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[RP] Les jeux de mains.

L_aconit
Juin 1461. Chateau de Rézé. Bretagne.

Les travaux lancés par le Prince de Retz pour donner à la place forte des allures moins rustiques, plus proches d'une une petit cité fortifiée tendaient à devenir interminables sous la petite bruine assassine qui les rendait laborieux. Le château faisant face à la grande Nantes changeait son vieux visage contre un jeune. L'édifice était habité d'une pensée nouvelle et jeune, campée dans ses bottes et inspectant l'avancée des travaux d'un oeil circonspect, en la personne de Taliesyn de Montfort. Se parant d'atours plus gotiques et s'agrandissant dans le fatras assourdissant des burins tailleurs de pierre, du roulis des charrettes et des jurons des artisans, éreintés par 4 jours successifs de pluie et prêts à se faire les dents sur leurs enclumes. Tout était fait sur place. La taille des blocs de pierre et même les outils pour se faire. On raconte même que les ânes bâtés tirant leur lourds chargements étaient eux-même nés ici, dans la lenteur de ces fastidieux travaux.

Le seul qui ne semblait pas s'embourber dans cette fourmilière bâtisseuse, c'était lui. Là.

De ce côté. Ha... Non.
De l'autre.

Par ici.
    Plus loin.


L'Aconit était nulle part et partout à la fois, petit homme au sortir de l'enfance, affairé à soigner les bêtes de somme le temps de la visite à Rezé du Prince qu'il servait et qui l'emportait partout avec lui. Du haut de ses treize ans, le garçon blond aux yeux clairs savait panser et soigner les chevaux, déterminer la date de la mise bas d'une jument et surtout... Redoubler de ruse et de malice pour obtenir ce qu'il désirait.

Aujourd'hui Faust, comme l'appelaient les uns, Nicolas comme l'appelaient les autres, l'Aconit comme ils l'appelaient tous, avait décidé de convoiter la paille sèche des écuries pour jouer avec les enfants du forgeron tandis que la bruine recommençait à se faire averse, mettant à l'arrêt les manoeuvres au grand désespoir des travailleurs du château. Ils étaient deux garçons gaillards mais braves, craignant leur père plus que nul autre, soudard aux mains calleuses affairées à battre le fer à longueur de journée. L'arrêt de ce bruit vif significatif, fer contre fer, les laissait tous deux raides et l'oeil alerte, craignant sans doute qu'il ne vienne s'occuper de les battre eux. Nicolas avait remarqué leur tension, mais... L'innocence des jeunes garçons permettait d'oublier, par le jeu, les défis et les secrets de polichinelles confiés sous la paille, les duretés de la vie. Des instants entre parenthèse, jusqu'à ce que le martèlement ne reprenne son cours.

Ce jour là donc, l'écuyer et les deux jouvenceaux feignaient la bagarre. Gaiement, le plus fort des trois prenait le dessus, écrasant le plus faible, à savoir Nicolas. Le jeu aurait pu s'arrêter là, mais comme tout le monde le savait, les jeux de mains étaient souvent prétexte à ne jamais s'arrêter, comme cette maudite pluie, et à pousser toujours plus loin leurs limites. La poursuite de l'un, la chute de l'autre dans la boue près du vivier, le troisième qui s'interpose. Les poings sont tendres, les vêtements se débraillent. Les rires s'entrecoupent de cris, attestant du rapport de force. L'écuyer a un geste brusque, le fils du forgeron, tout bonhomme soit-il, chute. Tête la première dans la boue.

Masquant l'hilarité, la main hyaline se tend au secours du vaincu, humilié. Tous deux couverts de boue et de purin, les yeux bleus restent joueurs, redressant le jeune garçon. Trop fier pour montrer sa défaite le combat reprend, dans la surenchère, jusqu'au geste fatal achevant définitivement celui qui avait au premier tour perdu d'avance la bataille. L'enfant chute dans le vivier, tête heurtant un obstacle mal identifié et perd connaissance. Effrayé, l'ainé croyant le cadet mort, s'en va alerter tout Rezé et Faust reste là, perdu, tentant de ranimer son adversaire pantelant dans l'eau, interloqué des conséquences de son propre geste.Quelques claques finirent par ramener l'enfant à lui, mais hélas le mal était fait.

    Le marteau cessa de retentir sur l'enclume.


L'Ogre s'annonça par ce simple et sinistre silence...

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N'est maître de son art, que celui qui le crée - Damien Saez
Taliesyn_de_montfort
La seule fin pour laquelle les hommes sont autorisés, individuellement ou collectivement, à intervenir dans la liberté d' action d' un de leurs semblables, est la protection de soi-même.


Sous la pluie bretonne

    L'avantage de la pluie, c'est quelle camoufle un tant soit peu l'odeur de l'oeuvrier qui par son apprêté est censé rappeler au bon souvenir de l'employeur qu'il travaille durement, aussi âprement donc que l'âcreté qu'il dégage. Mais les différentes averses font leur office et ont la joie d'offrir une douche bienvenue aux journaliers tandis que le travail continue. Bien sûr, le maitre d'oeuvre ne trouve qu'à s'en plaindre car je ne lui autorise pas de vacances pour autant à son chantier. S'il n'est possible d'avancer sur le gros oeuvre, il y'a toujours de quoi faire, chacun trouve à préparer le travail du lendemain si ce n'est que simplement d'avancer encore celui du jour. Si mon nez est à l'abri, le brouhaha n'est guère assumé par la pluie qui s'abat. Alors, sous la toile de fortune posé las, en face de l'aile en travaux, je tente d'entendre ce qui m'est proposé, entre deux battement d'un marteau, d'un chargement de carriole où le manœuvre tend plus à hurler qu'à travailler et je m'agace. Il n'est jamais évident de rater mon exaspération, car même lorsque j'y applique une retenue aussi rare qu'un sourire chez moi, le cynisme claque comme cette enclume maltraitée.

    Mes mains posées en appui sur la table tenant, bon an mal an, le vélin de plan trituré au gré de mon cahier des charges des plus capricieux, se transforme en poings au fur et à mesure que l'exaspération guette, les temps battant autant que le fer. Lorsque je me redresse, il m'est difficile de rater la course des trois garçons, faisant fi du reste du monde, je ne fais que suivre du regard pour y reconnaitre mon écuyer. Il est de cet âge où je ne sais encore si je dois le traiter en homme ou pas. Une rare tendresse et tolérance que je me refuse de reconnaitre est dévoué à ce gamin, que plus d'un regard extérieur plaindront du traitement infligé à ce pauvre hère, qui bien aimé de ma personne est fortement châtié à contrario. Certainement pour ne pas vouloir gâter d'un traitement trop favorable qui vire au traitement des plus durs. Le bruit s'arrête et permet enfin de me concentrer plus facilement, encore un coup et j'aurai fait bouffer le marteau au forgeron, comment pouvait-on battre un fer en discontinu au même rythme sans pause aussi longtemps si ce n'était pour m'agacer.

    Tournant le dos à la cour le dialogue continue avec le maitre d'oeuvre, la tour de flanquement devait être grandiose, elle porterait le nom de tour d'Elfyn, et serait orné gothique sur son orientation interne, et robuste sur l'externe...

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Pendant ce temps, du côté du vivier...


      "Morveux, t'as voulu jouer au plus fort avec mon petit jehan? Je vais te faire tater moi, tu vas voir ce qu'il en coute d'érafler le govig*. "


    Rangeant son marteau à la ceinture, rouge de l'effort constant, les muscles des bras visibles et saillants, l'homme s'approche. Visiblement, si l'effort rougis les muscles, le visage lui l'est par un vin mauvais, ingérée à fortes doses aussi régulières qu'un marteau tape une enclume. Et l'homme de voir rouge, c'est redondant, mais le forgeron est régulier en tout, et taper en rythme, un garçonnet désobligeant ou une enclume il sait faire. Et certainement qu'il est possible d'expliquer plus longuement un environnement défavorable et une suite de mauvaise fortune amenant à penser que la solution à cet instant dans l'absolu, sera de cogner un frèle écuyer. La raison est faible mais on a touché au gosse, et bien que celui-ci soit certainement plus souvent rué de coup qu'à raison en privé, en public le père est chef de famille protecteur selon sa vision, et l'aconit va bouffer ses pétales si ce n'est ses racines.

    Le pas est lourd, la démarche nerveuse et irréfléchie, le tablier voit la pluie couler doucement, contrastant avec la rudesse du forgeron. Une main s'abat pour attraper au collet Nicolas et le sortir de l'eau, la foudre s'abat lorsque comme une brindille il est balancé huit pieds plus loin. On aurait pu penser que le père allait sortir son fils de l'eau, sauvant la victime de la bataille infantile, mais celui-ci eut le droit au dos de la main avec un élan peu modéré, et un doigt fixant un horizon incertain.


      "Dégages d'ici, et que je ne t'y reprenne plus, où c'est moi qui te noie la prochaine fois, sale gosse."


    La brute se retourne, et voit l'écuyer encore présent au sol, visiblement secoué du choc ou tétanisé par l'ogre se trouvant face à lui, de toute manière peu importe pour le forgeron, il n'a pas saisi l'occasion de fuir et l'apprendra à ses dépens. Le forgeron lui flanqua un coup de pied bien sentis dans les côtes, suivit d'un second, maugréant et éructant des insultes inaudibles. Se baissant il lui assena d'autres coups, plus durs et aveuglés par la colère...


govig : petit forgeron
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L_aconit
Son coeur aurait pu s'arrêter. Là, le cul dans l'eau. L'immense silhouette du forgeron sous la pluie de Rézé pouvait suffire à lui donner des ratés... Mais lorsque la main agrippa ses vêtements l'Aconit sentit son palpitant s'emballer tant qu'il manqua d'air, terrorisé par la violence de l'ogre.

C'est ici qu'il mourrait. Tué par la colère d'un monstre aux pognes impressionnantes. Sa bouche voulu crier, mais sa gorge serrée n'autorisa aucune plainte. Tétanisée. Les yeux bleus se fermèrent avec force, et tous ses muscles se crispèrent lorsqu'il fut projeté plus loin, s'écrasant au sol comme une poupée de chiffon. Sonné d'abord, l'écuyer resta là, comme un chien obéissant et couché, bien incapable de se mouvoir tant il a été rossé. Mais la douleur vive et lancinante de son dos qu'il pensa brisé en mille morceaux le contraint à se redresser, libérant enfin un cri de détresse arraché à ses entrailles. Un cri qui résonna dans tout Rézé comme le marteau sur l'enclume de la montagne brutale qu'était le forgeron.

Sans doute agacé par son immobilité plaintive, l'homme revint au jeune blond qui sentit son ombre s'étendre sur lui comme la mort en personne. Celle qui n'épargne personne et dont les décisions sont irrévocables.

C'est ici qu'il mourrait. A treize ans, tué par le courroux foudroyant d'un Gargantua. Et personne, personne ne saurait l'arrêter. Ni les cris de Nicolas, ni les cris de ses propres enfants épouvantés que leur propre calvaire ne déborde sur quelqu'un d'autre.

Nicolas eut beau protéger son visage de ses bras, son assaillant ne lui pardonna rien. Les coups de bottes boueuses vinrent pleuvoir sur ses muscles meurtris, très clairement assénés pour massacrer ce doux visage d'angelot... Et le réduire en bouillie. Acculé, dans un dernier cri de détresse, blondin perdit connaissance. Comme un juste retour des choses qui apaiserait - oui ou non - la brute décérébrée qui s'en prenait à lui.

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N'est maître de son art, que celui qui le crée - Damien Saez
Taliesyn_de_montfort
“L'essence de l'idée de juste, c'est d'offrir une issue au sadisme en affublant la cruauté du masque de la justice.”

Sous la pluie de coups

Une pluie battante, comme le marteau de la colère sur l'enclume de l'innocence. Cette innocence, cette pureté c'est ce qui attire le Prince vers son écuyer. Non pas une attirance basse, ni profonde comme la nature voudrait, mais dans son essence même. L'aconit, pour lui, doit rester sans compromis, les soldats considèrent l'écuyer comme l'objet du Prince, à tort. SI l'écuyer est à ses ordres, il ne le considère pas comme un serf à proprement parler. Il le veut à ses côtés, car bien que faisant ressentir d'autant plus ses vices, il lui donne une impression de pureté qu'il n'a jamais, d'une pureté qu'aurait certainement choyé son père. Et s'il ne l'est pas, il admire ce qui l'est. Peu de mots peuvent décrire le sentiment éprouvé par le Prince. En protégeant la pureté encore infantile chez son écuyer, il anime comme le souhait d'expier des péchés qu'il n'a pour autant aucun scrupule à œuvrer en toute conscience. Mais comme un souhait profond, il est à la recherche de cette pureté que jamais il ne connaitra, la faiblesse de son âme trop prompte à chercher toute facilité, ainsi, si sa cruauté peut protéger le sanctuaire de cette pureté, il œuvrera sans peine, tel le Cerbère protégeant les âmes expiatrices.

      Votre Altesse, ce que vous nous demandez là, nous ne l'avons jamais vu, et j'ai peine à imaginer nos artisans capables de réaliser tel œuvre de maçonnerie pour vos fenêtres. Il nous faudrait bien des plans à défaut de l'expérience pour créer cela.


      Je vous en ferai mener d'Italie donc, c'est tellement répandu là-bas. Autre chose?


      Oui messire, ...


    Et la phrase de rester en suspens, tandis que je me note pour moi-même une moue de déception imprégné sur mon visage, qu'il faudra faire payer plans voir débaucher un maitre oeuvrier italien pour superviser les oeuvrages d'art de maçonnerie et de menuiserie. Finissant ma note rapide et illisible, je lève les yeux vers mon maitre d'oeuvre qui ne finit décidément pas sa phrase. Aidé par le cri d'alarme écrasé par la pluie, tel un cor de repli sonnant le glas de la défaite, je me sors de mes réflexions. Mes yeux parcourent les visages des hommes autour de la table de chantier, ils sont figés, le cri provient du protégé du prince, observant dans mon dos le massacre. Toute l'activité s'arrête, observant le soudard lourd, frappé sans retenue un corps frêle, pur et inanimé.

    Les coups de bottes sont en rythme, déformations professionnelle morbide d'un forgeron habile, fou de rage, possiblement plus aviné qu'à l'accoutumée, et ayant une bonne raison que de taper sur autre chose que sa progéniture. Il fait peu de cas de l'écuyer, personne ne viendra à y redire, son erreur aura été de taper celui-ci en particulier. Seul forgeron, peut-être se pensait-il indispensable, seul habile à des lieux, mais nul ne l'est, aux yeux du prince, sauf son feu follet pur. Ainsi j'attrape mon baudrier que j'avais laissé choir contre la table, courant vers la scène qui attirait tous les regards. Je cours, et chacun de mes pas, dans la boue de la cour, sur les pavés qui peinent à apparaitre viennent à contretemps des coups de botte. Contrant le destin qu'essaie de sceller le forgeron sur Nicolas, absorbant les quelques gens regardant la scène, sentant qu'en lieu et place d'un drame un autre aller se superposer, si tant est que j'arrive à temps.

    Le forgeron ne me voit pas, ne me sens pas dans son dos, comme pour parachever son oeuvre, pour signer de sa marque l'horreur de son crime, il sort son marteau de sa ceinture, et va pour achever l'âme frêle qui lutte pour s'accrocher à son corps. Levant son marteau bien haut, comme un juge arrêterait une sentence, il hurle, mais son cri n'est pas de haine, incrédule de ce qu'il se passe, je vois ses yeux chercher sa main. Ma lame elle, à l'instant est déjà haute, partant du bas, récupérant la main et son marteau, fauchant la morte certaine qu'elle représentait, couperet de deuxième chance pour l'aconit.

    Incrédule, je disais, le forgeron regarde là ou devrait se trouver sa main, un sang diffus jaillit du moignon, je me surprends à noter que le rythme reste le même que ses coups, un cynisme éprouvant pour le forgeron qui se tient le moignon, tombant à genoux dans la boue, hurlant de douleur. Son regard me questionne, mais lorsqu'il me voit à côté de Nicolas, je vois un éclair de compréhension dans ses yeux, le rideau rouge de la colère est tombé au même moment que sa main, et sa lucidité lui permet de comprendre que c'est la fin, que je n'ai pas rengainé mon épée, que je vois l'inanimation de l'écuyer que je sais mort. Et bien qu'une perte n'en remplacera pas une, c'est à mon tour de sentir la colère remplir mon esprit de la fureur de la vengeance. Mon regard quitte Nicolas, et je recule mon bras pour enfoncer ma lame dans le poitrail du pourceau qui geint aussi fort qu'il le peut, nuançant avec la plainte silencieuse de sa victime. Sobrement, comme si c'était son ultime combat, je lui jette un :

      Crève, ordure


    Mais ce n'est pas la pitié qu'il brandit avec son moignon, comme s'il me montrait de son doigt invisible sa victime, il me crie un brouhaha, inintelligible, que je ne sais affecter ce sifflement à ma colère où à la crainte qui ne lui fait sortir qu'onomatopée écrasé dans sa gorge. Je tourne ma tête, figeant mon geste, et voit une bulle éclatée au niveau de la flaque ou trempe le visage de Nicolas. A l'urgence cède la colère, et je frappe la tête du forgeron du pommeau de mon épée, que je balance derrière pour venir ramasser tel Méphistophélès, son Faust.

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L_aconit
Dans les nimbes , le jeune blond se délivre de ce courroux douloureux. Léger de tout, l'inconscience le berce sur des rives méconnues où les cris ont fait place au silence, et la douleur à la douceur. Il ne sent pas les bras du Prince s'emparer de sa frêle carcasse ni les mains de ses subordonnés saisir sa nuque poisseuse, le déposer dans un lit de convalescence qu'il ne quittera que quelques jours plus tard, clopin clopan.

Le corps, ce fabuleux mystère... Décidant de quand et où doit s'arrêter le traumatisme, emportant conscience et action dans la plus lourde des léthargie, coquille de protection latente, prête à se déployer quand les limites se rapprochent de trop.

De cet épisode dramatique de sa vie l'écuyer Princier ne gardera que quelques mauvaises sensations. Tête trop cabossée pour avoir tout gravé dans le marbre....

La peur à la vue du forgeron.
Les cris des enfants.
La douleur et la violence, qu'il exècrera plus encore.
La voix sèche du Retz, ses bras paradoxalement protecteurs.

***

Lorsque le jouvenceau ouvrit les yeux, il lui sembla s'éveiller d'un long et sinistre cauchemar. Mais lorsqu'il vit la silhouette masculine de Taliesyn adossé à ses côtés, écrivant diable savait quelle ennuyeuse missive d'affaires... Nicolas sût qu'il n'avait pas rêvé. Juste grandi. Dans une pénible et douloureuse poussée de croissance... Où la reconnaissance l'avait touché de sa grâce.

Le plus difficile ne serait pas de se remettre d'une telle mésaventure. Ce serait de revoir à chaque fois que Rezé se dessinerait au devant de l'escorte qui chemine, les yeux vides des enfants, que la vie n'aura jamais épargné. De son vivant, le forgeron ne s'était pas illustré pour sa paternité bienveillante. Mais mort et enterré, l'ironie du sort voudrait qu'il manque à ses fils. Comme si la filiation prenait le dessus sur tout les défauts de la création. Le lien naturel unissant les humains entre eux, dans leurs discordes ou leur entente. Comme si coûte que coûte, les fils ne pouvaient grandir sereinement sans père. Fusse-t-il le plus cruel, le plus absent...

    Ou le plus majestueux des Princes...



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N'est maître de son art, que celui qui le crée - Damien Saez
Taliesyn_de_montfort
“Il n’y a pas de péridurale pour une renaissance spirituelle.”

L'inquiétude avait fait place à l'ennui. L'ennui de devoir faire enterrer un forgeron, l'ennui de devoir en trouver un autre, l'ennui d'attendre le retour en forme de son écuyer, l'ennui de ne pouvoir voir cette joie de vivre légère papillonner partout dans n'importe quel lieu de Rezé. Et tant qu'à faire dans l'ennui, répondre aux correspondances trop souvent laissé de côté. Le chantier avait été mis en pause, non pas pour le deuil immérité d'un être sans réelle valeur, mais surtout parce que clou, pièces forgées de charpente, mors et autre ustensile nécessaire aux autres corps de métier ne pouvait être fait. Etrangement, l'esprit était léger sur le domaine, des jours de repos s'était profilé grâce à la mort du soudard, ils venaient à se satisfaire de cet état, ne craignant pas plus que ça le Prince finalement qui avait été dur avec une sanction ultime, mais qui à l'aune de la logique, pouvait s'expliquer. Chacun préjugeant qu'il ne ferait pas d'erreur de ce type aux yeux de l'altesse. Des éclaircies venaient se rajouter à la pause, et en deux jours tous avaient oubliés l'évènement récent.

      Si la douleur est présente, c'est que la vie prouve qu'elle est en toi par tout tes ports.


    Après tout, on dit d'une douleur qu'elle est vive. Et sentant l'éveil du gamin venir par un sommeil plus mouvementé et certainement plus léger. Je finis avec hate et peu d'application la lettre sur le vélin de mauvaise facture que j'octroie à hauteur de l'importance de celle-ci pour m'accorder sur ce qui va venir en suite. Je dois faire le deuil de la pureté de l'écuyer, il doit pouvoir se défendre.

      Ton entrainement commence ce jour, et rien de tel que ta douleur aux cotes et tes jambes frêles pour te mettre dans les conditions d'une bataille. Car il ne faut pas croire, lorsque tu dois courir à l'assaut d'une ligne de front ennemie dans un champ de bataille, que tu te sens au mieux de ta forme, tes viscère veulent fuir par le fondement, tes jambes ne supportent pas ton poids, alors celle d'une armure en plus parait inimaginablement lourde, tes bras peinent à supporter le poids de ton arme, et quand vient le contact tes poumons sont en feu d'une course inutile mais vitale, prétexte d'arriver le plus rapidement en dehors de la pluie de flèche.


    Le courage ne se mesure pas à l'absence de peur, mais à la plus grande force de croire en son destin et en sa capacité à survivre qu'à abandonner sa vie au hasard. La seule inconnue c'est la faucheuse, et si sa capacité de combat l'est tout aussi, on finit dans un charnier à la fin de la journée. Je pousse mon siège vers l'arrière m’aidant de mes bras pour me repousser de mon office. Peut-être s'étonnera-t-il de voir que je suis déjà en doublet armant, mon baudrier pendant à vide cela dit, je me rapproche du lit, sur ma route attrapant un sac et le balançant sur le lit.

      Habits-toi, tu as assez dormi. Ton sommeil a failli devenir éternel, la prochaine fois je ne te sauverai pas, tu te sauveras ou tu périras, mais si nous ne sommes pas amenés à nous couvrir l'un à l'autre, il est impensable que tu ais des chances de survies. Tu es un homme désormais, et mon manque de clairvoyance à le reconnaitre à failli te couter la vie.


    Reconnaitre un tort de ma part sonne faux, et pourtant je me pense responsable. Le blondinet a grandi, mais pas comme n'importe quel gamin, il a su garder l'innocence de l'enfance, je n'ai pas voulu lui enlever ça, m'attachant à cette présence angélique. Mais il ne s'agit pas de maintenir cet état, car il n'est pas si lettré pour pouvoir devenir haut-fonctionnaire, pas paysan, il se doit au moins d'être habille de sa lame pour survivre. Je reste là debout, attendant, pas de pudeur, pas d'observation malsaine, mais l'habitué à une présence forcé. Car je lui ai laissé sa liberté et sa candeur, mais si un jour il est amené à rejoindre mes Chevaliers, il faudra qu'il sache s'intégrer, et ça commence par être à l'aise dans toutes les situations, ceux-ci sachant sauter une ribaude pendant que son voisin continue de manger...

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L_aconit
L'oeil cristallin es attentif aux gestes du Retz, l'oreille à ses sermons. L'Aconit est une frêle plante à la capacité pourtant bien latente. N'a-t-il point usé plus d'une fois de ses talents pour le Prince, franchissant les lignes ennemies, semant la discorde dans le camps adverse, se faisant instrument de ses plus noirs desseins pour ses affaires?
Hélas, tout cela n'était que stratégie et persuasion. Le jeune écuyer savait s'armer de son esprit plus que de ses poings, c'était un fait que Taliesyn semblait vouloir abolir ce jour, là, à la sortie de son lit.

Il détaille brièvement la mise du Breton, habitué à le voir ainsi, en tenue de commandant plus que de prince de salon... Sans rechigner, l'adolescent fait fi de ses douleurs pour se soumettre aux lubies de son Maitre, cherchant d'un pied moite la stabilité d'un sol nouvellement retrouvé. Dieu qu'il se sent faible. Aucune miséricorde ne sera faite par celui qui le tourmente de ne pas savoir tourmenter. Il le sait mieux que personne.

Le Retz représentait toute la superbe d'un souverain insolent et combattif, avec une personnalité déterminée et particulièrement créative lorsqu'il s'agissait de se faire obéir... Nicolas sentait que ses privilèges s'arrêtaient aujourd'hui, dans la rudesse qu'il connaissait à celui qu'il servait fidèlement depuis qu'il était en âge de s'en souvenir.

Lentement, il saisit le sac envoyé sur le lit et l'ouvre, en extirpe les vêtements bien différents du bliaud brodé et des braies travaillées qu'il arbore généralement. Pas un mot ne sort de ses lèvres, scellées par l'effort de faire comme si la forme l'avait regagné. Par respect pour le Retz. Par dévouement. Le temps de la belote, de l'équitation et de la paume était bel et bien révolu, c'est en tout cas ce que la Broigne métallique qu'il étale sur la paillasse semble indiquer... Les Cobalts se tournent vers le prince, planté là comme une vigie, attentif à ses moindres faits et gestes. Déglutition.

L'Aconit était plus habitué à voir le prince nu, débauché, arpentant sa demeure ou le bordel voisin que de se mettre lui même à nu sous ses yeux... C'était d'ailleurs sans doute la première fois qu'il le devait.

Pudique, il ôte religieusement ses vêtements. La chemise d'abord, dévoilant son torse pâle et glabre. Le reste ensuite, d'une main mal assurée, regard fuyant pour ne pas imaginer ce que son Maitre pense de sa carrure de moucheron pleine de ses treize ans, autant dire de rien. Comme si elles pouvaient atténuer cette nudité androgyne et svelte, douce et encore juvénile, il pose ses mains sur son sexe, qui l'avantagera sans aucun doute à l'age adulte mais qui parait pour l'heure vaguement insignifiant... Rapidement et malhabilement , le jeune blond passe l'habit épais, y fait émerger sa tignasse. Tête basse, tenant mal sur ses jambes, l'écuyer joint ses mains fines dans son dos et murmure simplement :


- Merci Altesse.
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N'est maître de son art, que celui qui le crée - Damien Saez
Taliesyn_de_montfort
“La rudesse du combat contre les choses pousse l'homme vers lui-même.”

    Avec un sourire presque paternel, je regarde mon jeune écuyer s'habiller humblement. Cherchant à cacher des légères grimaces de douleur. Ce n'est qu'un enfant, mais à cet âge certains enfants ordonnent des batailles. Et si je ne veux pas voire un jour, mon écuyer le rester et devenir la risée de par son âge et plongée dans ses rêveries, je devrais le faire redescendre sur terre. Ce sera brute, ce sera difficile, peut-être autant pour moi que pour lui. Mais il allait devoir me détester pour parvenir à grandir. Alors je me tourne, il est temps, la première leçon doit commencer rapidement.

    Je pars devant, attendant guère de savoir s'il me suit et dévale les escaliers pour arriver dans la poterne de service du donjon, à l'arrière des remparts, sous la surveillance d'une vieille bretèche. Cachée derrière les lices, personne n'observera ce qui va se dérouler ici. Lorsqu'on verra de nouveau l'écuyer, il saura se défendre, à défaut de résistance, il saura comment tuer. Mais d'abord évitons les coups. Je saisis le bâton en noyer finissant à son bout avec un nœud. De trois pieds de long, il pèse un poids certain. Je le balance donc tout naturellement vers mon écuyer. Réflexe ! Puis je continue pour me positionner à l'autre bout de cette petite enceinte boueuse.

      Aujourd'hui, tu ne te concentreras que sur le fait d'éviter le plus possible que je te touche, notamment, les armes viendront plus tard. Je te sais habile à courir de créneau en créneau, ce ne sera j'imagine qu'un exercice pour toi.


    Je lui lance un sourire.

      Tu sens le poids du bâton? Maintenant tu peux le poser, c'est pour que tu puisses imaginer ce que ça fera si je te touches. J'ai grandis en Irlande, et c'est ainsi qu'on apprends le combat, le Bataireacht.


    Je prends mon bâton par le premier tiers et le tiens de façon à ce qu'il se tienne horizontal, ma main gauche retenant l'autre tiers sans se refermer. Je m'approche lentement, comme pour indiquer le début d'une séance. Puis vient rapidement viser le visage du bâton, visage que je ne frappe pas mais je récupère de ma main libre son épaule pour accentuer son élan d'évitement pour le faire finir directement dans la boue. Je me retourne, pour exposer une première leçon, désagréable mais pas douloureuse.

      Garde à l'esprit que lorsqu'on veut te nuire Nicolasse, le danger ne vient pas forcément de la main qui tiens l'arme. C'est le mouvement du corps qu'il faut suivre.


    Je me repositionne, attendant qu'il se relève, pour revenir vers lui, plus rapidement, la bâton haut, je coupe une trajectoire oblique qui vient récupérer le creux du genou, levant la jambe de l'écuyer. De ma main libre, je repousse son front, pour le faire finir sa course sur son arrière train.

    Je ne dis rien, mais me positionne, je sens que les douleurs infligées par le forgeron ne facilitent pas les mouvements et accentue les douleurs des petites chutes. D'ailleurs, je m'étonne de ma clémence, le garde irlandais qui m'a appris sur ordre ce type de combat, ne m'aimait pas, je m'en rends bien compte.

    Cette fois-ci je cours, bâton en avant, la pointe comme une lance vers l'écuyer qui parvient à l'éviter. Nous nous frôlons, mais je laisse trainer mon pied pour accrocher sa cheville. Il part en arrière et je le rattrape par le col pour que nous finissions en équilibre dans la boue l'un contre l'autre. Légèrement essoufflé, je lui murmure presque :

      Ta meilleure alliée sera la proximité, je ne te vois pas tenir un bâton comme celui-ci ou tout simplement une batarde, mais il va falloir joué sur cela.


    Je le repousse, testant son équilibre. Puis je passe d'attaquant à défenseur. J pense qu'il a déjà connu plus brut comme exercice, mais l'idée est surtout de lui redonner confiance. Il a failli perdre la vie sous les coups du soudard, il faut qu'il joue de son habilité.

      Essaie de me toucher.

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L_aconit
L'écuyer suit son maitre, ombre fébrile, à la démarche encore fragile. Faon dans le sillon du cerf, lui qui est habituellement vif argent, feu follet de ces lieux. Toute leçon de chose est bonne à apprendre lorsqu'elle émane d'en haut. L'Aconit a depuis toujours cette capacité à absorber l'apprentissage avec rigueur et résultat, valeur sûre de la valetaille de Taliesyn... Lettré, l'adolescent lit en douce la nuit et le jour, passionné par les fables fabuleuses des terres de Bretagne, les récits guerres et les mythes grecs. Le meilleur échappatoire sans doute qu'il ait trouvé à Retz.

Mais le prince ne le destine pas à être érudit, en bon petit rat de bibliothèque... Ses chausses boueuses peuvent en attester lorsque mal assuré il se plante là, face à son Mentor. Adieu bouquins, place à l'éducation de terrain. Envolée la théorie, l'heure de la pratique a sonnée. Le faciès d'ange détone dans ce décor clos, en vis à vis avec l'air sérieux et dur de son protecteur. Autant dire que lorsque le Prince de Bretagne a une idée dans la tête, il ne l'a pas au cul. Et ça, c'est une leçon bien apprise depuis longtemps...

Le bâton est réceptionné, la main fine de Nicolas le soupèse, assorti au sourire du Retz l'histoire sent le pâté à plein nez. Les bleus se recentrent sur leur adversaire, dans leur expectative inquiète. Esquiver, rien de bien compliqué en soi. Esquiver les chevaliers du Cerbère, garde personnelle de Taliesyn lorsqu'elle se sentait l'âme bagarreuse, les coups de rouleau à pâtisserie des cuisinières lorsqu'il inventait un mensonge plus gros que lui pour une écuelle en rab ou encore les colères du Maitre des lieux: l'histoire de sa vie.

Mais il s'agissait de Lui. Celui dont tous reconnaissaient ses compétences militaires. Il connaissait cette partie de l'histoire du Prince. L'Irlande, où il avait été envoyé par son père Elfyn pour apprendre à être un homme... Nicolas n'était pas convaincu que c'était ainsi que l'on apprenait à se faire pousser des couilles. Bel enfant encore bercé d'illusions. Posant le bâton, il se demanda si c'était ainsi qu'il s'était senti lui aussi la première fois qu'un maitre d'arme lui avait enseigné les rudiments du combat. Mou et mal à l'aise dans la boue.

Le premier coup est feint, mettant Nicolas face à ses lacunes, le museau dans la fange. Le jouvenceau se relève, encaissant en silence cette première et sans doute point dernière humiliation. Bouger le corps. Suivre les mouvements. Le blondin opine. Prépare sa seconde. La tension qui croit en lui finit par prendre le pas sur les préoccupations de ses douleurs, les bleus ne quittant plus son assaillant pour en déterminer à l'avance les attaques à parer.

Le second coup est plus traitre, lui arrachant un cri d'indignation. L'apprentissage comporte son lot de frustration dont celui de ne pas se trouver à armes égales, oubliant déjà bien vite que la leçon traite de l'esquive. Se redressant les deux mains dans la glaise, l'écuyer ramasse sa fierté.

    J'ai compris.

Est-il nécessaire d'apprendre dans ce bourbier? Le réflexion est de courte durée. Anticipe. Bouge. Esquive. L'attaque frontale est plus simple à éviter, torero improvisé le blond sent la force du Retz l'effleurer.

    Olé.


Un éclat de rire vient zébrer cette ambiance presque studieuse, avant que le pied insidieux ne viennent le déséquilibrer, élève rattrapé par son Maitre pour éviter l'énième défaite. Taliesyn serait-il clément? Interdit, écuyer retrouve son assiette lorsque le corps musculeux le repousse.

Blondin pris de court se prend peu à peu au jeu, et lorsque la consigne s'allège, l'oisillon stratège tire son épingle du jeu. Senestre vient trouver le pique à cheveux qu'il garde à la ceinture et le lance comme un couteau - fort inoffensif - contre l'épaule du Cerbère.


- Touché !
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N'est maître de son art, que celui qui le crée - Damien Saez
Taliesyn_de_montfort
“Le temps révèle toute chose.”


      Touché !


    Et c'est moi cette fois-ci qui est surpris par l'inventivité du jeune écuyer. Son projectile me frappe directement comme la révélation qui s'imprègne de moi. Je regarde l'objet puis je le regarde lui. Du jour au lendemain le frêle écuyer ne se transformera pas en montagne de muscle. Mais par contre il est imaginatif. La seule option qu'il me reste est cela dit extrêmement sombre pour lui.

      Nous allons tester quelque chose.


    Je ramasse le pique à cheveux et le mets à ma ceinture. Je jette le bâton et me mets en position de gouren, une forme de lutte bretonne. J'ancre mes pieds dans le sol et jette un regard vers Nicolas. J’espère ne jamais regretter la voie sur laquelle je l'expose, je peux encore changer d'avis, il n'est pas bête et ferait un bon juriste, ou comptable. Mais quel sens aurait sa vie ? Je déglutis, sa pureté contre le bénéfice de son talent, ou la préserver contre un bénéfice nul et un destin compromis ?

      Il faut que tu viennes chercher ton pique à cheveux. D'ailleurs qu'est-ce que tu fais avec ça sur toi? Bref... Ce n'est pas l'objet.


    S'il réussit cette étape, cela confirmerait mon idée sur le rôle qu'il pourrait avoir dans ma mesnie. J'attends donc, patiemment, l'observant, l'imaginant plus vieux, ce que son corps pourrait devenir. Et malgré que j'imagine un regard plus sombre que l'actuel, il faut bien que chaque talent dans ma maisonnée soit exploitée à son potentiel maximum.

      Si tu rates, tu remplaceras le forgeron, il faut bien que chaque chose rentre dans son ordre, et tu n'as plus l'âge pour être un fébrile écuyer.


    Si tu ne la sens pas la pression là mon garçon, c'est que je me trompe sur ton compte. Je tends les paumes, prêtes à repousser les tentatives d'approche. Viens mon petit, montre-moi que j'ai raison de te faire confiance, que j'ai bien deviné tout ton talent.

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L_aconit
Faust se défend ébouriffant sa crinière blonde, dans un "c'pas ma faute" maugréé. Les longues mèches blondes qu'il arborait depuis son enfance rendaient folle les dames, et lui causaient bien du tourment. Les brosser était un vrai calvaire, les discipliner un réel enfer, mais pour tout l'or du monde ne il les couperait. Cette coupe de fille le protégeait des autres, singularité connue de tous qui lui valait l'affection et la douceur des amantes du Retz, pour le rendre bien plus innocent qu'il ne voulait l'être. Feu follet aux cheveux d'or éclairait chaque pièce où il entrait, s'identifiait aux yeux de tous les gens de la maison. Et parfois lorsqu'un inconnu le menaçait de sa main, se retenait la gifle qu'il n'aurait pas donnée à une fille. Androgyne sachant profiter de sa particularité le garçon est maitre d'opportunités.

- Bien votre al...

Le forgeron? Il avait dit "remplacer le forgeron"? Un de ceux qui, d'ailleurs, ne s'était pas laissé attendrir par l'air frêle et le tendron.

- ...Tesse.

Le garçon ne cache pas son mécontentement outré, dans ses yeux bleus la rancune, sur ses lèvres entrouvertes l'incrédulité. Comme par enchantement ses douleurs reviennent avec l'odieux souvenir du monstre. L'enjeu est de taille. Il chérit son rang d'enfant béni et pour rien au monde, rien, il ne souhaiterait finir sa vie à taper sur des enclumes en les murs de Rezzé... Autant finir catin !

Et comme s'il jouait sa vie, le garçon se met à tourner autour du prince, à petites foulées, feignant de l'attaquer sans jamais le toucher. Un mouvement vif et Nicolas glisse dans la bourbe aux genoux de Taliesyn en voulant l'approcher de trop près. Au fil de la leçon le garçon avait pris une certaine assurance, tant avec le terrain qu'avec sa tenue. Maculé de boue, Nicolas se retire , craignant un coup mal placé. Et essuyant son visage à l'autre boue de l'enceinte, l'écuyer tend sa main en l'air dans l'hilarité la plus totale - sans doute une façon de décompresser - brandissant avec joie le sésame improbable. Il s'incline avec respect vers son instructeur et déclare solennellement:


- Volé .
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N'est maître de son art, que celui qui le crée - Damien Saez
Taliesyn_de_montfort
“C'est dans le travail que l'on retrouve le sens de l'orientation. Tout le reste n'est que chimères.”

    Il est vif et il comprend vite, lui apprendre le combat conventionnel, serait lui retirer tout ce qui pourrait l'aider. Une fois qu'il me montre son trophée, attrapé avec brio, j'éclate de rire. L'entrainement du jour est terminé. Mais il incombe qu'un nouveau, de longue haleine commence.

      Bravo, tu as gagné. Et pour la peine tu mérites un présent.



    Il n'avait pas gagné que ce duel. Il avait gagné contre la mort, il avait gagné un destin, il n'en saurait rien pour l'instant, mais tout l'entrainement qui lui serait fourni désormais servira à en faire un assassin. Loyal, dévoué, habile et en qui j'aurai toute confiance. Ce qui pour ce dernier point, n'était pas acquis pour tous. Je passe à côté de lui, il est plein de boue, mais arbore un grand sourire, le fait d'éviter un potentiel métier de forgeron certainement. J'ai donc eu raison, ses compétences sont là, et jamais il ne s'épanouirait dans un autre métier.

      Suis-moi.



    Et dans un même temps de bloquer sa tête dans mon bras, tendresse impromptue, avant de l'ébouriffer en relâchant l'emprise. Je savais que ce type de travaux, il ne le ferait que pour moi, que s'il n'y voyait pas de rétribution affective de ma part, rien ne l'amènerait à le faire. Est-ce que du coup c'est cela qui m'amenait à lui montrer un amour tel?

      Alors la crainte te motive?



    Une question en suspens, comme un constat qui dans ma bouche peut paraitre menaçant. Car tous les leviers sont bons pour arriver à mes fins. Et l'effet de ce constant est d'autant plus intéressant à constater sur le visage du minot. Je lui laisse un sourire avant de saisir le stileto posé sur mon office que nous avions quitté plus tôt. Je me retourne avec, le tenant paumes ouvertes.

      Il est tien maintenant, qu'il ne te quitte jamais, il faut que tu ais l'habitude de son poids, de sa longueur et de son utilisation. Désormais tous les jours tu t'entraineras à l'esquive avec mon sergent d'armes Fanch. Pour ce qui est de l'attaque, nous ferons des jeux d'habilité lorsque j'en ai l'occasion. Mais surtout, je te demanderai de me tuer dès que l'occasion se présente...



    J'attends sa réaction pour enchainer rapidement.

      ...par milles moyens tu dois trouver mes inattentions et celles des serviteurs pour venir à me tuer facticement. Si je t'attrape avant que tu parviennes à ton succès, tu auras droit aux corvées, si tu gagnes, tu auras une journée de repos pour gambader, voir un ouvrage si tes exploits sont remarquables.



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L_aconit
Le garçon accueille le compliment avec une humilité apparente, pourtant dans son esprit c'est un feu d'artifice. La moindre marque de reconnaissance émanant du Retz ne vaut-elle pas de l'or?

Pilier porteur, unique présence masculine dans sa vie, il l'avait élevé et instruit au même titre qu'un père, tout en le gardant à distance pour le laisser forger ses propres armes. Nicolas craignait sa main comme il l'adorait, cette main Princière qui avait le droit de vie ou de mort sur tous les gens qu'elle dirigeait. Et voir briller un éclat d'inspiration ou de satisfaction dans l'oeil de son instructeur était une source immense d'épanouissement.

L'écuyer tente d'éviter sans succès le pilori imposé par son adversaire, largement plus fort que lui et s'y plie de bonne grâce, écopant de quelques noeuds dans la tignasse. Montfort n'est pas coutumier d'effusions, ni avec ses subordonnés, ni avec ses Maitresses. L'adolescent saisit l'élan inhabituel de démonstration comme il se présente, tendre et viril à la fois. Extrêmement précieux venant d'un grand impulsif tel que le Retz. Docile, blondin suit le brun avec prudence, pas mécontent pour autant de se tirer de la gadoue, le plat de sa main tentant de ré-apprivoiser ses crins sauvages.


- Celui que la crainte ne motive pas est un crétin.


La constatation est sèche et sans nuances, comme une vérité d'enfant qui ne cherche pas à enrober ses mots. Montant les escaliers il ne peut s'empêcher de penser à ce qu'aurait été la vie s'il avait été le forgeron ou pire, l'un de ses fils. La vision de son lit de convalescence achève sa pensée et les prunelles limpides s'en détournent pour se poser sur les mains jointes du Prince, incrédules.

En leur centre, un stylet italien de superbe facture... Presque trop beau pour le toucher. Hésitation. La senestre pâle caresse la lame, écoutant le laïus d'une oreille déjà plus distraite. Nicolas se fascine pour cette arme aussi élégante qu'assassine. Les cobalts viennent accrocher les jais.


- Merci, merci votre Altesse. Je me montrerai digne de ce présent.

Une pointe de surprise se dessine sur les traits doux du garçon lorsqu'il prononce cette phrase étrange où le tuer est un défi lancé à la légère, jusqu'à l'issue excitante de la compétition et de la récompense. Foutrement exalté, l'Aconit saisit délicatement le poignard pour en apprécier la maniabilité. Léger et peu épais, une arme à son image. Un présent inestimable qui pour le moment encore ne faisait pas réaliser tout à fait au jouvençeau qu'il troquait là son statut d'écuyer, devenant par cette offrande garçon de main, et demain, abandonnant son innocence loin des jeux de l'enfance...

    Un Spadassin.

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N'est maître de son art, que celui qui le crée - Damien Saez
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