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[RP semi-ouvert] Enterrement d'une lumière.

Helena..
Note HRP : Ce RP est l'enterrement d'Alicina La Canéda de Lantwyck. Il est donc ouvert à sa famille proche, à ses amis, et à ses amants.


            J'aurais aimé tenir ta main, un peu plus longtemps.


    Ma soeur. Ma soeur jumelle. Mon âme soeur. La seule qui dans ce monde a réussi à me faire rester plongée dans la réalité aussi cruelle qu'elle puisse être. J'avais manqué de la tuer. Je l'avais blessée. Je lui en avais fait voir de toutes les couleurs. Pourtant? Elle était restée là, à mes côtés. Elle n'avait que très rarement cédé à une rage telle qu'elle m'avait tourné le dos. Je me souviens encore de nos derniers mots échangés. "Tu es la personne la plus lâche que je connaisse". Je l'avais cherché. Je lui avais montré le défaut qui occupait ma carcasse. Elle ne m'avait pas crue, au début. Et puis les réactions s'étant enchaînées l'autre qui occupait mon corps avait fait surface et l'avait cruellement blessée au ventre. Nous nous étions séparées. Simplement. Durement. Sans pour autant s'en vouloir. Je regrettais évidemment de la laisser derrière moi. Et puis après, Arry me quittait. On m'annonçait la mort de mon demi-frère et je dus partir pour Montpellier pour assister à l'enterrement. J'étais donc aller à Montpellier. Montpellier était la ville de mes espoirs et de mes rêves. Une ville que j'affectionnait beaucoup. Mais cette ville était morte dans mon coeur à l'instant où Vector m'avait quittée pour une autre. Au final, je n'assistais pas à l'enterrement de mon frère. Je n'avais pas le courage de me dire qu'il était mort. Je ne savais pourtant pas ce qui m'attendait.

    Je remontais bientôt avec pour seuls bagages mon chat noir et deux ou trois vêtements. La mort dans l'âme, je souhaitais rejoindre ma jumelle. Je ne donnais de nouvelles à personne. J'arrivais dans une ville aux abords de Bordeaux. Je demandais aux passants si ils n'avaient pas vu mon double. On me répondit que non. Et puis, le lendemain, allongé au soleil, je trouvais Pantoufle, le chat roux de ma jumelle. Je le prenais dans mes bras et éclatait en sanglots. Ce n'était pas dans mes habitudes de pleurer et de m'affaiblir. Mais je savais. Je savais qu'il était arrivé quelque chose à ma tendre soeur. A mon unique espoir de cacher le monstre que j'étais. Ma soeur était tout. Je me dirigeais vers la forêt comme si je savais déjà où la trouver. Plus loin, vers une rivière, je voyais un panier retourné, certainement par des sangliers affamés. Le cadavre du hérisson de ma soeur était là, tout près. Je me penchais vers la rivière, effrayée de ce que je pouvais voir. J'avais raison. Ma soeur était là, étendue. Je courrais à ses côtés, délaissant Pantoufle et Chatouille. Sa tête avait été ouverte. Elle était probablement tombée sur une pierre et inconsciente, elle baignait la tête dans l'eau, comme reposée. Je la sortais de cette eau froide. Ma vue se troublait rapidement. Je la regardais, comme si elle dormait paisiblement et je pleurais, sans savoir quoi faire. Je ne pouvais pas la laisser seule. Je ne pouvais pas aller chercher de l'aide. J'avais peur. La nuit tomba sans même que je m'en aperçoive et je n'avais pas changé de place. C'est impressionnant la quantité de larmes que nous pouvons déverser. Je ne sais plus ce qu'il se passa ensuite mais je me retrouvais dans un lit en sachant que le corps de ma soeur était bien pris en main.

    Au petit matin, il me fut impossible d'avaler quoi que ce soit, ni même de parler. Je voulais renier continuellement ce qu'il venait de se passer. Je voulais que ça n'existe pas. Je voulais que ma soeur soit là, à côté de moi, tout près et qu'elle ne m'abandonne pas. Je voulais ne jamais l'avoir laissée seule. Je voulais avoir été là. Mais il était trop tard. Le reproche que m'avait fait ma jumelle dans nos derniers rapports n'aura jamais été aussi utile qu'en ce jour. Je prenais donc mes responsabilités en main comme si mon esprit flottait au dessus de ce corps, sans sentiments, en tant que simple spectatrice de mes mouvements. J'écrivais machinalement à ma soeur aînée, aux amis d'Ali, à Niallan et Vector. Je comptais évidemment prévenir Natacha. Mon amie. J'avais besoin d'elle. Je prévenais Lanceline, et tous ceux qui étaient en mesure de savoir ce qu'il s'était passé.


            Tu sais que j'ai du mal, encore à parler de toi.
            Il paraît que c'est normal, il y a pas de règles à ces jeux là.


Citation:
De moi Héléna La Canéda de Lantwyck,
A vous.

Mes salutations,

Je suis dans le regret de vous annoncer une terrible nouvelle qui nous affectera tous et marquera nos vies à jamais. Ma soeur jumelle Alicina La Canéda de Lantwyck nous a malheureusement quittés. Très certainement un accident ou alors un meurtre, la bonté de ce monde est partie avec elle.

Mes sincères condoléances.

Je vous invite donc à nous rejoindre à Bordeaux pour que nous puissions enterrer ma soeur et que cette âme charitable puisse rejoindre le ciel.

Bien à vous,

Héléna La Canéda de Lantwyck.


    Je n'étais pas moi même en rédigeant cette lettre. Elle sonnait tellement faux. Ma soeur ne méritait pas de mourir. Je voyais déjà cette cérémonie, les gens seraient en noir, il y aurait ses amis. Ils me prendraient dans leur bras, hypocritement. Je devais rester en vie.


            Et tu sais, j'espère au moins que tu m'attends.

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Natcha
    Elle m'avait laissée. Abandonnée. Fait croire qu'elle viendrait, pour finalement ne pas donner un quelconque signe de vie. En un sens, elle m'avait trahie. Je lui en avais voulu. Terriblement. Tous ces jours à l'attendre désespérément. Ces nuits passées à anticiper ses courriers. C'était mon problême. Je m'attachais trop à ceux qui n'avaient rien à faire de moi, pas assez ceux pour qui je comptais... Le temps passant, j'avais fini par la considérer comme morte. Elle m'avait fait trop mal, j'en avais assez. Elle n'existait plus. J'avais parlé d'elle comme d'un pantin lorsque j'avais rencontré Arry. "Elle ne m'écrit plus. Bon, tant pis." Un désintérêt fabriqué, mais vital à ma survie. Et la voici qui me ré-écrit. J'avais envie de brûler sa lettre, d'en faire ressortir toute ma colère, mon ressentit contre elle. Mais, au dernier moment, la flamme entre les mains, la curiosité fut plus forte. Je pourrai, au fond, la brûler après l'avoir lue... Le serpent dans mon oreille avait parlé.
    Et que lis-je? ... Al', morte? ... Je ne pouvais le croire. C'était juste impossible! Pas Al. Elle devait avoir écrit ça pour m'amadouer, me faire la pardonner, oui... Mais non. Léna n'aurait jamais fait ça, elle n'aurait pas utilisé Al', non. Pas Al'. Une autre, oui, bien sûr. Mais pas elle, pas sa soeur. Jamais elle n'avait appelé son nom en vain, jamais elle ne le ferait. J'en étais persuadée. Et ce style, cette écriture... Non. Elle n'allait réellement pas bien. Je pris quelques secondes avant de faire quoi que ce soit. Je laissai mes yeux se remplir de larmes. Une bonté, une joie, partir jamais ne doit... Nous avons tous un temps imparti sur cette terre, je le savais plus que la plupart, mais je m'étais juré de protéger les gens comme elle. Les gens qui rendaient le monde... Meilleur. Et j'avais failli. Je repensais à ma famille, à mes frères et soeurs...
    Al' comptait parmis mes meilleurs amis. Je ne pouvais pas ne pas assister à son enterrement. Lui rendre un dernier hommage. Au moins, regarder mon erreur dans les yeux. Léna? Je ne lui prêterai pas attention. J'honorerai mon amie, puis partirai. Je tentai d'ignorer la boule qui se formait dans mes entrailles. Jamais je ne pourrai ignorer Héléna... Mais l'espoir fait vivre.
Pattricia
            [Sur mon âme la nuit est définitivement tombée...]




La pluie à enfin cessé de tomber. Le convoi avance, personne n'ose parler normalement, on distingue quelques silhouettes de cavaliers qui se penchent vers la monture d'à côté pour murmurer. Certains cous se tordent pour essayer d'apercevoir le couple qui chevauche en tête. La femme aux jades brillants, comme fiévreux, scrute le chemin sans vraiment le voir. Son visage est pâle et ses lèvres serrées en une mince ligne. La vindicative n'est plus que l'ombre d'elle-même, le corps amaigri, raidi par le contrôle qu'elle exerce sur elle, attentive au moindre indice qui tendrait à prouver que les fièvres de la folie vont la reprendre. Elle est droguée, la jeune Eloïce y a veillé.

Celui qui mène la marche à ses côtés est son époux, elle sent son regard inquiet qui se pose sur elle de temps à autre, mais elle reste roide sur sa jument, ne voyant rien ni personne, repliée à l'intérieur, à se torturer de ce qu'elle aurait dû faire ou dire la dernière fois qu'elle avait vu Ali à Paris. L'auto flagellation était son lot quotidien, elle la pratiquait depuis plusieurs mois. Cela avait commencé avec la mort de Souffredoul, puis de Truffe, cela avait continué avec le décès d'Estheban et Mychael, deux de ses jeunes frères et voilà que maintenant son Elfe avait quitté ce monde.

Les jumelles avaient fait irruption dans sa vie en début d'année. La surprise passée de se découvrir un père adultère, la rousse avait été ravie d'avoir des sœurs, des jumelles en plus, si dissemblables de caractère. Ali était son elfe, son rayon de soleil. Cette joie de vivre qui cachait ses blessures pour n'apporter que bonheur et rire autour d'elle. Patt avait des rapports différents avec chacune des frangines, Ali donnait toujours envie de la serrer dans ses bras, Helena provoquait plus la tape dans le dos. Après avoir grandi seule comme une fleur sauvage, plus proche du chardon que de la pâquerette, la vindicative avait retrouvé dans ce duo la complicité qu'elle ne pouvait avoir avec ses frères.

Pourtant elles avaient chacune leurs secrets et leurs blessures. Malgré ce lien ténu, elles ne savaient pas grand chose les unes des autres. Patt était la noble de la famille, collectionnant des seigneuries comme d'autres des vêtements. Il était loin ce jour où la gamine haute comme trois pommes volait pour se nourrir et se lavait quand l'eau des ruisseaux n'était pas gelée. Qu'elle soit dans sa rêverie n'empêche pas le convoi d'arriver en vue des rempart Bordelais. Le convoi s'arrête un instant, et le coche qui l'accompagne également. Dedans se trouvent Roselise, la veuve de Mycha au ventre arrondi, la petite Jade qui babille insensible à la morosité ambiante et Eloïce, la garde chiourme de la rousse.

Devant, les jades fixent la porte est de la capitale. Les chalands vont et viennent sur le chemin, les contrôles vont bon train, la ville périgourdine de Castillon est en rébellion contre son Comté et les gens qui fuient famine et combats viennent s'installer côté Guyenne.


Ça va prendre des plombes pour passer la garde...

Premiers mots prononcés par la rousse depuis qu'ils étaient partis à l'aube...
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RP fofo2 en cours avant le décès de la reine donc pas de deuil.
Argawaen
[T'occupes barbu, je suis bien plus trapu]

Des frères, des soeurs, des retrouvailles, de la joie, puis de la noirceur, de la tristesse, des pertes, des âmes enlevées... Voilà ce qu'était devenu le quotidien de la famille Dehuit de Malemort La Canéda depuis quelques temps. Il se demandait si cela était fait exprès afin de tester leur foy, leur force, leurs liens familiaux. Son épouse avait perdue la boule et elle était sous haute surveillance. Et lui s'inquiétait de plus en plus. Mais il savait la rousse forte, et elle parviendrait à reprendre surface, d'une manière ou d'une autre.
Pour le moment le couple était en tête de convoi, lui observant la rousse de temps à autre afin de s'assurer qu'elle tiendrait le coup.

Le vieil homme s'inquiétait pour une autre personne cependant, sa belle-soeur, enceinte et veuve. Si son épouse avait craquée de la sorte il n'osait imaginé ce que pouvait ressentir Roselise. Le chef de famille allait devoir être patient, à l'écoute, faire preuve de tact et être au maximum présent afin d'aider ce petit monde. Après tout c'était son rôle, et il s'en voudrait de ne pas le faire.
Alors que le convoi progressait tranquillement les contrôles douaniers étaient en train de s'accentuer à l'endroit où ils se trouvaient.
A la remarque de son épouse le Dehuit de Malemort vint poser sa main sur sa cuisse et souriait doucement.


Levant le bras afin que l'on mette en avant les étendards Dehuit et Malemort, surtout Malemort le vétéran comptait bien attirer l'attention afin de ne pas perdre de temps.
Cela semblait fonctionner puisque l'agitation alerta les douaniers et trois d'entre eux s'approchèrent jusqu'à leur convoi.


Famille Dehuit de Malemort La Canéda, en route pour assister à une cérémonie bien trop triste pour en parler.

Le Dehuit de Malemort se pencha et vint murmurer quelque chose à l'oreille du garde tout en glissant une petite bourse d'écus au soldat.
Inclinant légèrement le visage il regardait les douaniers ouvrir la voie sur le côté pour le convoi et regardait son épouse.


Les vieux réflexes mon amour... Mais je ne compte pas déshonorer la mémoire d'Alicina en étant en retard.
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" L'histoire est bâtie sur de l'ironie, les actes des hommes par des jalousies, mais peu d'entre nous ont utilisés leur coeur pour faire ce qui était vraiment juste. "
Niallan
Quand on perd l'aimée, on devient fou, au moins autant qu'on l'a été d'elle. Cette saloperie de lettre écrite de la main de sa frangine je l'avais lue et relue juste dans l'espoir de lui trouver un autre sens. Alors c'était pour ça qu'elle ne m'écrivait plus ? Pas parce qu'elle avait trouvé d'autres bras que les miens mais parce que la Faucheuse lui avait ouvert les siens ? Au final, ça ne m'étonnait même pas, ce monde était décidément trop merdique pour qu'y survivent des femmes comme celle qui aurait pu être la mienne si j'avais été moins con. Mais j'avais été con, tellement que je l'avais laissé partir dans l'espoir qu'elle soit plus heureuse sans moi. J'avais tout gagné, hein. Chienne de vie.

Les pans marron dégueulasse de ma capuche usée puent la vinasse mais il est hors de question que qui que ce soit de sa famille me reconnaisse. Je ne veux ni de leurs condoléances ni de leurs reproches, je n'ai même pas envie de les entendre chialer, mes propres pleurs me suffisant amplement. Alors j'ai fait ce qu'il fallait: des braies noires rapiécées, des bottes en cuir marron usées, une chemise noire déchirée, une cape d'un marron immonde dont la capuche me retombe sur les yeux et pour compléter le tout une fausse barbe qui tombe jusqu'à ma poitrine. Un parfait clochard. Mais ceux qui connaissaient vraiment Ali ne s'en étonneront même pas, elle avait toujours un geste gentil, une attention pour ces miséreux qui donnent l'impression de ne pas avoir pris de bain depuis une décennie. Je continue de me laver, faut pas croire, mais avec la cuite que j'ai pris il y a deux jours mon haleine est pire que celle de Shreck et subsistent sur mes frusques des tâches de provenance non identifiée. Et malgré tout ça je suis sobre, j'ai hésité, tergiversé et finalement j'ai rangé la bouteille de whisky dans ma sacoche. Je vais dire adieu à la femme que j'aime alors autant que je m'en souvienne. Je voulais me souvenir de tout: des nuages gris succédant la pluie à la moindre aspérité de la tombe. De tous les mots que je dirai et de ceux que je tairai. Du nombre de larmes que je verserai et de celles que je retiendrai. Je voulais me souvenir de tout ce que je ressentirai ce jour-là pour que plus jamais je ne me laisse aller à aimer une femme, pour que je me cantonne désormais à les prendre et les laisser derrière moi. Je voulais qu'Ali soit la dernière. Fleur avait été la première et le divorce qui avait suivi nos disputes incessantes m'avait laissé un goût amer en bouche. Léan la seconde sans vraiment l'être mais j'avais déjà morflé. Là, c'était pire. Bien pire.


Il fallait que je réapprenne à vivre sans elle alors même qu'elle était ma raison d'être, il fallait que je me souvienne de comment respirer alors que mon souffle n'était plus calqué sur le sien, que mon cœur batte sans le rythme du sien. Et c'était foutrement compliqué. Même après son départ je n'avais pas l'impression de vivre sans elle, je regardais les étoiles en me disant qu'elle était là, quelque part et que peut-être elle aussi pensait à moi. Je savais qu'elle était vivante, que je n'étais pas seul et ça me suffisait.
Là, je n'avais plus rien. Rien du tout. Elle était partie, elle était morte. Et moi j'étais encore là avec toutes mes conneries et mes regrets à porter. Je vais même vous faire une confidence, les types bodybuildés que vous congratulez parce qu'ils portent de lourdes charges ne sont que de foutus petits joueurs. Il n'y a rien d'aussi lourd à porter que la souffrance d'avoir perdu la femme aimée. J'y pense chaque jour à chaque heure de la journée et même lorsque je bois assez pour oublier comment je m'appelle son visage danse encore devant mes yeux. Son sourire dont j'aimais tellement à être à l'origine, ses yeux dans lesquels je n'avais de cesse de perdre les miens, sa tignasse rousse dans laquelle j'aimais accrocher mes doigts... Tout ça, j'avais beau boire jusqu'à me faire vomir, ça restait. Elle était toujours là, dans un coin de ma tête. Je méprisais toutes les rousses que je croisais, ignorais les blondes et moquais les brunes. Et, toujours, lorsque je finissais par en sauter une, je fermais les yeux et imaginais que c'était elle, sur moi, contre moi. Et puis la nana poussait des cris qui n'étaient pas les siens et ça me foutait hors de moi, souvent je les poussais et me barrais sans finir mon affaire et toujours j'étais exécrable. Je les détestais parce qu'elles n'étaient pas elle et je me haïssais parce que je ne voulais qu'elle.


J'avais profité qu'un convoi interpelle les douaniers pour pénétrer dans Bordeaux, j'avais bien évidemment autre chose à faire que décliner mon identité et les raisons de ma venue ici. D'ailleurs ça aurait donné quoi ? « Eh, salut les gars, moi c'est Niallan et je suis habillé comme la pire des loques parce qu'en plus d'en être une je viens enterrer la femme que j'aime. Enfin, enterrée, elle l'est déjà, je viens juste pleurer sur sa tombe. ». Non, décidément j'avais tout sauf envie de leur parler. Je traçais ma route en faisant fi des éventuels regards qui pouvaient se poser sur moi, direction le cimetière. Je ne connais pas Bordeaux et pourtant j'ai marché d'une traite jusqu'à l'alignement des tombes pour finalement trouver la sienne aussi facilement que j'aurais déniché une bonne bouteille de vin parmi des piquettes. Il y avait peut-être un guignol faisant office de prêtre devant ou peut-être que c'était juste un type aussi paumé que moi. Je pouvais aussi bien être le premier arrivé que le dernier, j'avais perdu toute notion du temps depuis que la lettre de Léna s'était retrouvée entre mes mains, tout ce que je savais c'est que c'était à Bordeaux et que j'allais en baver.
Je n'avais ni fleur ni mot d'amour, j'avais juste un caillou. Un caillou en forme de cœur sur lequel Ali avait gravé nos deux prénoms. Vous pouvez dire ce que vous voulez à savoir que c'est niais, enfantin et tout à fait ridicule mais je vous emmerde bien cordialement. Elle était comme ça Ali, pas niaise ridicule et enfantine, non, elle était simplement la fraîcheur-même, elle n'avait pas d'à priori et découvrait toujours tout avec le même émerveillement. Ce caillou était à l'image de notre histoire: simple et belle. Ce caillou je viens de le déposer sur sa tombe, les genoux dans la boue, les mains crispées sur la pierre de la tombe.

T'aurais peut-être préféré que je le garde mais si je le perds un jour, je ne me le pardonnerais jamais. Et puis tu sais, j'ai pas besoin de ça pour penser à toi... J'avais pas non plus besoin d'un autre tatouage pour savoir que je t'avais dans la peau.

Sans déconner, j'avais vraiment dit ça ? Je voulais me souvenir de tout ce j'allais lui dire et j'étais vraiment en train de lui causer d'un caillou et de tatouages qu'avaient réalisé deux autres femmes ? La gorge nouée, j'effleure son nom gravé dans la pierre du bout des doigts.

Alicina La Canéda de Lantwyck, ça fait tellement sérieux tout ça... Pour moi t'étais juste Ali, mon Ali. Et tu serais devenue Alicina Ozéra la Canéda de Lantwyck si j'avais été moins con. T'imagines, on aurait eu une petite blonde et un petit roux, ou l'inverse. Ils m'auraient appelé Papa et je les aurais vus grandir, je leur aurais appris à marcher, je les aurais fait tournoyer dans mes bras. Et toi, toi tu nous aurais regardé en riant et t'aurais dit...

T'aurais dit que tu m'aimes mais tu ne me le diras plus jamais. Plus jamais je n'entendrai ces deux mots passer la barrière de tes lèvres, plus jamais tu ne me les chuchoteras à l'oreille après l'amour, plus jamais tu ne me les diras au matin pour me réveiller, plus jamais tu ne les hurleras en taverne juste pour que je me lève et que je cours t'embrasser. D'ailleurs, jamais plus je ne t'embrasserai, jamais plus je ne te tiendrai dans mes bras, jamais plus je ne te toucherai. C'est fini, terminé. FI-NI. Et c'est là que je m'effondre, là que mon front heurte la pierre froide qui sera désormais ta demeure, là que mes ongles se plantent dans la terre froide, là que je hurle ma douleur entre mes dents. Parce que c'était toi, toi et personne d'autre que toi. Toi qui serais devenue ma femme, la mère de mes enfants. Toi qui étais tout et qui n'es plus.

T'avais dit que me laisserais jamais, que tu reviendrais... T'avais dit que si je te répondais, si je revenais … on pourrait recommencer. Je suis revenu Ali, je suis là maintenant... Et toi non... Y'a plus que moi.

Est-ce que j'aurai vraiment envie de me souvenir de ce monologue stupide, de ces vaines pleurnicheries ? De ces sanglots qui me secouent, de cette gorge qui n'en finit plus de se serrer ? D'un mouvement rageur j'arrache la fausse barbe que j'avais collé et envoie valser la cape au loin.

Y'a plus que moi, Ali ! Tu m'as laissé tout seul comme un con ! Tu m'as abandonné alors dis-moi ce que je dois faire maintenant, hein, dis-moi ! J'ai plus de fille, plus de femme, plus rien du tout ! Et je t'aime et ça me tue, je te promets que ça va me tuer. Je voulais pas tomber amoureux de toi, bordel je voulais pas. Mais je suis tombé fou amoureux de toi, j'y pouvais rien, je contrôlais plus rien... Tu m'as retourné la tête, complètement. Et aujourd'hui j'y arrive pas sans toi alors je crois que je vais aller faire une petite baignade... Et je vais venir te retrouver, d'accord ? Attends-moi juste un tout petit peu, je te jure que j'arrive.

On y était. Pourquoi je n'y avais pas pensé avant ? Ce fleuve passant dans Bordeaux ou cette rivière, j'y connais rien. Machinalement je me redresse, adresse un sourire en coin à la tombe de ma rousse et tourne les talons. Je ne vois pas plus les passants qu'à l'aller, je ne vois que son visage illuminé d'un sourire. Celui qu'elle faisait quand elle me voyait, elle sait que j'arrive, c'est évident.

[Je marche vers le bout tout seul
Pour tomber dans l'eau comme une pierre
Gelé jusqu'à la moelle des os
...
Oh mon Dieu, je vois comment tout se déchire dans cette profonde rivière *]



*Traduction paroles Agnes Obel - Riverside

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Plumenoire
Lorsque Plume appris la nouvelle, ses yeux se fermèrent un instant … Elle refusait de passer en revue la triste liste des décès, des mauvaises nouvelles, de ces heures malheureuses qui s’abattaient sur sa famille, encore, encore et encore.

Elle est à cheval, sur Okan, elle ne le lâche plus, même si son père, sa mère, n’aiment pas, c’est ainsi, elle restera à cheval, habillée à la garçonne, qu’importe. Evil trottant à ses pieds, ou dans une charrette selon son état de fatigue, suit également le convoi.
Le trajet n’en finit pas, et les embouteillages non plus …

La louve soupire de nouveau et s’approche de son père histoire de ne pas être séparée de sa famille de trop …


Quand est ce qu’on arrive ? Faut aller faire de la place pour pouvoir passer ? Nan par ce que j’vais leur faire bouger leurs charrettes vitesse grand V moi !

De bonne humeur la Plume … De Bonne humeur …
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