Walan
[Castel de Guillestre, surlendemain des meurtres]
Alors que soleil approchait de son zénith, la silhouette d'un cavalier menant un cheval à cru apparu au sommet de l'une des collines entourant. Son allure martiale et le trot soutenu avec lequel il chevauchait eurent tôt fait d'alerter les guetteurs endeuillés du castel et ce n'est que lorsque le nouveau venu fut arrivé à porté de flèche que l'un des soldats pu reconnaitre le blason ornant l'écu accroché à sa selle. Dès lors, l'un d'eux s'empressa d'aller ouvrir les portes et accueillir le seigneur de Meyrieu tandis que les autres reprenaient leur surveillance.
Mettant pied à terre à peine arrivée dans la cour, Walan tendit les rênes des deux chevaux harassés et au poil luisant de sueur au premier venu avant de rejeter le capuchon de sa cape en arrière.
Une après midi et une nuit de chevauchée n'avait guère arrangé son expression, pas plus que le messager envoyé par le vicomte de Crots qu'il avait croisé dans la nuit ou la découverte des traces de sang dans l'église de Briançon le matin même. La mine sombre qu'il arborait depuis la venue du messager à Lyon se trouvait en effet tant accentuée par les cernes et les traits tirés -consécutifs de la nuit blanche et du voyage- que certains des domestiques guillestrins ne purent s'empêcher d'avoir un mouvement de recul à la vue de celle-ci.
Indifférent à cela, à la fatigue et à la douleur de ses muscles, le seigneur de Meyrieu se contenta d'ordonner sans même vraiment s'en rendre compte :
Menez moi à eux.
Nul besoin d'être une grande lumière pour comprendre de quels "eux" il s'agissait et il ne fallu guère de temps pour que Walan soit introduit dans l'église Notre-Dame d'Aquillon, près du chur de laquelle avait été dressé un catafalque où reposaient les deux corps. L'ancien gouverneur remonta rapidement les travées vides. La famille, les amis et la maisonnée devaient avoir quitté les lieux depuis peu pour aller prendre quelque repos après la veillée funèbre, aussi personne ne pu assister à la scène qui vit le seigneur de Meyrieu s'agenouiller devant les dépouilles et faire ses adieux à Francesca-Amalya d'Avencourt et Charles de Macquart. Nul témoin non plus du serment qu'il prononça alors en cette froide fin de matinée, prenant le Très Haut et son prophète à témoin.
C'est en se relevant pour partir à la recherche de sa filleule que Walan distingua un éclat blond sur le premier banc de la rangée. Nul besoin de chercher finalement : recroquevillée sur le siège et endormie, vraisemblablement vaincue par la fatigue et la souffrance, la jeune fille était là. Sans un bruit, le conseiller militaire s'approcha de l'héritière des lieux, dégrafa sa lourde cape et en recouvrit l'adolescente. S'agenouillant, il contempla un moment ce visage si semblable à celui, maintenant blanc et froid, gisant à quelques pas, avant de l'effleurer doucement de la main en lâchant à voix basse.
C'est à moi de veiller sur toi désormais, petit ange ...
Se redressant, le seigneur de Meyrieu alla s'assoir sur le banc immédiatement derrière, immobile et silencieux, protégeant le sommeil de celle sur qui il avait promis de s'occuper en un temps béni qui semblait maintenant bien lointain ...
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Alors que soleil approchait de son zénith, la silhouette d'un cavalier menant un cheval à cru apparu au sommet de l'une des collines entourant. Son allure martiale et le trot soutenu avec lequel il chevauchait eurent tôt fait d'alerter les guetteurs endeuillés du castel et ce n'est que lorsque le nouveau venu fut arrivé à porté de flèche que l'un des soldats pu reconnaitre le blason ornant l'écu accroché à sa selle. Dès lors, l'un d'eux s'empressa d'aller ouvrir les portes et accueillir le seigneur de Meyrieu tandis que les autres reprenaient leur surveillance.
Mettant pied à terre à peine arrivée dans la cour, Walan tendit les rênes des deux chevaux harassés et au poil luisant de sueur au premier venu avant de rejeter le capuchon de sa cape en arrière.
Une après midi et une nuit de chevauchée n'avait guère arrangé son expression, pas plus que le messager envoyé par le vicomte de Crots qu'il avait croisé dans la nuit ou la découverte des traces de sang dans l'église de Briançon le matin même. La mine sombre qu'il arborait depuis la venue du messager à Lyon se trouvait en effet tant accentuée par les cernes et les traits tirés -consécutifs de la nuit blanche et du voyage- que certains des domestiques guillestrins ne purent s'empêcher d'avoir un mouvement de recul à la vue de celle-ci.
Indifférent à cela, à la fatigue et à la douleur de ses muscles, le seigneur de Meyrieu se contenta d'ordonner sans même vraiment s'en rendre compte :
Menez moi à eux.
Nul besoin d'être une grande lumière pour comprendre de quels "eux" il s'agissait et il ne fallu guère de temps pour que Walan soit introduit dans l'église Notre-Dame d'Aquillon, près du chur de laquelle avait été dressé un catafalque où reposaient les deux corps. L'ancien gouverneur remonta rapidement les travées vides. La famille, les amis et la maisonnée devaient avoir quitté les lieux depuis peu pour aller prendre quelque repos après la veillée funèbre, aussi personne ne pu assister à la scène qui vit le seigneur de Meyrieu s'agenouiller devant les dépouilles et faire ses adieux à Francesca-Amalya d'Avencourt et Charles de Macquart. Nul témoin non plus du serment qu'il prononça alors en cette froide fin de matinée, prenant le Très Haut et son prophète à témoin.
C'est en se relevant pour partir à la recherche de sa filleule que Walan distingua un éclat blond sur le premier banc de la rangée. Nul besoin de chercher finalement : recroquevillée sur le siège et endormie, vraisemblablement vaincue par la fatigue et la souffrance, la jeune fille était là. Sans un bruit, le conseiller militaire s'approcha de l'héritière des lieux, dégrafa sa lourde cape et en recouvrit l'adolescente. S'agenouillant, il contempla un moment ce visage si semblable à celui, maintenant blanc et froid, gisant à quelques pas, avant de l'effleurer doucement de la main en lâchant à voix basse.
C'est à moi de veiller sur toi désormais, petit ange ...
Se redressant, le seigneur de Meyrieu alla s'assoir sur le banc immédiatement derrière, immobile et silencieux, protégeant le sommeil de celle sur qui il avait promis de s'occuper en un temps béni qui semblait maintenant bien lointain ...
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