Kachina
Quelque part au fond d'une forêt bretonne,
Axelle,
Cesse de te flageller. Nous sommes ainsi faites toi et moi.
A nous enflammer le coeur bien trop vite pour un trop beau.
A nous embraser le ventre, à nous briser les reins sous des caresses habiles , des mains exigeantes.
A nous donner, nous livrer à eux corps et âme, pour mieux les prendre.
On pense avoir gagné. On se croit Reyne.
Et puis...
Ils nous quittent.
Ils meurent sous la dague d'un assassin dans une ruelle sordide un soir d'hiver.
Ils nous déçoivent, nous lassent et nous leur tournons le dos.
Ils disparaissent dans les abysses de nos étranges royaumes, nous laissant un coffret rempli de lettres sublimes que nous nous interdisons de relire. Un cierge qu'on n'ose allumer de peur qu'il ne se consume à jamais, un nom comme un cadeau, des remords bien de trop.
Ils nous fuient, apeurés, craignant qu'on les enchaîne.
Et nous leur survivons Axelle... A chaque fois.
A coup d'éclats de rire pour donner le change, qui viennent rebondir sur les pierres des murs de ces auberges où nous laissons l'alcool diluer nos souvenirs.
A coups d'amitié et d'épaules tendres au creux desquelles nous nous épanchons parfois les soirs de gris.
A coups d'envie, de niaque, et de passion, parce qu'il n'est pas question que cette chienne de vie fasse de nous des ombres tièdes.
Et il nous en revient un.
Amoureux et beau.
Et folles de nous, on replonge, on en redemande, on mord nos bouches pour qu'elles paraissent plus charnues et plus rouges. On lisse nos tignasses pour qu'il retire une à une les épingles le soir venu. On resserre les lacets à nos larges ceintures de cuir pour qu'il ne songe qu'à nous étreindre et on dégrafe un peu nos corsages pour qu'il crève du désir de nous.
On vit Axelle.
Ni catins, ni nonnes. Gourgandines insolentes à l'heure des soupirs. Mères aimantes et maladroites, bien trop absentes.
Femmes.
Alors bon sang, bien sûr que je t'attends. Ton fils est beau, il est grand temps de retrouver son rire. Un fils ne juge pas sa mère, un fils ne peut que l'aimer. Laisse lui le temps de devenir homme, de se tromper, de faillir et de comprendre.
Rappliques. Et quand tu auras oublié jusqu'à ton nom, je te le répèterai inlassablement à l'oreille, je laisserai le vent le chanter sous tes jupes au cours de nos chevauchées folles. Et s'il ne te plait plus, si d'autres l'ont trop murmuré, nous te choisirons d'autres surnoms.
Je boirai avec toi, je m'empiffrerai avec toi.
Je te laisserai dormir. Mais au réveil, nous inventerons de nouveaux rêves.
Mais nous n'oublierons rien. Ni leurs regards, ni le goût de leur peau, ni ces heures fauves et ces aubes pourpres. Nous n'oublierons pas ces incendies sans cesse rallumés , ces défis au balancement de nos hanches. Nous garderons tout.
Parce que c'est nous Axelle.
Je file à Fougères. Ensuite je longerai l'océan. J'ai fui l'Anjou. Je n'avais pas le coeur à me terrer pendant des jours , prisonnière de murailles froides. Je préfère être celle qui donne l'assaut, plutôt que celle qui résiste à un siège.
Retrouves moi.
Kachi
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(Merci à Jd Axelle pour la bannière)