[ La campagne, ça vous gagne ]Adaptation du spot publicitaire « la montagne, ça vous gagne »J'aimais bien la campagne. La campagne profonde, j'entends. Le genre où, si tu croises un fermier en deux jours, tu peux déclarer avoir été plongé en pleine foule. La cambrousse, quoi.
J'aimais bien, parce que c'était calme, reposant. On pouvait réfléchir, se détendre, ce genre de trucs qu'on arrive bizarrement pas à faire en pleine ville. On pourrait croire qu'on pouvait se détendre entouré d'amis, mais non. Y'en avait toujours un pour râler, un autre pour péter une durite, et le dernier, celui sur qui on comptait pour passer une bonne soirée, finit inévitablement par vous servir de somnifère dès qu'il commence à parler de ce qu'il a mangé hier soir au diner, en compagnie de sa belle-mère et de sa grand-tante Marie-Chantal. Alors décidément, j'étais d'avis que pour se détendre, mieux valait être seule.
L'inconvénient, avec la campagne, c'est que, étrangement, ça manque de table. Le roi devrait ordonner de placer toutes les trois lieues un banc et une table, pour ceux qui ont des courriers à rédiger en chemin. « Table de campement », ça sonnait pas mal. Ca, avec une réserve de nourriture et de quoi faire sa toilette. Il y avait de quoi révolutionner le monde du voyage, avec mes idées.
Assise en tailleur, le parchemin sur la cuisse et la langue entre les dents, je tâchai de répondre à Patt. J'avais été transportée - littéralement, puisqu'à la fin de la lecture, je m'étais pris les pieds dans un trou et que j'avais fait un roulé-boulé sur plus d'une dizaine de mètres - en recevant sa réponse. Et je profitai des derniers rayons du soleil de cette fin d'après-midi pour écrire à mon tour.
Chère Patt,
Je suis ravie de te lire, vraiment. Et d'autant plus heureuse de savoir que le vouvoiement et toutes ces politesses futiles entre membres d'une même famille, sont à oublier.
Médire des hommes et papoter, voilà deux activités dans lesquelles je pense exceller ! Ce sont des occupations tout à fait amusantes, et bizarrement, il y a toujours à dire quelque chose là-dessus.
Héléna m'accompagne oui. Nous sommes actuellement... quelque part, entre Saintes et Angoulême. Dans ta région, dans le Périgord ! Réserve-moi un peu de ce pâté de foie d'oie, et un bon verre de vin. Je ne refuse jamais un bon plat, et plus je m'empiffre, mieux c'est. Il m'arrive parfois d'oublier de prendre à manger lorsque je voyage en pleine nature.
J'ai vraiment hâte de visiter le Périgord, et en particulier Sarlat. On dit que c'est une belle ville. Et je suis toute prête à le croire.
A très, très bientôt,
Avec toute mon affection, puisque tu la possèdes déjà,
Al'
Le pigeon de Patt fut employé pour apporter ma lettre. Et avec un large sourire joyeux, je suivis des yeux l'oiseau s'élever dans le ciel vers ma demi-soeur.