Taliesyn_de_montfort
Les ours blancs sont blancs parce que ce sont de vieux ours.
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Pour me suivre
Il est de réputation que les deux hommes, le Prince et le Marquis, ne s'entendent pas forcément sur tous les sujets, pour ainsi dire sur peu de sujets. Mais il est de notoriété aussi que les deux hommes, associés, pouvaient être capable du pire comme du meilleur. Comme deux faces d'une même pièce, deux différences qui unis donnent toute valeur à l'association. Mais pour cela il fallait passer déjà outre quelques obstacles, la rudesse de l'ours et sa condescendance sur le Prince, qu'il avait vu jeune lorsque ce premier travaillait avec le Grand-Duc Elfyn.
Les Cerbères, comme ils sont communément appelés étant lige du Prince, faisaient route en entier depuis Retz. En transit à défaut de récupérer les terres dans l'immédiat, ils voyageaient vers Dol. Ainsi deux dizaines en deux lignes, avançaient en direction de la Baie du Mont Saint Michel, évitant soigneusement Rennes, où une halte aurait été inutile et allongée du fait du bouillonnement de la cité. Les hommes qui avaient profité de la halte de Pornic pour se requinquer étaient désormais plus proche de troupes de Prince que de mercenaires. Le Prince de Retz, laissant le trot routinier du cheval guidé un mouvement nonchalant, les pensées du condottiere vaquant ailleurs. A vrai dire ses pensées n'allaient pas si loin, il suffisait de suivre son regard pour voir qu'il fixait la voiture qui le précédait, sa captive y était, accompagnée, comme toujours de Fanch.
- Johan, lève la bannière, nous sommes en vues de leurs remparts.
Le Cerbère flotte fièrement sur cette petite compagnie, je cherche à changer mes pensées trop chargées, et mes souvenirs me projette rapidement en arrière, m'étonnant qu'elle ait traversé les rangs des soldats napolitains sans faillir. Le rôle de porte-drapeau est ingrat, et Johan est bien placé pour le savoir son bras ayant été brisé de tous ces os, sous les coups d'épée sur son bouclier rompu. Portant encore celui-ci en bandoulière, il n'a pas pour autant abandonné sa tâche, sa fierté de porter les bannières, est tout autant dû à son jeune âge, qu'à sa capacité incroyable à survivre comme un miraculé, faisant de lui le plus apte à être porte drapeau, et le moins apte à inquiéter quiconque à la batarde. Son entrainement cela dit portait ses fruits, mais la bannière l'ayant sortie de sa condition de jeune écuyer pour un rôle plus noble, il se refusait de la lâcher de peur de ne plus mériter sa place. C'est donc avec un grand sourire que je l'observe, il me le retourne, d'autant plus fier de son rôle et ainsi parvenu à me faire oublier la présence de la brune dans notre cortège.
Baissant la tête pour passer le châtelet, je laisse un des hommes descendus à terre prendre les rênes pour guider mon cheval tandis que le carrosse finit sa course en direction de la haute cour. Je me laisse glisser du cheval profitant du léger élan pour faire quelques pas et me dépoussiérer un peu. Je me tourne pour voir la compagnie prendre ses marques habituelles, guidés pas les quelques soldats en présence pour trouver foin et eau pour les chevaux, et ale fraiche au gout abrupt. Je desserre mon baudrier prend l'épée par son fourreau et la lance au soldat qui venait vers moi dans ce but, un échange de regard et je file en direction du donjon. Je ne sais à quoi m'attendre concernant l'ours de Dol. L'homme immense de mon mètre soixante-quinze, imposait déjà lorsque j'étais plus jeune, et j'avais de notre dernière rencontre gardé un mauvais souvenir. Il s'était à cette époque échiné à me considérer comme je pu être avant mes différentes campagnes, un jeune homme plus ambitieux que solide et frêle en tout point. C'est finalement une condition qui sera le plus à même de valider la viabilité d'une association entre nous, si d'aventure il n'était pas capable de me traiter comme je le devais, je ne serai pas en mesure de garder l'once de respect que je me dois, et ne saurai aller plus loin. L'a priori serait entérinée et je ne serai pas apte de faire fi de cela. Mais nos échanges par correspondance avant cette rencontre avaient été des plus productifs, je me redressais donc, tirant sur mon doublet armant et frottant la poussière issue de la chevauchée de mes manches, suivant finalement le garde qui venait m'accompagner jusqu'à la haute cour.
Dol est tout de même une belle place forte, certes plus rustiques que les castels italiens, au vu des hourds populaire ici et jugé trop peu esthétique en Italie. En même temps qui voudrait d'une place forte esthétique... Ainsi je passe la porte d'accès pour la haute cour, la herse descendue et visiblement rarement remonté au vu de la rouille installée, la Bretagne était calme en ce moment, cela changeait. Voyant le carosse installé entre le donjon et le logis, je vois que celle-ci n'est toujours pas sortie. Mon humeur se distingue par le fait que mon pas est plus rapide désormais que le garde qui m'accompagne et qui traine finalement derrière moi. Notre échange la veille avait été vif, et il semblerait qu'elle continue de me le faire payer, je ne parvenais trop à savoir où on allait avec elle finalement, et si mon jugement n'était pas trop altéré, de la à me demander si je ne me condamnais pas moi-même à la savoir là. Arrivant à hauteur de la porte de la voiture, je dégage le cocher pour donner un coup de la plante du poing dans la porte. Au vu du bruit, le message était clair. L'arrivée du Marquis n'allait pas tarder, et je ne souhaitais pas faire tout un spectacle de sa présence, elle ne devrait pas interférer dans les projets, et elle serait capable de vouloir les faire échouer juste parce qu'elle en avait le pouvoir et qu'elle souhaitait en faire étalage. Je tournais le dos pour faire face au donjon, seul moyen efficace de trouver mon calme.
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