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Quand tout devient noir...

Eliance
Eliance vote incontestablement pour l'amende honorable. Question de naïveté, tout ça. Toujours est-il que pour elle, il n'y a plus trop péril ni perversité en la demeure, vu que 22 a baissé les yeux. Un soupire achève ce qui semble être pour elle une nouvelle épreuve dans ce dur monde où les gens ont des yeux et s'en servent. Elle se relâche un peu, les épaules se détendent, même si le bras barre toujours son buste. Il faut bien avouer qu'il est obéissant, pour un pervers ou un blaireau, au choix, le 22.

hm... merci. Non, parce que j'vais commencer à croire que vous l'faites exprès d'être là quand... bref.
Y a pas débat. Y a rien, d'ailleurs. Vous avez raison. On oublie.


On a déjà dit qu'elle est naïve ? Oui ? C'en est désolant, à ce stade, je sais. Mais elle y croit au 22 qui fait de belles promesses d'oubli. Autant qu'elle a cru que son premier mari ferait son bonheur, comme promis par son père, que son second lui resterait fidèle, malgré les apparences sans équivoques, que...

Sa seconde main détentrice de galet se rabaisse lentement. Mais effectivement, toutes ces émotions soudaines et très inattendues ont lustré – si on peut dire ainsi – sa paume d'une légère sueur, rendant le projectile glissant à souhait. Et ce n'est pas pour attérir sur une quelconque partie de l'anatomie du voyeur qu'il s'échappe malencontreusement des doigts ménudiérien, mais bien pour s'écraser lourdement sur le pied nu de la propriétaire de la main, suivant une trajectoire toute newtonnienne.


Aïe !

Oui, ça fait mal, un galet sur un petit orteil. Le bras protecteur de nudité descend à la rescousse du blessé pour le frotter abondamment. L'équilibre est précaire, sur une seule guibole, alors la roussi-blonde sautille pour tenter de rester digne ou à peu près.

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Cmyrille
Je vous ai déjà parlé de la théorie selon laquelle un homme ne peut stocker qu'un nombre limité d'images dans sa mémoire ? Ben la sienne est remplie d'images de son ex. C'est pas ce qui se fait de mieux pour la santé du cigare. Du coup il a besoin de les remplacer. Alors "on oublie", c'est une notion assez vague à ce moment là. Il se dit surtout que ça fera une image de plus à réveiller les soirs de solitude.
Les yeux toujours braqués sur le cuisseau duveteux et hérissé d'un début de chair de poule, il est aux premières loges pour voir le galet, qui il y a encore un instant risquait de lui fendre le crâne, s'écraser sur un orteil qui passait par là. Et là commence une danse assez particulière. N'étant pas spécialiste en animaux, il se demande à quelle créature stupide la cheffe a emprunté cette parade amoureuse. Mais en tout cas ça semble marcher car elle provoque chez lui un rire gras et franc. ... Oui bon d'accord, il se fout allègrement de la gueule de la cheffe. Mais c'est l'jeu ma pauv' Lucette. Fallait pas faire la maline avec un galet.
Il se relève avec difficulté, secoué de soubresauts et d’éclats de rire.



- Arrêtez de gigoter comme ça cheffe, vous allez vous vautrer.
A moins que vous cherchiez à séduire un mâle grue. Ou une autre bestiole du genre...




Sortie de la Gascogne IG ce soir, c'est donc ma dernière intervention.

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Eliance
Elle souffre le martyr et il se marre. Un regard noir tout droit sorti des orbites ménudiériens se braque sur lui. Certes, elle a déjà souffert bien plus, depuis le début de sa vie, en terme de douleur corporelle, mais un orteil amputé ou presque, c'est douloureux. Alors, pour rendre le comique utile au moment, elle se saisit d'un bout de son bras pour se stabiliser. Et se gêne pas pour le serrer à qui mieux mieux.

C'pas drôle !

D'un point de vu distant, ça l'est tout de même. Les doigts massent le pauvre organe endolori. Plus de peur et de simagrées que de mal tout de même. Pas une goutte de sang. Pas un ongle retourné. Pas un os brisé. La danse de la cigogne estropiée a cessé, la stabilité est retrouvée grâce à la béquille improvisée.

C'est vous, la grue.

Ce qui, de base, doit être une insulte pourrait être perçu différemment. Mais elle souffre, rappelons-le. Et sa phrase a double-sens n'en a qu'un seul en sortant de sa bouche.

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Eliance
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    Midi du 17 juillet
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Une Ratiboisée erre comme une âme en peine entre les maisons de Labrit. Elle ne cherche pas particulièrement l'ombre des habitations. Elle ne cherche personne, d'ailleurs. Elle ne pense à rien en particulier. Elle est juste seule. Elle s'ennuie. Et c'est les gravillons se trouvant sur son chemin qui s'en trouvent chafouins. Régulièrement culbutés, ils roulent sous l'impulsion des bouts de chausses ménudiériennes pour s'en aller plus loin. Mais plus loin, les chausses les retrouvent et leur font tâter à nouveau leur bout. Ils partent alors encore plus loin. Et encore plus loin, rebelote.

Eliance s'acharne sur ces cailloux qui n'en demandent pas tant. Par ennui. Lassitude. Elle a l'humeur maussade. Et les mains liées dans son dos par les doigts pâles entrelacés. Ses cheveux repoussent. Un peu. Lentement. Ils lui tombent à présent en dessous des oreilles dans un flot de boucles qui se battent en duel au moindre coup de vent. Mais ça lui rend pas le sourire. Elle s'en fiche, de sa tignasse d'antan. Celle qu'elle voulait retrouver pour Elias. Il est pas là. Il est loin. Il vient pas. Elle se souvient régulièrement des paroles de 22, qu'elle compte pas pour lui. Que si il se souciait d'elle, il serait là. Si il est loin, c'est qu'il s'en fout. Elle se souvient aussi de ce qu'Atro pense de 22, qu'il n'en a cure, du Elias. Ce qu'il veut, c'est le corps de la rousse pour une nuit ou quoi. Les pensées d'Eliance balancent d'un avis à l'autre, sans réellement savoir qui est dans le vrai, qui ne l'est pas. Elle est juste au milieu, avec son esprit pas vif.

Mais surtout, ce qu'elle sait, c'est que Elias lui manque. Que 22 lui manque. Que Diego lui manque. Que tous sont partis. Ou du moins pas revenus. Elle attend une lettre de Diego qui n'arrive pas. Elle attend des nouvelles de 22 qui reste silencieux. Elle attend le débarquement d'Elias qui reste loin. Et elle, attend. Elle attend simplement. Tout et rien. Elle regrette les journées passées à côté d'Elias, à le regarder travailler. Elle regrette les nuits dans les bras protecteurs de Diego. Elle regrette les discussions enflammées d'avec 22. Elle se surprend à s'imaginer un présent différent. Un où Diego serait encore là, avec elle pour seule femme. Un autre où elle aurait dit oui à 22. Un autre où elle ne serait jamais partie de chez Gontrand.

Les pensées sont frivoles, furtives. Elles s'envolent comme elles sont venues dans la caboche ménudiérienne. Mais tout de même, celui vers qui elles se tournent le plus est le vil 22. Eliance repense... à tout. Elle rigole au souvenir de quelque débilité énoncée, elle rougit au souvenir de certains davantage osés. Et elle marche, bottant inlassablement les gravillons du bout de ses chausses, avec un manque constant dans l'âme.

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