagner. En voyant le maître des lieux, ils avaient compris qu'il lui faudrait quelques jours de repos.

C'était une question d'habitude.

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