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Fugue du petit duc

Dacien_de_chenot
Jerh

La sortie de la ville ne fut pas si aisée. Incroyable l'affluence qu'il y avait aux portes. Jerh commença à perdre patience et força le passage, des paysans grommelèrent mais il n'en tint pas compte. Heureusement, sinon, il aurait été bien coincé entre tous les charriots.
Il avisa un jeune homme, encore un enfant, qui poussait devant lui des moutons, tenant dans la main un bâton.

- Hé toi là ! Tu n'aurais pas vu un petit garçon sur un poney ?

- Un p'ti gars sur un poney ? un p'ti ch'val, hein ? Tu m'donnes combien si j'lai vu ?


Jerh soupira et sortit un pièce d'un écu dans sa poche et la lui montra

- J'ai ça et j'ai aussi un coup de pied aux fesse si tu te moques de moi !

L'enfant gloussa, il n'avait pas peur des soldats. Il venait régulièrement en ville et avait souvent à faire avec les miliciens.

- C'est-y pas moi qui l'ai vu, mais l'grand frèrot. C'l'avait étonné qu'un mioche galope dans la nuit tout seul sur un tout p'ti cheval. L'était sur la route à Dié.


Il tendit la main pour recevoir la pièce que Jehr lui envoya.

Jerh se tourna vers Haironthe et Justine et leur dit sans se préoccuper de l'enfant qui les observait attentivement

- Il n'a que quelques heures devant nous ! On va surement le rattraper avant qu'il n'arrive à Dié, il faut deux jours pour y arriver. On fonce !

Et il fit partir son destrier, certain d'être suivi. Dés qu'il put, il lança son cheval au galop mais du ralentir très vite, la route était encombrée. Pourquoi tout le monde allait à Chambéry ? Ou en sortait ?
Il rageait, il profitait pour regarder s'il y avait des traces sur les chemins de traverse, hélas la pluie avait tout effacé et les fondrières étaient remplies d'eau.
Enfin la route se dégagea suffisamment pour qu'ils puissent enfin galoper. Jerh était un cavalier émérite et galoper sur sur route boueuse et défoncée sous une pluie averse, cela ne le gênait pas du tout. Il lança son cheval et galopa un moment avant de s'apercevoir que Justine avait du mal à suivre. Il revint vers elle.

- Vous ne savez pas galoper plus vite ? Votre cheval a l'air de boiter. Que s'est-il passé ?


Tandis qu'il parlait, il était descendu de sa monture et il inspectait les jambes et les sabots du cheval. Soulevant la jambe arrière gauche, il trouva quelque chose.

- Ah, il a un gros caillou qui s'est enfoncé dans le pied. Je vais l'enlever. Descendez du cheval, ce sera mieux pour vous.

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Dacien_de_chenot
Maitre Haironthe

Enfin une piste ! Et le sénéchal de s'élancer au galop. Malgré le mauvais temps le maistre suivait, espérant que Justine en fisse autant. S'il le jeune Duc avait pris la direction de Dié alors il n'y avait plus un instant à perdre. Peut-être même arriveraient-ils à lui mettre la main dessus avant qu'il ne quitte Dié. Haironthe en était là de ses pensées que le sénéchal s'arrêta brusquement et fit volte-face. Visiblement la monture de Justine semblait avoir des problèmes. Ils jouaient de malchance... Ignorant le temps qu'il faudrait à Jehr pour s'occuper de la dite-monture, le précepteur mit pied à terre.

- Espérons qu'il n'y a là rien de grave.
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Dacien_de_chenot
Dacien





[Cure de Dié... dans les méandres de la fièvre...]


La pièce sentait bon la cire et il y régnait une douce chaleur.
Des cuisines s'échappait une bonne odeur de beurre cuit. Près de la vaste cheminée où dansaient de hautes flammes, il devinait la silhouette d'une femme.
Elle était brune.
La tête inclinée sur un ouvrage dont elle faisait tourner les pages à espaces réguliers de ses longs doigts fins.
Elle était belle.
Une robe de satin blanc retombait en plis gracieux autour de ses genoux.
Un homme aussi était là, assis près d'elle, à une table devant un vélin que noircissait sa plume.
Ses longs cheveux sombres encadraient librement son visage.

Il lui sembla s'approcher du couple toutefois il n'eut pas conscience de bouger.
Qui étaient-ils ?...
Il l'ignorait, pourtant ils lui paraissaient étrangement familiers.
La jeune femme leva la tête et c'est alors qu'il la reconnut.
C'était sa mère. Et l'homme assis ne pouvait être que son père !
Il en était sûr pour avoir contemplé des heures durant le portrait qui ornait le grand salon dans l'espoir de retrouver des souvenirs qui s'effaçaient peu à peu de sa jeune mémoire.
Une ineffable joie l'envahit tandis qu'un sourire se dessinait sur son visage.Ainsi donc ils étaient revenus !

- Mère... Père ? bredouilla t'il.

Il avança et tendit la main pour caresser la joue maternelle mais sa vue se troubla.
La chaleur disparut soudain pour laisser place à une froidure mortelle.
Il fit encore un effort pour rejoindre ses parents mais la noirceur avait envahi l'espace et le couple avait disparu.
Sa tête retomba lourdement sur l'oreiller.
Seule subsistait la forte odeur de la cire provenant des cierges qui, un instant, lui avait fait croire à des jours heureux.

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Coligny.
Bruges, le port le plus au nord du Royaume de France. Ce n’était pas pour autant un trou perdu. Bien au contraire. La ville marchande se peuplait régulièrement de marins, de nobles, de visiteurs, de nouveaux villageois. On y faisait du commerce de toute sorte et nombres d’opportunistes y faisaient fortune. Le port grouillait de monde et les tavernes battaient leur plein. Lieux de passage entre le Royaume et les Anglois, nombreux étaient ceux qui pratiquaient les deux langues.

Mais comme tout grand port, la ville comptait son lot de miséreux qui vivaient au crochet des riches en travaillant pour eux ou en les volant. On y trouvait donc toutes les classes sociales de la plus noble à la plus miséreuse. Coligny était quelque part entre les deux. Ni vraiment pauvres, ceux qui s’occupaient de lui, n’étaient pas non plus vraiment riches. Ils ne portaient le nom de parents que parce qu’ils l’avaient enfanté. Dès que le petit Col fut en âge de marcher, il fut mis à contribution. Chaque enfant, sept en tout, passait sa vie à seconder ses aînés. Les filles avec leur mère et les garçons avec leur père. Un père autoritaire devant lequel tous s’effaçaient tant ses coups de gueule faisaient trembler tout le monde et que sa main cognait fort.

Des roustes, Coligny en prit plus d’une, mais ni plus ni moins que ses frères. Il avait rapidement appris à marcher droit et lentement s’était forgé un caractère d’acier au point qu’aucune larme ne mouillait son visage même si cet homme qui disait être son paternel frappait plus fort pour le faire pleurer.

Il pleurait, mais seul, loin du regard des autres jusqu’au jour où il ne versa plus une larme. Il se souvient de ce jour comme si c’était hier. Un beau matin de printemps. Du soleil, la mer d’huile, le port plus calme que d’ordinaire. Il était dans sa huitième année et le monde s’ouvrait à lui. Bien des enfants de son âge étaient déjà mousses à bord des navires qu’il voyait s’éloigner. Quant à lui, la mer ne l’attirait pas. Il avait même peur de l’eau. Il préférait regarder et admirer les naves et les caraques. Assis sur un tas de cordes posées sur le quai, il jouait avec un petit couteau au lieu de chercher à se rendre utile et rapporter quelques écus à la maison. Il le plantait maladroitement dans un bout de bois coincé entre deux cordes quand un homme s’approchait de lui. Il était mince et portait un chapeau qui lui couvrait presque les yeux. Son regard était froid et scrutateur.


- Comme ça, avait-il dit tout simplement en lui prenant le poignet et en positionnant la lame de façon à ce que le poids soit mieux réparti. Lance, ordonna t’il.

La pointe se planta dans le bois sous le sourire de l’enfant que Coligny était encore. L’homme repartit en riant et criant à ses amis qui l’attendaient que ce gamin avait tout ce qu’il fallait pour manier les armes. Manier les armes ? Et pourquoi pas ? Alors, il s’entraîna encore et encore jusqu’à ne jamais rater sa cible. Il ne rapporta rien à la maison ce jour-là et son dos se souvenaient encore des coups de ceinture de son père. Mais que lui importait de se faire frapper. Cet inconnu lui avait offert une porte de sortie et chaque jour, pendant les deux années qui suivirent, il s’entraîna et s’entraîna encore. Chaque nuit, il partait travailler avec le forgeron gratuitement pour que ce dernier lui forge une lame à sa taille, avec le bon poids tandis que lui fabriquait un fourreau qu’il pouvait mettre à sa taille. En peu de temps, il se fit une réputation de mauvais garçon avec qui il valait mieux ne pas chercher les ennuis. Il n’était pas rare de le voir rentrer avec des bleus au visage et la lèvre en sang mais plus souvent victorieux. En deux ans, il avait poussé comme une asperge. Il était long, mince et musclé. Ses traits étaient durs et son visage sans sourire. Il se regardait dans l’eau du seau de temps en temps et se trouvait triste. Il venait d’avoir dix ans et trouvait qu’il ne ressemblait à rien et qu’il détestait sa vie. Debout devant son père, ce dernier titubait et puait l’alcool. Il tenait un bâton à la main et dans un angle, l’une de ses sœurs pleuraient et se repliaient en remontant ses genoux, et tirant sur sa chemise de nuit tâchée de sang. Coligny l’interrogeait du regard mais ne reçut aucune réponse alors il demanda à son père qui se mit à rire comme jamais il ne l’avait entendu. Ce qui n’était pas le pire. Sa mère hurlait des mots que le jeune homme n’entendait pas. Elle était penchée sur le corps de Corentin, son aîné, qui gisait, mort dans son sang. Il avait tenté de venir en aide à leur sœur et l’avait payé de sa vie. Toute l’attention de Coligny était sur le bâton même si ses yeux étaient plantés dans ceux de son père. Ses frères et sœurs criaient tout autant et pleuraient aussi, et d’un calme dont il ne se crut pas capable, Col demanda ce qu’il avait fait à sa sœur. La réponse fut si odieuse qu’il en eut un coup au cœur. Il aurait dû le comprendre depuis longtemps. Deux autres enfants étaient entrés dans la famille et il réalisait que sa mère n’avait jamais été enceinte. Il n’avait de famille que le nom alors cet être abjecte se permettait de toucher aux filles lorsqu’elles étaient en âge d’enfanter. Toute l’horreur de la situation lui serra la gorge et son poing se serra sur le manche de son couteau. Le « père » leva le bâton qui retomba sur le sol. L’homme avait les yeux fixent, la bouche ouverte et un étrange silence venait de se faire dans la pièce. Il s’appuya au dossier d’une chaise et tomba lentement avec elle, une lame plantée dans le cœur. Coligny n’avait eu qu’un pas à faire et sans même se demander si ce qu’il faisait était bien ou mal, il prolongea son bras de toutes ses forces et le couteau se planta entre deux côtes, en plein cœur. Il venait de tuer son premier homme et ne regrettait rien. Son cœur était devenu sec avec le temps. Avec un geste froid, il récupéra sa lame, l’essuya sur le veston du monstre qui gisait au sol et le rangea dans son fourreau avant de regarder sa mère. Il se rendit à la chambre, prit une couverture et enveloppa sa « sœur » dedans avant de la conduire sur une paillasse. La suite fut assez vague. La milice vint constater les faits, lui posa quelques questions ainsi qu’au reste de la famille.

Légitime défense. Le verdict était tombé sans même l’ombre d’un procès. Le corps fut jeté dans la fosse commune et Coligny quitta à jamais cette vie. Mais sa réputation était faite. Il disparut pour descendre et descendre encore, le plus au sud possible pour s’éloigner de son passé. Cependant ce dernier le rattrapait à croire que sa vie était toute tracée depuis le jour où cet inconnu lui avait appris à tenir une arme. Il loua ses services de garde du corps, sa grande taille l’aidant à mentir sur son âge. Il apprit à monter à cheval et se trouva à protéger des convois, des hommes, des nobles, des membres de l’Eglise, des femmes, des enfants. Il avait déjà tué plusieurs brigands alors qu’il atteignait ses douze ans. Mais les choses ne s’arrêtèrent pas là. Bientôt, il fut payé pour tuer. Il savait se cacher, attendre sa proie durant des heures, chercher le meilleur moment et frapper avant de disparaître. On le contactait discrètement et on le payait une fois le travail effectué. Il ne posait aucune question et ne s’en posait pas non plus. Jusqu’à ce que sa route croise celle de deux individus qui lui proposèrent un contrat particulier.

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Quand il tremble, c'est de froid
Le.couillu
- Allez roulez mes petits amis et m'amenez la gagne !

Le Couillu lance les dés sur le berlenz et les regarde heurter le rebord de la piste. Un rictus déforme son visage tanné. Cette fois il ne peut pas perdre, il joue avec ses dés plombés.
Mazette !.. qui veut la fin, veut les moyens. Les deux sacs à vin qui lui servent d'adversaires ne sont que des boursemolles que ses poings calmeront si tentés ils étaient de le traiter de tricheur.

- Eh eh !! Une tierce ! Vous estes faits comme des rats ! Aboulez les deniers...Qui donne aux pauvres, preste à Dieu.... Allez je suis bon prince, c'est moi qui vous rince. Tavernier ! Une cruche de ton meilleur vin et par les couilles du Sans Nom de t'avise pas de nous donner de la pissette.

Un regard goguenard sur les bousiers et il chantonne :
Les dés que les déciers ont fait
M'ont dépouillé de mes habits
Les dés m'occient
Les dés me guettent et m'épient
Cela m'accable.

- Une autre partie ? Non ? Ah bah... Si vous ne voulez pas vous refaire tant pis ! J'espère que vous n'allez pas vous faire estriller par vos matrones... Enfin c'est vous qui voyez...

Il vide son godet et s'essuie d'un revers de la main avant d'éructer grassement. Il aurait bien tondu ras ces deux moutons... dommage cette bande de cuers de lièvre ne jouera plus ce soir. Il leur a juste pris de quoi ripailler mais il devra garder ses défroques un moment encore. Quel guignon ! Ses braies dont la couleur a depuis longtemps disparu sont d'un gris douteux et plusieurs accrocs laissent voir une peau tout aussi grise de crasse.
Soudain des criements se font entendre dans la rue. Il se lève pour s'enquérir de ce qui se passe. A la lueur des quelques flambeaux il devine une femme et voit un soldat charger un homme sur dos. L'homme semble raide mort. L'équipage prend le chemin du dispensaire. Le Couillu flaire la bonne affaire. Si ce gueux est mort, il n'aura plus besoin de ses braies ni de son mantel.
Discrètement il suit le soldat.

Il avait donc suivi le soldat et son précieux chargement jusqu'à l'hospice restant à bonne distance de l'équipage. Tapi dans l'encoignure d'une porte, il voit le soldat mettre genoux à terre pour déposer le macchabée.
De là où il est, il ne peut entendre ce qui se dit lorsqu'arrive une bachelette bien gironde, mais il lui semble que le soldat a du mal à se relever.
Le Couillu se gratte l'entrejambe tout en fronçant les sourcils. Il n'aime pas ça. Le gaillard est solide et ce n'est certes pas les quelques 1000 pieds qui séparent la fontaine de l'hospice qui peuvent expliquer sa sale trogne. Autre chose l'étonne. Visiblement l'homme estait un estranger, alors s'il est crevé, pourquoi l'avoir conduit à l'hospice et pas à la fosse commune ?
Par les cornes du Sans-Nom ! Cette histoire l'intrigue plus qu'elle ne l'inquiète. Il doit en avoir le coeur net.
Le soldat passe près de lui. Par habitude plus que par nécessité, il se colle à la muraille.
Le soldat ne l'a pas vu. Il attend que le bruit de ses pas disparaissent dans la nuit et quitte son abri.
Un groupe s'est formé, des bribes de phrases lui parviennent mais il retient que deux mots : médicastre, pestilence...
Soudain il s'arreste et déglutit.
Il a connu l'épidémie de peste noire et son cortège de charrettes remplies de cadavres. Il en a réchappé. Un instant il hésite à se mettre à recueillette, filer vite et loin. Mais l'appât du profit qu'il peut tirer de la situation le pousse en avant. Et puis un crevé ne fait pas une épidémie, il ne va pas trouiller sans savoir.

Il remonte ses braies, écarte légèrement une jambe pour remettre ses joyeuses en place, lance un crachat gras qui s'éclate contre le mur d'enceinte et s'avance dans le jardin de l'hospice : par les Saints couillus du Pape, il lui faut la vesture de ce mort à tout prix.

- Bien le bonsoir gentes damoiselles... Dites moi... on m'a dit qu'un soldat avait apporté un corps par icelieu et justement l'ami que j'attendais m'a fait faulx bonds. Je crains le pire... Pensez-vous que je puisse le voir pour m'assurer que ce n'est point de lui qu'il s'agit ?


Par les saints couillus du Pape, voilà que cette pucelle fait du zèle !
Au Sans Nom, la gore pissoue !!!
Il va devoir faire preuve d'ingéniosité pour parvenir à dépouiller le cadavre. Il n'est d'ailleurs pas loin de renoncer mais la souvenance du mantel bien épais le retient. Dame ! C'est que l'hiver approche avec ses frimas et il ne donne pas cher de sa peau avec les oripeaux qu'il porte. En fait, voilà : C'est une question de vie ou de trépas ! Son bliaud, jadis de laine épaisse, a connu des jours meilleurs quand il l'a volé sur le fil à linge d'une ferme.
S'il sait se contenter d'un mauvais brouet, il n'en est pas de mesme de la froidure qui perce la peau comme cent mille dagues acérées. Cette gourdasse ne s'imagine pas à quelle allure tourne les rouelles de son cerveau jamais en peine d'un mauvais coup.

- Des signes particuliers... à vrai dire je ne sais... Mais comprenez, damoiselle, je ne peux pas aller dire à son épousée que son mari est trépassé sans estre certain que c'est bien lui qui est raide mort étendu sur une table d'examen. Laissez-moi au moins jeter un oeil sans m'approcher... J'ai connu la grande peste qui n'a pas eu raison de moi et je suis solide. Tenez ! Je vais mettre un pan de ma chemise sur mon nez.

Et aussitôt, pour couper court à tout refus, il remonte un pan de sa chemise sur son visage. S'il pouvait au moins voir la pièce, à n'en point douter il trouverait comme y entrer sans passer par la porte... Sans laisser à la jeune femme le temps de faire un geste, il l'écarte et se dirige prestement vers l'hospice.

- Je vous propose un marché...

Un marché ? Elle a bien dit "un marché" ? Par le cul dieu ! Il est en terrain de connaissance là...
Il s'arrêta aussitôt et se retourna vers la drôlesse. Il réfléchit à toute vitesse, la jaugeant du regard. Après tout il avait tout à gagner à s'en faire une alliée.
Le mantel attendrait ; le macchabée n'allait certes pas s'envoler.
Il laisse tomber son pan de chemise.

- Un marché ? Et quel genre de marché ?


Et voilà que la gueuse lui met entre les pognes un marché qu’aucun ruffian ne pourrait refuser.

- Ainsi donc ma belle, tu as un contrat mais tu ignores qui est le commanditaire ? ça pourrait m’intéresser… Sais-tu que tu as de la chance de parler ablement ? Ton nobliau sera promptement saigné ce soir. Montre la couleur des écus, la moitié sur l’heure et l’autre lorsqu’il aura trépassé.


Voilà qui n’est pas pour lui déplaire et promet plus de profit que de détrousser un macchabée. Des contrats il en a honoré plus d’un. Jamais encore la moindre de réclamation n’est venue entacher son curriculum vitae. Il ne sait ce que cette puterelle fricote mais elle connait du beau monde. Ça lui suffit. Demain il sera loin, les poches pleines.

- - Un nom. Donne-moi simplement un nom.
- - De Chenot. Un enfant de huit ans. Un tit nobliau. Il est à la cure déjà mal en point à ce qu'on m'a dit, ce sera facile, il a déjà un pied de l'autre côté.


Le nom s’échange contre une bourse de cuir bien grasse.

- C'est cette nuit, tu n’auras pas d’autre occasion.


Un regard dédaigneux se pose sur la fille.

- Le travail sera fait. Et ne t’avise pas d’essayer de me rouler. Le Couillu n’aime pas les dettes.

La voix s’est faite dangereusement grave et ne laisse aucun doute sur les intentions du couillu.
Il n'a pas vraiment l'intention de s'occuper de l'affaire lui-même. Il va sous traiter et il connait celui à qui proposer le contrat.
Dacien_de_chenot
Justine

Ils n'avançaient pas très vite, au gout de la jeune fille. Ils étaient sans cesse arrêtés ou bloqués par quelque chose sur la route. Justine souriait, ou levait un sourcil, ou faisait une moue réprobatrice, mais n'ouvrait pas la bouche sur ce que faisait ou disait le sénéchal. D'ailleurs il ne lui avait pas adressé la parole depuis qu'il lui avait donné la couverture.

Cet élan la tenaillait d'autant plus. Quelle genre de compassion était-ce donc ? Celle d'un homme qui voulait vous rabaisser, se justifiant par le fait que vous étiez une femme et que vous étiez plus faible ? Ou celle d'un meneur qui prenait soin de ne pas perdre un "homme" de sa troupe ? Justine était interrogative mais cela la détournait de son inquiétude pour Dacien.

Lorsque la route devint plus praticable, Jerh décida de lancer la poursuite à une vitesse supérieure. Le cheval de la jeune fille, sans doute habitué, se mit à galoper pour suivre ses deux comparses. Justine se tenait fermement aux rênes, n'ayant soudain plus d'attention pour rien que de garder son assise la plus stable possible et de ne pas chuter.
Mais il lui sembla que l'animal ralentit, ce dont elle n'était pas mécontente vu comme son petit poids volait sur la selle. Cependant ce qui devait arriver arriva, et Jerh rapprocha sa monture, aussitot suivi du Maitre.

- Vous ne savez pas galoper plus vite ? Votre cheval a l'air de boiter. Que s'est-il passé ?

Elle rougit violemment, partagée entre honte et colère. *Eh non ! Je ne sais pas, messire le Parfait !!!* avait-elle envie de lui répliquer.

- Ah, il a un gros caillou qui s'est enfoncé dans le pied. Je vais l'enlever. Descendez du cheval, ce sera mieux pour vous.

Justine obtempéra sans un mot, sans un regard pour le sénéchal, et leva la jambe pour la glisser par dessus la croupe de l'animal, le menton relevé fièrement. Seulement, est-ce que ce fut le résultat d'un manque d'entrainement ou de malchance, la jeune fille se déséquilibra et se renversa sur le coté au lieu de descendre avec la prestance qu'elle s'était imaginée.

Elle serra des dents, pensant se ramasser la figure dans le sol boueux de la route, mais ce furent les bras fermes et musclés de Jerh qui la rattrapèrent. Elle resta un instant interdite, incapable du moindre mouvement.
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Dacien_de_chenot
Jerh

Jerh eut juste le temps de lâcher la jambe du cheval de Justine et de la rattraper. En fait il n'avait pas réfléchi une seule seconde, c'étaient ses réflexes qui avaient agi.
Il la tenait dans ses bras, il aurait voulu la serrer contre lui mais recevoir une gifle, il ne le voulait pas et puis il 'était pas du genre à profiter de la situation. Le jour où elle serait dans ses bras, se serait parce qu'elle l'aura voulu et non point par accident.

- Attention !

Il la redressa et l'aida à se mettre debout. Il lui sourit, timidement.

- Vous avez sous-estimé la fatigue.

Il s'adressa aussi au maitre en ajoutant

- Je pensais faire une halte dans une heure pour laisser les chevaux se reposer. Mais Vaillant ne peut pas continuer. On va s'installer là-bas !


Jerh leur montra un petit chemin. Il prit les rênes de Vaillant et du sien, un hongre gris pommelé qui répondait au nom de Zeus. Jerh aimait les histoires des dieux grecs et romains, le curé du village était un passionné et les soirs, il racontait des contes sur l'Olympe.
Vaillant boitait beaucoup. Dès qu'ils furent hors du chemin.

- Installez-vous le mieux possible ! Je m'occupe d'abord de Vaillant puis on va manger. Avec cette pluie, je ne pourrais pas faire du feu.

Le Sénéchal attacha les chevaux à un arbre. Jerh retira le caillou, le cheval se laissa faire mais hennit de douleur. Quand il eut enlevé le caillou, il lava le pied et il revint auprès de Haironthe et Justine.

- Il faut le laisser se reposer un peu. Justine vous ne pourrez pas remonter dessus aujourd'hui, même si vous devez être légère comme une plume

Il rougit en disant les derniers mots.

- Vous monterez derrière l'un de nous deux.
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Dacien_de_chenot
Justine

Les joues de Justine prirent quelques degrés de plus, mais vu que son visage était déjà rosi par le froid cela ne se vit que peu. Son visage tout près du sien, elle le regardait. Ses yeux étaient si clairs, comme un lac d'été où il aurait fait bon se baigner.

Le charme se rompit lorsqu'il parla et la reposa sur ses pieds. La jeune fille balbutia rapidement quelques mots.

Oui ... effectivement ... je vous remercie ...
- Installez-vous le mieux possible ! Je m'occupe d'abord de Vaillant puis on va manger. Avec cette pluie, je ne pourrais pas faire du feu.


Cette expédition ne se présentaient pas sous les meilleurs hospices. D'abord le temps qui était contre eux, la foule les avait retardé, le cheval boitait ... Quels obstacles se mettraient donc encore sur leur chemin jusqu'au petit duc ?

Justine alla se caler tout contre un tronc énorme, bien abritée de la pluie par la densité des branches. Ses bras se resserrèrent sur elle, malgré la couverture elle sentait bien le froid lui mordre la peau. Les hommes s'occupèrent d'abriter le mieux possible les chevaux, et la jeune en profita pour sortir du pain, de la viande séchée et du fromage. Ils devaient reprendre des forces, sinon le froid humide viendrait à bout de leur résistance.

- Il faut le laisser se reposer un peu. Justine vous ne pourrez pas remonter dessus aujourd'hui, même si vous devez être légère comme une plume.

Un nouveau rougissement de la demoiselle vint en écho à celui du sénéchal au souvenir de la sensation de ses bras sur elle.

- Vous monterez derrière l'un de nous deux.


Oh ! ... Je ...


Cruel dilemme ! Son regard alla de l'un à l'autre. Instinctivement elle aurait choisi Haironthe bien sur, mais elle se demanda si cela aurait été poli de faire un tel affront à Jerh, après tout il avait été correct avec elle depuis le début de l'expédition, c'est elle qui se faisait une montagne d'idées à son sujet. Elle ne savait que répondre et opta finalement pour la diversion.

Asseyez vous, il nous faut nous restaurer.

Elle coupa trois tranches de pain, posa dessus quelques morceaux de viande et de fromage, pour leur en tendre chacun une. Il serait temps de réfléchir à la question le moment venu.
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Dacien_de_chenot
Maitre Haironthe

Un mauvais génie semblait prendre un malin plaisir à parsemer leur route d'une série d'embûches : la foule, la pluie, et maintenant le cheval qui s'était blessé. Visiblement ils n'avaient point d'autre choix pour le moment que de prendre une petite pause pour se restaurer avant de reprendre la route. Seulement, à chaque seconde le jeune Dacien pouvait s'éloigner un peu plus et ainsi ils perdraient l'avance qu'ils avaient acquis après leur chevauchée.

Haironthe regarda les deux jeunes gens quand le sénéchal déclara que Justine devrait monter derrière l'un deux. Ne voulant pas réitérer son erreur de la fois précédente, le précepteur préféra se taire et se contenta de sourire chaleureusement à Justine et à Jehr.

Le précepteur prit le pain que lui tendait la jeune femme en la remerciant :

- Mille fois merci ma chère.

Après avoir mordu dans le pain, la viande et le fromage, Haironthe se tourna vers le Sénéchal :

- Espérons que ce nouveau contre-temps ne soit que peu préjudiciable
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Dacien_de_chenot
Jerh

Jerh était soucieux. La plaie de Vaillant était profonde mais il la surmonterait mais pendant combien de temps pourra-t-il les suivre ? Il n'était pas question de le laisser là. C'était un étalon de grande valeur mais il y avait le petit duc qui lui .. Non, il n'y avait aucune estimation pour le fils des ducs de Cunéo. Jerh ne s'était pas attendu à ce genre de responsabilités quand il avait été nommé sénéchal.

Il prit le pain et oublia de remercier Justine tant il était perdu dans ses interrogations, quand il s'en rendu compte, il lui sourit.

- Excusez-moi ! Merci. Je me demande si nous arriverons à Dié ce soir. Normalement il faut deux jours pour y aller. Je pensais qu'en poussant les chevaux au maximum et sans nous reposer vraiment, nous y arriverions. Les chevaux que j'ai choisi sont les meilleurs de l'écurie. ils sont rapides et endurants seulement avec la blessure de Vaillant...


Il laissa sa phrase en suspend, se rendant compte qu'il n'avait pas à embêter la jeune fille avec ses préoccupations. Elle était si belle, malgré la pluie qui dégoulinait sur son visage. Son cœur se gonfla et il balbutia.

- On va surement trouver un relais sur la route !


Il se leva subitement et alla prendre une gourde dans ses fontes. et il la tendit au maitre

- Prenez une goutte, c'est du génépi avec des herbes. Ça réchauffe à l'intérieur et nous empêchera de tomber malade....En principe ! N'en prenez pas trop !


Il attendit qu'il eut fini pour passer la gourde à Justine

- Attention c'est très fort !


Sa voix s'était faite douce malgré lui, mécontent de lui. Il se tut. Il ne devait pas se laisser aller. Comment faire avec Vaillant ? S'Il ne trouvait pas de relais ? Il savait qu'il y en avait un mais il ne se rappelait plus sur quelle route, il était.
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Dacien_de_chenot
Justine


Justine ne comprenait rien aux hommes ! Voila la vérité. Bien sur, elle n’était pas la plus belle femme de tous les royaumes, ni la plus riche, ni la plus intelligente, mais Justine s'estimait dans une bonne moyenne tout de même. Elle était jeune, pas si vilaine que cela, suffisamment instruite et elle progressait encore grâce aux possibilités que lui offrait la vie auprès des ducs.

Elle les écouta la remercier l'un après l'autre, le premier avec un manque d’intérêt flagrant, le deuxième ... bah, le deuxième elle ne savait plus quoi en penser. De sa colère froide et presque effrayante, il semblait à présent timoré face à elle, comme si elle le gênait mais d'une autre manière qu'elle n'aurait pu expliquer. Puis il se leva, ne finissant guère son explication, peut-être souhaitait-il juste s’éloigner d'elle ...

- Attention c'est très fort !


Justine le regarda, de plus en plus intriguée. Sa voix était douce, pourtant il y avait de la retenue dans ses paroles, comme s'il hésitait entre deux attitudes vis à vis d'elle. Qu'avait elle bien pu lui faire ?? Elle n'en savait fichtre rien.

Elle porta un regard sur le Maitre et soupira. Attrapant la gourde, elle oublia la mise en garde et bu rapidement une gorgée, ce qui la fit s’étouffer. Entre deux quintes de toux, la main tenant la gourde tendue vers Jerh, elle réussit à articuler.

Je pense ... qu'il faut ... se remettre en route ...
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Dacien_de_chenot
Yollande



Yollande et son compagnon ne prirent pas de retard. Ils mangèrent sur le pouce et laissèrent les chevaux se reposer le minimum vital. Pourtant ils n'arrivèrent pas à Dié le même jour. il en fallait deux pour y arriver sauf à tuer les chevaux. Ils dormirent à même le sol détrempé, la pluie tombait toujours, une pluie fine et tenace. Ils étaient trempé jusqu'aux os. C'est donc le lendemain qu'ils arrivèrent en début de soirée. Il faisait déjà nuit et leurs chevaux étaient exténués ainsi qu'eux-mêmes.
Ils entrèrent dans la première auberge qu'ils trouvèrent. L'aubergiste leur lançant un regard noir, Yollande et Hubert dégoulinaient d'eau et de boue. Ils étaient dans un état lamentable.

- Nous voudrions une chambre et nous voulons prendre un bain chaud. Mais avant tout ça, vous n'avez pas vu un enfant ? Un petit garçon, tout seul ?


Le regard de l'aubergiste se fit plus méfiant encore

- Un enfant ? Tout seul ? et qu'est ce que vous lui voulez à cet enfant ?

Hubert posa un écu d'argent sur le comptoir

- Que du bien. Il s'est enfui et on doit le retrouver. Vous savez où il est ? Cet écu est votre si c'est oui !

L'aubergiste jeta un regard plein de regrets sur la pièce mais il ne savait pas où était l'enfant et l'allure des deux zigotos qui étaient face à lui, ne l'encourageait pas à mentir. Il savait reconnaitre les gens dangereux et ces deux là l'étaient incontestablement.

- Dommage ! mais je sais rien. Mais je peux me renseigner pendant que vous prenez votre bain. Vous allez descendre pour manger ?


Hubert et Yollande étaient à bout de souffle et ils auraient préferé rester se reposer mais ils avaient une mission et pas le temps de trainer.

- Oui, nous allons descendre !

Ils montèrent prirent un bon bain et se changèrent, la pluie n'avait pas mouiller les vetements qui étaient dans le sac. Cela se voyait que Yollande avait vécu longtemps sur les routes, elle savait faire un paquetage.

Ils restèrent tard dans la salle commune, interrogeant tous ceux qui y passaient mais personne n'avait vu un enfant richement vêtu avec un cheval. De guerre lasse, ils remontèrent et s'effondrèrent sur le lit pour se lever avant l'aube et repartir à la chasse.

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Dacien_de_chenot
Jerh

Jerh dissimula son sourire quand il vit que Justine reprenait son souffle. Son génépi était distillé par un villageois d'un village de Luserne et il n'y allait pas avec le dos de la cuillère.

- En effet nous repartons ! Cette satanée pluie ne se décide pas à s'arrêter. Tant pis ! Maitre Haironthe vous êtes prêt ?

C'était une question de routine, de ce qu'il savait sur le précepteur, même avec une jambe cassée, il aurait suivi.
Jerh rassembla les affaires, regarda le pied du cheval et secoua la tête.

- Je crains qu'il ne puisse nous suivre. Je vais le lâcher, peut-être qu'il rentrera à l'écurie tout seul. On ne s'imagine pas ce que ces animaux sont capables de faire. ils sont très intelligents.

Tristement, il retira la longe de Vaillant mais lui laissa sa selle. elle était onéreuse certes mais il y avait les armes des ducs de Chenot dessus. Il espérait que si quelqu'un trouvait le cheval, il le ramènerait dans un des châteaux contre récompense. Personne en Savoie n'achèterait une selle avec les armes des ducs de Luserne dessus.

Il monta en selle et il alla tendre la main à Justine pour qu'elle monte devant lui. Ce qu'elle fit à sa grande surprise. En fait il n'avait pas réfléchi, trop préoccupé par Vaillant, il avait agi à l'instinct et son instinct voulait Justine avec lui.

C'est quand il sentit son corps appuyé très légèrement sur lui qu'il réalisa son impudence, et si elle avait dit non ? Il ne réfléchit pas plus avant, humant le parfum de ses cheveux mouillés, la pluie s'abattant toujours sur eux. Jerh fit signe à Haironthe

- Prêt ? Au galop !

Il dit à Justine à son oreille.

- Accrochez vous à ma taille, on va allez vite !

Et des qu'elle le fit, il lança Zeus au galop. Le cheval méritait son nom, il filait, rapide, et vif. Le cœur de Jerh menaçait d'exploser de bonheur. Justine était contre lui, elle le serrait fort, et son cheval filait comme le vent. Il adorait galoper. Il ne pensa à rien d'autre, oublia pour le moment le fils des ducs qu'il cherchait, Vaillant qu'il avait du abandonner. Il goutait simplement ce bonheur fugace.

Puis la nuit tomba, et les chevaux ne pouvait plus avancer, même au trot. Jerh dut admettre que Dié était plus loin qu'il ne l'avait cru. Il fallait qu'ils s'arrêtent.

Il descendit d'abord de son cheval puis aida Justine à descendre à son tour. Puis s'adressant au précepteur

- Nous allons passer la nuit ici. Hélas, nous ne pouvons pas aller plus loin. La ville est encore loin. Je n'ai qu'une seule tente, je la monterais pour mademoiselle Justine, cela l'abritera de la pluie. Elle n'est pas assez grande pour qu'on fasse un grand feu mais j'ai un petit réchaud, on va pouvoir avoir au moins de la tisane chaude. Voulez-vous m'aider ?
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Dacien_de_chenot
Justine

Justine avait eu vite fait de resserrer sa masse de vêtements contre elle. Rester assis ici plus longtemps ne leur ferait qu'attraper la mort à tous. Elle espérait bien que quelques heures de galopades les amèneraient à une auberge, dont n'importe quel niveau de confort serait mieux que le creux d'un arbre humide.

Jerh s'occupa des montures, libérant celle qui était la sienne, et elle comprit qu'il lui fallait prendre la décision maintenant et rapidement. C'était un homme d'armes et excellent cavalier, elle ne risquerait rien avec lui ... Justine jeta un regard discret vers Haironthe qui ne bronchait pas.
Aussi lorsque le plus jeune des deux cavaliers lui tendit la main, elle n'hésita pas et la prit. Elle fut comme transportée dans les airs pour se voir retomber en douceur devant le sénéchal. Heureusement le froid avait déjà bien rougi son visage, et rien ne pouvait paraitre de son trouble, trouble qu'elle n'expliquait d'ailleurs pas.

Son murmure la fit frissonner. Et si sa déduction était fausse ? Si c'eut été avec le Maitre qu'elle aurait été plus en sécurité ? Soudain, il lui semblait sentir le danger dans tout son corps, chaque fibre en tremblait. Mais elle n'avait guère le choix à présent, et elle fit ce qu'il lui dit, ne voulant pas chuter. Ses mains se resserrèrent contre lui, leurs deux corps tout près mélangeaient leurs chaleurs et il lui parut se réchauffer légèrement.

Lorsqu'ils furent forces de s'arrêter, la jeune fille sauta à bas de la monture, rattrapée par les bras forts de Jerh. Pour la seconde fois en une journée, elle se retrouvait dans ses bras, il fallait absolument que cela cesse !

Puis quand il parla de monter la tente pour elle, Justine se sentit gênée. Mais que pouvait-elle dire ? Non, je vais dormir dehors, prenez la tente ... Impossible.

Je ... Je suis désolée, je n'aurai pas du venir ... Je vous retarde et ... Avec ce temps ...

Elle se tut. Aucun mot ne changerait de toute façon la situation, il fallait faire avec. Elle laissa les hommes monter la tente et tenta de faire un feu avec le bois humide aux alentours. Décidément, Dacien en faisait de belles ! Elle se dit que la punition devrait être à la hauteur cette fois-ci. Mais après coup, elle espéra que le cher enfant avait eu plus de chance qu'eux et ne se trouvait pas sous la pluie à grelotter de froid. Oh non ! Il ne fallait surtout pas qu'il attrape froid, qu'il ait la fièvre, ou autre. Elle ne se le pardonnerait jamais.
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Dacien_de_chenot
Maitre Haironthe

La chevauchée dura pendant un long moment. Le Mestre galopait juste derrière Justine et le Sénéchal, juchés sur la même monture. Voir les deux jeunes personnes monter en selle avait provoqué un léger sourire sur le visage du précepteur. La situation entre ses deux comparses de recherches était pour le moins cocasse.

Le froid ne les ralentit pas, bien couverts qu'ils étaient. Haironthe, durant la chevauchée, plongea dans une sorte de transe du fait du bruit régulier des sabots martelant le sol, de l'environnement qui se brouillait du fait de la vitesse. La vitesse avait cet étrange pouvoir de vous faire entrer dans un monde de distorsion des sens. La perception changeait et devenait plus floue, complète dérégulation des sens.

Mais le nuit, force irrésistible, gagnait inlassablement du terrain ; et bientôt ils n'eurent d'autre choix que de s'arrêter.

Pestant intérieurement, le Mestre descendit de cheval, toujours silencieux.

- Nous allons passer la nuit ici. Hélas, nous ne pouvons pas aller plus loin. La ville est encore loin. Je n'ai qu'une seule tente, je la monterais pour mademoiselle Justine, cela l'abritera de la pluie. Elle n'est pas assez grande pour qu'on fasse un grand feu mais j'ai un petit réchaud, on va pouvoir avoir au moins de la tisane chaude. Voulez-vous m'aider ?

Regard vers le Sénéchal, puis le précepteur d’acquiescer avant de dire :

- Oui bien sur Sénéchal. Il s'avança vers le Sénéchal pour lui prêter main forte. Bien que dois-je faire ?
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