Afficher le menu
Information and comments (0)

Info:
Unfortunately no additional information has been added for this RP.

[RP] Implication et "ex"plications

Wallerand
Vous êtes sûre que vous voulez marquer ça ? Il n’y aura pas que des nobles…
Je sais bien, mais c’est la manière respectueuse.
Bon… Va pour cette formule-là alors.
Ou alors essayons autre chose. Je vais trouver... Je l'ai sur le bout de la plume.


Ca faisait un temps infini, du moins Wallerand en avait-il l’impression, qu’ils étaient attablés chez Adalarde, côte à côte, devant un feuillet, une plume et un encrier, une chope de bière chacun à portée de main. A vrai dire, le Prévôt n’avait guère de difficultés à écrire courriers de recrutement, laissez-passer et autres dossiers de plainte, quand il ne s’agissait pas de textes législatifs, mais il se trouvait en difficulté quand il s’agissait de rédiger une invitation, exercice qu’il n’avait guère pratiqué au cours de sa vie. Avait-il seulement eu des choses à célébrer au cours de sa vie ? Le cursus de son frère, mais alors c’était Père qui s’en était chargé. Le moment où il avait été présenté officiellement comme l’héritier de l’affaire… Mais Père avait également tout organisé, avec Mère. Et en dehors de ça… Il y avait eu les fêtes, certes, mais au final, c’étaient les liesses populaires plus que des célébrations privées qu’il avait connues. Alors cette invitation, même si elle traduisait un événement des plus heureux, était une sorte de grande première pour le Beauharnais, qui se trouvait bien plus désemparé que sa maîtresse. Et l’œil goguenard et la gouaille rieuse de l’aubergiste étaient là pour le lui rappeler à chaque instant, car elle tournait autour du couple dans un amusement évident aux tergiversations que l’un induisait et que l’autre tentait de réduire. Elle intervint finalement :

Z’avez pas fini de chipoter, les z’amoureux ? T’avais moins d’soucis l’autre jour, l’Wallchiant, pour répondre à la Castelc…
J’étais en rogne. Je suis rapide quand je suis en rogne.


Et flûte. D’une, Adalarde avait lâché le morceau, malgré l’injonction de la fermer au sujet du vif échange épistolaire qui avait eu lieu quelques jours plus tôt, et un regard noir accueillit cette joyeuse indiscrétion. De deux, il avait admis avoir écrit. Youhou. Ca, c’est du talent ! Evidemment, Bella avait levé le nez, comme piquée par une guêpe, et ce dès la première syllabe d’un certain nom. Et aussitôt, la jeune femme lança :

Attendez… Vous avez écrit à Sashah ?

Et zut. Raté. Il n’avait pas coupé Adalarde assez vite… Ca sentait le grand moment de solitude, à très court terme. Il avait évidemment gardé pour lui la correspondance récente qu’il avait échangée avec Sashah, d’abord parce qu’il y avait réglé ses comptes, ensuite parce que certaines insinuations sur ce qui pouvait se raconter auraient, à tous les coups, atteint Bella. Et ça, ce n’était pas la peine. Pas pour ça. Et même si les méchantes langues se feraient un plaisir de baver abondamment sur le sujet, il ne tenait pas du tout à lui infliger ça, surtout de la plume de son ancienne compagne. Mais maintenant, l’atmosphère s’alourdissait, et à coup sûr il aurait à rendre des comptes. Quitte à le faire, il préférait avoir tous les atouts dans sa manche et toutes les armes à disposition, même s'il ne devait en faire qu'un usage modéré. Aussi, s’étant levé, conclut-il, laissant leur dû sur la table :

Adalarde, ta marmite nous attend chez moi. Merci pour la bière. Venez, ma Dame.
Mais...
Je suis sûr que vous avez un creux. Venez.


Bella ouvrait déjà la bouche pour protester, mais son amant avait déjà posé la main sur son coude et la guidait fermement vers la porte. La jeune femme aurait pu le bousculer, crier, EXiger des EXplications, immédiatement, mais son rang le lui interdisait. Soit. Devant Adalarde, elle serait assez en confiance pour le questionner, mais Adalarde était une commère et il n'avait pas besoin que toute la Gascogne soit au courant. Alors, la comtesse se retint d'EXploser. Quelque part, elle était piquée au vif de savoir qu'il avait entretenu une correspondances avec son ex – même si la l'EXacte réalité des échanges était tout autre ! - et de l'apprendre par une tierce personne. De qui se moquait-il ? Pourquoi écrivait-il à celle qui lui avait fait tant de mal ? Dans la rue, la jeune femme qui arborait déjà la mine du "fais gaffe à ce que tu vas dire parce que le retour de bâton va arriver plus vite que tu ne le croyais" ne se laisserait pas aller. Le sport commencerait réellement une fois dans l'appartement de la rue des Pendus. Et Wallerand s'y préparait alors qu'ils parcouraient d'un pas rapide les rues montoises. La mine pincée, le regard noir, la démarche raide, elle n'avait aucun mal à suivre le pas du Beauharnais, pressée d'avoir le fin mot de l'histoire. Et évidemment, ça lui avait paru des heures pour arriver jusqu'à l'appartement du jeune homme, qu'ils montent les escaliers, qu'il leur ouvre la porte, puis la referme, dans un bruit mat. Se tournant vivement vers lui, le fixant dans les yeux, la blondissime réitéra sa question. Son ton montait dans les aigus, au fur et à mesure de sa tirade, alors que sa fureur augmentait.

Alors comme ça... vous entretenez une correspondance avec … Elle ? Malgré tout ce qui s'est passé ? Et dans mon dos, qui plus est !
_________________
Christabella
Furibarde, c'était le mot. La blondissime était furieuse, et pas qu'un peu ! Et des réponses, elle voulait en avoir ! Ecrire à son ex-compagne... Pourquoi ? Regrettait-il ? Ne suffisait-elle pas ? - Qui a dit jalouse ? Je vous ai entendu, là dans le fond!! - Elle ressentait un sentiment qu'elle n'avait jamais vraiment connu jusque-là. Un peu de colère, teintée de soupçon, de peine, et d'une pincée de trahison. Et de la jalousie, évidemment. Elle ressentait cette satanée petite boule au fond de la gorge, comme un nœud coulant... Et Wallerand, qui sentait venir le coup de bâton après l’entrée en matière de la jeune fille, répliqua, manifestement piqué :

Mais ça ne va pas, non ? Je lui ai juste écrit pour lui dire que je ne voulais pas qu’elle se mêle de ce que Gerei ferait en tant que mon témoin !

C’est ce qu’on dit, n’empêche que vous lui écrivez toujours !

Je lui ai écrit deux lettres… Trois, si vous incluez le mot pour relancer les membres du parti.


Aux membres du parti, ah ouiche, la belle excuse ! Parce qu'elle faisait encore partie du parti, après son dernier mandat si efficace ? Manquerait plus que ça qu'il ait invitée la Castelcerf aux noces!

Eh bien, c'est deux de trop ! Qu’est-ce que vous pouviez bien avoir à lui dire ?

Crever des abcès ! Ca vous va ?

Non, ça ne me va pas ! Vous-lui-a-vez-é-crit !


Elle avait martelé chaque syllabe en piochant du talon par terre. C'était pas bien compliqué de voir où était le problème, m'enfin ! Deux étages plus, bas, le savetier, Guilhem, une aiguille en os dans la bouche, une chausse et sa semelle dans les mains, observait le plafond. Ca chauffait chez le Wall'chiant, il allait prendre cher ! Il ne comprenait pas tout ce qui se disait, mais essayait de se concentrer. Adalarde lui filerait un canon s'il pouvait lui raconter quelques potins... Mais il ne pouvait pas augurer de la figure désabusée du Beauharnais, de ses yeux levés au plafond, un bref instant, comme pour le prendre à témoin qu’il trouvait cette réaction de sa future fiancée totalement disproportionnée. D’accord, il avait écrit, mais il n’y avait pas mort d’homme ! Et ce n’était même pas pour des mots doux ou autres courtoisies, même pas pour prendre des nouvelles dont, au final, il se moquait éperdument (seules des nouvelles de Salvelinus, à la limite, auraient pu l’intéresser, car il avait gardé une certaine affection pour le garçonnet), non, c’était pour mettre des choses au clair. Aussi rétorqua-t-il, emporté par une exaspération croissante :

Et alors ? Vous me parlez bien de Milandor parfois !

Oh ! La mauvaise foi ! Oh !! Elle leva les yeux au ciel, exaspérée.

Mais il est MORT, lui !

C’est sûr, elle, elle ne l’est pas.

Pas encore,
gronda-t-elle entre ses dents. Non, mais là, il exagérait franchement ! Comparer un mort à une ex toujours vivante ! Comme si feu son époux pouvait sortir de son catafalque pour demander des comptes à son amant ! Et, en réaction à l’absurdité qu’il voyait dans la colère de sa maîtresse, Wallerand poursuivait :

Elle a juste raconté combien j’étais un homme rempli de tares à mon propre filleul !

Et quand bien même ? Une femme déçue et aigrie, ça a la dent dure ! Pourquoi lui donner une importance en répondant aux bêtises qu'elle pond ?

Et alors ? Vous n'écrivez à personne sans que je le sache ?

Pas à un ex ! Pire ! Vous avez fait ça dans mon dos ! Pour que je l'apprenne de la bouche d’une autre ?

Enfin, une autre ! Adalarde ne sait même pas ce qu'on pouvait bien s'écrire ! Bon. Je vois. Vous faites votre mauvaise tête, alors aux grands maux les grands remèdes…


Un soupir. Le Beauharnais se sentait coincé, mis au pied du mur, et soudain vint l’idée qui allait lui sauver la mise, il le sentait, il le savait ! Ces lettres, ces échanges de mots durs, il ne les avait pas inventés, et il allait le prouver de la manière la plus incontestable qu’il soit. A la Chancellerie, Bella avait forcément croisé des documents de la main de Sashah, elle pourrait constater que les lettres étaient authentiques. Il grommelait tout de même en cherchant dans une liasse de feuillets, avant de lui tendre deux courriers qu'elle prit, soupçonneuse, le cœur battant. Pourquoi se mettre dans un état pareil ? Elle avait peur de lire quelque chose qui lui ferait beaucoup de mal, même si elle ne pouvait croire tout cela.

Tenez. Lisez et dites-moi si nous avons l’air en si bons termes. Ex ou pas ex, dans ce cas, c'est comme si j'écrivais à... Tenez, à...

Wallerand cherchait, marchant de long en large, pendant que Bella commençait à lire les plis, elle releva le nez, exhalant avec colère un :


À ??? Cherchez!!

Un instant, je fais un choix.... Sowen ! Voilà, comme si j'écrivais à Sowen... Ou à Laureen après qu'on se soit accrochés, parce que c'est exactement pareil !

Qui? Qui est cette Sowen ? Encore une ex ?


Wallerand leva les yeux au ciel. Avoir une relation avec Sowen ! Il n’aurait plus manqué que ça, et Dieu lui était témoin que pareille diablerie était bien loin des mœurs du Beauharnais, même si elles avaient été légères en un temps qui s’éloignait de plus en plus. Et son agacement était sensible quand il répondit, appuyant sur le dernier mot :

C'est un homme...

Scrogneugneu...

Je l'ai fait mettre en procès pour manque de présence au sein du Conseil ducal, il a disparu peu après... et apparemment, il en avait gros sur le cœur, alors vous imaginez qu'entre lui et moi c'est pas l'amitié folle...

N’essayez pas de changer de sujet!!

Et d’ailleurs, si Sashah et moi avons rompu, ce n'est pas non plus par hasard !

Humpf.

Bref, lisez, au lieu de vous monter le bourrichon, vous verrez à quel point elle m'aime, ça devrait vous rassurer...

N’empêche que vous lui écrivez.

Vous allez voir pour quel résultat... J'ai peut-être même le brouillon de mes lettres, si ça peut vous rassurer.


La blondissime prit une inspiration, un peu de courage, et entreprit la lecture du pli... Pour s’occuper les mains, Wallerand reprit sa fouille dans ses propres affaires, mettant de côté tel ou tel feuillet, pour usage immédiat ou ultérieur. Ca lui occupait les mains. Mais bientôt ce ne fut plus suffisant, alors il se mit à faire les cent pas, comme il en avait pris l’habitude au Guet. Un problème se posait-il à lui ? Il était mieux debout qu’assis pour y réfléchir, et la déambulation semblait de nature à lui éclaircir les idées.
_________________
Wallerand
Wallerand faisait les cent pas, donc, histoire que sa colère redescende un peu. Après quelques secondes de lecture, déjà, la jeune femme haussa un sourcil, découvrant peu à peu la plume acerbe de l'ex de son amant. Elle tiqua à la mention de "courriers étalés à la vue de tous", puisqu'elle ne les avait jamais vus. - En effet, lesdits courriers avaient été jetés au feu le lendemain de leurs retrouvailles... - Et ce serait étonnant de la part de Wallerand de placarder des courriers sur des panneaux, ce n'était pas du tout son style. Elle gronda littéralement à la mention de "tarée de marraine", qu'elle répéta dans ses dents et ses yeux jetaient des éclairs, alors qu'elle lisait la suite, que Sashah se présentait comme la pauvre femme délaissée qu'on traînait dans la boue par vilénie. Parce que s'asseoir sur les genoux d'autres, et leur dire qu'elle envisageait de prendre un amant pour combler les absences d'un Wallerand très occupé au conseil était acceptable de la part d'une femme de son rang, déjà fille mère ?

Non… Mais elle se prend pour qui?
Pour mon ex, je dirais.
Parce que vous envisagiez de l’inviter aux noces? Pas question! Vu ce qu elle écrit elle est encore dingue de vous!
Dingue de moi ? Vous me la baillez belle... Elle ne viendra pas, de toute façon, alors qu'importe ? Mon message était seulement courtois... Je veux dire, elle me félicite, espère que vous êtes la femme parfaite pour moi... Je n'allais pas l'envoyer sur les roses, quand même !


Principe récurrent du Beauharnais : ne pas mordre le premier. Et c’était dans cette optique qu’il avait répondu… Après tout, n’était-ce pas chose naturelle que de remercier, même une personne qui n’était pas son ami, pour des félicitations ? Même Percius avait agi de la sorte en réponse aux vœux de Wallerand pour son mariage… Ce n’était que de la courtoisie, qu’y avait-il de si difficile à comprendre là-dedans ? Aristote, que ça pouvait être exaspérant, une femme, comme Bella s’empressa de lui démontrer :

Et vous... Vous ressentez encore quelque chose ?
Mais évidemment que non ! Sinon qu'est-ce que je ferais là, sinon, à essayer de vous montrer que vous vous prenez la tête pour rien ?


Bella se mordit la lèvre, car il ne comprenait pas où elle voulait en venir. Wallerand secoua la tête. C’était n’importe quoi… Tout ça pour quoi ? Pour quelques pauvres lettres à peine courtoises et, surtout, sans aucune trace de ce qu’il avait bien pu ressentir ? Certes, Bella n’avait pas les brouillons sous le nez, mais vu la teneur des courriers de la Castelcerf, il y avait peu de chances qu’il lui ait envoyé des douceurs…

Et..
Et quoi ? Voyez ? Rien à craindre d'elle !
Je ne comprends pas.
Quoi donc ?
Pourquoi vous lui avez écrit le premier... Pour la campagne, alors que... Vous m’avez dit ne pas avoir confiance en elle, vu sa prestation calamiteuse au conseil...
Je n'ai pas fait attention, j'ai fait des courriers à la ronde.


La jeune femme s'étouffa de surprise. Pas fait attention...

Pardon? Vous plaisantez?
Eh bien, non, je les ai envoyés à... Pfiou ! Tellement de gens que je me demande si certains n'ont pas disparu. J'ai fait tellement de copies que j'ai perdu le compte...
Vous avez écrit "Sashah" en en-tête, et sur le rouleau, sans faire attention?
Il semblerait bien, surtout que je savais qu'elle avait déménagé…


Le Beauharnais grommela, sentant venir la soufflante. Emporté par son élan, il avait encore laissé entendre qu’il savait des choses sur Sashah ayant trait à ses agissements récents… A tous les coups, elle allait le lui reprocher, ah oui ! Il le sentait venir. Bella avait l'air agacée et intriguée. Fronçant les sourcils, Wallerand repartit aussitôt avec fougue :

Avant que vous vous imaginiez des choses, je l'ai su non pas parce que je la fais suivre MAIS parce que j'ai vu un jour dans les registres de douane de Dax que son nom n'apparaissait plus.

Mais la jeune femme secoua la tête, quelque chose la chiffonnait dans ces deux lettres...

Non… Il manque quelque chose.
Quelque chose comme quoi ?
Une lettre. Une autre lettre.


Wallerand grogna. Oui, une lettre. Deux, en fait. La lettre qu’il avait reçue en premier, avec cette mention du témoignage de Gerei auquel Sashah entendait prêter la main, et la toute dernière. Pourvu qu’il n’ait pas à la sortir, celle-là… Aussi lâcha-t-il :

J'ai répondu, elle a répondu et on s'en est arrêté là.
Elle ne répond pas à la missive pour le parti. Surtout si c'est le message impersonnel que j'ai pu lire.


Et là, c’est le drame. C’est définitif : il se rend compte qu'il s'était enferré.

Si, justement, c'est de là que c'est parti.

Bella, piochant de nouveau du talon sur le plancher, nerveuse et impatiente, le fixait dans les yeux. Elle ne pouvait s'empêcher de renifler quelque chose de louche, comme un animal sauvage sentait un incendie au loin. Incrédule, elle aurait préféré tourner les talons, ne pas creuser... Mais c'était plus fort qu'elle.

Vous avez osé écrire à elle plus personnellement en la provoquant? Vraiment ? Dites-moi... Honnêtement, il n’y a que ces deux lettres?

Wallerand, au pied du mur, fouilla de nouveaux dans ses papiers dans un soupir. Vraiment, il détestait cette sensation. Elle n’avait pas pu s’en empêcher, non, il lui fallait tout savoir, boire la coupe jusqu’à la lie, et pas seulement pour elle, pour eux deux. Pourtant, ce ne serait pas pour son ancienne compagne qu’il mentirait à Bella, ça non, aucune chance, aussi répondit-il avec une certaine résignation :

Deux autres. Celle qui a mis le feu aux poudres, en réponse à la lettre au parti, et une dernière, après ces deux-là, à laquelle je n'ai pas répondu.

Bella sentit sa colère et sa peine monter d’un cran. Il lui avait menti... Le Beauharnais soupira et tendit les deux feuillets incriminés, que la blonde lui arracha avec vigueur. Wallerand haussa les épaules et reprit sa déambulation. Connaissant leur contenu, il ne pouvait que se douter que ça passerait mal.
_________________
Christabella
Bella parcourut des yeux la première réponse de la Castelcerf. Déjà bien énervée, elle bondit aussitôt.

Faux témoignage?
Façon de parler...
Scrogneugneu !
… Et j'ai été un peu sec dans ma réponse à ce propos, d'ailleurs, je crois...


Puis, parcourant le dernier pli, Bella se sentit atterrée. Très peinée, en lisant un passage particulier. Comme vaincue. Elle se laissa tomber assise sur le lit, tandis que la détresse pointait dans sa voix redevenue douce...

C’est ... Vrai?
Que j'ai été sec ? Ou que j'ai demandé à Gerei d'être mon témoin ?
Le titre ... a une importance... Pour vous?
Quel titre ?


Wallerand n'avait pas saisi de quoi elle parlait, et pensait simplement – car il ne voyait guère que ça – qu'il s'agissait du titre du tract de recrutement. Aussi, un poil agacé, il commença son explication. Vraiment, elle irait chercher la petite bête jusque dans le détail le plus insignifiant !

Elle parle bien du titre, mais c'était juste une formule stupide que j'ai entendue je ne sais plus où… « Retour vers le futur »... L'idée m'avait bien plu, c’était original.

Fut-ce une révélation ou le souvenir de l’allusion à cause de laquelle il aurait largement préféré ne pas lui montrer cette dernière lettre, restée d’ailleurs sans réponse, qui lui fit réaliser de quoi Bella parlait ? Tombant des nues, il coassa :

Attendez... Le titre, comme votre titre ? Mais qu'est-ce que ça peut bien me faire ?

Bella resta pensive, avant de déclamer le passage d'une voix atone, provoquant un nouveau secouage en règle de la tête du Beauharnais. Comme s’il avait encore, maintenant qu’il avait compris de quoi elle lui parlait, besoin qu’elle lui rappelle ça !

« Comme quoi vous voyez, je pense que beaucoup se sont mêlés de notre rupture au point de faire de nous des ennemis jurés et je vous prie de croire que si vous en avez souffert moi aussi et pas qu'un peu, partir devenait vital pour moi, car entendre que "Wallerand préférait avoir dans son lit une Comtesse parce qu'une simple Dame issue de mérite de mon espèce était presqu'une insulte pour lui," ça fait très très mal. »

La jeune femme avait gardé les yeux baissés sur les feuillets, sans les lire plus avant. Wallerand s'arrêta dans sa déambulation, s'assit sur le lit à ses côtés et lui releva le menton, doucement, remarquant l'aura de tristesse de sa maîtresse. Exactement ce qu'il avait voulu éviter, qu'elle soit blessée par les propos d'une ex-fiancée rageuse. Par des propos qu’ils entendraient de nouveau, fatalement. C’était dans l’ordre des choses… Il laissa passer quelques instants en silence puis, plus doucement, lui enjoignit :

Regardez-moi.

Bella releva la tête et le regarda dans les yeux, sentant son cœur s'arrêter. Le sourire du Beauharnais avait quelque chose d’amer, comme une ombre de regret, et il lança sans y mettre plus de formes que cela :

Votre titre me gêne. Votre titre est l'obstacle qui nous a empêchés de nous officialiser aussi tôt que je l'aurais voulu. Pourtant, c'est votre titre, vous et moi n'y pouvons rien, et jamais, en aucun cas, je ne vous demanderai d'y renoncer. Je sais qu'on dira de moi que je vous épouse pour ça, mais si c'était ce que je voulais, franchement, vous ne pensez pas que j'aurais courtisé directement en Gascogne une grande noble ? Vous n'êtes pas la première que j'ai rencontrée... Et vous croyez vraiment que c'est ce qui m'aurait amené vers vous ?
Pourquoi dit-elle cela ?...
Parce que c'est ce qu'un esprit mesquin peut concevoir, pas forcément qu'elle le soit, mais parce que c'est ce qu'on dit de tout homme peu titré, ou pas du tout d'ailleurs, qui a des vues sur une femme de votre rang… Et que le sentiment soit sincère n'y change strictement rien.


Wallerand récupéra les lettres rendues par sa maîtresse, la scrutant, tandis que la jeune femme soupirait longuement. Quelque s'était débloqué, le noeud coulant s'était desserré un peu.

Vous auriez dû l’ignorer...

Wallerand esquissa un sourire. Bella semblait lâcher du lest, et saisirait peut-être mieux s’il lui disait… Oui. Allez, on raconte la fin de la dernière correspondance avec l’ancienne compagne.

Qu'est-ce que ça peut bien faire ? J’attache tellement d’importance à ça que… Vous savez ce qui est arrivé aux lettres qu’elle mentionne ? Je les ai brûlées le lendemain de nos retrouvailles, avant de tomber sur vous chez Adalarde. Je les ai toutes brûlées. Toutes. Ces lettres que vous avez lues ont juste été un échange un peu vif, mais ce que je regrette le plus là-dedans...
_________________
Wallerand
Wallerand hésita un bref instant, pesant rapidement le pour et le contre, puis se lança. Après tout, au point où il en était, il pouvait bien poursuivre. Et puis il en avait dit trop, ou pas assez. Sans parler du fait qu’il tenait à être d’une honnêteté scrupuleuse avec sa maîtresse, quitte à avoir des paroles parfois malheureuses.

C'est que ça m'ait fait voir que vous doutiez de moi.

Après tout… Elle lui avait bien demandé s’il subsistait encore quelque chose de cette histoire morte et enterrée avec l’hiver ! Bella sursauta pourtant, sentant de nouveau la colère poindre, en dessous de la peine.

Le doute est une graine qui germe vite et vos cachotteries ont servi d'engrais. Moi, ce qui me chagrine, c'est que vous n'avez pas confiance en moi. Si vous aviez eu confiance, vous me l'auriez dit, et ce, dès les premiers échanges.
Ils n'ont aucune importance... S'il y avait eu une quelconque implication, je vous en aurais parlé. Mais là, franchement, qu’est-ce qu’il y avait à savoir, à part que j’ai fait une boulette au moment d’un envoi et que ça a entrainé un règlement de comptes ?
Vous croyez le prendre comment à ma place? Vous me l'auriez dit, nous en aurions ri... Car au fond, cette femme a saisi l'occasion de déverser son fiel et sa rancoeur, et ces échanges n'ont aucune importance...
Il n'y a pas l'ombre d’une importance, ça, c’est sûr.
Vous me parlez de confiance, mais…


La jeune femme plongea ses jades brillantes dans ses yeux sombres. Et amena, du coup, une question à la marge de l’esprit du Beauharnais. Misère, quelle allait être la prochaine attaque ? Et comme on disait, la meilleure défense – il fallait bien y penser ! – étant l’attaque, le Gascon repartit sans attendre :

Attendez, c'est bien vous qui m'avez demandé si je n'éprouvais plus rien pour elle ?

La jeune femme eut un sourire en coin, avant de se relever, de marcher jusqu'à la fenêtre et perdre son regard dans le paysage urbain de la cour qui s'étalait devant elle. La voix lasse, elle répondit :

Pour moi, le contraire de l’amour n’est pas la haine, mais l’indifférence... Et cette femme aura essayé de vous toucher, de vous piquer au vif, afin de vous faire répondre... Et en répondant à ses déclarations farfelues, vous lui donnez une importance qu'elle ne mérite pas. Non ?
C'est ce que je vous dis : c'est totalement sans importance... Ce n'est pas de l'indifférence, ça ? Si ça avait tellement d’importance, vous pensez bien que j’aurais bondi pour nier, re-nier, protester, me défendre, vous défendre… Et, au final, lui dire que lorsque nous étions un couple, je me foutais bien de son titre. Ce qui est vrai, en prime, et dont je l’avais déjà assurée à l’époque.
D'accord... Mais comprenez ma réaction … Si j’écrivais à un ex dans votre dos...
Vous n'en avez pas...


Wallerand sourit légèrement malgré la situation, ne pouvant se résoudre à considérer qu’un mort faisait un motif sérieux de discorde tant que sa mémoire n’était pas mise en jeu et tenant à souligner combien il se sentait tranquille vis-à-vis de la fidélité de Bella, mais la jeune femme l’entendit pas de cette oreille et ne supporta pas l'attitude primesautière, l'allusion à feu son époux. Son ex était son feu son époux, elle était veuve, ce n'était pas une situation amusante ! Elle en avait souffert ! Pourquoi tournait-il cela à la dérision ? La frustration la gagnait, alors qu'il semblait, à ses yeux, la tourner en dérision. Elle se retourna, se saisit d'une assiette qu'elle brisa. Un exutoire à la colère qui la rongeait... Wallerand de Beauharnais en sursauta, tandis qu'elle criait de nouveau.

Imaginez bon sang !
Eh bien.... Je vous fais toute confiance, et même si j'aurais sûrement un mouvement d'humeur, si vous m'aviez montré des lettres comme celles-là, en me disant que vous n'en aviez rien à faire, je crois que je n'aurais pas eu de mal à vous croire...


Bella soupira, baissa les yeux. Il ne comprenait pas...

Ce ne sont pas les lettres le souci, Wallerand... Vous m'avez menti, par omission. Sciemment, même... Si vous m’aviez tout montré...

Wallerand se rapprocha d'elle, et lui prit les mains. Mentir, le vilain mot. D’une, il arrangeait éventuellement la réalité, mais c’était bien le bout du monde et réservé aux affaires, pas à sa vie. Le plus dur, ce serait de lui montrer que non, il n'avait pas menti, pas un instant.

Bella...
Sans avoir peur, sans me cacher les deux autres... Sans me mentir, sciemment... Je … C’est blessant.
Ce n'est pas une question d'avoir peur... Je vous ai montré les deux lettres qui vous prouveraient la vraie manière dont Sashah et moi communiquons. La première, vos en aviez une copie exacte. Et la toute dernière, celle à laquelle je n'ai pas répondu... Vous devez vous douter de la raison pour laquelle je ne voulais pas vous la montrer. Non ? Parce que ce genre d'insinuations, vous les entendrez largement assez, peut-être même à notre mariage. Pourquoi croyez-vous, outre ce que je pense pouvoir apporter, que je tiens autant à pouvoir être tête de liste ?


Bella lui serra les mains doucement, avant de lui sourire tendrement à travers un rideau de larmes qu'il entreprit d'essuyer du revers de la main.

Vous n’avez rien à me prouver... Je vous aime, c’est tout. Pour vous.
A vous, non, au monde si. Et je le ferai justement parce que je vous aime et parce que je ne veux pas que quiconque en doute. Que personne ne puisse mettre en cause la pureté de mes intentions envers vous.


Le Beauharnais esquissa un sourire. C’était là toute la question. En plus des projets qu’il voulait porter, s’il arrivait par hasard à se hisser jusqu’à la noblesse, il était assuré de ne plus avoir à encourir ce genre de ragots, de racontars ridicules. Il y aurait eu tellement de monde qu’il aurait pu courtiser, si c’était un titre qu’il avait voulu et pas elle, cette femme-là, tellement improbable pour un homme comme lui…

Et vous m'en voulez, persuadé que je doute de vous...
Vous n’avez pas douté, vraiment ? J’ai du mal à le croire. Et la prochaine fois qu'on vous dira que je vous ai couru après parce que vous étiez Comtesse ?


Le sourire, cette fois, s’était voilé d’un certain fatalisme triste. Elle avait bien demandé si c’était son Comté qui l’intéressait, s’il éprouvait encore quelque chose pour une femme qu’il n’avait plus vue depuis des mois et qui avait abondamment médit de lui avant de filer à l’anglaise…
_________________
Christabella
Cette fois, c'était elle qui observait son amant, caressant doucement les lèvres aimées du pouce, avant de l'embrasser tendrement pour effacer cette moue triste et désabusée. Elle était fatiguée de cette dispute, de ces incompréhensions. De Sashah, qui savait distiller son venin dans le but de blesser. Puis, la vérité lui désilla les yeux, et elle rougit. Baissant les yeux, elle murmura...

La jalousie m'aura aveuglée, mon amour...

Un baiser vint clore les lèvres de la jeune femme sur cet aveu. A vrai dire, Wallerand n'en aurait pas attendu autant. Les femmes avaient de ces mystères parfois... Qu’importait, tant qu’elle était là. Puis elle sourit, connaissant la réponse. Si on lui raconte que Wallerand n'en veut qu'à son titre...

Ca n'aura pas d’importance, savez-vous pourquoi?

La jeune femme, encore empourprée de honte, se réfugia dans ses bras. Elle eut un petit rictus amusé, tandis que Wallerand retrouvait le sourire et posait un baiser sur son front.

Parce que je vous ai supportée ce soir ? C'est une plaisanterie, hein !

Le Beauharnais serra ses mains et sourit de toutes ses dents, précisant tout de même pour la forme qu'il s'agissait bien d'une boutade (il n'aurait plus manqué qu'il en remette, bien involontairement, une couche), tandis qu'elle le chatouilla en représailles, avant d'exhaler :

Parce que c'est moi qui vous ai couru après...

La jeune femme rit, et se pelotonna dans ses bras, tandis que Wallerand souriait de plus belle. Qu’aurait-il pu demander de mieux ? Cela dit… Elle lui avait couru après ? La belle histoire ! Pourtant, s'il se souvenait bien...

Vraiment ? Attendez... A Paris, c'est moi qui ne vous ai pas lâchée, quand vous passiez voir Alvira, je vous suis tombé dessus comme la faim sur le monde, et dès que vous êtes arrivée à Lou Moun, boum ! j'ai recommencé!

Ah oui.. Vous étiez donc mort de faim? C'est moi qui ai engagé la conversation chez Vivi... Et je ne suis pas venue à Lou Moun par hasard...

Un point pour vous !

J'aurais pu choisir Tolosa... Ou Pau!

Le Beauharnais sourit, tandis qu'elle le fit basculer sur le lit, le surplombant, altière. D'un air dubitatif, il croisa les bras dans l'attitude qu'il adoptait ordinairement quand, au Guet ou au Conseil, quelque chose le perplexifiait. Allongé, c’était sûr, ça devait avoir de la gueule ! Et, l'oeil taquin, il lança :

Le Béarn, j'en doute !

Bella laissa échapper un rire argentin, en pensant au dossier Béarnais qui avait tant souffert, et le chatouilla de nouveau, provoquant rires et rebuffades. Puis, elle soupira longuement en regardant l »assiette brisée... Et fit mine de se dégager des bras du Beauharnais.

Je vais ramasser cela...

Wallerand secoua la tête, la faisant basculer sous lui pour l'empêcher de quitter ses bras - et échapper aux représailles chatouillesques. Et, laissant lui-même courir ses doigts sur les côtes de la jeune fille, il continua :

Laissez... En plus, elle devait être fêlée pour avoir éclaté comme ça.

Mais je suis certaine qu'à ma place... Eeeeh!

Elle ne put aller plus loin, éclatant de rire, prisonnière de son amant. Le jeune homme sourit et compléta :

J'aurais été de mauvais poil ? C'est probable, oui

Vous n'auriez pas aimé.


Wallerand hocha la tête, reprenant son sérieux. Il ne servait à rien de le nier, il savait parfaitement qu'il aurait également râlé tout son soûl, et il convint :

Sans doute... Dites... Vous avez des correspondances secrètes ?

Le sourire, taquin, soulignait la plaisanterie. Bella frotta son nez contre le sien, mutine, avec un air de "Je ne parlerai même pas sous la torture..."

Peut-être...

Tant qu'on y est, autant qu'on sache tout pour n'être jamais surpris !

Il effleura de nouveau les côtes de la jeune femme, qui remua tant et plus, battant des jambes - tant pis pour sa condition - pour tenter d'échapper à la torture. Après quelques rires nerveux, et un baiser passionné, elle avoua:

Non évidemment, j’écris à mon ex.
...
Au mausolée.


Le Beauharnais esquissa un sourire. C’était exactement le genre de correspondances qu’il se savait capable de pardonner !

Vous écrivez à des pierres ?

Eh bien avant d’être mon époux, il était mon afisant.


Parrain ?

Confident. J'étais son afisantà et lui mon afisant.


Oh, pardon. Du coup, vous continuez à vous confier ?

Bella eut un sourire mi-rêveur, mi-nostalgique... Elle gardait cette habitude, depuis son décès, habituée à leurs interminables conversations à refaire le monde. Et Wallerand eut garde de ne rien railler. Les souvenirs, c’était sacré…

En quelque sorte... J écris dans un recueil. Comme un journal. Parfois, j'y raconte des anecdotes passées, des souvenirs. J'y dessine...

Wallerand sourit. Alors comme ça, elle aussi sacrifiait aux plaisirs du dessin ? Même comme outil de mémoire, c’était bon à savoir. Pour autant, il avait repris un ton badin pour ajouter :

Je crois que je vais fouiller vos affaires !

Inutile de fouiller, Wallerand : la clef du mausolée est sous le pot de marguerites. J’ai aussi peint son portrait avant que le souvenir disparaisse, si cela titille votre curiosité de savoir à quoi ressemblait mon EX. Il était beau, il sentait bon le sable chaud, mon légio... Euh bref. Vous voyez... Je fais cela pour les enfants... Qu'ils sachent qui est leur père.


Wallerand esquissa un sourire. Peut-être bien qu’il aurait eu un mouvement d’humeur si elle n’avait pas mentionné les enfants de Milandor… Après tout, elle venait bien de dire qu’il était beau, non ?

C'est aussi bien... Ca permet d'entretenir le souvenir. Oh, parlant des enfants... Je me demandais...

Wallerand se demandait comment le tourner, et il finit par opter pour :

Peut-être serait-il bon que... Heu... Que nous ne nous rencontrions pas que le jour où... Enfin, où nous nous fiancerons officiellement ?

Nous les inviterons, évidemment. Avec tous ceux qui me sont chers

Et... C'est un autre... Enfin, pas du tout un détail... Mais... Ni Kenny ni son frère n'ont de père, au final...

Eh bien oui... Je suis leur seule parent.

S'ils le souhaitent, voudriez-vous qu'on leur propose de les adopter ?


Bella sourit et l'embrassa tendrement, ravie de son idée. Ainsi, Kenny et Martin auraient de nouveau un père, s'ils le voulaient. Bella s'inquiétait de Martin, à la santé plus que précaire, soigné dans un sanatorium du cap d'Agde, officiellement en pensionnat. Personne ne savait, aussi elle n'en pipa mot. Il le saurait bien assez tôt...

Si c'est votre souhait ! En espérant que cela ne nous dispensera pas d'essayer d'avoir nos propres enfants...

Le Beauharnais l'enlaça et lui rendit son baiser, lui glissant à l’oreille qu’il y comptait bien et qu’il voulait bien s’y employer dès l’instant présent…
_________________
Wallerand
Vous pourrez enfin vous reposer de l'armée si nous avons des enfants.
Certes...
Ce sera plus sage pour l'enfant à naître, d'ailleurs. Dangereux, une armée. Pas un endroit pour élever un enfant. Ni si vous êtes enceinte.


Enfant, armée, armée, enfant... La jeune comtesse se demandait où le Beauharnais voulait en venir. Une famille. Lui, en tout cas, savait très bien où il voulait en venir : il était temps que cette armée qu'elle avait montée soit démantelée. Un point c'est tout. Et du coup, il se lança, d'un ton badin qui, en réalité, cachait quelque chose de beaucoup plus sérieux.

Evidemment, dès demain vous écrirez au conseil, et une fois l'armée démantelée...
Co...Comment? Quoi ?
Eh bien... Ce n'était pas notre accord ? Démanteler l'armée une fois la menace passée, afin que vous ne preniez aucun risque ?
Non, l'accord était que je démantèlerai l'armée si d'aventure je me retrouvais enceinte, mon cher. Pas dès potron minet !


Le ton s'était immédiatement durci. La jeune femme n'appréciait pas qu'on décide pour elle ! Elle croisa les bras à son tour, dans une attitude fermée. Gros soupir du jeune homme. Pourtant, ils en avaient déjà parlé, et cette armée était censée simplement dépanner, momentanément, durer juste assez pour faire face à l'alerte... Il pensait qu'elle comprendrait, enfin, qu'il se rongeait les sangs à chaque nuit de garde, à chaque rumeur d'attaque, qu'il faisait des cauchemars dans lesquels il la voyait, les yeux vitreux et allongée dans une mare de sang ou pire encore... Mais non. Raté. Les femmes, les femmes ! C'était tellement plus facile quand on ne les voyait que quelques jours... Bon, c'était aussi beaucoup moins bien que ce qu'il découvrait, mais ce n'était pas une raison ! Et il était si peu habitué encore à maîtriser totalement sa langue que la réflexion sortit toute seule :

Ne faites pas l'enfant.

Elle leva les yeux, s'éloigna de lui, sèchement, offusquée comme jamais, alors qu'il prenait la mesure de la rudesse de son propos. Exactement ce qu'elle détestait. Qu'on la traite d'enfant. Elle avait déjà sa mesnie qui sous prétexte de veiller sur elle, qui était un peu trop prévenante parfois, à l'étouffement. Surtout Marie-Clarence.

Non mais, arrêtez bon sang de me prendre pour une enfançonne ! Je ne vous permets pas, vous vous rendez compte que vous m'insultez ? Je suis comtesse de Fontralha, môssieu. Sum gladium qui infirmos defendit.
Et moi, je ne suis rien, je sais, mais ce n'est pas votre Comté qui va vous protéger !


Non mais ! Qui avait dit qu'un titre ou une devise en latin était un bouclier, hein ? Ou une bonne raison de se mettre en danger ? Comtesse, la bonne excuse pour se retrancher derrière l'insulte quand il n'y avait qu'inquiétude sincère pour justifier... De nouveau, elle leva les jades au ciel.

Ne remettez pas la roture sur le tapis ! Je suis née roturière, et je ne juge pas la valeur d'un homme sur ce critère.

C'était même plutôt l'inverse, compléta-t-elle in petto. Elle connaissait de nombreuses personnes qui n'avaient de noble que le titre, notamment feu Dampierre la parvenue, morte dans un incendie, elle qui accusait à brûle pourpoint les gens de sorciers, comme quoi le destin avait le sens de l'humour. Mais présentement, elle trouvait Wallerand particulièrement énervant. Qu'il ait peur pour elle, soit. Mais pour Bella, cela sonnait comme un doute vis à vis de ses talents de combattante. Quant à lui, il ne pouvait s'enlever de la tête le bras qu'il avait accidentellement démis. Et si ça n'avait été qu'un accident, il était bien en droit de s'inquiéter pour des situations réelles, non ? Aussi, plus doucement, Wallerand reprit-il :

Je ne dis pas ça. C'est juste que votre devise n'a rien à faire là, votre titre non plus. Vous en deviez pas assurer ce commandement dans le temps, et je souhaite que vous en finissiez avec In Bellae Veritas.
Oh, Deos tout puissant... Sérieusement, vous ne comptez pas que j'obéisse à votre vœu ?
Si. Je refuse que ma descendance pâtisse de votre insouciance.
Je-sais-me-défendre. Enfin ! J'ai toujours su manier l'épée, même aux joutes je n'ai jamais été blessée ! Et, entre nous, mon cher... Ce n'est pas moi qui ait passé quarante jours en boitant sur une béquille.


Cette fois, elle était piquée au vif et rendait coup pour coup. C'était même un coup bas, très bas, mais elle voulait remettre les choses à leur place. Réprimant un rictus mi-figue mi-raisin, Wallerand soupira à ce souvenir - long d'un mois et demi, tout de même - et lâcha, presque désinvolte à force d'avoir eu affaire à cette béquille et d'y avoir pensé et d'avoir vu comment on le regardait quand il devait se reposer sur elle :

Justement. Vous, vous ne savez pas ce que c'est, et quand ça vous tombera dessus, vous comprendrez mais ce sera trop tard.
Cela veut-il dire que si nous devenions parents, je devrai vous forcer à renoncer au guet, aux risques en tout genre, pour ne pas redevenir veuve ?
Mais ça n'a rien à voir ! Restons sérieux ! Et nous en avons déjà parlé, en plus.
De toute façon, je ne suis pas enceinte.
En êtes-vous sûre ? Certaine ?


C'est qu'il insistait, le bougre, il s'était fait à cette idée et aurait accueilli la nouvelle avec joie (au moins, ça, c'était clair). Mais … Sa camériste de choc veillait au grain de très près, inspectant son linge étant donné qu'elle supervisait les lavandières. Elle eut un sourire de coin en imaginant la tête de sa camériste se rongeant les sangs à l'idée qu'elle ait du retard dans ses cycles.

Certaine. Marie-Clarence vous aurait tué sinon...
C'est pas faux.
Soyez tranquille, je peux continuer à gérer cette armée pour l'instant.
Alors … Non, je ne veux pas attendre que vous preniez des risques.
Il ne faudra pas y compter ! Je sais ce que je fais, je ne prends aucun risque.
Et s'il vous arrivait quelque chose, comme une chute, n'importe quoi d'imprévisible et d'aussi dangereux qu'une armée ? Et s'il vous arrivait quelque chose alors que vous ne vous êtes pas encore rendue compte que vous étiez enceinte ?
Ne recommencez pas sinon je mords !
Une Comtesse, mordre ? J'aimerai bien voir ça, ma chère.Vous n'utilisiez pas ça pour défendre votre dignité il y a un instant ?
Pfff … Vous êtes pénible.

_________________
Christabella
Ah ça, oui, il était casse-pieds. Pas pour rien qu'il s'était retrouvé surnommé "Wallchiant". Fallait le porter, ce surnom-là ! Aussi se contenta-t-il d'esquisser un sourire. Puis, comme s'il avait eu l'idée de génie, l'oeil soudain redevenu rieur, il lança, attirant de nouveau Bella à lui :

Puisque c'est comme cela, je m'en vais nous faire un fils !

Ggrrrmmmbl... Pas ce soir. Pas d'humeur.

L'humeur vous reviendra, l'appétit vient bien en mangeant !

Pfff. Et puis m'touchez pas puisque je suis en sucre. Une poupée fragile.


Hinhinhin. Et toc ! Lança une petite voix dans la tête de la jeune blonde. Se refuser à lui, elle ne voulait pas, Bella souhaitait juste lui faire comprendre qu'elle était furieuse. Encore une fois, il la rabaissait au rang de femme fragile, ou d'enfant gâtée. Et voilà qu'il comptait clore la dispute de cette manière ! Non ! Enfin peut être... Elle devrait être ferme dans son refus, elle le sentait, avant de céder à son charme. Mais c'était sans compter avec l'opiniâtreté de son amant. Après tout, le motif de dispute était stupide, du début à la fin (comprenons : des lettres de Sashah à la dissolution de l'armée)... Il savait bien qu'à l'usure, elle admettrait la nécessité de faire baisser l'étendard de son armée. Aussi, entourant sa maîtresse d'un bras caressant, Wallerand entreprit l'exploration du cou de la jeune femme, de sa clavicule à l'oreille où il glissa :

Le sucre, c'est bon... Attendez, je m'en vais vous goûter.

Goinfre ! Je… J'ai la migraine, voilà!

Ah oui ? Alors, vous allez voir, faire l'amour est souverain pour ce mal !

Faites vite alors, j'ai sommeil.


La blondissime boudeuse était prête à tout pour vexer le mâle, qui leva les yeux au ciel. Ca, c'était un tue-l'amour absolu, mais... Il prit le pari de considérer que c'était une simple pique "pour le plaisir". Une sorte de rebuffade qui tenait plus du jeu que d'autre chose. Autant dire qu'il n'allait pas désarmer pour si peu ! Aussi, sans se formaliser outre mesure, laissa-t-il une main vagabonde partir à l'assaut d'une jambe, une bouche avide redescendre vers certaine gorge qui l'attirait irrésistiblement. Bella sourit tout de même, appréciait le traitement, se sentait céder peu à peu. Zut, il avait gagné.

Vous aviez raison...

Elle l'encouragea à continuer d'un baiser... Peu avant que le Beauharnais ne se recule.

Pardon, je vous laisse tranquille... C'est vrai, je sais, je suis pénible par moments, vous méritez bien de vous reposer.


Ahn !

Hmm ? Une protestation, très chère ?


Bella lui lança un regard oblique, et comprit qu'il allait la laisser en plan, comme ça. Ca ne se faisait pas ! Non ! Mais si, il allait le faire. Et s'il demeurait impavide, malgré une marque flagrante de son trouble, Wallerand n'en gardait pas moins une lueur rieuse au fond de l'oeil. Excédée et, il fallait l'admettre, un peu frustrée, elle lui tourna le dos et gronda :

'Nnuit… Grrblmm.

Mais non, revenez là.


Wallerand sourit, étendant le bras pour la ramener vers lui, et... Et ! Sur la croisée, deux observateurs guère discrets guettaient, se lissant par intermittence les plumes. L'un des deux, roulait des mécanoches d'un air suffisant, roucoulant à qui mieux mieux.

Roouuu, mi corazon...

Chut, doi... Ca piaille là-tessous... Du crois que c'est un chant t'amour ?

Yé né pense pas, ma beauté.

Du grois qu'il fait quoi là ? Rekarde ! Il cherche ses kraines gachées sous sa chupe. Groou grouu ! Foleur !

Tou né comprends rien mi corazon, c'est oune danse dé l'amore !

Moi che te dis qu'il fole ses kraines qu'elle a caché ! Nein, le laisse bas faire ! Il enlèfe sa robe et fas tout troufer !

Régarde mieux, c'est oune danse, je té dis, il a enlevé aussi sa jupe à lui.

Ach il ne borde pas de jupe, fulgaire pigeon ! You know nothing, Banderas.

Tou crois qu'ils échangent les graines, mi corazon ? Il me semble en avoir oune sachett bien pourvou.

Apruti, ce ne sont bas des kraines !

_________________
Wallerand
Un endormissement apaisé, serein, contre cette femme qui embaumait contre lui, était toujours le prélude chez Wallerand à un sommeil réparateur et à un réveil tranquille. Dans la majeure partie des situations et une fois qu’on éliminait les soirs de garde, les tours de l’armée, les jours où un chaperon se faisait par trop protecteur – ce qui faisait au final un certain nombre d’occasions où ils ne pouvaient que se croiser et échanger à peine quelques baisers et caresses dérobés à la vue du monde –, en tout cas, cette règle était respectée. Ce matin-là, en revanche, il semblait écrit que ce ne serait pas le cas.

Comme de coutume, il avait raté l’éveil de sa maîtresse. A vrai dire, trouver à son côté quand il ouvrait les yeux une place à peine tiède encore était devenu presque habituel, et Wallerand prenait un malin plaisir à surgir aussi silencieusement qu’il le pouvait (ce qui n’était pas toujours possible dans son appartement) pour surprendre Bella. Alors que le jeune homme s’étirait et se levait, il lui sembla entendre des mots comme chuchotés, maugréés. Dans son plus simple appareil, intrigué par les murmures qui donnaient l’impression que la Comtesse n’était pas seule, il contourna le paravent qui isolait son lit du reste de l’appartement, et…

Surprise ! Trois paires d’yeux se tournèrent vers lui, tout conciliabule interrompu. Les pupilles étrécies et réprobatrices de Marie-Clarence se levèrent vers le plafond, les yeux écarquillés de Tibedaud semblaient devoir détailler le Gascon sous toutes les coutures de son anatomie matinale, et le clair regard rieur de Bella embrassait la scène alors que, médusé par la surprise, le Beauharnais n’eut que le réflexe de jurer :


Rah, et m*rde !
Cachez-moi cette peau que nous ne saurions voir !
Evidemment. Si la bonne soeur qui servait de camériste à Bella avait eu une chance de la fermer en pareille circonstance, ça se serait su !
En fait, si, je saurais bien la voir, moi.
Bella, vous auriez pu prévenir…
Voyons, très cher, j’ai été aussi surprise que vous.
Peut-être, mais vous, ils ont coutume de vous voir, ‘fin, vous comprenez.
Mais ça va venir pour vous aussi.
Aheum ! Ne vendez pas la peau de l’ours, Votre Grandeur !
Pas la peine de faire la rabat-joie si bon matin…
Vous, on ne vous demande pas votre avis, et allez vous habiller !
Je suis chez moi, je me balade à poil si je veux !


Et pour appuyer cette éloquente démonstration de territorialité, Wallerand s’élança autour de sa table, soufflant au passage un baiser à sa maîtresse – au grand scandale de son chaperon indigné, qui le manifesta par de hauts cris qui contrastaient fort avec les yeux régulièrement levés au ciel aux taquineries de Bella – avant de disparaître derrière son paravent. Dignité, zéro, affirmation face à Marie-Clarence, un ! Non mais... Le triomphe fut cependant de courte durée car, à son retour une fois braies et chemise enfilées à la diable, le maître du modeste appartement présentement envahi par la mesnie de Bella percuta sur la tenue que portait cette dernière. Misère, mais...

Mais qu'est-ce que vous fabriquez habillée en NONNE ?
A votre avis?
Vous prenez le voile ? Vous nous faites ça ?


Bella réprima un rire, sous l'oeil catastrophé de Wallerand. Comme si c'était drôle !

En soeur cistercienne... Hum... J'aime le gris, ça me sied à merveille. Et le voile noir… Il camoufle ma tignasse à merveille. Vous n'aimez pas ? D'ailleurs, je fais quoi à qui ?

La tirade, manifestement rieuse, ne fut accueillie que par le légendaire oeil de poisson mort de Wallerand, ce regard si particulier de celui dont le cerveau a décidé de se mettre en grève pour protester contre l'afflux d'informations désagréables, inacceptables, inconcevables (rayez la mention inutile) ou nécessitant un arrêt du système nerveux pour remise à niveau suite à erreur système (l'erreur 404 du cerveau humain, quoi).

Ne faites pas cette tête... Vous viendrez me voir à Noirlac. Ou à l'église ? Pour la messe ?

Bella eut un sourire tendre et caressa la joue rêche de son amant pas encore rasé (forcément, on faisait irruption chez lui, ça n'aidait pas...), lequel grommela :

Votre tignasse est superbe, mais je n'irai pas à Noirlac et vous non plus ! Sauf pour officier une ou deux fois, à la rigueur, et qu'en tant que la diaconesse mon épouse... Grmbl...

Bella mime un soupir exagéré, soufflant longuement, et prit un air exaspéré qui contrastait avec l'éclat espiègle de ses jades. La blondissime s'amusait manifestement et, ayant secoué son atonie de merlan frit - l'idée de Noirlac l'avait bien aidé à reprendre pied, d'ailleurs -, le Beauharnais la suivit dans son jeu. S'ensuivit un échange qui, s'il n'avait pas été aussi complice, aurait ravi la camériste en lui faisant espérer une scène de ménage (encore qu'il était difficile de parler de ménage, chacun vivant encore dans ses pénates) qui ne vint pas, malgré les mines trop exaspérées et les soupirs trop prononcés pour être vrais...

Evidemment !
Bon, affaire réglée, mais remisez-moi cette tenue loin loin loin ! On n'a pas idée de faire des frayeurs pareilles aux gens...
Non. Trop facile, ça ! Je refuse votre despotisme !
Despotisme ? Ne faites pas la Laureen...
Ahn l'insulte ! Vous cherchez à me vexer ? Tout mais pas elle ! Et puis... J'irai où bon me semble ! Je ne suis pas mariée, que je sache ! Pas encore !
Si j'étais un despote, vous auriez déjà baissé ce foutu pavillon d'armée.
Roooh ! Laissez l'armée où elle est.
Pourtant c'est un bel exemple d'anti-despotisme !
Mouais... Encore heureux, je n ai été ni secouée ni d'épaule démise.
L'épaule était un pur accident !
Vous êtes brutal et violent !
Pardon ? Violent ? Brutal ? Dites-moi quand je l'ai été, à part à Dax ! Et qui a fracassé une assiette chez moi, hein ?
Ahn ! Touché, coulé ! C'est vilain, ça.
C'est mérité, ma chère !
Et puis... Ce n'est qu'une tenue... Ne me va-t-elle pas bien? Elle met en valeur ma ligne superbe...
Si, elle vous va bien, un peu trop même !
J'en ai une autre... C'est juste ma tenue de diaconesse. L'autre vous plaira plus, je gage.

_________________
Christabella
Tibedaud déposa une lettre sur la table, avant d'amener l'autre tenue neuve. Machinalement, Wallerand prit le pli, et le parcourut des yeux. Une vieille habitude, il était chez lui après tout. C'est donc avec un naturel non feint qu'il décacheta un pli qui ne lui était pas destiné, à la grande stupéfaction du jeune page qui esquissa un geste qui n'échappa pas au Beauharnais. Trop tard. Des mots lui sautèrent aux yeux. Créance, gîte et couvert, forfait blanchisserie, herboristerie, soins, massages, le tout sur les côtes Languedociennes... et Forfait grand luxe. Pour qui ? Pas pour elle, elle n'avait point quitté la Gascogne. La lettre parlait d'un homme apparemment, vu la teneur de la prose. Le prévôt caché derrière le Wallerand se réveilla, d'un œil, puis des deux yeux, avant d'interroger sa belle. Il manquait la chandelle pour l'éblouir et l'impressionner, pour se croire en garde à vue.

Dites moi … Qui est cet homme dont vous assurez la subsistance ?
Quoi ? Comment ? Qui ?
C'est moi qui pose les questions !
Mais je … Oh ! Un... Grand, blond, athlétique... Vous voyez !
Genre... Feu votre époux ?
Heu... Exactement ! Je n'ai pas résisté. Seriez vous jaloux, à votre tour ?
Mais c'est pas du tout pareil, là, il y a des écus en jeu ! Et pour un homme en plus ! Que vous entretenez !
Jeune homme, pour être exacte.
Jeune ? Ah oui ? Je suis trop vieux, maintenant, c'est ça ?
Mignon.
Mignon ?!


Le Beauharnais stupéfait grommela, tandis que Bella faisait mine de s'éventer avec sa robe, pour camoufler un rire. On se payait la tête du jeune Beauharnais, Tibedaud regardait ailleurs, gêné, et Marie Clarence avait un sourire amusé. Vieille pie ! Pensa le Beauharnais... La comtesse en rajouta une couche, une bien épaisse, sur la tartine :

Et fougueux... mmhmmmm
Plaignez-vous, en plus !


Wallerand grommella de plus belle et se mit à faire les cent pas, dans une imitation parfaite du prévôt face à une situation conflictuelle. D'un ton condescendant, la Blondissime enfonça le clou :

Trop, ce n'est pas assez, dixit l'expression consacrée. Et il est serviable avec ça!
han !
Il me couvre d'attentions, de menus présents....
On dirait que vous êtes la plus malheureuse des femmes à vous écouter !
Ah non, du tout ! Je suis on ne peut plus heureuse ! Il est si chou ! De petits présents fait-main...
Fait-main ? Pardonnez-moi de préférer utiliser ma tête...
Regardez ...Un bouquet de fleurs séchées, un marque page en dentelle, des aquarelles...Un mouchoir brodé...


Elle montra vite fait le mouchoir, mais le cacha aussi sec pour éviter de montrer qu'il était brodé non pas du nom de Bella, mais avec le mot « maman ». L'homme en question étant son fils, soigné au sanatorium.

Charmant, charmant ! Un dentelier, hmm ? Des occupations de fille, tout ça.
Il est malade...


Bella tiqua, piquée au vif malgré elle. On parlait de son fils, là !

Je vous interdit de parler ainsi de Mar...Euh
De qui ?
Mar... euh..Marius !
Marius ? c'est qui, ça ? Et puis excusez-moi, mais j'ai rarement vu des hommes faire de la dentelle !
Il est presque mourant. Il me couvre de présent, lui. C est le plus beau cadeau d un fils a sa mère...
Ce n'est pas Marius alors ! Mais Martin !


Wallerand de Beauharnais se radoucit, sourit, l'enlaça et l'embrassa tendrement, avec un mépris total pour les gros yeux de la camériste.

Vous n'êtes pas possible...
Et vous...Vous êtes jaloux !
Vous avez fait ce qu'il fallait pour !
Vous n'aviez qu'à pas lire mon courrier. Je me rassure comme je peux !
Grmbl... comme si vous aviez pu avoir un doute !
Vous êtes distant ces derniers temps, Môssieu je trouve le temps d' écrire a mon EX, et jamais à ma future fiancée. Pas un poème, pas une lettre d'amour. Tss.
Vous n'allez pas remettre ça sur le tapis !
Si.


Bella rit, elle n'était pas sérieuse, et il le savait. Elle avait comprit pour la lettre à Sashah, une erreur qui avait donné lieu à un échange épistolaire musclé. Frottant son nez contre le sien, elle désigna l'autre paquet, sur la table.

Je vais vous faire un présent. Je sais qu'il vous plaira. Regardez par la fenêtre, à droite. Que voyez vous ?
L'entrée de la ville.
Et ?
Des habitations, quelques charrettes, les remparts …
Grrmbl... Il ne manque rien ? Réfléchissez.


Wallerand réfléchissait, quelque chose manquait, mais quoi ? Il y avait un étendard, de couleur différente, une autre armée... Tiens, il manquait l'étendard bleu !

On lave votre étendard ?
Mais noooooon !
Vous... Vous l'avez fait !
Oui. Pour vous. Cadeau de fiançailles. J'ai dissout mon armée.
Oh !
Un cadeau de choix... Vous avez intérêt à être à la haute... oh !


Il l'enlaça brusquement, heureux de cette nouvelle. Finis, les cauchemars avec cette armée, finie la peur. Wallerand la serra dans ses bras, l'embrassa, encore et encore, jusqu'à ce qu'une camériste toussote. Sale vieille pie !

Bon, je vais essayer l autre robe. Regardez ce tissu! Du taffetas, et du brocard.
Ha ! Vous aviez raison, ça, ça me plait mieux que la bure!
Et ce coloris est unique. Une demande de ma part.
Très élégant ! Vraiment... Vous allez me montrer ?
Vous m'aiderez ?
AHUM
Vous voulez une tisane pour la toux ?
Marie Clarence? Il m a déjà vue nue, vous savez.
Oui ! Plein de fois !
Grrrrrr, ce n'est pas une raison !


Wallerand lui sourit de toutes ses dents, impertinent, heureux de faire enrager la camériste qui enflait comme un crapaud buffle. L'énerver, c'était aussi facile que de réveiller un ours endormi en lui crevant un œil. Bella capitula, devant l'air cramoisi de la carmélite. Marie Clarence le fusilla du regard tandis qu'il ne se départissait pas de son sourire.

Bon... J arrive, je vais derrière le paravent.
Vous voulez de l'aide ?
Je m'en occupe.
Oui! Non, Marie Clarence, pas vous ! M enfin! C est presque mon époux! Presque !


Bella leva les yeux au ciel, le ton était suppliant. Pourquoi étaient-ils venus, tous, hein ? On avait la paix nulle part pour la bagatelle. Vivement le mariage, tiens ! Sentant la moutarde lui monter au nez, elle décida de sévir.

Dehors, tous !! Vous êtes chez lui, donc... Zou !
Et … Merci pour les livraisons et le déjeuner !


Wallerand de Beauharnais riait sous cape, tandis que la mesnie Jauzac quittait les lieux, laissant les amants seuls et susceptibles de s'adonner au plus doux des crimes.
_________________
See the RP information
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)