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[RP] Le contrat

Simeon.charles
Qui a dit que je voulais que tu sois une ombre ? Qui a dit que je veux que tu t’en ailles ? Qui t’interdit de mal prendre ce que tu veux ? Je veux que tu restes. Je veux que tu sois heureuse… à mes côtés. Je t’ai laissé partir une fois, je ne ferais pas deux fois cette erreur. Je veux que tu vives avec moi. A côté de moi. Contre moi ou tout simplement dans mon champ de vision. Qu’importe.

Une fois qu’il eu relâché bras de la jeune fille, il passa le sien dans le dos de Maxine et augmenta la pression de leurs deux corps en la plaquant encore plus contre lui. Il sentait le sang battre ses tempes et ces battements furent encore plus fort quand ressenti la poitrine de la petite béarnaise contre son torse.

Comme je te l’ai dit, je veux que tu restes. Je veux que tu sois heureuse à mes côtés. Je veux t’entendre soupirer. Je veux t’entendre rire, maudire et jurer. Je veux être là quand tu es triste. Je veux partager tes rires. Je veux encore sentir la chaleur de ton corps lorsque je dors. Je veux sentir l’étreinte de tes bras. Je veux que parfois nos bouches se rejoignent. Je veux sentir tes jambes se nouer à ma taille. Je veux… Je veux que toujours ce soit au creux de mon oreille que tu gémisses de plaisir la nuit.

Il desserra l’étreinte à ce moment.

Tu es libre de le vouloir ou non. Mais je voulais que tu le saches.
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Maxine.
Elle vécut ce contact physique rapproché comme une souffrance qu'on lui aurait imposé. Pleine d'angoisse, elle se dégagea brusquement en jurant intérieurement mille dieux qu'elle lui ferait payer. Il la traitait comme une femelle, la réduisant à un état sexuel primaire, en pensant en plus qu'elle n'avait qu'à acquiescer pour être à lui, c'était écœurant, humiliant, révoltant, c'était intolérable, totalement hors de propos, c'était si fort et si horrible à la fois que son attitude ne générait que du dégout en elle, elle aurait voulu le fuir, le frapper, réduire à l'état de néant cet aveu ridicule et n'en faire qu'un vague souvenir puéril.

Ne me dis plus jamais ça. Je ferai comme si tout ça n'avait jamais eu lieu. Tu te fourvoies ; tu ne sais même pas qui je suis. Tu ne parles qu'avec ton corps et pas ta tête, c'est une pulsion, ça ne veut rien dire, tu es décevant.

Ses pensées comme son discours partaient dans tous les sens. Plein d'envies contradictoires lui traversèrent l'esprit, sans qu'elle ne sache laquelle prédominait.
Le fuir. Le blesser. Rester, faire ce qu'il disait. Elle avait couru tellement longtemps qu'elle ne savait plus très bien ce que ça faisait qu'avoir une sédentarité relative : une maison, une famille, un... Elle pensa à l'éventualité de le retrouver dans son lit tous les soirs, aurait voulu vomir à cette simple idée ; les hommes qui dorment sont si vulnérables, et elle ce qu'elle voulait c'était un homme imperturbable, un homme fort, pas une tapette prêt à répondre à une exigence hormonale en abandonnant le reste...!


Ne sois pas stupide et arrête avec cette idée. J'appartiens aux bas-fonds et toi tu pisses dans un pot de chambre : on est pas du même monde. Ce que tu dis est totalement hors de propos. Quitte cette idée. C'est aussi aberrant qu'un loup et une brebis. C'est voué à l'échec. Les proies et les chasseurs ne s'accouplent pas, c'est contre nature.

Sur ce, elle tourna les talons et marcha d'un pas décidé, reprenant ses esprits au rythme régulier de ses chausses sur la chaussée. Une, deux, une, deux, battant l'air et serrant son châle au dessus de ses épaules, une, deux, rapidement, aussi vite que son coeur qui battait la chamade. Elle avait envie de vin, de viande, de sauce, de sexe, elle était perturbée par cette intrusion brutale dans sa vie et par son aveu qui le rendait aussi crédible qu'un gamin.
Et aussi par la nature qui se rappelait à elle en lui faisant ressentir des choses qu'elle n'avait pas ressenties depuis des années. Un fil d'électricité qui la traversait des pieds à l'occiput, une sorte de gouffre indescriptible d'où s'échappaient mille envies et de nouveaux désirs, où résonnait sans s'arrêter sa dernière phrase. Je veux toujours que ce soit au creux de mon oreille que tu gémisses de plaisir la nuit.


Elle accéléra le pas, aurait souhaité que le vent la fouette, la rafraichisse, rentra le cou entre les épaules et plissa les yeux pour éviter les bourrasques. L'hiver lui redonnerait une contenance que la chaleur de son bas-ventre tentait d'empêcher.
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Simeon.charles
La tête à la chevelure bouclée, limite hirsute, s’inclina sur le côté alors qu’elle s’éloignait de lui. Le loup, la brebis. Le chasseur et la proie. Un rictus s’étira sur son visage, il n’était ni loup, ni brebis. Il était une vipère élevée par des salamandres comme le rappelaient ses armes. En lui, le feu des Saint Just et le poison du Livel-Rees. Il n’était que la proie de ses propres envies, mais n’avait rien du chasseur. Les chasseurs traquaient par besoin, lui pouvait devenir qu’un prédateur n’ayant pas d’autre but que celui de semer mort et destruction. Le prenait-elle sérieusement pour une oie blanche ? Pensait-elle sérieusement qu’il avait grandi avec une cuillère en or dans une main et un mouchoir brodé dans l’autre ? Lui ? Le fils d’une ribaude et d’un indélicat marchand artésien ? L’imaginait-elle prenant des leçons de bienséance ? Prenant quelques petites douceurs dans les jardins l’après-midi ? Lui qui, tout d’acier vêtu, avait franchi la Birse pour massacrer une troupe de suisses ? Lui qui avait sans remord rejoint la cavalerie huguenote lors de ses raids meurtriers sur les villages ayant trop de « papistes ». Lui qui avec son pieu de fer avait bousillé tant d’hommes. Lui qui avec son pieu de chair avait ruiné la vie de tant de filles. La colère teinta dans son esprit et fit bouillir son sang. Il rugit.

Stop !


Stop oui. Il ne voulait pas lui faire de mal, mais il ne voulait plus être repoussé. La « petite tête » entrainant parfois la grande il fut envahi par des pensées lubriques alors qu’il accélérait le pas.

Vous !

L’horrible vouvoiement.

Vous ! Cessez immédiatement de me repousser. Vous, vous cessez immédiatement de me prendre pour un de ces cols blancs de béni-oui-ouis. Vous me prenez pour une oie blanche ? Je peux vous montrer à quel point vous êtes la plus blanche des deux. Tòca-i se gausas*




*Touche-moi si tu oses.
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Maxine.
Le bruit de ses pas et de ses ordres martelaient l'air et résonnaient en elle : fuis ! Elle entendait l'intime supplication de son instinct en réponse à ses mots, et en une seconde elle y répondit, s'élançant, bondissant comme un chat pour être hors de sa portée.
Elle avait peur, elle bouillonnait, tremblante et pleine de regrets... Qu'il était doux tout à l'heure et sévère désormais !


Siméon...! glapit-elle d'une voix qu'elle ne reconnaissait elle-même plus du tout. Reste où tu es et ne m'approche plus !...

Ce-disant, comme si la confiance en sa propre menace lui disparaissait déjà, elle continuait à courir pour s'éloigner de lui. Au vol ses cheveux se défirent, s'inclinant dans le ciel derrière elle. Le châle l'étreignait, elle y vit un moyen de rester prisonnière, voulut s'en défaire, eut peur de perdre du temps ; il fallait fuir !

Elle avait peur de lui, de sa volonté, sa force, ses menaces. Aux tournants des rues elle prenait des virages secs, bousculait les gens, enjambait les caisses et déchets, cherchant à disparaître parmi la foule en jetant de temps en temps un regard apeuré derrière elle ; mais déjà l'adrénaline montait et brûlait ses joues, floutait son regard : était-il à droite ou à gauche ? Etait ce lui si près, ou lui si loin ?
Elle aurait ri de ce jeu du chat et de la souris si elle n'avait pas à ce point peur de sa réaction lorsqu'il l'aurait attrapée. Cette fois ci plus que nulle autre, il fallait gagner.

Une ruelle, une deuxième. A la plus sombre troisième elle fit volte-face, croyant un guet-apens trouver pour se cacher et l'y perdre, pour trouver un pan d'une échoppe, un tonneau renversé, la porte retournée d'une taverne ou un buisson où disparaitre, mais la ruelle était close d'un mur trop haut pour qu'elle le franchisse. Elle rugit, voulu faire demi-tour. Etait-il déjà là, prêt à la réceptionner ?


Elle respirait avec peine, sentait le sang cogner dans son poignet en voie de guérison. Son coeur battait la chamade et elle ne savait pas pourquoi. Ou la peur de le voir apparaitre. Ou la peur de l'avoir perdu.
L'air en tous cas manquait dans sa poitrine, ce que le silence et la désertion de la ruelle n'aidait en rien ; s'il lui prenait l'envie de l'étrangler pour l'honneur dans l'obscurité de ces maisons, on y verrait son cadavre que dans des heures et des heures.

Elle fit quelques pas en arrière, défaisant enfin le châle qui l'oppressait. Dessous y siégeait une gorge trépignante et palpitante, une gorge de petite souris. Luisante et cramoisie, comme ses joues. On ne distinguait de calme et de gris que ses yeux angoissés, qui visaient la naissance du cul de sac en attendant de l'y voir poindre. Elle recula encore, trouvant finalement contre son dos le froid glacial d'une cloison de briques, qu'elle aurait voulu repousser de ses omoplates sans rien y pouvoir. Elle tenta de se calmer, écrasa ses doigts froids contre ses joues pour les refroidir...
Calme toi, murmura t'elle pour elle même. Il ne te trouvera pas. Il ne pensera pas que tu es assez idiote pour te fourrer dans la gueule du loup si facilement.

A moins que ça ne soit, justement, l'idée qu'il ne la trouve jamais qui lui soit si difficile à supporter.
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Simeon.charles
Et voilà ! Il poussa un soupir à fendre une pierre en deux. Pourquoi faisait-elle ça ? Il était gentil, elle le repoussait car trop gentil. Il se faisait plus dur, elle le repoussait. Maudite femme, elle le rendrait fou un jour ou l’autre. Ou peut-être l’était-il déjà et de fait il ne la comprenait pas. Alors qu’il allait tempêter, elle se changea en courant d’air et disparue dans la nuit. Il ne se lança pas à sa poursuite, se contentant de la garder en son œil. La rue n’était pas assez calme pour déchaîner l’ouragan de colère qui commençait à gronder en lui. Elle était loin désormais, mais elle était captive. Toulouse fermait ses grandes portes à la demande du maître des clefs et celui-ci n’était autre que Siméon. Une fois les portes closes, nul ne sortait ou n’entrait sans risquer de se rompre le cou ou de se faire prendre par la milice bourgeoise. Puis… il connaissait la ville, elle non. D’expérience, lorsqu’il était à Constantinople, il savait que lorsque l’on fuyait on avait tendance à éviter la foule et les ruelles.

Son premier réflexe fut d’interpeller un des soldats du guet, afin de lui faire lancer un appel à la vigilance et demander à ce qu’on ferme la ville ainsi que tous les quartiers un peu éloignés. Il prit également son cheval, quatre jambes en valaient mieux que deux. Il ne lui restait plus qu’à remonter la piste demandant qui fut bousculé, quelle caisse fut renversée…

Les pas du cheval martelaient lentement le sol, le Bâtard d’Artois avait repérée sa victime. Il sauta à terre et quitta son manteau qui glissa au sol.


Pourquoi ? Pourquoi me forces-tu à sceller l’un de nos destins ici et maintenant ? Aurais-tu peur ? Toi la grande courageuse se prenant pour un loup ? As-tu senti que tu allais sur un terrain glissant ?

Il sentit ses propres mains avant de les tendre vers elle puis reprit d’une voix glaciale.

Sens mes mains. Tu y décèleras sans doute l’odeur de l’homme qu’on étrangle, ou celui de la vierge captive qui va perdre son pucelage. Peut-être que tu distingueras même l’odeur du curée qu’on fait rôtir dans sa cheminée. Tu as peur ? Allons…. Pas toi. Pourquoi aurais-tu peur de moi ?


Une de ses mains retourna à sa ceinture et en tira son poignard, mais au lieu de la menacer avec, il lui le tendit par le manche.

Prends-le et tue-moi si tu le souhaites. Mais moi je vais t’enlacer, t’embrasser et te caresser.
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Maxine.
Tu... Tu... Elle balbutia une phrase de défense sommaire, ne trouvant plus ses mots. Les mains tendues, paumes dressées vers lui comme pour maintenir une distance respectable entre eux deux, une distance de sécurité, son coeur trépignait et ses pieds faisaient de même. Ainsi, elle se dandinait d'une jambe sur l'autre, gênée comme jamais. Tu... Tu ne comprends pas, c'est pas ce que j'ai voulu dire... Siméon, le loup, c'est pas moi, c'est t... Elle se tut, doutant de véritablement le calmer. En avouant qu'elle se trouvait faible devant lui, elle incarnait plus encore une position de soumission et le laissait, prédateur, libre de venir saisir ce qu'il désirait. Je ne te force à rien, rajouta t'elle. Le seul qui force à quoi que ce soit c'est toi-même. Tu es le loup, tu attaques, tu ne peux pas m'en vouloir de fuir, tu ne peux pas m'en vouloir de provoquer, Tu provoques, tu interpelles, c'est toi qui force le destin.

Il lui parlait comme jamais il ne lui avait parlé avant. Tant de froid dans sa voix qu'elle se demanda si le même homme avait parlé avant, avait trahi ses sentiments, parlé d'amour, d'envies, ou si elle avait mal entendu et que tout n'avait jamais été que bestial et primaire. Elle avait probablement imaginé quelque chose s'approchant de l'affection, quand ce qu'il avait voulu traduire jusque là n'avait rien de romanesque et de beau : ce qu'il voulait c'était du sang, c'était des vierges et comme il le disait lui même, des cuisseaux de prêtre dorés à la broche.

Arrête toi. Reprends toi. Tu me fais peur. Elle redressa les mains vers lui s'en protégeant encore plus. Le recul n'était plus possible contre le mur, et elle ne pouvait pas non plus bondir d'un coté ou l'autre de lui, il l'aurait attrapée avec l'une de ses paumes, aussi larges que ses hanches, et alors il l'aurait peut être étranglée, comme ses mains tendues le laissaient croire, elle savait en tous cas, que la fuite en avant n'était pas une possibilité. Je ne peux pas croire que tu aies fait toutes ces choses... Elle eut un hoquet dans la voix, comme un soubresaut, qui se perdit alors dans les aigus. Aucune tentative de camoufler sa peur si visible qu'elle était blême, opaline aux reflets qui traversaient à travers la ruelle. Qu'avait-il fait ? Que ferait-il ?

Ne me touche pas. Je prendrai ton poignard s'il le faut.

Ce qu'elle n'avait pas hâte de faire ; s'il fallait rentrer l'arme dans un corps ou un autre, elle préférait repousser ce moment. Elle préférait le prévenir, lui sommer de s'arrêter et de se maîtriser. S'il marchait encore vers elle elle l'arrêterait en le frappant, ou tout du moins...

Essayerait.

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Simeon.charles
Mais….

Il abaissa comme vaincu. La brise lui caressait les joues mal rasées et s’engouffrait dans ses cheveux poivre et sel. L’œil non-bandé se tenait braqué sur elle. Les doigts de sa main droite se détendirent, lâchant la pression qu’ils avaient sur la lame et qui faisait blanchir la jointure de ses doigts et couler un filet de sang le long de l’arme. Désormais le liquide carmin tachait le sol, goutte à goutte, à côté de son pied droit. Ses épaules se soulevaient au rythme de sa respiration qui se faisait lente et profonde. Il demeura, là, stoïque comme un aventurier gascon s’apprêtant à briser à coup d’hallebarde une charge de cavalerie. Il inspira plus profondément encore avant de souffler à mi-voix :

… J’ai fait toutes ses choses. Je pourrais faire encore toutes ses choses, voire bien pire, si mon clan, ma famille, me le demandait. Oui ma belle, je peux voler, navrer, piller, rançonner, violer, incendier, faucher et tuer sur demande des miens. Je peux être pire que peste rouge, un véritable cauchemar pour les populations qui ferait passer Attila pour un chérubin.

Il fit encore un pas dans sa direction, jusqu’à ce que les paumes tendues de la jeune femme le touche.

Mais je peux aussi plus doux que miel, plus protecteur que le chien de garde, plus aimant que cupidon, plus joviale que Bacchus ... Fais-moi confiance et tu verras mes bons côtés. Apprécie-moi et tu verras en moi un allié fiable et fidèle. Aime-moi et ta vie sera douce et celle de ton ennemi ne sera que ruines et désolation.

Puis d’une voix presque suppliante contrastant parfaitement avec son attitude bestiale.

Embrasse-moi…

Vas-y la belle, embrasse la bête.
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Maxine.
Ses épaules s'affaissèrent et elle se détendit soudain. Sans qu'elle ne le réalise, suivant le rythme de sa respiration telle qu'elle la distinguait à travers sa silhouette trapue, elle se mit à inspirer et expirer aussi lentement que lui. La pression retomba, ainsi que le danger immédiat qui semblait être le sien se dissipait ; non, il ne la tuerait pas aujourd'hui. Son discours quoique emprunt de force et de violence avait quelque chose de très triste. Elle le jugea malheureux, pleurant des larmes de sang sur le sol.

Tu t'es fait mal à la main.

L'évidence.

Elle s'approcha alors, aux abois, si peu rassurée qu'elle tâtait le sol du bout du pied avant chaque pas, comme pour préparer un bond de coté ou une fuite s'il changeait à nouveau de ton. Ainsi proche, elle vit les petits mouvements discrets des poils minuscules sur son menton, qui flottaient dans tous les sens, et sa tignasse parcourir des trajets régis par le vent ; elle était si proche qu'elle sentait l'écho de sa propre respiration sur sa joue, et la chaleur liquide qui glissait de sa main jusqu'aux pavés.


Tu saignes, dit-elle d'une petite voix. Elle prit alors avec la plus grande délicatesse du monde le petit poignard et le dégagea de son étau de chair, tressaillant au bruit que firent alors ses doigts : comme une déchirure multiple de petits tendons, même s'ils n'avaient pas l'air trop atteints.
N'osant pas redresser le nez vers lui, qu'elle savait juste au niveau de son front, sentant sur elle un nuage chaud à chaque respiration, elle défit son bandage et l'entoura en secondes noces autour de ses phalanges lacérées.
C'est pas très malin.

Ils étaient comme dans une arène, opposés, face à face, rincés de s'être combattus avec autant de hargne. Elle en tous cas ne s'en sortait pas d'un affrontement si perpétuel, éprise, l'emprise de son propre ego et de sa colère l'empêchant de capituler. Lutter contre lui était un leitmotiv évident qui rendait sa journée gaie d'une certaine façon ; que se passerait-il si elle cessait ?
Être heureuse de cette façon lui semblait impossible. Ils étaient fait pour se détester, et tout s'était toujours merveilleusement bien passé ainsi. La situation n'avait pas d'intérêt à changer.

Sans s'en rendre compte, tenant toujours la grosse main blessée entre les deux siennes, Maxine relevait le regard vers lui en s'attardant d'un détail à un autre, comme partant à la découverte d'un tableau ; ci les reliefs de sa veste, les galons usés, la chemise salie, le torse se soulevant doucement, les vaisseaux nourriciers à la base de son cou et les voûtes de ses deux épaules que l'on devinait à la manière que ses muscles avaient de se contracter les uns après les autres, dans un aller retour silencieux. Au dessus de l'oreille, la lanière de cuir cachant son oeil, le mensonge de l'aveugle, les cheveux qui s'y enroulaient en protestation. Le trait grossier de ses sourcils, le tracé de sa peau, le duvet de sa barbe qui y siégeait, et tout en suivant ainsi les contours de son visage elle approcha les yeux des siens, d'abord avec hésitation, s'y attardant moins d'une seconde, rougissant, puis revenant dessus comme un enfant ayant fait une bêtise.

T... T... fit-elle sans prononcer plus.
Les pupilles dans les siennes, tenant ce difficile contact en essayant de se persuader qu'il ne serait plus ni violent ni dangereux. C'était comme plonger les doigts dans un âtre en évitant les flammes, mais en sentant leur chaleur. Ou caresser un tigre et se coller à lui, en priant Dieu qu'il n'eut plus faim. Défier les lois et les statistiques.
Tu sais que c'est très idiot, rajouta t'elle en ne quittant ni sa plaie si ses yeux.

Ils étaient comme dans une arène, sous un filet qu'on avait par hasard lancé sur eux deux en même temps. Si elle capitulait ce n'était que par désespoir de ne plus pouvoir résister plus loin.
Le petit chat mit alors la paume de son maître sur sa nuque, et vint se poser contre lui dans un froissement d'étoffes et de fierté. Elle maintint sans douceur son bras autour d'elle, glissa la truffe contre son cou, jusqu'à ce qu'elle sente le frôlement à son front de ses carotides battantes.
Bercée par un bruit de vie et de sang qui cognait contre son oreille, elle n'entendit pas le bruit du poignard qui tombait au sol en fanfare. Il n'existait plus rien d'autre que l'odeur de lui et sa chaleur qui l'envahissait.

Rien, absolument rien.

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Simeon.charles
Contact !
Elle venait de se lover contre lui. Ce n’était certes pas le grand amour avec sa pluie de pétales de rose, sa myriade d’étincelles dans les yeux et son fond sonore de violon. Non, ils semblaient plus à deux pouilleux en pleine cour des miracles se soutenant physiquement après une explication musclée avec la maréchaussée. Mais de ce qu’ils montraient Siméon s’en contrefichait. Non, tout ce qui importait à la vipère était de sentir le sang chaud de la petite chatte sauvage contre lui. D’abord son regard se tourna vers le ciel, non pas pour chercher un signe divin, mais pour pouvoir garder un peu plus le visage de Maxine contre son cou.


La main sur la nuque fragile se fit plus douce, plus caressante, un peu comme le ton de sa voix.

C’était très idiot. C’est vrai. Mais puisque je t’ai contre moi, je me dis que cette idiotie avait du bon, de fait, s’il fallait me taillader l’autre main pour t’avoir encore ainsi, je le ferai sans le quart du début d’un commencement de d’hésitation.

Il abattit doucement son visage vers celui de Maxine, ou plutôt au-dessus de sa chevelure. Il huma une fois, comme un renard avec ses petits. Il respira son odeur une seconde fois, à pleins poumons. Puis une troisième mais ses bras se refermèrent en même temps sur la jeune femme. Il voulait l’étreindre définitivement, garder ce corps chaud tout contre le sien. C’est là qu’il osa déposer un petit baiser sur la tempe et un second sur la pommette de la jeune femme, espérant ainsi attirer ses lèvres aux siennes.

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Maxine.
Le cocon s'était refermé sur eux. Vide, silencieux, comme un nuage qui transformait chaque geste en caresse. Elle se laissa bercer ainsi pendant quelques minutes avant de réagir. Peut être était-ce la pression d'un doigt sur sa nuque, l'humidité de ses lèvres sur son front, la froideur du vent sous sa veste ? Elle se réveilla.

C'est bien suffisant comme ça, fit-elle en déposant deux doigts sur sa bouche, comme un verrou invisible l'empêchant d'aller plus loin. L'inexactitude de ce qu'elle voulait avec lui, sa promiscuité brutale, elle était perturbée par tous ces nouveaux éléments et voulait réfléchir, une fois seulement, avant de foncer tête baissée et d'assouvir une envie pulsionnelle.

Je vais rentrer avec ton cheval, annonça t'elle en se dégageant de lui et s'approchant de la monture à petits pas. La chair de son cou était brulante et ankylosée, stigmates d'un câlin imposé. Elle se saisit de la gourmette en cuir et serra ses doigts autour. Prends tes pattes et rafraichis-toi les idées avant de.... De faire quelque chose que tu pourrais regretter ou que ta famille regretterais ou... Elle plaça un pied dans l'étrier gauche, sautilla sur place avant de grimper en selle. Enfin tu vois qu'est ce que je veux dire.

De là haut, elle le surplombait parfaitement. De la main droite elle tenait les deux rênes, et guida ainsi sa monture, un peu nerveuse, jusqu'à ce que son museau ne vienne babiller sur l'épaule de Siméon. Elle ricana.

Le froid va te faire du bien parce que t'as l'air serré dans tes fringues. J'savais pas que je te faisais cet effet là.


Sur ce, elle partit dans un grand éclat de rire en lorgnant sur ses parties, d'un air ironique. C'était une simple façon de se défendre contre l'évidence d'une attraction qu'elle sentait elle même à chaque houle, à chaque foulée lorsque le pommeau de la selle rentrait en contact avec ses os, ses hanches adhérant au cuir dans un mouvement collé, comme si elle se donnait déjà à lui.
Elle fit faire demi-tour au cheval, n'attendant pas l'accord de Siméon. S'il disait non, elle serait déjà loin, s'il disait oui, elle était déjà loin. Elle contourna la foule et fit un léger détour, s'éloignant du centre ville pour des ruelles plus claires, plus propres, où trônaient presque pas de déchets et un simple ruisseau d'eau en leur centre. Elle s'y arrêta. Huma l'air. Une éternité dura, dont elle ne se réveilla qu'alors que le cheval tirait sur le mord pour lui arracher des mains. Elle résista, claqua un coup de langue et le fit stopper.


T-t-t-t... le calma t'elle. On rentre bientôt.

Puis, trottant dans les ruelles jusqu'à chez lui, elle prit une allure douce, lui permettant de respirer calmement sans faire d'effort. Ce cheval avait beaucoup de possibilités, un côté très impulsif. Ce devait être un entier, ce qui ne l'étonna pas : pour Siméon, les hongres devaient être des sous-montures.
Elle sauta à terre en arrivant près de chez lui, faisant claquer ses talons sur le sol. En caressant l'encolure, elle finit de rentrer et ramena l'étalon jusqu'aux écuries, s'en occupant elle même. Le poids de ses sabots dans les mains, pesant sur son poignet cassé, finirent de l'achever et de ne faire de son corps qu'un tombeau de souffrance, tant physiques que psychiques, alors qu'elle ne savait toujours pas quoi faire de ce qu'il s'était passé entre eux.

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Simeon.charles
Maudits doigts qui venaient de le stopper dans son élan d’affection. Il resta un moment interdit, cherchant de son regard vert la réponse dans celui de la Maxine. Une fois de plus, il ne su pas ce qu’elle souhaitait. Une fois de plus il resta avec ses doutes et incertitudes. Mais la colère ayant passée il ne put que réprimer un rire lorsqu’elle s’échappa. Il trouva même amusant qu’elle lui prenne sa monture et le laisse se débrouiller seul pour rentrer. Lui bon prince, il l’aurait fait monter devant lui et ils seraient rentrés collés l’un contre l’autre bercés par les pas du canasson, mais non. Elle, elle en avait décidé autrement en jouant à merveille son rôle de petite princesse rebelle. Son sourire prit naissance quand elle l’invita à s’aérer les idées en marchant seul dans le froid et il s’étira un peu plus quand elle lui parla de sa gêne « vestimentaire. ». C’est vrai qu’il allait avoir besoin de calme et de vent frais pour se rafraichir les idées, car pour l’heure elles étaient toutes libidineuses à souhait.

Il ne tenta pas de la retenir, car il savait qu’il la retrouverait d’ici la fin de journée. Il la regarda simplement s’éloigner en secouant la tête. Ses bras étaient croisés sur sa poitrine et il respirait calmement désormais. Oui elle lui faisait de l’effet, dire le contraire serait un mensonge. Oui c’était chose assez rare et sans doute trop compliqué pour qu’il sache comment s’y prendre. La gagner, ne pas la brusquer. La tenter, sans trop l’inviter. Etait-ce son idée ? Elle avait à peine disparu dans une des ruelles, qu’il se mit à rêver d’une possible nuit ou ils dormiraient l’un contre l’autre durant laquelle, il en était certain, elle le repousserait cent fois. Il savait également qu’il reviendrait cent fois chercher quelques tendresses. Le giflerait-elle, ou le laisserait-elle gagner ? Leurs bouches se croiseraient-elles une fois ? Plus ? Se réveillerait-il une de ses paluches reposant tel un doux écrin sur un des seins blancs de sa jeune amie.

Il fit un pas en arrière, puis deux. Le dos au mur, il se laissa glisser jusqu’à ce que son postérieur vienne siéger sur le pavé sale et froid. Perdu dans ses pensées il ramassa quelques graviers qui sortaient des pavés et sa main, se prenant pour une maraca, se mit machinalement à les secouer en sa paume. Qu’est-ce que l’avenir lui réserverait ? Allait-il encore la perdre ? Ou accepterait-elle de rester à ses côtés ? Le grelot des cailloux le tira de ses pensées. Un à un il les expulsa de sa main comme s’il jouait aux billes. Une fois le ayant ricoché sur le pavé, il se redressa sur ses cannes. Il était temps de rentrer. Il se frotta le postérieur afin de déloger toutes saletés ayant cru bon de s’y inviter et prit serein le chemin du retour.

Il faisait doux, il faisait clair et chose qui n’était pas arrivé depuis longtemps, il était bien.

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Maxine.
Fixe.

Les yeux fixes droits devant elle, la jeune fille n'en bougeait pas. Elle pensait à tout ce qui la bloquait dans cette position, accroupie dehors, les cheveux battus pas le vent. Et c'était pleine de réflexion qu'elle entendit en arrière fond le bruit que firent les petits cailloux, ou les grands pas de Siméon, elle ne savait pas.

Redressa le nez.


Ah, c'est toi.

Elle en était là de sa réflexion, à se dire qu'elle ne pourrait plus jamais laisser qui que ce soit la toucher, la frôler, encore moins lui, quand il était arrivé.
Comment expliquer qu'elle ait envie de quelque chose qu'elle était incapable de faire ? Aurait elle pu lui expliquer qu'elle avait envie de venir contre lui, dans ses bras, mais qu'intérieurement elle se liquéfierait alors, complètement terrorisée, incapable de profiter de cet instant ? C'était comme avoir envie d'un versant d'une pièce dont l'autre face l'angoissait : idiot. Elle aurait toujours les deux à la fois.
Le comble fut atteint lorsqu'il arriva vers elle et qu'elle sentit son instinct fondre : l'attirance, l'évitement, la parade, comme une danse. Tournaient ses yeux de lui au sol, sans s'arrêter, toujours en revenant. Aussi peureux, aussi avides. Ses gestes son odeur, son regard, comme un déchirement dans son silence intérieur, il ne marchait pas vers elle, il cognait vers elle, dans sa poitrine, comme si elle allait mourir d'être ainsi tiraillée.


C'est une énorme erreur, dit-elle en évitant de le regarder.

Entre le désir et l'angoisse.

Elle fit mine de parler d'autre chose, du procès, de leur passé, de leurs souvenirs. Mais sa voix avait changé, tout comme le choix de son vocabulaire, et elle ne parlait plus sans faire attention à la mélodie de ses mots, comme pour le charmer. Elle ne comprenait pas ce qu'il lui arrivait. Quelle erreur....!

Aucune importance.

Les bras croisés, la voix mielleuse, qu'elle aurait voulu cuir claquant et pas velours doux. Parlait-elle réellement du temps qu'il faisait, des bruits du vent dehors, de son cheval ? Etait-ce elle qui lorgnait sur son corps en parlant de tout et de rien ? Elle qui rougissait en essayant de se reprendre...?
Apprenant par cœur le moindre de ses détails physiques ? Quelle erreur...!

Aucune importance ! Aucune importance ! L'évidence était là, arrêtant tout, l'angoisse la peur, les idéaux, les valeurs, ses envies, ses désirs, son passé, son avenir... Le temps des regards qu'ils s'échangeaient dans le silence, rien n'existait ; le temps ne reprenait que lorsqu'elle se forçait à échanger une banalité, comme pour réinscrire dans le réel ce que leur étreinte avait mystifié. Quelle erreur !

Cédant soudain, à la fin d'une phrase, au duel invisible qui se jouait en elle, elle bondit vers lui, puis s'arrêta, releva les yeux crispa les poings, oh, que c'était dur de combattre ainsi sa phobie, ses angoisses, quelle erreur !
Elle jura, donna un coup de pied dans l'une des marches, colère.

Aucune importance...


J'vais pioncer. Merde alors.

Elle était vidée. Totalement exténuée. Depuis des années de lutte, de refus, à en oublier son corps, c'était une faim inexploitée depuis des lustres qui se réveillait. Etait-elle réellement en lien avec Siméon, ou n'importe quel autre homme l'aurait réveillée? Pulsion. Si forte qu'elle n'arrivait plus à rien arrêter et que tout devint confus.
Elle entendit un cheval hennir. Ce fut le déclenchement de tout.
Dans la confusion et le mélange, le coup de pouce du destin la dirigea finalement vers les box où elle l'invita du regard.

C'était une énorme erreur, elle le savait, mais elle avait envie terriblement de la faire.

A quelques pas de lui, en s'en allant vers la chaleur des écuries, lui tournant le dos, elle pria qu'il la suive. Qu'il la prenne là maintenant tout de suite, dans la paille, contre un mur, comme il voudrait mais vite, et qu'elle puisse accomplir ce que son corps lui ordonnait de faire malgré la frousse qu'elle ressentait : une erreur sans importance.

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Simeon.charles
Si une chose agaçait profondément Siméon c’était bien de se retrouver, les cheveux collés aux joues, à mâchouiller en bon ruminant les pointes de ceux-ci. Hélas pour le Chevalier au Serpent, c’était bel et bien ainsi qu’il fit face au « merde alors » de Maxine. D’un geste de la main rageur il l’extirpa les invités capillaires de sa gueule restée béante lorsque la jeune femme, un bref instant après le jurons, l’invita à le suivre dans l’écurie. Rien de grivois, rien d’aguicheur dans le regard de la jeune béarnaise, mais…. Une invitation à la suivre. Oui elle l’invitait alors qu’elle l’avait toujours fuit. Devait-il répondre, pas en arrière, par un refus ? La question ne lui traversa même pas l’esprit. Il était invité, il honorerait celle-ci ainsi que l’hôte s’il le pouvait.

Après avoir marqué l’arrêt comme un chien de chasse, il emboita le pas de la jeune femme. Une marche un peu plus rapide pour qu’elle soit à portée de main. Il déploya ses bras et la saisit tendrement par les épaules. Il voulait la stopper pour se coller à elle, sa bouche dans le cou gracile pour y livrer mille baisers. Ce fut sous l’oreille droite que la bouche du serpent délivra sa tendresse, le chevalier oubliant que la jeune femme pourrait bien le rabrouer d’un soufflet sur le museau. Il était calme, serein, détaché du reste. Seul ses mains et sa bouche le rattachaient à la réalité qu’était Maxine.

N’écoutant que son désir sa main droite alla chercher la broche pour faire tomber la première épaisseur de vêtement. Il fut un temps, lorsqu’il déshabillait une jeune femme, avec sous sans son accord, la seule chose qui lui venait à l’esprit était : « Croix de bois, crois de fer, si j’débande je vais en enfer. »
Mais là, ce jour, c’était plutôt les désirs de Maxine qu’il voulait satisfaire et il était prêt à se damner s’il s’en montrait incapable.

A tâtons ses mains cherchèrent celles délicates de la jeune femme. L’envie de les serrer, de les caresser, de croiser ses doigts aux siens venait de l’envahir aussi vite que la chaleur avait envahi son corps. A son oreille il susurra ce qu'il pensait intelligent.


N'aies crainte, tu es la seule à décider.
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Maxine.
Elle le savait.

Elle décidait toujours.

C'était ainsi que les choses s'étaient passées depuis plusieurs années. Toujours de la même façon. Toujours, indiscutablement la même chose : elle attire, elle convoite, elle possède, elle rejette. Toujours la même chose. Le même refrain, devenu presque une rengaine : elle était au centre de tout et gouvernait ses relations en ne laissant aucune place masculine. S'il désirait plus, elle lâchait tout, préférant se défendre d'un plaisir qui aurait pu la mettre en danger.
Pouvait-on lui en vouloir ? Qui aurait réagi autrement à sa place ? Qui aurait pu supporter des mains caleuses et viriles là où d'autres semblables avaient marqué au fer son corps ? Comme la superposition sur les gestes de Siméon d'autres gestes plus anciens qui auraient tracé des sillons ineffaçables : il n'aurait rien pu faire, systématiquement, à chaque avancée, à chaque nouveau territoire de peau atteint, elle tressaillait. Ici, des doigts avant toi ont griffé et lésé, ici, les chairs ont été forcées et meurtries, ici, les cicatrices d'un acte si vil qu'elle ne s'en déferait jamais.

Mais c'était elle qui décidait.

Elle rentra dans l'écurie en se dégageant de lui. Oui, c'était elle qui décidait. Elle fit quelques pas en avant jusqu'à ce que ses pieds ne rencontrent la paille étalée au sol par les sabots lourds d'un percheron. La chaleur des bêtes les atteignit.
Volte-face. Regards. Angoisse.


Je...

Je n'ai plus rien à dire, c'est cela qu'elle voulait lui signaler en bégayant bêtement.
Ça n'avait même plus de sens de le préciser. Ils s'étaient dédouané des mots bien longtemps auparavant, scellant leur silence par l'échange de caresses que seuls les amants se prodiguent. Certains moments ne sont faits que pour se partager que dans le silence ; rompu seulement par le piaffement d'un cheval près d'eux, ou le bruit d'étoffes que l'on défait et de peaux qui se rencontrent. L'intimité de l'autre qui se découvre, par pressions de plus en plus fortes, par territoire interdit de plus en plus offert. Au delà d'un galon arraché, d'une manche défaite à moitié, d'une épaule dénudée et baisée... c'est là qu'on trouve par hasard quelques secondes brûlantes et parfaites.

Silence.
On n'entendit alors plus que le bruit de leurs respirations qui se mélangeaient, de ses doigts malhabiles qui s'évertuaient à défaire, se glissaient, se tordaient, caressaient encore. C'était elle qui décidait d'où ses doigts iraient, et lorsqu'elle n'eut sur elle plus qu'une chemise fine, elle conduit elle même la découverte première de ce qu'il désirait, très doucement.
Les voûtes se creusaient au passage de sa main, comme s'il la sculptait ; la peau tressaillait, les os se mouvaient en vagues chaudes. Une houle guidée par les mouvements de l'un et l'autre, soudés à leurs hanches comme des aimants. Les mouvements volubiles et souples que l'on voit sous l'eau de certaines espèces de mollusques, de pieuvres, d'anémones, ou de sirènes si elles existent, et qui ne semblent régis que par une forme de poésie à l'harmonie parfaite.
Les ondulations de ses mains ne suivaient plus que le tracé de ses épaules et son cou, s'évadant, une fois ou deux, pour finir de défaire une manche, et laisser tomber le linge au sol. Dans un petit rire, elle le tira brusquement vers elle. Elle était prête. Le mur dans son dos acheva de rendre impossible toute marche arrière. Viens, aurait-elle pu dire si elle avait pu.

Mais agissant à sa place, son instinct réveillé franchit la frontière invisible, la limite indistincte inscrivant leur étreinte dans le réel et l'inaliénable : lorsqu'elle fut offerte tout à fait, et lui aussi, et qu'ils atteignirent des profondeurs telles qu'il était impossible de faire demi tour sans mourir un petit peu.

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