Afficher le menu
Information and comments (0)

Info:
Unfortunately no additional information has been added for this RP.

[RP] Pays merveilleux.

Jutta.
    Ça pousse dans son crâne.
    Je veux dire, à l'intérieur. Ça pousse. Comme si un noyau de cerise avait décidé d'élire domicile sous sa tignasse sèche & embrouillée, & qu'à force de l'arroser d'absinthe, ça avait poussé. Genre, vraiment poussé, avec des racines & des feuilles, des tiges, des fleurs, tiens, même des cerises. Voilà, elle a des cerises dans la caboche, & des moineaux qui viennent s'empiffrer en lui arrachant des mèches brunes. Mais attention, pas n'importe quelles cerises : des guignes, des vraies guignes à l'absinthe déjà macérées & prêtes à fourrer le clafoutis. Tiens, un clafoutis.

    - Glmbl... Claaa... Claaaa... Claaaouuu...

    En voilà, une belle. Voilà que la belle - qui ne l'est pas, ne nous fourrons pas le doigt dans l’œil - n'arrive plus à activer sa langue. C'est qu'à force de pousser dans son crâne, ce cerisier, il lui a pompé des neurones. Quel égoïste ! Et si j'te taillais un peu... C'est l'idée du siècle, & que quelqu'un vienne lui dire que ce n'est pas une bonne idée, qu'il vienne donc, elle qui a déjà la hache à la main, la lame bien en face des yeux, prête à s'éclater le cerveau pour déloger son hôte. Les bottes bien écartées & ancrées au sol - tiens c'est normal les sables mouvants ? - la hache balance, balance, balance si bien qu'elle va se ficher droit dans le mur derrière elle, & l'effrite si bien qu'il retombe en poussière.
    Derrière, c'est dehors. C'est le ciel gris, la lumière blanche, les arbres verdâtres, l'eau bleue canard & la terre rose. Rose & molle, un de ces roses que les petites & grosses princesses portent si bien qu'on ne voit plus la différence entre leurs joues fuchsias & leurs kilomètres de tissu framboise - tiens d'ailleurs, c'est pas des framboises par terre ?. Et puis c'est mou, tout ça, c'est mou & collant comme de la confiture d'abricot, celle d'Alix, avec un panier d'abricot pour six paniers de sucre, & quand elle marche & que les bottes s'enfoncent ça lui colle aux semelles, & évidemment, ça se gamelle.

    - Saint foutre d'ristote, t'peux pas faire attention pauv' tâche de gras ?!
    Non mais je rêêêêêêêêêêêêêêêve, on est même plus tranquille dans ses trips maintenant, faut qu'on s'coltine sa maladresse, J'VEUX UN PLAN SANS POISSE T'ENTENDS ?


    Y'a ses moineaux qui s'envolent, ses cerises qui tombent & se mêlent aux framboises, mais le cerisier, lui, il reste bien enraciné, comme un chapeau clouté, malgré la tête penchée en arrière, qui fixe de deux émeraudes luisants le bleu canard du ciel*.

    - Et fais pas mine de m'ignorer trou d'fion, j'sais qu'tu t'gausses & si tu continues, j'te PRÉVIENS, je... je... J'ME GAUSSE AUSSI !

    Silence.
    - Ah ça fait moins l'mâlin gros tas !

    Et la dextre, en pleine forme visiblement, de balancer une poignée de guignes à l'absinthe de framboise vers la lumière blanche.
    Vous n'aviez peut-être pas bien saisi la chose : Jutta plâne haut, & ne compte pas redescendre de si tôt.


* C'est pour vérifier que vous suivez.

_________________
Nomi
Blois.


    C'est pas sa faute, notez. Comme toujours, mais là, encore moins.

    Le clocher sonnait trois heures, ravivant au passage dans l'âme de tous les voisins directs de l'église une vieille rancœur meurtrière pour l'agent immobilier ès-chaumières qui leur avait garanti une isolation parfaite, de beaux volumes et, pour les plus cons, une vue sur la mer. Non loin de ces pauvres hères, Nomi se promenait entre les tables de la salle de son auberge déserte. Après s'être musclé les coudes toute la soirée, elle cherchait activement l'escalier menant à sa chambre, juste assez bourrée pour être persuadée qu'elle était sobre. Les recherches n'étaient pas concluantes. Finalement sujette à une subite envie d'aller aux latrines, elle s'engouffra, non pas dans les latrines mais bel et bien dans la cuisine (because alcohol). Cuisine où elle tomba pif-à-pif avec Muzardin, le cuistot un tout petit peu inquiétant qu'elle avait réquisitionné deux jours plus tôt et qui était occupé à verser dans une assiette le contenu fumant d'une poêle à frire. L'échange fut bref, mais riche en conséquences.

      - Hé ben Muzardin ? Vous dormez pas à cette heure ?
      - Chiasse. Oooo-oooh mademoiselle d'Abancoooourt, quelle bonne surpriiise...
      - Vous êtes vachement zélé pour quelqu'un à qui on paie pas les heures sup. Ni les heures tout court en fait.
      - Que voulez-vous, c'est une passion.
      Et si vous alliez vous coucher maintenant ?
      - Et c'est quoi qu'vous nous cuisinez là, Louis ?
      - Euh ben... C't'un genre de fricassée de champignons. Sympa, pittoresque. Légal.
      - Ça puire. J'en veux pas.
      - Ça tombe bien, c'est pas pour vous.
      - Keuwah ?! J'en veux.
      - Non mais c'est vraiment pas pour v...
      - *chomp chomp*


    Maintenant... maintenant, ça pousse dans son crâne.
    Escortée jusqu'à sa chambre par un Muzardin pas jouasse, elle s'est vautrée sur le tapis avant d'atteindre la paillasse de toutes les convoitises. Et elle est restée là. Finalement c'est confortable aussi, un tapis, chipotons pas.
    Et ça pousse, vraiment...

    Plutôt comme dans une foule à carnaval. Toutes ses pensées jouent des coudes, se pressent, s'agglutinent, s'escaladent, s'écrabouillent les pieds, pour voir passer les chariots multicolores qui tournent en rond autour d'elle. Malôcrane, gnnn, poussez pas tant... Son dos crame, il fait beaucoup trop chaud. Son ventre, lui, ratatiné contre le sol, recueille les pensées qui se sont faites éjecter de la foule. Là-dedans aussi, ça pousse, ça escalade les parois pour remonter vers la nuque trempée... Dans sa bouche il n'y a plus rien, plus une once de salive, plus de langue, plus de dents, juste un vide tapissé d'éponge sèche, vaguement délimité par les lèvres livides. Et ça pousse, et ça tourne... Plusieurs masques l'observent maintenant, des médecins de peste, grand bec de palissandre incurvé, draperies noires, yeux transparents. Les chariots sont chargés de géants grimaçants qui agitent leurs sceptres dans des volutes de fumée jaune et poudreuse. Ça danse, comme les sorcières autour des feux, au rythme d'une basse qu'on frappe directement sur le tambour de son occiput. Et ça pousse, et ça tourne, et ça danse...

    Nan nan nan nan nan. Les doigts cramponnés aux franges du tapis, Nomi essaie d'en contrôler le décollage. Prendre l'air... prendre l'air.... Ou prendre la mer, c'est pareil : trois cabrioles et elle s'échoue dans un grand geyser d'écume pelucheuse sur une plage. C'est pas du sable, c'est de la confiote, collante, d'un orange soutenu. Ah non, rose. Ah non, orange à nouveau. Qui lui englue les mollets à mesure qu'elle y marche. Oh, un casque badass de guerrière ! Arraché à la mélasse, l'objet est vissé sur son crâne.

      - Qu'ess je... paumée... Hé ! c'est par où ?

    Le pourceau vert pomme auquel elle s'adresse exhibe un panneau directionnel entre ses pieds de porc qui clignotent. Tout clignote d'ailleurs, faudrait changer les tubes des rayons-néon du soleil. Le ciel clignote. La mer clignote. Ses doigts clignotent. Au loin, une silhouette efflanquée clignote. C'est quoi, un genre d'arbuste ? Ça tombe bien, ses boucles ont triplé de longueur et elle se prend les pieds dedans. Il lui faudrait des brindilles. Pour me faire un chignon.

    Les bras tendus en avant pour écarter le chaos de lianes noueuses, de boucles de cheveux et de rubans de soie qui pendouillent un peu partout devant elle, elle prend la direction de l'arbuste.

_________________
Jutta.
      Je suis une fleur
      Je suis une très jolie fleur
      Je suis plus jolie qu'une rose et je sens meilleur qu'un lilas
      [...]
      Des trèfles, des digitales et des orchidées
      Oui nous sommes tous des fleurs dans le même bouquet
      Salut c'est cool.


    - Mais qu'est-ce que c'est qu'c... C'est quoi c'tr... Hein ?!

    Un sploutch gluant atteste de l'atterrissage des genoux anguleux dans la confiture d'abricot. Non de framboise. Non d'abricot... Nom d'une tomate verte ! Elle s'enfonce dans la bouillie, arrache sa jambe à la gelée en y laissant sa botte, & continue de s'enliser de désespoir en agitant le pied... Et oui, Jutta est souple, très souple.
    Tout à sa chorégraphie, elle en oublierait presque que si elle se retrouve autant dans la panade, c'est à cause de l'énoooorme mouton de poussière qu'elle a peut-être éventuellement cru apercevoir sans doute possiblement de manière probable. Mais ouuui, le truc là, qui avance lianes tendues vers l'aventure, en l’occurrence vers la Jutta embourbée jusqu'au bide.
    Elle se débat si bien que les sables mouvants s'en durcissent au point de la figer à la taille. Elle prend racine, observe ses bras devenir tiges, ses mains évoluer en feuilles, sent ses narines chatouillées par le pollen qu'elle s'en vient à produire.
    La digitale est née. La poussière/liane/orchidée s'approche.
    La digitale s'anime. Et quand elle ouvre la bouche, des trèfles sortent de ses pistils.

    - Tu es une fleur... Tu es une très jolie fleur...

      Un homme à l'abdomen astronomique s'approche d'une Jutta affaissée sur la table, ronflant paisiblement, un filet de bave humidifiant un morceau de pain oublié. Il secoue l'anguleuse, tape du poing sur la table, renverse une chope de bière sur la crinière vipérine sans parvenir à la sortir de sa torpeur. La tripot est vide maintenant, le soleil n'est pas encore levé, encore une belle journée*... Excédé, l'homme saisit l'affreuse aux aisselles - auréolées, les aisselles - & la traîne jusqu'à la porte arrière, déposant son paquet dans une ruelle si étroite qu'on peine à étendre ses jambes. C'est qu'il doit faire le ménage, maintenant. Alors ça a beau puer de toutes les déjections imaginables, des dégueulis au stupre en passant par la sueur & les excréments, lui, il veut juste se débarrasser de l'épave. Et de claquer violemment une porte branlante après s'être épousseté les mains sur un tablier plus douteux encore que la décoration de la ruelle. Dans les oreilles de la Jutta, ça sonne comme une détonation.

    - Aaah.... AAAAAH... AAAAAAAAAAAAAAAH !!!!! ON NOUS TATTAAAAAAAAAQUE !!!!!!!!!!

    Et la digitale de viser la tête de l'orchidée casquée avec une tarte à la crème.

*Pardon pour la pub !
_________________
See the RP information
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)