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[RP]De l'Etoile bleue à la balafrée, passant par la mutilée.

Don.
Le duché, quelle idée de s'engager la dedans ?
Tiernvaël le lui avait dit, ne pas y aller à moins d'être complètement remontée à bloc ! Et bien non, il avait fallu qu'elle se lance à corps perdu dans cette aventure qui ne lui offrait aucune satisfaction. La dépression flirtait avec la pauvre duchesse.

Pire - en parlant de corps perdu - Dôn n'avait rien trouvé de mieux que de tomber éperdument amoureuse d'un de ses colistiers, mais vous la connaissez maintenant... Tomber amoureuse n'aurait pas été suffisant. Non, bien entendu. Il faut aller plus loin encore, s'enfoncer chaque jour un peu plus.
Et fricoter coûte parfois cher en représailles, car de celles-ci elle en tient une bonne ! Si son unique héritier ne lui suffisait pas, gâtée prochainement elle sera. (Admirez la mode Yoda)
Un second mais bien moins légitime celui-ci, était déjà en route.

Oooh, enfant du déshonneur ! Enfant de malheur !
Nous voilà bien.

Encore éprise de son défunt époux, il fallait tout de même admettre que le nouvel homme de ses nuits à défaut de sa vie prenait chaque jour un peu plus de l'importance dans celle ci. En son coeur aussi. Et sa tête... N'en parlons pas.

Si, parlons-en plutôt.

Le Salar n'en sortait pas, tant qu'il était difficile pour Dana de travailler sans rêvasser, impatience de le retrouver la nuit tombée, ou tout simplement en son bureau de bailli, ou au collège d'armes.
Mais si ces derniers temps, l'insouciance des premiers émois et le bonheur des retrouvailles discrètes entre deux baisers prenaient toute la place dans l'esprit de la Kerdraon, il était difficile d'oublier qu'Equemont était marié. A son impression - fausse - tous les bretons semblaient vouloir le lui rappeler. En passant du premier Tréglorieux croisé à son amie Amarante, les allusions allaient bon train. Les doutes de chacun semblaient tant gonfler à chacune de leur rencontre, qu'il était de plus en plus difficile de garder un tel secret.
Pourquoi ne pas se confier à Brélidy ? Une partie fut pourtant révélée. Quant à Tiernvaël son ami de toujours, il savait pour l'autre moitié de la confidence partielle.

Mais ce soir c'est différent. Aucun ami ne sera contacté. Non. Une étoile seulement.
Lien possible entre l'enfant des étoiles et celle qui bleue illumine de son éclat toute la ville indomptable ?

La baronne contemple le plafond qu'habituellement ses yeux observent les paupières closes. Sur son ventre, s'arrondissant légèrement, sa main gauche est posée. Cette même main qui dans quelques instants compte bien confier sur le vélin, toutes ces peines qui l'absorbent depuis ces dernières semaines.
Des peines dont les mots iront certainement à vau-l'eau. Des peines... Ou des espoirs.



Citation:
De nous, Dôn ap Maëlweg de Kerdraon,
A vous Zakarine de l'Etoile bleue,


Quelle curiosité que ce courrier.
Si habituellement, nous entretenons correspondance avec votre cher et tendre Emeric, il est plus étonnant de nous voir vous écrire.
Oh, non pas que vous me soyez désagréable, d'ailleurs la suite de cette missive vous prouvera tout le contraire, mais nous n'avons pas eu la chance de nous apprécier davantage. La conséquence de mes déplacements fréquents et nos trop rares rencontres.

Si nous commencions par vous dire combien j'ai apprécié nos moments échangés à Tréguier, l'une à l'autre nous avions tant à nous dire, sans nous ennuyer. Nous avons aimé apprendre de notre mère, par votre bouche et nous confier sur ces peines qui peuvent tant secouer le coeur.
Venons-en au coeur.

Souvenez vous d'un sujet. Celui de la pauvre Carole, sans doute trop naïve pour se rendre compte que chaque jour qui passe, elle se réveillerait aux cotés d'un homme volage.
Nous avions affirmé que volage ne voulait pas dire ingrat, ou mal aimant.
Notre sincérité ne fut pas pleine à ce moment là. Si nous parlions avec autant de ferveur, de conviction, c'est qu'en arrière nos pensées étaient bien entendu dirigées vers un exemple basé sur notre propre expérience. C'était peut-être d'ailleurs flagrant.

Vous devez désormais vous demander où nous aimerions en venir.
Où j'aimerais en venir...

Je suis amoureuse Zakarine.
Un amour pur et vrai, un amour passionné mais sans doute destructeur.
S'il l'était seulement pour moi...

Vous êtes la seule à qui je dis ces mots, à qui j'ose délivrer mes sentiments. Même le principal interessé ignore la puissance avec laquelle je l'adore.
Avez-vous deviné désormais ? L'homme que j'évoque est marié. Trollement à ma propre personne, comme dirait Emeric. Mais officiellement, il est marié à Lanceline.
Je n'ignore pas qu'elle est votre amie. Je ne vous demande en aucun cas d'ailleurs de lui mentir, ou lui cacher quoique ce soit. Je ne demande qu'une seule chose, et vous devez déjà la deviner. De ne pas me juger.
J'ignore même pourquoi je me livre ainsi, ce soir si ce n'est pas pour l'être...
Peut être parce que votre intelligence sentimentale à fait écho en moi.

Peut être parce que la solitude pèse tant, qu'il faut chercher, trop souvent à tâtons, où sont les siens.
Avec trop de désarroi. Il est exagéré ? Quoiqu'il en soit, il est honnête.

J'ai honte désormais, il me faut vous laisser.
Veuillez m'excuser pour ce courrier trop personnel, et égoïste.

Rennes.
25.02.1464.





_________________
Zakarine
Elle vivait ses derniers jours en tant que mairesse de Tréguier. Fatiguée de tout ce remue-ménage entre la mairie et ses devoirs administratifs puis ses gardes de nuits et ses rapports qu'il fallait qu'elle rende au petit matin à la prévôté, Zakarine avait décidé de ne pas se représenter aux prochaines élections. Tout ce travail acharné qu'elle avait fourni avait eu raison d'elle. Elle adorait son travail, là n'était pas la question, mais elle avait surtout besoin de repos. La Rouquine ne se faisait pas de soucis, elle savait que le candidat à sa succession était celui qu'il fallait à Tréguier. Rico connaissait parfaitement le dossier de l'arsenal et cela la rassurait, la ville allait être entre de bonnes mains. Zakarine ne s'éloignait pas non plus. Elle resterait là pour aider.

Des nouvelles de son amie Gin lui parvinrent un jour. L'armée de Patate avait été décimée par des Angevins qui n'en avaient qu'une bouchée. Tous les soldats étaient mal en point et en convalescence à Thouars. Mauvaises nouvelles donc. La Bretagne était menacée. Contrairement à l'époque des événements de Tréguier, tous étaient mobilisés pour une seule et même cause: la défense du Grand-Duché! Chacun mettait de côté ses rancœurs personnelles pour aider son voisin. L'unité bretonne, la fierté enfin retrouvée! Zakarine n'avait pas hésité une seule seconde à envoyer une délégation trégorroise représentant l'Indomptable aux côtés de leurs frères bretons. Parmi eux, se trouvaient presque tous ses amis et surtout Emeric. La maison lui semblait bien vide sans son amant. Les tours de garde sur les remparts étaient les bienvenus, finalement. Ses nuit lui semblaient moins longues sans lui.

Avec le départ de tout ce petit monde, le calme avait gagné la ville. Seuls quelques Trégorrois qui étaient restés et visiteurs animaient la taverne municipale. Ah oui! Il y avait aussi un revenant qui était.. revenu! Kiarna, l'époux de notre célébrissime couturière Imagine était rentré au bercail. Sa joie et sa bonne humeur communicative remontait le moral de la Rouquine. Les bébés de Carole et de Maël étaient à croquer. Zakarine se régalait de les prendre dans ses bras pour les bercer tout en leur demandant de faire des risettes. Elle gagatait, quoi! La Rousse n'avait pas eu la chance d'enfanter alors, elle profitait des enfants des autres dès qu'elle le pouvait.

Un jour, on vint lui porter un courrier venant de l'étranger. Curieuse comme pas deux, elle s'empressa de décacheter le parchemin et, avant même de lire le contenu, regarda la signature de l'expéditeur. C'était Lanceline qui lui écrivait pour lui donner de ses nouvelles. Inquiète de la savoir seule, enceinte, avec les deux enfants dans le sud, Zakarine poussa un soupir de soulagement et commença doucement sa lecture. Plus elle avançait dans le texte, plus son sourire se dessinait sur son visage. Elle avait accouché! Equemont et elle avaient eu un fils!


Citation:
Le 24 Février 1464

Lou bonjorn Zak,

J'ai accouché d'un petit garçon du nom d'Aloan, conformément à ce que souhaitait Equemont. L'enfant va bien, et je vais bien également.

Je suis chez ma cousine, enceinte et paniquée. Je l'aide à se préparer, et je dirige sa maison pour lui permettre de se reposer. Gabriel et Ermelne vont bien, je te remercie. Je leur transmets tes amitiés.

Pour Equemont, je lui ai renvoyé une lettre, mais il ne m'a pas répondu. J'en suis au point où j'espère seulement qu'il est encore en vie.

Si tu le vois, transmets-lui mon amour. Qu'il en soit certain, quoi qu'il puisse se passer.

Je pense fort à toi.

Lanceline.



A un moment de la lettre, Zakarine se mit à froncer les sourcils. Comment ça, il ne lui répondait pas? C'était quoi cette affaire? A trop vouloir faire de l'escorte, avait-il oublié qu'il avait femme et enfants qui avaient besoin de lui? Elle prit sa plume et répondit à son amie, qui se trouvait loin de chez eux.

Citation:
Le 24 Février 1464

Demat Lanceline

Je tiens à te féliciter pour la naissance d'Aloan. Je t'avoue que j'étais un peu inquiète de te savoir sur les routes, enceinte, seule avec les enfants. Quand Equemont était à Tréguier, je ne manquais pas de lui demander de tes nouvelles. Mais que s'est-il passé? Je n'ai pas compris pourquoi tu es partie seule, dans ton état. Il aurait pu t'arriver n'importe quoi sur la route. Franchement, ce n'est pas raisonnable! Mais bon, tu es arrivée à bon port et c'est cela l'essentiel.

Dans le courrier que tu lui as adressé, lui as-tu parlé de la naissance de votre fils? S'il ne te répond pas et qu'il ne prend pas ses responsabilités, crois-moi que je vais lui tirer les oreilles! Toute gentille que je suis, il y a des choses que je n'accepte pas et ce genre de comportement en fait partie! Grrrrr, je suis énervée là...

Tu n'as pas le temps de te reposer que déjà tu dois aider ta cousine à se préparer à accoucher. Son époux est là aussi pour l'aider? J'espère que tout se passera bien pour elle également et qu'elle connaîtra une bonne délivrance.

Sinon, tout va très bien ici. Il y a une alerte à Rennes: les Angevins menaceraient le Château. Du coup, de nombreux Bretons sont partis là-bas pour défendre la Capitale. Je pense qu'Equemont y est aussi. Un groupe de Trégorrois aussi y est allé et comme Sisoue fait partie du convoi, je suis de garde tous les jours sur les remparts jusqu'à leur retour.

Je ne me représente pas aux prochaines élections municipales, je suis un peu fatiguée de m'occuper de tout à la fois. Rico a gentiment accepté de me succéder pour me laisser respirer un peu.
L'arsenal avance bien, nous allons bientôt attaquer le ferraillage.

Je t'embrasse bien fort Line, ainsi que les petits. Promets-moi de bien prendre soin de toi!

Au plaisir de te revoir très bientôt

Bises

Ton amie Zak


Une fois cacheté, elle remit son courrier au coursier qui attendait réponse avant de repartir. C'était une bonne nouvelle mais Zakarine ressentait comme un malaise dont elle ne connaissait pas vraiment la cause. Elle annonçait la naissance d'Aloan à tous ceux qu'elle croisait. Cependant, le mauvais pressentiment ne la quittait pas depuis qu'elle savait Lanceline partie sur les routes et Equemont resté là, escortant la Duchesse dans toute la Bretagne. Non... ce n'était pas une situation normale. La parturiente avait besoin de son époux à ses côtés et voilà!
Pour essayer d'en savoir un peu plus, elle prit de nouveau sa plume et entreprit d'écrire à Equemont, cette fois. Selon sa réponse, elle saurait enfin si quelque chose clochait ou pas.


Citation:
Cher Equemont,

Félicitations à l'heureux papa!

C’est avec une très grande joie que j'ai appris ce matin la naissance de votre petit garçon, à Lanceline et à toi, par un courrier de Line et je voulais t'adresser toutes mes félicitations pour ce cadeau de la vie.
Je lui souhaite dès à présent une très belle vie à lui ainsi qu’à ses parents et un rapide rétablissement à la nouvelle maman.

Elle m'a dit que l'accouchement s'était bien passé et qu'elle était chez sa cousine qui était, elle aussi, prête à accoucher. J'espère que ça se passera bien pour elle aussi.

Line m'a demandé de te transmettre son amour si je te croisais. Comme tu es à Rennes, ben,je te l'envoie par missive interposée.

Il doit te tarder de connaitre Aloan, ton fils, non ?!

Je te laisse et salue bien tout le monde de ma part, s'il te plait


Bises,

Zak


Une longue journée de travail passa depuis que Zakarine avait écrit à Equemont. Un nouveau coursier lui apporta une lettre. Tout naturellement, elle pensa à des remerciements de la part du Papa, comme la bienséance le demandait. D'autant plus que le jeune homme qui était là, devant elle, lui avait annoncé un courrier venu de Rennes. Ses amis, qui lui écrivaient régulièrement, n'avait pas usage de messagers de cette qualité. Non, il s’agissait sans aucun doute d'un noble. Sans même vérifier le propriétaire du cachet, elle déroula la lettre et commença à lire. Les yeux écarquillés, elle n'arrivait pas à croire ce qu'elle avait devant elle. Contre toute attente, ce n'était pas Equemont qui écrivait, mais la Duchesse en personne!
Zakarine déchiffra une à une les phrases qui défilaient sous ses yeux ébahis tout en répétant: Oh punaise, ce n'est pas possible, mais que me dit-elle?! Pourquoi à moi? Que vais-je dire à Line?! Comment lui annoncer cette affreuse nouvelle?
La pauvre Trégoroise dût s'asseoir pour ne pas défaillir. Elle ne savait plus quoi penser de la situation. Même si elle avait appris à apprécier Dôn, elle n'en restait pas moins la Duchesse, la fille du Grand-Duc. C'était quelqu'un d'assez spécial.

Elle envoya le messager se reposer et se restaurer à l'auberge en attendant qu'elle lui réponde. Zakarine ne pouvait pas écrire sur le champs, il lui fallait tout de même un temps de réflexion. Quel dilemme! Comment s'en sortir sans faire de mal à autrui? Elle se sentait prise au piège là, du coup. Elle repoussa l'échéance à plus tard. La fin de son mandat la préoccupait aussi. Elle retourna donc à la mairie pour tout mettre en ordre avant de remettre les clés à son ami Rico. Elle rangea tous les comptes, mit toutes les factures au propre pour qu'il n'ait pas à chercher trop longtemps.

Elle avait beau essayer de penser à autre chose, le courrier qu'elle devait écrire revenait sans cesse dans ses pensées. Extrêmement gênée, Zakarine ne pouvait se dérober. Elle relut la lettre avec attention. C'était vraiment bizarre. Dana se confiait à elle mais le ton était tout de même très officiel. Elle employait aisément le nounoiement que Zakarine avait du mal à faire, bien qu'elle fut anoblie par son Suzerain, le Duc du Tregor. Zakarine de l'Etoile Bleue, Comtesse de Kerborzh! Ça en jetait pourtant mais elle avait du mal à en user. Pour elle, elle était restée la petite Zak, la Provençale devenue plus bretonne qu'un Breton pure souche.

Après sa nuit de garde, au lieu d'aller se reposer, elle prépara son matériel d'écriture sur la table de la salle à vivre de sa maison. Pour se donner du courage, elle plaça une bouteille de chouchen juste à côté et se remplit un premier verre.


Irmat Comtesse!

Et la Comtesse aux pieds nus qui se mit à boire cul-sec avant de reposer le verre devant elle. Un dernier coup d'oeil sur le début de la lettre de la Duchesse. Elle apprit par là-même qu'Emeric entretenait une correspondance avec elle alors qu'elle n'était pas au courant. Elle demanderait des comptes plus tard à son compagnon, en toute innocence bien sûr. Un petit rire s'échappa de sa gorge car elle adorait le taquiner. Elle aurait bien aimé qu'il soit là, à cet instant-même, pour la soutenir et la conseiller sur ce qu'elle allait écrire ou pas.
Le moment était grave. Elle se saisit de sa plume qu'elle trempa dans l'encre et grava quelques mots sur un parchemin. Zakarine avait plusieurs fois croisé Dôn, mais pouvait-elle oser penser qu'elle était son amie? Certainement pas, vu le ton du texte. Elle écrirait donc de la même manière. Et puis.. elle pensait à la pauvre Line, qui se trouvait à Labrit.



Citation:
De moi.. nous.. Zakarine de l'Etoile Bleue, Comtesse de Kerbozh
A Vous, Dôn ap Maëlweg de Kerdraon




Si le but de votre courrier était de m’abasourdir, vous pouvez dire que vous avez gagné votre pari.

Moi aussi, j'aime bien votre compagnie quand vous venez nous rendre visite à Tréguier, là n'est pas le problème mais.. Mais que penser de cette histoire?

Je vous avoue que je suis toute retournée par et aveu que vous avez l'honneur de me faire. C'est une marque de confiance que j'apprécie même si je m'en serais bien passée.

Voyez-vous, je connais très bien Line. C'est une femme formidable qui vient d'accoucher et qui attend des nouvelles de son époux défaillant. Elle m'a écrit pour que je lui donne de ses nouvelles et vous m'écrivez que vous êtes enceinte de lui! Mettez-vous à ma place! Je suis dans une situation des plus inconfortables qui puissent exister.

Ne pensez pas que je vous juge! Nul n'en a le droit, seul le Très-Haut le peut!
Avec Emeric, nous aussi avons débuté notre amour dans la clandestinité la plus totale. J'étais libre, lui, l'était plus ou moins. Sa compagne était partie un jour sans jamais revenir. Je peux donc vous comprendre: l'Amour ne se commande pas. Il arrive souvent au moment où on ne l'attend pas.

Je suis bien ennuyée par cette révélation. Pourtant, bien des signes nous montraient votre attachement à Equemont et à vous. Quelquefois, des regards en disent bien plus que de simples paroles. Serait-ce mon expérience de la douane qui fait que presque rien ne m'échappe? Je voyais bien que quelque chose de pas très net se passait. Equemont semblait changé à vos côtés. Un escorteur qui voyage seul avec une Dame, toute Duchesse qu'elle peut être, ne peut rester insensible. Quand le chat n'est pas là, les souris dansent...

Mon père, le sage, disait souvent qu'il n'y avait pas d'amitié entre un homme et une femme. Enfin, il était suspect qu'un homme et une femme se côtoient souvent sans qu'il n'y ait un lien, secret ou pas, qui les unisse.

Par votre lettre, vous venez de me prouver qu'il avait encore une fois raison. Je ne peux, cependant, ne pas penser à Line. En effet, elle est mon amie et j'ai l'impression de la trahir. J'appréhende le moment où elle va apprendre que son époux chéri est, en fait, un beau salaud volage qui profite de son absence pour avoir une aventure avec une jeune femme. Comment va-t-elle réagir? Je n'ose imaginer...

Et vos parents? Pensez-vous bientôt les mettre au courant? Quoique la seule chose qui me fasse sourire dans cette sordide histoire, c'est que votre mère change ses cheveux roux en cheveux blancs prématurément!

J'espère que nous nous verrons bientôt pour en discuter de vive voix. Les conseilleurs ne sont pas les payeurs mais je peux essayer de vous aider, malgré tout. Jeune veuve, vous avez été victime de votre côté fleur bleue. Comment pourrais-je vous en vouloir alors que moi-même j'ai aimé un homme déjà pris? Je n'approuve pas, bien sûr, mais je comprends.

Portez-vous bien Votre Grandeur.

Je vous prie de croire, Madame la duchesse, en l'expression des mes plus respectueuses salutations.

Fait à Tréguier, le Samedi 27 Février 1464


Zakarine de l'Etoile Bleue



Zakarine relut succinctement ce qu'elle venait d'écrire. Bien qu'amical lorsqu'elle était face à Dana, le ton qu'elle avait employé ici s'était fait plus protocolaire naturellement. La Trégorroise sécha l'encre avant de rouler le parchemin. Elle fit rappeler le messager et lui donna le courrier à apporter à sa destinataire.
Le visage bouffi par le sommeil duquel on l'avait tiré, il repartit en direction de la capitale et elle alla se coucher, sans toutefois trouver le sommeil.

_________________
Don.
Ils vont bientôt tous parvenir à la tuer.

C'est lasse et désabusée de sa journée que la jeune duchesse pénètre dans cette chambre qui l'abrite depuis de longs jours désormais. La château où elle passe le plus clair de son temps est délaissé dès que la soirée s'annonce.
En effet, bien que persévérante, Dôn a besoin de recul afin de bien appréhender tous les imprévus qui surgissent lors d'une journée. Et dieu sait qu'il y en a !

Ce recul elle le fait donc naturellement en retrait, dans des appartements simplement loués. Salar y est également chaque nuit, il ne pourrait en être autrement car aussi étrange que cela puisse paraitre, son impertinence et sa fâcheuse tendance à réprimander Dana ne sont rien à coté du réconfort et de la tendresse qu'il lui procure. Et elle en a bien besoin.

Un besoin presque vital. Il y a deux jours, il lui a annoncé qu'il l'aimait.
De but en blanc, fidèle à lui même, ne lui laissant pas le temps de comprendre, d'analyser, au dépourvu.
La réponse fut maladroite. Impossible de lui dire qu'il ne lui apprenait rien, que deviner fut facile, il l'aurait estimé prétentieuse.
Inutile de lui dire que cet amour était partagé, c'était si évident. Alors les preuves furent données. Le visuel, le charnel. L'échange des corps est un raccourci bien plus pratique que les aveux, parfois.

Le lendemain, les azurs dévoilés de Kerdraon s'égarent sur un pli, distraitement laissé sur un guéridon, dès sa réception remontant à plusieurs jours.

Zakarine avait répondu à son courrier bien plus vite qu'elle ne l'aurait imaginé.
La lecture de ce dernier fut redouté et pourtant, au fur et à mesure que les mots s'enchainaient, la brunette se sentait de mieux en mieux. Le fait de ne pas être jugée était un point très important à ses yeux. Bien des personnes se permettront de le faire, mais jusqu'à présent, les gens mis au courant ou ayant deviné aisément n'avait finalement pas désapprouvé cet amour naissant. Peut être seront ils plus sévères lorsque le fruit de ces rencontres nocturnes sera découvert.
Chose qui ne devrait plus tarder, tant la comtesse grossissait à vue d'oeil.

L'amorçe fut faites, il fallait désormais assumer les réponses à suivre.
Accoudée à sa table, Dôn contemple ce parchemin vierge. Il faut désormais le noircir.
Le ton de la précédente missive fut trop lointain, bien que modifié sur la fin afin de donner plus d'ampleur encore à sa révélation, la prochaine sera axée sur l'unique sincérité. Plus de pudeur, ou mieux maitrisée.


Citation:
De Dôn,
A Zakarine,


Bonsoir,

Soyez assurée que le but de mon courrier n'était véritablement pas celui de vous abasourdir. Loin de là.
Par contre, j'ignore toujours quel pouvait bien être le but de ma démarche, tout ce que je sais, c'est que cela était nécéssaire. Pour moi en tout cas. Peut-être un peu pour cette fameuse conscience, que beaucoup évoquent en l'affirmant coupable bien souvent.

Je veux d'ailleurs que vous sachiez qu'Equemont n'était pas et n'est toujours pas à l'heure où j'écris ces mots, au courant de ma confidence auprès de votre personne. J'imagine qu'il prendrait très mal le fait que je puisse vouloir me confier sur notre relation, alors que justement... Le propre d'une relation est d'être vécue uniquement par les personnes la partageant. Je ne vous oblige pas au silence, s'il vient à le savoir, j'apprendrai surement très vite à savoir me taire même sur les sujets me concernant uniquement.

Je ne pensais pas que vous ayez pu deviner quoique ce soit. Pour tout vous avouer, je n'ai jamais essayé d'être discrète et lui non plus. Bien entendu, il serait fort déplacer de le chanter sur tous les toits, mais personnellement, je me contente désormais de tout vivre au jour le jour. Et le savoir près de moi, enjoué à mon contact suffit à emplir mon coeur de bonheur.

la culpabilité devrait me ronger.
J'ai rencontré Lanceline peu de temps avant son départ pour la France. A ce moment là, nous venions Equemont et moi, tout juste de reprendre contact et j'étais bien loin de penser qu'il se passerait quelque chose d'ordre sentimental entre nous.
L'état de son épouse fut constaté, je ne peux le nier. Il m'avait annoncé sa prochaine paternité d'ailleurs, et des félicitations avaient été de mises. J'étais et je suis encore heureuse pour lui, il est impossible de ne pas se réjouir d'une naissance, surtout lorsqu'il s'agit d'un garçon.
C'est un homme très secret et il est rare qu'il accepte de se confier à moi, mais je suis certaine qu'il est très heureux d'avoir obtenu un nouvel enfant.
Mais je ne culpabilise pas malgré tout cela.

Certainement parce que j'ai perdu le premier amour de ma vie il y a encore trop peu de temps... Et que profiter du bonheur lorsqu'il s'offre à nous me parait obligatoire.
Certainement parce qu'Equemont arrive à faire de moi une personne plus complète, plus affirmée.
Il a su me redonner confiance, une confiance qui disparait bien trop vite chez moi. Il m'a redonné envie d'avancer et surtout le courage de m'occuper à nouveau de mon fils, orphelin de père désormais.
Et surtout, comme vous avez su le lire entre mes lignes, au delà des mots, il m'a fait un enfant.

Je suis loin d'être un modèle maternel, entre une mère disparue trop tôt et celle dont vous espérez qu'elle vieillisse un peu plus vite... Mes modèles différent et troublent, mais je sais que ce petit, bien qu'illégitime sera une source de joie inépuisable.
Pour son père, je l'espère, pour moi sans aucun doute.

Concernant mes parents... Pour tout vous dire et surtout pour vous répondre, ils ignorent encore que j'entretiens une liaison avec Salar.
Ils le détestent. Plus que tout. Et c'est réciproque.
Ma mère s'en doute, les rumeurs courent.
Mon père aussi, certainement.
Apprendre cela de ma bouche risque fort de les décevoir, ce sera fait un jour prochain, c'est inéluctable.
Quant à l'enfant, je me moque bien de ce qu'ils penseront de lui, il est désiré par ses deux parents c'est tout ce qui compte à mes yeux.

Dès que la mobilisation cesse, je remonte sur Tréguier, et nous pourrons échanger sur le sujet.
Sachez que j'ai hâte de vous revoir, et espère sincèrement que vous vous portez aussi bien que lors de notre dernière rencontre.

Que le très haut vous protège,




_________________
--Lanceline



-« Hum, donà. [1] Ménagez Morwyn et Feu-de-Neige. Ils vont s’épuiser.
- Mercé Gaspard.


Elle venait de poser son regard noisette sur l’homme qui, à sa manière, lui exprimait toute sa sympathie. Elle acquiesça avant de délaisser le cheval qu’elle venait d’épuiser, preuve en était de l’écume qui sortait d’entre ses lèvres. Elle flatta l’encolure équine puis le laissa aux bons soins de l’homme et rentra au cœur de Brassenx.

Elle salua d’un bref signe de tête son fils et Ermelne qui semblaient courir le parfait amour, loin de la tourmente qu’ils avaient causé peu avant l’accouchement de leur mère. Ils lui sourirent en retour, et si la Blonde avait fini par accepter du bout des lèvres leur amourette, elle n’en avait pas touché mot à Equemont. Principalement parce qu’il semblait s’en foutre d’elle, et qu’elle ne souhaitait pas se rappeler à son -mauvais- souvenir.

Elle semblait finalement se plaire dans ce Sud qu’elle n’aurait jamais dû quitter, même pour les beaux yeux d’un breton qui lui avait promis monts et merveilles. Elle aurait dû suivre son discernement plutôt que son cœur, mais pour l’instant elle ignorait encore combien elle avait raison de songer cela. Non, pour l’heure, elle martelait des sabots de sa monture le sol pour oublier sa rage, et joutait à en perdre la tête, espérant que peut-être quelqu’un la lui ferait vraiment tomber. Tout pour ne pas oublier ce silence qui la minait de la part de son époux. Basile avait raison, les bouffeurs de gui ne valaient vraiment rien. Sauf une ou l’autre personne, peut-être. Zak en faisait partie.

La cape ne fut pas longue à tomber sur le sol une fois le seuil de sa chambre passé. Au dehors, elle entendait les cris de ceux qui profitaient du spectacle des joutes. Elle y assistait avec attention, vibrant en même temps que les jouteurs et frissonnant de plaisir à chaque fois qu’une lance se brisait.


Citation:
Lou bonjorn Zak, [2]
    Je suis partie parce que je devenais folle de rester en Bretagne. J’ai l’impression que l’air ne m’y réussit pas, et si j’y ai rencontré des gens qui me sont chers, le sud et ma famille me manquaient. Simplement, Equemont ne semble pas l’avoir compris, ou trop tard, aussi, comme il avait des fonctions en Bretagne, il a préféré rester.

    Je lui ai dit qu’il avait un fils. J’ignore même s’il en est heureux. Peut-être qu’Aur lui suffit. J’ai entendu dire qu’il était guéri. Ermelne l’a un peu senti, elle m’a dit qu’il y avait du mieux. Leur lien gémellaire, certainement.

    L’époux de ma cousine est également en vadrouille, mais il reste dans le comté où ils vivent. Il a des responsabilités lui aussi, mais je suis certaine qu’au moment de la délivrance de sa femme, il sera là.

    J’espère que tout va bien à Rennes et que l’attaque a été déjouée. J’espère qu’Equemont va bien. Mais je n’en sais pas plus. Il m’a juste demandé de revenir quand je lui ai demandé ce qui n’allait pas. Je n’ai plus de nouvelles depuis que je lui ai répondu que ma cousine avait besoin de moi…

    Repose-toi également, profite avec Emeric de ce temps qui vous ai donné… Et prends soin de toi !

    Pour moi, ne t’en fais pas, je me sens enfin utile ici.

    Je t’embrasse.


    Fait à Brassenx, le trois mars de l’an de grâce mil trois cent soixante-quatre.



Pendant qu’elle écrivait, une servante était entrée et avait déposé une lettre sur l’écritoire. Intriguée, espérant une réponse de son mari qu’elle n’attendait en réalité plus, elle prit la missive et l’ouvrit, ressentant alors qu’elle la lisait une boule de chaleur se former dans son bas-ventre.

Citation:
Ma très chère sœur,

Je t'écris aujourd'hui pour partager avec toi mes émotions. Tout d'abord ma joie, ma joie immense, d'apprendre que tu avais donné naissance à un garçon qui se porte bien. Reçois toute mon affection, et transmets-en un peu à mon neveu, veux-tu ?
Rassure-moi en me donnant de vos nouvelles. Car je suis inquiète pour toi, et pour les enfants. J'étais en taverne aujourd'hui, et j'ai échangé quelques mots avec Zakarine. Elle m'a appris que ton époux était à Rennes. Que fait-il à l'autre bout du royaume en pareils moments, si loin de toi ?

Sache qu'à tout moment, un mot de toi et je quitte Tréguier pour te retrouver. Rien ne me retient ici, et si je peux t'être d'un quelconque secours ou réconfort, sache que rien ne me ferait plus plaisir que de passer du temps à tes côtés.

Affectueusement,
Azarielle


Citation:
Ma sòr adorée, [3]
    Je tiens tout d’abord à te présenter mes excuses. En effet, je n’ai pas songé à t’annoncer la venue de ce dernier-né qui me remplit de joie… Mais j’ai vite été happée par d’autres occupations, et je ne suis même pas sûre que tous dans la famille sachent qu’un nouvel enfant est né.

    Equemont le sait, mais je ne suis pas certaine qu’il en soit heureux pour autant. Il m’a à peine parlé de son fils dans les dernières missives, m’a seulement dit qu’il avait failli à son mariage, et il me réclamait dans sa dernière lettre, arguant qu’il n’était rien sans moi. J’ignore ce qu’il a fait, et j’essaie de faire taire mes soupçons. Mais à toi je peux parler ouvertement et je suis très inquiète.

    Ta sollicitude me touche, mais si tu pouvais m’être utile à une chose, ce serait d’aller voir ce qu’il fait à Rennes. S’il est même encore vivant, puisque même cela je l’ignore…

    Aloan va bien, lui. Il est plein de vie et ne passe jamais un jour sans me réclamer. Il est adorable, et je sais que je ne l’aide pas en le couvant ainsi. Mais j’en viens à penser que ce sera peut-être mon dernier enfant, et je tiens à savourer ce moment tant que je le peux encore.

    Le temps s’enfuit, Azarielle, et ne revient jamais… Il ne sert à rien de l’attraper parce qu’il s’enfuirait facilement, mais il faut le laisser aller après en avoir profité. S’il y a bien une chose que j’ai apprise après toutes ces années, c’est celle-ci.

    Pour l’instant, Alvira a besoin de moi, aussi je reste dans le sud. Mais étant mariée à Equemont, je ne puis décemment rester trop longtemps loin de lui, aussi préféré-je penser que je rentrerai bientôt.

    Je t’embrasse.

    Que Sainte Illinda te garde !


    Fait à Brassenx, le trois mars de l’an de grâce mil trois cent soixante-quatre.



[1] Dame
[2] Le bonjour.
[3] Ma sœur.



Zakarine
Son mandat avait pris fin, Zakarine avait un peu plus de temps à consacrer pour elle-même. Elle passait ses journées à paresser dans son lit, un livre à la main ou bien elle retournait pêcher, seule avec le bruit des vagues et les cris des goélands comme compagnons. En attendant le retour de son guerrier, elle réapprenait à vivre doucement et calmement. Quand elle ne passait pas ses nuits à garder la ville, elle allait en taverne boire un coup avec les villageois. Un soir, une dame entra. Zakarine se souvint très vaguement d'avoir croisé un jour Azarielle mais quand elle se présenta, la gêne la rendit aussi rouge qu'une pivoine en pleine éclosion. Mais comment avait-elle pu oublié la sœur de Lanceline?! La cordiale conversation du début de présentations s'était peu à peu engagée au sujet de l'épouse d'Equemont et de sa grossesse hors de Bretagne et surtout loin de son mari.

La Rouquine avait déjà reçu le premier courrier de Dana dans lequel elle lui faisait son effroyable aveu: la Duchesse était enceinte de Quem. Zakarine ne savait plus quoi dire. Elle n'allait tout de même pas annoncer de but en blanc à Azarielle que sa soeur chérie était cornue?! D'autant plus qu'elle venait tout juste d'accoucher d'un petit garçon prénommé Aloan. Les questions fusèrent de la part d'Azarielle dont certaines restèrent sans réponses de la part de Zakarine. Non pas qu'elle refusait de lui répondre mais c'est qu'elle ne savait pas quoi lui dire. Enfin bref, elle éludait parfois, tout en essayant de changer de conversation. Azarielle n'était, cependant, pas dupe. Elle se doutait bien que quelque chose de grave se passait, aussi décida-t-elle de partir pour en savoir un peu plus.

Dans cette affaire, la Trégorroise devait servir d'intermédiaire mais surement pas à n'importe quel prix. Il fallait toutefois, ne serait-ce que par amitié, prévenir la parturiente de sa mésaventure. Il n'était pas juste pour elle qu'elle se berçât d'illusions sur son mariage.

Le 2 mars, un messager lui porta un nouveau courrier de Don. La jeune femme lui décrivait l'amour qu'elle ressentait pour son amant et vice-versa. cela aurai pu réjouir Zakarine au plus haut point si seulement... si seulement l'homme en question n'était pas déjà marié et papa. De plus la rouquine appréciait fortement Dana. Le malaise qu'elle ressentait était indescriptible. Elle était prise entre deux feux: deux femmes pour un même homme. Cela aurait pu être le récit d'une tragédie grecque mais non, l'histoire se passait en Bretagne et chez elle.

Elle prit à nouveau la plume et répondit bien plus tard qu'elle ne l'aurait souhaité car, entre temps, elle avait aussi reçu des nouvelles de Lanceline, le 3 mars. Un bref courrier qui en disait long sur ce qu'elle ressentait. Zakarine soupirait à chacune des lectures des deux femmes. Le bonheur adultérin de l'une et l'angoisse du sentiment d'abandon de l'autre. Si seulement elle avait des pouvoirs magiques, Zakarine aurait tout fait pour le monde soit doux et beau. Mais non, la dure réalité était là et bien là et il fallait faire avec.

La Rousse commença par écrire à Don, même si elle était entrée à Tréguier entre temps, s'épancher par écrit est parfois plus facile que de vive voix.



Citation:
De Zakarine
A Dôn


Je vous prie d'excuser le retard de ma réponse à votre courrier mais vous devez bien comprendre que recevoir des confidences de la sorte fait de moi votre complice. La complice de votre bonheur à vous et la complice du malheur de Lanceline. Rien que pour cela, je pourrais vous en vouloir mais il n'en est rien. Vous avez drôlement de la chance!

Vous vous dîtes heureuse et cela me sied. Il ne manquait plus que Equemont vous fasse souffrir, à vous aussi! Un enfant à naître est toujours une bénédiction. Il ne devra surtout pas subir les affronts de la part d'autres gens à cause de votre liaison illégitime. Je vous promets que je ferai en sorte que cela n'arrive jamais, enfin à Tréguier: c'est un être totalement innocent qui n'a rien demandé à personne.

Votre secret est très dur à garder. Les gens commencent à se poser des questions et je ne sais pas si je dois le révéler ou pas et surtout à qui. Je vous ai promis la plus grande discrétion et je m'y suis tenue jusqu'à présent. Même Emeric n'est pas au courant de cette histoire.

Cela dit, il en est une qui mérite la vérité et cette personne est Lanceline. Elle m'a écrit en se plaignant du manque de communication de son époux bien qu'il lui ait demandé de rentrer en Bretagne. Vous rendez-vous compte, le choc pour elle si elle vous voyait enceinte et amoureuse de son mari alors qu'elle vient de faire tout ce chemin avec de jeunes enfants?

Personnellement, je ne voudrais pas lui infliger cette torture morale. Azarielle, sa soeur, a déjà des soupçons que je n'ai en aucun cas confirmés ni infirmés, d'ailleurs. La première à être informée doit être la femme cocufiée, par respect pour sa personne. si vous le désirez, je peux m'en charger même si la tâche ne me sera pas aisée.

Ne vous tracassez pas, je vais essayer de tout faire pour arrondir les angles pour faire souffrir le moins de gens possible dans cette histoire.


Portez-vous bien et que le Très-Haut vous garde!.


Fait à Tréguier, le Mercredi 9 Mars 1464

Zakarine de l'Etoile Bleue



Zakarine fit sécher l'encre, roula le parchemin et le cacheta avec son sceau personnel. Elle remit le courrier à un messager afin de le livrer au plus vite à sa destinataire. La Rousse se leva et se servit un godet de chouchen. Elle avait besoin de courage pour affronter la deuxième lettre qu'elle devait écrire, celle qui était destinée à Lanceline.

Elle revient s'asseoir à sa table de travail et réfléchit longuement à ce qu'elle allait coucher sur le parchemin vide, devant elle. Était-ce vraiment son rôle à elle de révéler l'infidélité de son époux à Lanceline? Plus elle gambergeait et moins elle en était convaincue. Et Equemont dans cette histoire? Que pensait-il? Pourquoi ne répondait-il pas à sa femme quand elle lui a appris la naissance de leur fils alors qu'il lui avait demandé de le rejoindre? Était-il certain de vouloir la quitter? Pourquoi détruire un couple par des révélations qui ne les regardaient qu'eux deux alors qu'il y aurait, peut-être, un espoir de réconciliation? Non, Zakarine ne voulait pas avoir le mauvais rôle de l'histoire. Les affaires conjugales devaient rester au sein du couple et une tierce personne ne devait pas s'en mêler. Elle allait lui écrire, oui, mais seulement pour demander de ses nouvelles. Zakarine pensait à écrire également un courrier au mari infidèle.


Citation:
De Zakarine
A Lanceline



Ma très chère amie,

Je suis heureuse que vous allez tous bien, même si c'est dans le Sud et non en Bretagne, auprès de nous tes amis, et surtout de ton époux. N'aies aucune inquiétude à son sujet, il va très bien. Tout comme Emeric, il est rentré à Tréguier car l'alerte a été levée pour le moment. Sa charge au sein du Duché s'achève bientôt, il ne reste que dix jours avant les prochaines élections ducales. Il aura sans doute plus de temps à consacrer à sa famille, après cela.

Ermelne a vu, ou ressenti, juste. Aur va beaucoup mieux, que le Saint béni soit-il! De savoir cet ange dans cet état ne facilitait pas surement pas décision d'Equemont de le laisser seul en Bretagne pour vous rejoindre.

Tu sais, Quem est plutôt du genre taciturne. Il ne parlait déjà pas beaucoup auparavant mais là, il est presque devenu une tombe. Peut-être que quelque chose de grave le tracasse-t-il? En tout cas, je peux te dire qu'il est plutôt fermé en ce moment.

J'ai rencontré ta soeur Azarielle. Elle aussi est très inquiète à ton sujet et à votre situation matrimoniale qui n'est pas très nette: lui ici et toi en bas.. Elle m'a d'ailleurs expliqué qu'elle voulait se rendre à Rennes pour avoir une explication avec lui. Ils se sont sans doute croisés sur la route. Du coup, je ne sais pas si elle a obtenu de lui les renseignements qu'elle désirait avoir.

Je te promets de tout faire pour que tu aies les éclaircissements que tu es en droit d'avoir.

Je t'embrasse bien fort

Prends bien soin de toi ainsi que de tes enfants!

Que le Très-Haut vous garde tous en bonne santé!


Fait à Tréguier, le Mercredi 9 Mars 1464

Ton amie Zak




Un autre courrier l'attendait. La nuit était passée très vite, voilà que les premiers rayons de soleil filtraient à travers la fenêtre. Zakarine avait passé sa nuit assise sur une chaise, à penser et à écrire. La fatigue ne se faisait pas tellement ressentir cependant. Elle avait trop de choses en tête pour penser à se reposer. La Rousse irait très vite rejoindre son compagnon dans leur lit aussitôt sa mission accomplie. Mission, quel drôle de mot pour une affaire aussi privée que celle-là! Elle dont les "missions" avaient toujours été plutôt guerrières ou bien de surveillance. Enfin bref, comme aurait dit Pépin, cette mission-là, elle s'en serait fortement passée. Lanceline se morfondait à Labrit, chez sa cousine. Equemont et Dana s'affichaient ensemble en Bretagne sans toutefois dévoiler la grossesse de cette dernière au grand jour.



Citation:
De Zakarine
A Equemont



Tu vas sans doute être surpris pas ce courrier et, crois-moi, je me serais bien dispensée de te l'envoyer. Seulement, je suis mêlée à une affaire qui ne me regardait pas au départ et qui me préoccupe aujourd'hui.

Je vais être directe et franche avec toi. Je suis au courant de la liaison que tu entretiens avec Dôn et les conséquences qui en découlent. Vous pouvez encore un peu cacher ce lourd secret mais, à un moment, la grossesse de la Duchesse sera visible et il faudra bien donner une explication plausible puisque son mari est mort et qu'il ne peut, en aucun cas, être le père de cet enfant à naître.

Lanceline m'a aussi écrit plusieurs fois pour le demander de tes nouvelles et pour m'apprendre la naissance de votre fils Aloan. Mais ça, tu le sais puisque je t'ai félicité quand tu étais à Rennes et que tu n'as pas jugé bon de répondre à mon courrier..

Elle s'inquiète beaucoup pour toi et surtout sur votre situation à tous les deux. Tu sais, Line est loin d'être idiote. Elle sent bien que quelque chose ne va pas. Elle attend de tes nouvelles. Je n'ai pas osé lui expliquer les circonstances dans lesquelles tu vis actuellement, ce n'est pas à moi à le faire mais bien à toi.

Sois un homme Equemont, et prends tes responsabilités! Même si je me doute que ce ne sera pas facile, il vaut mieux pour tout le monde que tu éclaircisses la situation en écrivant à Lanceline.

Sais-tu seulement ce que tu veux réellement? Aimes-tu vraiment Dana, comme elle le pense, ou bien t’amuses-tu avec elle en l'absence de ton épouse? Il faut vraiment que tu sois clair avec toutes les deux. Ce sont des dames estimables qui méritent le respect, aussi bien l'une que l'autre.

Ce sera le seul conseil que je te donnerai: celui de prendre tes responsabilités en dévoilant ta relation à ton épouse afin qu'elle puisse en tirer les conséquences et agir comme bon lui semblera par la suite. Elle mérite la vérité et ce n'est pas à moi à la lui révéler, c'est ton devoir de mari et de père.

Si je me suis permise de t'écrire, c'est parce que je t'aime bien et que cette histoire me chagrine. Je sais que tout s'arrangera par la suite, seul est le premier pas qui est difficile.

A toi de jouer, Quem! Toutes les cartes sont entre tes mains.

Bon courage, mon ami!

Que le Très-Haut te donne la force d'affronter cette tempête!


Fait à Tréguier, le Jeudi 10 Mars 1464

Ton amie Zak




Tout en roulant le parchemin, juste avant de le cacheter, Zakarine regardait la porte fermée de sa chambre. Des tas de questions lui vinrent à l'esprit. Comment réagirait-elle si elle avait été à la place de Lanceline? Est-ce que Emeric aurait le courage de lui avouer qu'il en aime une autre? La fatigue de cette longue nuit blanche se faisait sentir. Elle donnerait les courriers à envoyer à son réveil, il était tard et tout le monde dormait à cette heure. Elle souffla sur les chandelles qui trônaient sur la table et prit le petit bougeoir pour s'éclairer jusqu'à la chambre. Elle entra et pénétra dans le lit. Zakarine chassa ces vilaines pensées qui lui étaient parvenues et se blottit tout contre son amant. Elle s'endormit paisiblement.
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