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Info:
Samsa pensait jouer et confesser un délit de pot de confiture à Shawie. La situation lui a quelque peu échappé.

[Rp] J'ai la plus grande confiance dans votre indiscrétion*.

Shawie
*Sydney Smith


Vil félon, où as-tu dissimulé le Trèfle Sacré ?
Dans ton cul !
Tu paieras pour cet affront !

....

Cassez-vous ! Cassez-vous ! Cassez-vous ! Décarrez, bande de clampins ! Taillez-vous vite fait ! Et j’vous conseille de vous mettre au turbin, vous m’entendez ? Et le prochain qui se pointe avec un prototype, un vase à fleurs ou le pot de chambre de sa mamie, j’l’envoie garder les moutons à St Liziers ?! Et tenez, reprenez vos merdes ! J'suis pas vide-grenier !



A chaque fois qu'elle croisait un pécore à l'allure louche, elle l'interpellait pour lui mander des renseignements sur ce foutu trèfle. C'était pourtant pas compliqué d'y foutre la main dessus. Ben apparemment si. Bredouille, c'était le mot. Toujours la même ritournelle, à chaque fois, on essayait de l'enfler. Un jour, peut être qu'on essayerait de lui refourguer le vrai trèfle mais que dans le doute, elle ne le prendrait pas. Ça serait con. Chaque ville, chaque villages inconnus étaient traversés, le marché raflé mais toujours pas de cette herbe sacré. Son cul était posé en taverne pour changer. La fringale aura raison d'elle, c'pourquoi elle osa commander un petit quelque chose pour se mettre sous la chico. En guis de sortie et de paiement, elle lâcha un :


Le plus intéressant, c'est, comment vous arrivez à faire un truc aussi immonde avec des ingrédients normaux ? Mais c'est incroyable, j'ai l'impression dé bouffer de la terre avec dé la bouse et du gravier, ça sent lé poulailler, mais c'est du céleri et des oignons, c'est prodigieux.


En sortant, elle huma un bon coup d'air frais et chaud. Rha que ça fait du bien de se sentir cramer sous la chaleur. Un petit verre d'hypocras et tout repart. La place fut traversée sans encombre avec en point de mire, une Eglise.

Oh un Eglise. Mère de tout miracle ! Gaiement, elle osa fouler le parvis pour la première fois de sa vie. C'était coquet, c'était bien décoré, c'était froid et humide. Mais c'était tranquille. Pourquoi tant de richesse apparente comme ça ? C'était la porte ouverte pour se faire piller. C'est uniquement pour son trèfle qu'elle posa son cul dans une petite bicoque appeler communément "confessionnal". Bon ça, concrètement, elle ignore totalement son utilité. Mais le siège semble vachement plus confortablement que ces bancs en bois pourris par les mites. Elle avait entendu des trucs vraiment étranges sur le fonctionnement de celle ci. Il parait même qu'on peut boire du sang. Après le forniqueur de bovine, voila qu'on picole du sang. Étrange. Elle, ce qu'elle voulait c'était uniquement trouver ce putain bout d'herbe.

Il lui faut un miracle. C'était la maison des miracles. Le bon endroit donc.



Hum. Ça fonctionne comment la dedans ? On cause tout seul ? J'vous file une pièce et jé peux dire tout cé que je veux ? Faudra penser à fermer à clef votre église là. C'est pas très sur dé laisser ouvert aux quatre vents comme ça.
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Samsa
    "Et dire que ça se veut chrétien
    Et ça ne comprend même pas
    Que l'amour dans le cœur d'un chien,
    C'est le plus grand amour qui soit.
    Un jour pourtant je le sais bien,
    Dieu reconnaîtra les chiens."
    (Renaud - Baltique)



C'était peut-être pour ça que le Très-Haut n'avait pas accordé une vie facile à Samsa, parce qu'elle était Cerbère, que Cerbère est un chien et qu'Il ne les reconnait pas. Les chiens ne sont pas rancuniers mais Samsa, malgré son surnom, n'était pas de la race canine et sa vengeance avait été terrible. Elle avait torturé et tué jusqu'à ce qu'assez de pleurs et de cadavres lui permettent de remonter à la surface, telle une bouée macabre qui avait ensuite temporairement servie de radeau de sauvetage, le temps d'apprendre à nager, le temps de retrouver pieds. Retourner dans une église, accepter d'entendre de nouveau parler de religion, tout cela était revenu un ou deux ans plus tard, une fois seulement que Samsa s'était sentie considérée. Depuis, elle n'avait plus de problèmes avec tout ça, préférant simplement ne pas s'en approcher quand elle le pouvait car il persistait au fond d'elle le reste d'un indicible malaise.

Errante dans les rues, la Prime Secrétaire Royale au chômage temporaire se laissait aller à une balade sans but ni décisions, se faisant porter par des envies, des instincts, des bribes de conversation lui tombant dans l'oreille. C'est ainsi que sur la place du marché, ceux qui parlaient futurs pillages, marchandage de carottes et rumeurs sur le prêtre, finirent invariablement par provoquer en l'oreille canine un fouillis qui ressemblait à la conversation très suivie d'un trésor de carottes caché en l'église. Voici donc Cerbère national aller au pas vers la bâtisse sacrée et y entrer librement. Le faste est là, les vitraux laissent entrer une douce lumière colorée et le calme y est particulier, inégalable. Truffe au vent, elle se met à humer l'air ambiant. S'il est quelqu'un qui peut dénicher des carottes à cinq lieues à la ronde, c'est bien Samsa.
Le nez droit renifle rapidement certains piliers, guette les courants d'air qu'il capte, même le sol est discrètement senti lorsque la tête s'incline. La Bordelaise s'approche plus avant dans la nef jusqu'à arriver au choeur mais l'autel ne renferme rien non plus. Elle glisse derrière, dans le déambulatoire, et finit par entrer dans un confessionnal qui referme sur elle le lourd rideau rouge, comme si Samsa se retrouvait actrice projetée sur scène malgré elle. Elle n'était jamais entrée là-dedans, et pour dire quoi ? Pour parler de Soeur Laurelle, de tous les autres, de toutes ses provocations, de son incompréhension au fait qu'elle soit encore en vie après tout ça, après toutes ses batailles, après toutes ses sordides victoires, après tous ses échecs minables comme le jour où elle avait sauté dans l'océan pour se fracasser contre les rochers ou juste finir noyée ? Elle aurait raconté ses filles rousses dont l'une est gauchère, elle aurait confessé avoir quitté Sid pour une femme ? Oui, elle aurait parlé de ses goûts féminins, de Shawie dans les bras de laquelle elle se complaisait. Passionnée, elle aurait loué ses formes -"désirables"-, son odeur -"enivrante"-, sa peau -"chaude"-, sa bouche -"impétueuse"-, ses yeux -"profonds"-, ses cheveux -"ébènes"-, le prêtre aurait fait le poisson asphyxié mais elle n'aurait rien remarqué, elle aurait raconté le courage de son Espagnole, tout ce qu'elle admirait chez elle, elle aurait raconté leurs nuits, manquant de tuer le confesseur au passage des détails, elle aurait parlé de Maria même, la nonne avant elle, achevant le malheureux ecclésiastique, simplement histoire de bien s'enfoncer. Et finalement, elle ne serait jamais ressortie vivante de cet endroit froid et humide, un peu à l'image des geôles.

Elle aurait été brûlée vive sur la place de la ville, et sans procès.

C'est dans ces pensées qu'elle se trouve être surprise lorsqu'une silhouette entre brusquement à son tour, de l'autre côté. Dans la pénombre et à cause du grillage de bois très étudié, Samsa ignore de qui il s'agit. Enfin, jusqu'à ce qu'elle entende l'accent espagnol qu'elle reconnait. Visiblement, Shawie non plus n'avait jamais eu affaire à un confessionnal et cela étire un sourire sur les lèvres royales. Soit. Tout cela ne devrait donc pas être très important, pas vrai ? Alors autant jouer le jeu. Enfin, "jouer", c'est facile à dire parce qu'il va falloir retenir les tics de langage et ça, ce n'est pas gagné du tout.


-Bonjour mon Enfant p... ose-toi t...iens. Tu me donneras une pièce plus tard si tu souhaites faire un don à notre Sainte Mère l'Église t... es d'accord p... our ça t...

Elle avait réussi, jusqu'à présent et avec moult grimaces obscures, à trouver une suite à chaque début de son, annonciateur de tics très reconnaissables, mais pour la fin, impossible de trouver car plus les phrases s'allongent, plus les tics veulent se placer. Un cercle vicieux qui s'arrête lorsque la langue vient buter contre les dents en un simple son de -t finalement à peine audible et pouvant facilement passer pour une simple manière de parler, au pire.

-Les églises ne ferment pas afin de chaque brebis égarée puisse toujours rentrer à l'étable p... our échapper au loup.
Je t'écoute t...iens, de quoi veux-tu te faire pardonner pa... nique pas hein ! Amen t... tiens.


C'est Cerbère qui a manqué de paniquer, à la limite de lâcher un pardi. Jusqu'à maintenant, elle a rattrapé trois té avec un "tiens". Est-il possible de dire que, à l'image de "putaing" et "oh cong", il s'agit d'une injonction provençale ? Qu'importe, si ça se trouve, elle n'a rien remarqué de cela. Immobile, aucun cliquetis ne vient trahir Samsa qui reprend son souffle derrière le grillage, en proie à des tensions mentales qui s'estompent tant qu'elle ne parle pas pour retenir ses tics. "Tout va bien". Normalement, elle aurait dû réciter le Crédo ou quelque chose du genre avant d'entendre la confession, mais elle n'avait ni la capacité de parler autant sans faire de fautes, ni la connaissance pour savoir qu'elle aurait dû le faire, et Shawie ne l'avait pas non plus.

La vie est bien foutue.

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Shawie
Elle toussote, se racle la gorge, manque de s’étouffer et puis reprend conscience un instant. Se trouvant assise dans cet isoloir, elle rêvassait déjà depuis un moment quand elle fut interrompu par une voix de femme ... d'homme ? Elle ne savait pas en y pensant. Mi grave mi aiguë, un peu rauque mais un brin féminine. Ou alors, un homme castré. Un eunuque voila. Dans les églises, c'était la fourmilière des eunuques parait il ! Elle haussa un sourcil puis une épaule, étira ces jambes ouvra le bec puis le referma. Elle écouta l'histoire des brebis égarée ... c'quoi le rapport avec les églises toussa ?


Mé faire pardonner ?


Se faire pardonner de quoi d'abord ? J'ai rien fais dé mal pour vénir quémander un pardon. Puis d'abord, y a pas cette histoire dé "tout cé qui se dit ici reste ici" ? Comme quand on va dans la ville dé la débauche, genre tout cé qui se passe à machin, reste à machin ?

La voix de l'homme eunuque la dérangeait quand même vachement c'est pourquoi elle plissa les yeux et essaya de voir à travers le grillage mais en vain. Donc elle s'affala totalement sur son siège et soupira. Tant qu'à rester ici, autant joindre l'utile à la praticité.



J'ai du mal à prendre une décision en fait.


Elle posa ces coudes sur ces genoux et sa tête dedans.


J'ai lé cul entre deux chaises voyez. J'suis bien et tout et tout mais voila en fait, j'ai l'impression qu'il mé manque quelque chose voyez. Genre brebis égarée si vous voulez, pour parler comme vous. J'trouve plus mon étable, enfin, je sais où elle se trouve mais j'ai plus lé droit d'y entrer. Pourtant, j'ai pleins d'agneau qui m'attendent et qui mé poussent à revenir. Mais d'un autre côté, j'ai une étable plus propre j'crois mais j'me sens moins à l'aise. J'ai pourtant cé que tout lé monde voudrait avoir mais j'suis pas bien en fait si j'suis bien mais pas assez.

C'est grave ?



C'était clair comme du jus de boudin mais bon, les hommes de Dieux devaient comprendre cette histoire de brebis égarées, puis après tout, c'était lui qui avait commencé.
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Samsa
    "Je sais que c'est toi c'est pas ton ombre
    Qui rêve de vivre un autre monde.
    Croire en toi qui n'est pas si sombre;
    Je sais que c'est toi c'est pas ton ombre."
    (Éléphant - Collective mon amour)



Samsa bat des cils à la question de Shawie. Visiblement, elle ignorait jusqu'au rôle même de ce coin en bois et lui expliquer serait compliqué. Chaque mot que devait dire la Prime Secrétaire Royale était un défi, une sorte de roulette russe avec laquelle il valait mieux éviter de trop jouer car elle finirait par se brûler les ailes. Enfin, la langue. Mais si Shawie n'avait rien à se faire pardonner, il n'y avait pas de jeu et Cerbère allait pouvoir sortir de là, lui dire "hey t'as vu pardi, comment j'ai bien retenu mes tics té ! T'as rien vu hein pardi ? Ahahah !".

... Ah. Ah. Ah.
La bonne blague de merde qui ne sert à rien.

Contre toute attente cependant, l'Espagnole s'installe plus librement -lourdement- et annonce la couleur de son intention avec l'expression d'une difficulté à prendre une décision. Curieuse, Cerbère dresse les oreilles et écoute, fixant la silhouette de l'autre côté du grillage qui prend une posture peu tranquille. Samsa l'écoute parler, imager les choses avec sa propre histoire de brebis qui vient elle-même de l'Église. Il est à parier qu'un véritable curé, extérieur à tout ça, n'aurait rien compris mais Cerbère, elle, connait bien le problème et comprend tout de suite que c'est de cela, de lui, que Shawie parle. La peur étreint soudainement le coeur bordelais, elle l'entoure lentement jusqu'à le serrer, à l'image d'un boa étouffant sa proie. Il prend à Samsa l'envie de sortir de ce petit cloaque, de passer dans l'autre, d'étreindre Shawie, de cacher son visage dans son cou et lui dire que tout ira bien, qu'elles trouveront une solution bien qu'elle soit désolée de ne pas être capable de la rendre aussi heureuse que tous ceux de la Grotte, que tout ce qui constitue cette identité que Samsa n'est pas et ne sera jamais. Mais, immobile, Samsa reste là, assise sur le petit banc de bois et la tête tournée vers le grillage qui ne laisse plus passer que le silence de sa réflexion.
Lentement, Cerbère inspire. Elle sait que Shawie ne changera pas car sa vie d'avant fait partie d'elle, elle sait que le passé est de ce qu'il y a de plus important dans la vie; elle sait que la Pègre, la Grotte, est pour Shawie ce que Zyg est pour Samsa. A la différence que Zyg est morte, qu'elle ne reviendra pas, et qu'il ne reste, pour vivre, que son souvenir, son doux souvenir, celui qui rattache Cerbère au temps où elle n'était pas Cerbère. Et si, demain, Zyg revenait ? Samsa sait pertinemment qu'elle cavalerait vers elle, que les larmes l'aveugleraient sur le chemin et qu'elle la serrerait dans ses bras, qu'elle lui dirait à quel point elle est désolée de son silence, désolée d'avoir gâché sa vie, leur vie, celle qui a été et celle qu'elles auraient pu mener.

Elle aurait tout abandonné pour la revoir ne serait-ce qu'un instant, non pas parce que Zyg comptait plus -il était important de ne pas se laisser avoir par l'effet du fait qu'elle était morte par ce que Samsa pensait être sa faute-, mais parce que Cerbère savait que lorsqu'elle reviendrait, ce qu'elle avait laissé serait toujours là et qu'elle pourrait reprendre sa vie d'alors. C'était comme rallier le Nord et le Sud, c'était rallier le passé et le présent, et s'il était apparemment plus facile de les réunir du fait qu'aucune distance physique ne les séparait, Samsa savait pourtant bien qu'il existerait d'autres obstacles.
C'était peut-être ça, la solution : juste rallier.


-Une brebis égarée ne peut pas être entre deux étables mon Enfant t... u vois, car sinon, elle reste simplement dehors, dans la nuit et à la merci du loup p... rédateur.

Le chemin de la Vertu est difficile, il est plus strict t... u vois. Mais le Très-Haut, dans Sa grande mansuétude, ne saurait blâmer Ses enfants pour quelques séances d'ébattements p... our leur bonheur.


En fait si, Il blâmerait aisément puisque Samsa en a fait les frais pour un pêché qu'elle ignore même, mais les curés disent que, alors la Bordelaise dit que.
Les petits yeux sombres fixant le bois transpercé finissent par se détourner, vaincus. Non, les principes n'étaient pas plus forts que les sentiments, Samsa disciplinée n'était pas plus forte que Cerbère bienveillante. La voix baissa cependant encore d'un ton avant de lâcher la dernière tirade qui résonna autant comme une crainte que comme une mise en garde.


-Mais aussi difficile soit le chemin de la Vertu, n'oublie pas que tu l'arpentes pour une raison t... rès particulière. Si tu le quittes, même temporairement pa... mi tout le temps, fais attention qu'y revenir ne soit finalement pas plus dur que d'y rester t... u vois.

La tête se redresse alors que les yeux reprennent leur fixation aveugle. Samsa ne doutait pas de la force de Shawie, elle l'estimait à sa juste valeur, la force incroyable d'avoir tout quitté pour elle, pour une discipline qui n'est pas la sienne, un idéal qui n'est pas le sien. Malgré tout, elle savait que son Espagnole n'avait pas la force de résister à cet appel, l'Armagnac l'avait prouvé. Et comment la blâmer ? Samsa ne savait pas plus résister aux appels du Nord ou du Sud quand ça la prenait, elle se mettait à hurler à la mort et à tourner en rond, teigneuse, fatiguée et agressive si on l'empêchait d'y aller. Cerbère ne résistait pas à l'appel de la liberté, tout comme Shawie, mais là où Samsa savait que tout n'était qu'une boucle pour elle, une succession de deux appels qui défilaient, immuables, elle ignorait encore tout de ceux de Shawie; et si elle partait dans cet élan de liberté pour s'apercevoir qu'à la Grotte seule elle était mieux ? Et si l'appel des sentiments n'était pas assez fort pour la ramener ?

Et si Shawie ne revenait jamais ?

La Prime Secrétaire Royale, temporairement curé, pressentait que l'Armagnac n'avait été qu'une bouffée d'oxygène, quelque chose de bien trop court. Ou bien cette sensation était-elle simplement faussée par la peur ? Si l'Espagnole se contentait de ces petits écarts de temps à autre, la Bordelaise se sentait bien moins anxieuse; ce n'était que petits, ce n'était pas retrouver la bande entière, c'était faire cavalier seul et l'effet de masse ne serait en rien un obstacle à l'appel retour. Elle secoua vivement la tête pour chasser la peur inhabituelle et retrouver son courage bien plus connu et reconnu; la confiance rendait vulnérable mais Cerbère se rappelait qu'elle en avait trop en Shawie pour que la balance penche en la faveur d'une crainte quelconque.
Tout à coup, elle se souvint du contexte religieux de l'entretien et lâcha précipitamment un "amen !" dans la crainte d'être en train d'être démasquée. Au moins, là, elle venait de rééquilibrer les choses en tous les domaines !

-"Perfection, quand nous tiens.
-Hum, modestie aussi...
-Ta gueule Sub."

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Shawie
Cette histoire de brebis était complexe et elle se perdit dans son raisonnement. Toute seule comme une grande. Elle c'était embrouillée sans qu'on ne vienne l'aider. La réponse fut cinglante. Elle baissa la tête et un souvenir vient heurter son esprit comme s'il ressortait d'une petite trappe bien fermée. L'image des brebis lui avait filé le cafard, donc elle enchaîna avec cette farfelues retenue sur cette histoire de fourmis qui résumé plutôt bien ce qu'elle pensait.


Le Très Haut dans sa mansuétude ? Vraiment ? Jé pense surtout qué le Très Haut ne vous entend pas ou alors qu'il percute dé travers, voyez. Quand j'étais môme et encore innocente, le Père du village disait qué Dieu est tellement plus grand et intelligent qué nous, qu'essayer de le comprendre c'est comme si une fourmis essayait dé me comprendre moi.

Comme moi avec la grosse fourmilière du jardin, j'ai passé des jours entiers à regarder les fourmis, et essayer de faire la différence entre les bonnes et les mauvaises, mais tout cé que je voyais c'était des insectes.
Alors j'ai commencé à les punir.
J'les ai puni en les noyant, en les brûlant, avec mon poing pour les écraser, et pour être tout à fait honnête j'ai perdu les pédales avec la grosse pelle.
Et si ça sé trouve les fourmis priaient pour moi tout lé temps, et j'entendais rien.
Quoi qu'elles fassent, elles étaient impuissantes.



Revenons à nos moutons. Si elle avait choisis de faire une pause dans son travail habituel c'était simplement pour Sam et uniquement pour elle. Toutes les raisons du monde ne suffisent pas pour changer du jour au lendemain mais l'amour semble être LA raison suprême. Bien sur, Sam ignorait totalement tout le déroulé après leur rencontre en Empire. Des bribes de temps en temps étaient lâchées lors de conversation autour d'un feu de camps mais rien de plus concret. Alors quoi, pour les beaux yeux d'une donzelle, on tourne le dos à sa vocation ? Vocation qui lui avait mis quelques claques dans la gueule déjà. Vocation qui l'avait rendu bien plus riche que la plupart des bourgeois. Vocation qui lui avait fait trouvé une famille.

Elle l'arpente pour une raison mais si à chaque intersection, l'Espagnole préfère aller tout droit, ça finirait automatiquement par poser un problème. Est ce que Sam serait capable d'assumer la vie de sa compagne ? A voir son état après une petite prise en Armagnac, la question ne se posait quasiment plus.



Cé chemin, je l'ai emprunté pour une personne et une seule. Jé ne souhaite nullement qu'elle souffre dé mes décisions quand sur une ligne droite, j'aurai décidé dé prendre à gauche sans raison apparente. Jé fais des choix qué bien souvent personne né comprend -j'ai du mal moi même à m'y retrouver- mais souvent, ils suivent une logique profonde.

Je vivais dans l'ombre avant. Dans l'ombre d'une gloire éphémère qui me satisfaisait, riche en luxure et en désinvolture.



Soupire. Puis ces mains viennent se poser sur le grillage.


Aujourd'hui je vis dans l'ombre de Sam. Jé ne veux pas qu'elle se sente obligée dé se justifier pour moi, qu'elle soit insultée dé traite à cause dé mes agissements. Jé ne veux pas qué mes décisions lui portent préjudice.


Enfoiré de Dédain. Un jour, il payerait son offense. Foi de Shawie qu'elle avait la rancune tenace. Le Béarn était en ligne de mire d'un projet qui mûrissait dans son esprit. Satyne lui avait dit simplement que ces gens là nous apprécié uniquement car nous avions les griffes rentrées. Dès qu'elles sortent, ils deviennent frileux. C'était pas faux. Dédain en était l'exemple parfait. Au moindre souci, je te plante un couteau sans chercher plus loin.


Mon père, il y a bien longtemps, jé venais souvent ici. On m'a toujours dit que par amour, il fallait laisser partir les gens même si cela faisait souffrir.
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Samsa
    "Élevés dans le noir,
    La sécurité de notre montagne natale.
    Peau faite de fer, acier dans nos os,
    Creuser et creuser nous rend libre."*



Samsa sourit dans l'ombre à la tirade de Shawie sur le Très-Haut et les fourmis. La tête appuyée contre le bois, elle se plait à imaginer Shawie petite. Comment était-elle ? Cerbère la place dans une enfance dont elle ne lui a pas parlé, dans une vie d'innocence qu'elle a elle aussi connu et dont elle ne parle cependant pas plus. Cerbère laissait venir l'Espagnole après lui avoir exprimé le souhait de savoir certaines choses, simplement pour mieux la connaître. Patiente et respectueuse, elle laissait dorénavant les choses se faire. Rien, de toute façon, ne l'empêchait de l'aimer.
L'histoire des fourmis, c'était une belle façon d'imager ce que Samsa avait vécu elle aussi. Ne rien faire, simplement vivre, aider les autres même, et se faire injustement punir. Cerbère avait traduit par un échiquier dont elles n'étaient que des pions, ensuite elle avait prit l'image d'un chien qui, jappant joyeusement au retour de son maître, se mange un coup de pied parce qu'il a passé une mauvaise journée. C'est amusant comme rien ne change finalement, comme tout est semblable : on fait subir aux autres sa colère. Le Très-Haut, Dédain... Et, plus tard, on s'étonnait que ces victimes se mettent à tout détruire. Mais quelle autre forme de vengeance pouvait-il exister quand ces mêmes entités avaient elles-même détruit quelqu'un ?


-Les voies du Très-Haut sont impénétrables p... auvre enfant.

Qu'est-ce qu'il y avait à dire de plus ? Cerbère n'allait pas applaudir et jeter des fleurs, elle était censée être un curé qui prône aveuglément le Très-Haut et béni chacune de Ses actions, dusse-t-Il brûler trois comtés et faire déferler la peste. Alors, en phrase passe-partout, celle-ci était très bien; on lui avait même assez répété et, malheureusement, cela avait également participé à enfoncer Samsa dans ses folies de tortionnaire meurtrière.

La tête toujours appuyée au bois, Cerbère écoute ce qu'elle sait déjà, ce dont elles ont déjà parlé. Une boule dans la gorge, elle sourit cependant en fermant les yeux. Étrangement, elle n'a pas peur, là, parce qu'elle sait. Elle sait que ce n'est qu'une affaire de temps. Après Dédain, pas habituée, elle avait plongé littéralement. L'attaque était sournoise et elle n'y était pas préparée, elle n'avait pas su comment se protéger de ces mots, des mots du Comte, homme de lumière. Elle avait su cependant, après, face à Aby. Samsa avait le défaut de ressasser longtemps mais elle apprenait très vite à se protéger; Shawie n'avait qu'à comprendre cela.

Mais comment puisqu'elle n'était pas censée savoir ? Il fallait de nouveaux arguments, différents mais pas moins faux.


-Certaines personnes ne savent pas faire la part des choses t... rès souvent. Moi par exemple, je suis là autant pour les criminels que pour les fidèles, j'assiste les hérétiques à convertir par... tous les moyens ! Je ne me fais traiter de traître que par les suppôts du Sans-Nom t... u vois. Que par ceux qui n'ont pas la force et le courage de dépasser des barrières p... ourries.

Les petits yeux sombres transpercent le grillage, cherchent à capter un regard inaccessible et qu'ils n'auraient de toute façon pas trouvé, quand bien même leur volonté de plonger dans les émeraudes aurait été magnifiquement déployée. Ce n'est plus le curé qui s'apprête à parler, simplement Samsa qui, par des moyens détournés, exprime finalement une sorte de reconnaissance.

-Si celle dont tu me parles a besoin d'un peu de lumière quand toi tu ne vis que d'ombre p... our toi, elle court déjà le danger de ce que tu racontes t...u vois. L'ombre n'attire pas la convoitise et l'Homme s'y révèle souvent plus primaire t... outefois, c'est parce qu'il y a de la place pour tous qu'on ne s'y plante pas de couteau p... our si peu et que les appuis sont sûrs t... u vois.

Oui, Samsa était bien en train de dire que le monde de Shawie était plus fiable que le sien. C'était impressionnant comme les principes pouvaient aveugler quelqu'un au point même de ne plus voir les qualités des pires mondes alors que la Prime Secrétaire Royale, depuis toujours, avait assisté à plus de coups-bas et de trahisons en Haut qu'en Bas, d'où son désir de ne jamais s'approcher des politiques ducales et comtales, pas même municipales; tout ça, ça avait détruit trop de gens sous ses yeux déjà. Il n'est pas de lumière sans ombres, et pas d'ombres sans lumière. Samsa n'était pas dupe, elle savait bien que sa montée entrainerait des ennemis, des conflits, des hypocrisies et des trahisons. Elle savait bien que certains de ses appuis la laisseraient un jour tomber en prenant peur de son ascension et Cerbère, colosse aux pieds d'argiles, n'avait pas besoin en plus d'un sol en sable mouvant, à l'image de Dédain. Il lui fallait une stabilité qui, au-delà d'être nécessaire pour la Prime Secrétaire Royale, l'était pour la femme.

-Perdre quelqu'un n'est jamais facile sur le coup t... u sais, mais rien ne justifie une mauvaise compagnie pa... ssablement destructrice même. Sam se remettra -je sens beaucoup de force en ce nom t... rès joli en plus !- et se portera mieux avec un entourage sain sur qui elle peut compter t... u vois.

Cerbère se tourne pour s'assoir face au grillage. Elle doit être ferme et trouver les bons mots, comme en diplomatie. Toucher juste malgré qu'elle ne connaisse pas tous des rouages espagnols, trouver le bon chemin pour atteindre le but souhaité. Une nouvelle fois, les petits yeux sombres luisants fouillent l'obscurité alourdie par le grillage de bois et la voix se fait de nouveau entendre.

-Il faut se battre pour ceux qu'on aime t... u sais car si on ne le fait pas, qui le fera p... our eux ? L'attachement nécessite toujours des sacrifices, et les sacrifices ont des conséquences pour celui qui les fait t... u vois, mais s'il les fait, c'est qu'il en est capable et qu'il a choisi son chemin par... faitement en connaissances de causes. Tu n'as pas le droit d'empêcher cette personne de suivre le chemin qu'elle a choisi t... u vois, même si elle tombe par... fois. Mais c'est ton devoir de la relever et de l'aider, de l'accompagner en ce chemin t... u vois ? Quand on s'éloigne d'elle en la traitant de traître p... our des choses qui ne sont pas d'elle, c'est une protection que tu lui offres d'un coup qui aurait pu être plus méchant et plus préjudiciable encore t... u comprends ?

Elles n'avaient passé qu'un mois avec Dédain en Béarn. Que se serait-il passé si cela avait duré plus ? Si Cerbère soumise de par sa discipline s'était élevée au niveau du Comte ? La chute aurait été bien plus haute et douloureuse. Elle n'avait jamais qualifié Dédain d'ami, il était trop distant pour l'être; heureusement, donc. Et, comme Shawie, Samsa prévoyait sa vengeance. Un vengeance sournoise et parfaitement personnelle, très différente de celle que mûrissait l'Espagnole mais qui ne serait pas moins violente en soi. Réveiller Cerbère était la pire chose à faire car ses ripostes étaient parfaitement justes et détruisaient autant qu'on l'avait détruite. Cerbère n'oubliait pas et pouvait laisser passer des années avant de saisir l'opportunité de répondre. Pouvait-on dès lors dire que Samsa était dangereuse ? Pas moins que ceux qui la blessaient. Une griffure n'était pas moins dangereuse qu'une morsure, les deux pouvaient être fatales, mais on avait souvent tendance à sous-estimer la première. Pareillement, parmi les derniers mots écrits à Aby, Cerbère avait mordu quand celle-ci avait touché la blessure du Béarn qui, à l'époque, n'était pas encore tout à fait refermée.

-Celle dont tu me parles a choisi un chemin où la lumière lui est moins importante que toi t...'as vu et toi, tu as choisi un chemin où l'ombre t'es moins importante qu'elle par... non-hasard. Alors si vous êtes sur le même chemin, pourquoi partir par... ailleurs ?

Retenir ses tics devenait difficile pour Samsa dont le cerveau se trouvait occupé à penser, réfléchir, retenir ses tics, l'empêcher de sombrer en leur absence. Profondément, Cerbère respire pour apaiser la tension dans sa tête due à cet exercice complexe et particulier, celui de se faire passer pour un curé sans tics ni connaissances d'une situation où il convenait pourtant de convaincre une Shawie en paroles libres.


* = paroles traduites de Yogscast - Diggy Diggy Hole

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Shawie
Bien sur que non, elle ne comprenait rien de cette histoire. C'était beaucoup trop philosophique pour elle. L'Espagnole était beaucoup plus terre à terre - un peu trop des fois- mais au moins, quand elle disait quelque chose, il n'y avait pas matière à sous entendre quelque chose ou à interpréter. C'était dit quoi. Elle se gratta la tête aux mots du Père. Elle n'avait jamais traité Sam de traître. Pourquoi remettre ça sur le tapis la ? Comment il savait ça d'abord ? Les voix du Seigneur sont impénétrables parait il. Mouai, c'était louche quand même. Elle plissa les yeux et sourit :


Oui oui, c'est un très beau prénom ! Vous trouvez aussi ? En plus de ça, Sam est vraiment parfaite. Oh, jamais je ne lui dirais ça, elle s'en vanterait à jamais et serait insupportable.

Samsa ... Jé préfère parler d'un Cerbère enragé et baveux, d'un Dog Royal en deuil royal alors que je me gosse et que je picole en gloire d'une mort. D'un Samuel aux pectoraux parfaitement dessinés et au "pardi" chantant. D'un homme subtilement habillé en femme qui gling-gling en marchant, des oreilles pointues aux aguets du moindre danger, d'une truffe au vent pour renifler le fion des passants. Plus jé vois les hommes, plus j'admire les Chiens. Il possède la beauté dans la vanité, la force dans l'insolence, lé courage sans la férocité -quoi que- et toutes les vertus de l'homme sans ses vices. C'est ça Sam.



Voila et toussa Sam, ne devait jamais le savoir ! Sam ne tombe pas, elle trébuche, elle plis mais ne se casse pas, jamais. Si par malheur elle devait casser, Sha' était prête à ramasser chaque petit morceaux pour les recoller entre eux et refaire une Sam encore plus forte et plus belle. Pour chercher des trucs, Sha était une experte, elle pouvait avoir une grande patiente pour ça. Mais ça n'arriverait jamais. La Cerbère était inhumaine alors il lui était impossible de passer l'arme à gauche.


Jé crois surtout qu'elle n'a pas choisit vous savez. L'amour toussa toussa, on ne choisit pas sur qui ça tombe. Jé crois qu'elle m'aime profondément et jé me demande pourquoi. Jé crois qu'elle m'aime assez pour supporter mes incartades dé vie, voyez. Elle fermerait les yeux si jamais elle me voyait tuer un homme devant ces yeux. Elle détournerait le regard et nous continuerons notre chemin. J'fais des efforts pour elle, savez. Parcé que dit comme ça, on pourrait croire que c'est unilatéral mais en fait non.


Elle reprit son souffle et expliqua plus en détail.Bah oui, il était pas censé être au courant quoi. Même si de plus en plus, l'Espagnole sentait le roussi. Comme si son instinct lui disait de faire gaffe, que c'était un imposteur. Quelques instants de blanc et puis elle se ravisa de raconter la vraie histoire, la vraie raison. Elle plissa les yeux et déposa sa main sur son arme par simple réflexe de protection.


Je l'ai vu en Empire la première fois ... et là, jé me suis dis qué j'allais entrer dans sa vie pour la saigner. Qu'elle mé présente tout son beau monde et qué je puisse m'y faire une place pour ensuite mieux profiter d'eux. Jé les saignerai un par un. Je volerai tout ce qué je peux, briserai chaque personne et je finirai par Sam. Ça ne sera pas difficile puisqu'elle m'aime. Elle né s'y attendra pas. Le coup lui sera fatal à elle et tout ce merdier de nobliot.


Sourire carnassier sur ces lèvres. Ces yeux pourtant verts tournèrent plus foncés. Qui que se soit derrière ce putain de paravent, elle réagirait sans doute, probablement, enfin elle espérait. Et si c'était un vrai religieux et bien cela tournerait en confession.
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Samsa
    "Mais elle est toutes mes tempêtes ma Scandaleuse.
    C’est une femme libre à la langue audacieuse,
    Et quand son sang chaud ne fait qu’un tour,
    Le calme prend un aller sans retour."
    (Mickaël Miro - Ma Scandaleuse)



De l'autre côté du grillage de bois, c'est d'abord une Samsa qui se fait surprendre par les mots de Shawie à son égard. Son orgueil était donc la raison pour laquelle l'Espagnole esquivait les mots tendres et caressants ? Donc, tout le monde savait ce qu'il en était, tout le monde avait déjà entendu ces mots... Sauf elle ? Parce que sinon, elle serait soit disant insupportable. Cerbère bat rapidement des paupières; c'est la raison la plus incroyable qu'elle ait jamais entendu. Au fond, Samsa pourrait se douter que ce n'est pas la vraie, du moins pas la seule raison du silence de Shawie mais la Prime Secrétaire Royale n'a ni l'envie ni les capacités de réfléchir là maintenant tout de suite; elle se laisse simplement bercer par les mots de Shawie alors que sa mâchoire inférieure se décroche un peu. C'est que la Cerbère n'a jamais entendu le fond de pensée de Shawie à son sujet, alors forcément... Son petit coeur s'emballe. Elle savait ce que l'Espagnole ressentait pour elle, les mots étaient surfaits par rapport aux actes, mais c'est vrai que quand ils sortaient, c'était quand même très beau et très plaisant. Un frisson hérisse d'ailleurs le poil de Cerbère.
De la suite, Samsa ne peut qu'intérieurement et timidement acquiescer alors que ses yeux se détournent, comme une approbation des paroles espagnoles, mais ils se relèvent ensuite car ce n'est pas exact. Shawie lui avait parlé de son projet de brigander et Samsa l'avait accepté. Elle l'avait accepté non pas parce que c'était celle qu'elle aimait, mais parce qu'elle savait qu'elle en avait besoin et qu'à l'issue de cela, l'Espagnole reviendrait. C'était un peu comme les doudous des enfants : un jour, ils doivent le laisser, mais parfois, ils leur arrivent de le ressortir simplement pour se rappeler de comment c'était, avant. Se rappeler de comment ils étaient. Shawie avait comme ancrage le brigandage et Samsa avait la dépression et Chinon, bien que ce dernier se soit largement désagrégé à sa dernière visite. Ainsi, Cerbère avait été humaine avant d'être amante, son propre vécu avait parlé avant quoique ce soit d'autre.

"Je sais, que tu fais des efforts. Je sais que tu ne fais que cela. J'espère qu'un jour, tu n'auras plus à en faire, que tu pourras vivre heureuse avec moi sans eux."
Une pensée qui reste dans une des trois têtes du Cerbère qui bloque soudainement sur ce qu'elle entend. Elle a envie de rire, parce qu'elle n'y croit pas du tout. C'était comme revoir cette journée où, escortant Primha, elles s'étaient battues en se jetant les pires mots à la figure. C'était à celle qui blesserait le plus l'autre dans un ultime essai de se repousser, un dernier désespoir qui, échouant, avait laissé tomber sa carapace pour devenir un grand espoir commençant par un baiser furtif. Qui s'était soldé par un revers de manche et un départ au galop, oui bon, d'accord; on avait vu mieux en matière de début, mais la rencontre au Mans avait bien débloqué tout ça, puis les lettres lors de l'absence de Cerbère. Depuis, il n'y avait jamais eu ni raisons ni matières à douter des sentiments de Shawie pour Samsa.


-As-tu conscience, mon Enfant, que tu viens de dire l'inverse de tout ce que tu as dit précédemment p... our elle ? Le Très-Haut-Tout-Puissant -quel nom... Amen. Une étrange ressemblance avec Toutankhamon mais passons- te regarde et t'écoute t... u sais, pour te pardonner tes péchés. Il ne convient pas de mentir, durant ce temps plus qu'un autre par... eillement !

Rattrapage approximatif mais ça peut passer crème. Cerbère enchaine d'ailleurs très vite comme pour couper tout début de réflexion chez Shawie. Allez, pas maintenant quoi... Pour une fois que Shawie parlait ! Samsa voulait logiquement connaître la suite d'une histoire à laquelle elle participait pourtant.

-Je continue de t'écouter t... ranquillement, et tâche de ne plus mentir; ce n'est pas bien p... our ton salut.

On se débrouillait toujours mieux en religion quand on avait été baptisé, déjà, et qu'ensuite on avait une soeur de coeur diaconesse de Bordeaux. Qu'importe si, depuis des années, Vivie avait disparu; à jamais, pour Samsa, elle resterait la diaconesse de Bordeaux.
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Shawie
Ploc. C'est le bruit de l'échec. Bon au moins, ce n'est pas un sycopathe derrière le grillage mais ça restait louche. Elle écoutait attentivement. C'était bien une des premières fois où elle parlait presque à cœur ouvert à quelqu'un. Oh, il y avait bien Satyne pour parler mais ça restait tendu, presque attentive aux moindres dérapages pour lui balancer une vacherie dans la gueule. Méritée le plus souvent. C'est ça qui est pénible avec les Amie, bah c'est qu'ils vous connaissent bien souvent plus que vous. L'amitié, c'est pourri.


Mé pardonner dé mes péchés ? Je n'ai rien à mé faire pardonne vous savez. Jé vis plutôt pas mal en accord avec mes actes. Par contre vous, j'viens dé vous dire qué j'étais avec une femme et ça né vous fait ni chaud ni froid. Pour un homme d'église, c'est louche. C'est lé péché le pus gros dans votre religion. Vous êtes une Eglise indépendante dé Rome ? Ca mé fait file presque des frissons !


Ouai parce qu'en temps normal, elle se serait retrouvé en place publique, fouetté, caillassée voir même les deux. Alors si une telle église existait, elle voulait bien se faire nonne desuite !


Jé disais donc qu'on c'était croisées en Empire mais c'était pas lé coup dé foudre desuite.


Loin de la. Même si Sam n'était pas dans la catégorie moche, elle entrait dans une catégorie bien pire : les royalos. Une proche du roi en plus.


En fait, jé sortais d'une passe merdique en Bourgogne -j'vous passe les détails- puis j'suis tombée sur elle. Au sens propre hein vous savez. J'ai chu d'un arbre sur sa tronche.


Ricanement.


Elle était tout ce que jé détestais. Elle m'a sortit être Secrétaire Royale. Jé savais même pas cé que c'était cette chose. Apparemment, j'étais pas la seule à né pas savoir. Puis après, on a eu des emmerdes. On a traîné ensemble plusieurs jours et jé me suis rendue qu'elle m'attirait tellement elle insupportait.

J'sais pas pourquoi. A partir dé ce moment là, j'ai décidé de changer de route. Voyez, dé me restreindre pour essayer dé lui plaire. Jé savais pas si elle jouait dans la même cours qué moi ... et puis j'ai vite compris qué non. Mais tant pis. J'avais décidé dé m'accrocher à cé petit espoir.



Puis ensuite, il y eu les Blanches. Elle aurait mieux fait de se chier dessus que de tocquer la bas. M'enfin, c'était fait et elle y avait fait des supers rencontres. Peut être même un petit coup de cœur mais qu'importe, elle avait tout brisé en quelques jours.


Est ce qu'un jour, jé serai capable dé me contenter dé ce que j'ai ? Jé veux toujours plus. Oh, pas en amour bien sur. Jé parle pour tout lé reste. Je suis insatiable dé tout le reste.
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Samsa
    "Et si tu as une minute, pourquoi n'irions-nous pas
    En parler dans un endroit que seuls nous connaissons ?
    Ça pourrait être la fin de tout."*



Shawie disait régulièrement que Samsa était cruche et celle-ci la corrigeait d'un sourire en lui répondant qu'un être intelligent pouvait jouer l'imbécile mais pas l'inverse. Ce n'était pas méchant, même pas sérieux venant de l'Espagnole parce qu'elle le disait même avec une sorte d'admiration dans la voix. Et que pouvait faire Samsa puisqu'il s'agissait d'un talent qu'elle exerçait depuis toujours ? Faire l'idiote pour faire rire les autres était devenu faire l'idiote pour mieux naviguer. Elle ferait donc ainsi et ce serait grâce à sa stupidité qu'elle se sortirait de tout cela. Le pire, c'est qu'il était possible qu'on y voit que du feu puisque tout était toujours parfaitement crédible.

Mais ça, on verrait plus tard.

Là, Samsa s'instruit. Avec autant d'attention que de tendresse, elle écoute l'histoire qui la concerne mais dont elle ne sait finalement pas grand chose, comme Shawie pour elle. Elles ne parlaient pas de ça, de ce qui avait plu, à quel moment, même si Samsa a la parole plus libre là-dessus, sûrement à cause de la mort de Zyg mais aussi parce qu'elle admire Shawie. Cerbère savait taire tous les renseignements importants du monde mais dès que cela devenait personnel, elle ne pouvait plus que s'exprimer. Elle avait envie de lui dire à l'instant qu'elle aussi, à l'époque, elle l’insupportait, à ne pas vouloir rentrer dans la case qui était faite pour elle, une brigande simplement malhonnête et sans principes. Il avait fallu qu'elle en ai et qu'elle les applique avec force, courage et dévouement. A quel moment Samsa était-elle tombée amoureuse ? A quel moment s'était-elle dit qu'elle ne pourrait plus jamais sortir Shawie de sa vie parce qu'elle venait de laisser en la Cerbère une empreinte indélébile ? Quand avait-elle comprit que plus rien ne serait comme avant ? Quand eut-elle posé pour la première fois un regard différent sur elle, le regard qui a comprit ce qui venait de se passer, ce passage de "tu n'es rien" à "tu es tout" ? Quand Shawie était revenue la chercher sans doute, qu'elle avait mit sa vie en danger pour la sienne, qu'elle avait brisé son orgueil plus facilement que d'autres après des années de vaines tentatives. Littéralement, elle avait apprivoisé le Cerbère. Et si c'était elle qui, maintenant, s'était trouvée à se confesser ? Lui aurait-elle avoué que la nuit où elles se sont chamaillées pour savoir qui ferait la garde, alors qu'elle la regardait dormir, elle eut envie de venir s'allonger à ses côtés et de simplement profiter de cette présence ô combien puissante et inspirante, rassurante aussi ? Sûrement.

La question tombe, celle à laquelle Samsa ne sait pas répondre. Shawie saurait-elle s'arrêter un jour ? La Prime Secrétaire Royale ne sait pas et elle est perdue dans ses cheminements de réflexion. Pour commencer, elle était à l'opposé de l'Espagnole en terme de biens; elle n'avait finalement que peu d'écus comparée à elle, elle ne collectionnait pas aussi ardemment, économisait parfois l'argent qu'elle grappillait lentement... Elle n'avait, en résumé, besoin de rien. Shawie, elle, avait besoin d'avoir, de posséder, d'agrandir. Elle avait des besoins que Samsa ne comprenait pas et que, depuis Tarbes, elle ne cherchait plus à comprendre. Elle était dans une phase de semi-acceptation qui n'était cependant pas proche d'une caution quelconque et elle avait peur. Elle avait peur de devoir un jour réellement choisir, elle avait peur de savoir ce qu'elle ferait, elle avait peur de ne pas être capable, elle avait peur de l'échec et, finalement, il restait en elle la même peur qu'elle avait eu du temps de Zyg, la même peur qui avait causé sa mort : elle avait peur des gens; de leurs regards, de leurs pensées, de leurs jugements, de leurs croyances. De leurs erreurs. Dédain en était l'expression même et, comme face à toute peur, Samsa comptait le combattre pour écraser ses jugements, ses croyances, tous erronés et tous dans l'erreur. Shawie lui insufflait la force et le courage dont elle avait besoin pour ça, pour endurer la tempête autour d'elle et même pour résister au désir de vengeance qui s'éteindrait bientôt quand elle recevrait les lettres de Primha.
De l'autre côté du grillage, Samsa fouille l'obscurité de ses petits yeux sombres. Elle ne sait toujours pas quoi répondre à la réponse de Shawie mais pourtant, telle une talentueuse en diplomatie, elle se lance.


-Toute conséquence a une cause t... u sais. Si tu trouves pourquoi tu es insatiable, tu trouveras comment t'en soigner par... faitement. Et tu vois, dans ce que tu me dis p... our ça, il y a déjà les péchés d'avarice et d'envie t... iens. Tu as donc bien des choses à te faire pardonner !
Quant à cette femme, hum Sam... Je pensais que tu me parlais d'une bonne amitié aristotélicienne ! N'as-tu pas honte pa... stourelle ?!
Quoi ? Bon, d'accord... Le Très-Haut te punira si tu ne demandes point pardon p... our ça !

Un soupire vient soudainement ponctuer la fausse colère et Samsa roule des yeux. Elle a mal à la tête et aux mâchoires de devoir retenir ses tics de langage mais elle voit autre chose en l'instant et elle le lâche sans complexes; ce devrait être la chose la plus sensée qu'elle dira en tant que prêtre et Prime Secrétaire Royale en même temps.

-Au moins Sam t'aura-t-elle orienté dans le droit chemin p... oney. Ça devient critique... Enfin, une partie du moins car te pousser au vice cité précédemment est tout à fait ignoble... ! Il faudra me l'amener pour que je l’absolves de ses péchés t.. u en as conscience ? Autrement, elle comme toi, nous devrons vous purifier par le feu t... u comprends...

"Il faudrait la faire brûler tiens. Sam comment ? Samsa ? Mais attends, on a déjà un dossier sur elle à l'Inquisition ! Comme c'est amusant... Il ne faut plus que l'attraper et on la fait cuire comme son modèle Jeanne d'Arc. En plus elle est presque rousse. "
Dans son coin, Cerbère sourit. Elle s'amuse, taquine un peu Shawie sur la fin, en espérant que celle-ci n'enflamme pas le confessionnal pour lui retourner tout ça dans la figure.



* = paroles traduites de Lily Allen - Somewhere only we know

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Shawie
Pa ... stourelle ?

Vous êtes bourrés mon Père ? Et non j'ai pas honte, j'suis même fière. J'ai jamais eu honte dé quoi que se soit sinon ça né sert à rien de les faire. Sam est une femme et jé suis avec elle. Lé monde n'est pas prêt pour ça, du coup, j'essaye dé le cacher .. un peu quoi. J'emmerde lé Très Haut, jé demande pardon à personne, on verra quand jé serai morte pour ça.

....

Poney ?

....



Plus la conversation avancée plus l'Espagnole plissait les yeux. C'est que ça devenait étrange cette conversation quand même. C'était quoi le rapport avec des Poneys ? Elle se gratta la tête sans trop reffléchir au sens caché sans doute. Faut dire que dans la religion, il y avait vachement de sous entendu avec les animaux. Peut être est ce un versé qu'elle ne connaissait pas. Après les moutons, les brebis, bah les poneys.


Avises toi une seconde dé la menacer et c'moi qui te ferrais rôtir comme un porc. Puis, dé toute façon, tout cé que je dis doit rester ici, c'est la règle. Peut être la seule qué je connais tu vois. J'pourrai té faire radier dé ton ordre, juste parcé que tu as trop ouvert ta gueule.

Puis j'suis pas sure que cette histoire de Poney et de pastourelle soit dans les Livres Saints. Faut pas mé prendre pour une cruche non plus. Escro, voyou. Bandit, tocard ! Enfoiré !



Les insultes montées doucement, fallait toujours un tour de chauffe. Puis cette histoire de feu lui fit tourner la tête et l'Espagnole sortit de l'isoloir pour aller ouvrir de l'autre côté, histoire de foutre une mandale dans la tronche de ce curé. Oh, le tissu fut poussé et la mandale fut partie. Pourtant, elle avait bien vu qu'il s'agissait de Sam derrière. Elle ne savait pas trop ce qui lui faisait le plus mal : avoir été écouté par Sam, ou le fait que Sam lui tire les vers du nez. Quoi qu'il en soit, c'était certain que la Cerbère savait qu'il s'agissait de l'Espagnole, et ça, ça valait bien une seconde mandale. Attention hein, pas une mandale de princesse avec la paume de la main, non, plutôt, un coup de poings dans la gueule tel qu'on puisse voir dans les combats clandestins de la Cours des Miracles.


Tu joues à quoi franchement ?
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Samsa
    "Suis-je meilleure suis-je pire
    Qu'une poupée de salon ?
    Je vois la vie en rose bonbon;
    Poupée de cire poupée de son."
    (France Gall - Poupée de cire poupée de son)



Samsa pâlit de son côté, bien consciente que la situation lui échappe à cause de ses tics et, pire encore, elle commence à comprendre que la situation est sans issue et que Shawie finira par comprendre que c'est elle. Mais au fond, est-ce vraiment si grave ? Elles en souriront, échangeront, s'ouvriront peut-être à plus de paroles et tout ça s'achèvera derrière l'église. Pas de quoi paniquer, au contraire même. Cerbère retrouve le sourire lorsque Shawie crache pour la défendre; elle n'en attendait pas moins, elle qui l'avait défendu contre Dédain et qui invoquerait le même motif pour une entreprise moins glorieuse. Samsa contestait vivement les formes que l'Espagnole y mettait mais le fond, lui, ne cessait de l'étonner.
Pendant ce temps-là, Shawie monte en mayonnaise et Cerbère comprend qu'elle l'a perdu. Qu'elle a perdu tout court d'ailleurs. Sa compagne va tout fracasser, tout brûler et voilà la Prime Secrétaire Royale dans la panade. Shawie quitte sa place et, malgré elle, Samsa se tasse sur son siège. Le jour se fait lorsque le rideau s'écarte et la main jaillit pour gifler du tissu rouge pour s'écraser sur la joue droite.


-Ahoutch pard...

L'interruption de l'interjection est cette fois purement involontaire car c'est un coup de poing qui lui écrase les muqueuses contre les dents, lui coupant l'intérieur de la joue. Cerbère s'étale à moitié contre une paroi, surprise autant de la violence que du coup lui-même. Pour le sourire, l'échange et le reste, on verrait pour une prochaine fois. Là, Shawie n'est pas contente du tout et Samsa, à l'étroit dans le coin, n'a aucun autre moyen de se protéger que de se recroqueviller et de se protéger le visage des bras. Aucun autre coup ne vient pourtant, pour l'instant en tout cas. Lentement, Cerbère se découvre et crache un mollard de sang et de salive par terre.

-Ah mais putain pardi ! J'ai pas donné mon accord pour l'instant sadique là pardi.

Elle passe le bout de ses doigts gantés de cuir à la commissure droite de ses lèvres et constate qu'un léger filet de sang s'en échappe, résultat de la coupure interne qu'elle confirme en passant légèrement la langue dessus. Un rictus lui échappe et elle crachote un peu de nouveau. Avaler du sang, d'accord, mais pas en cette quantité là.

-J'étais posée là-dedans pardi, et puis t'es entrée té. Je voulais juste m'amuser pardi, je pensais que tu confesserais que tu avais mangé le pot de confiture à la fraise de ta grand-mère pardi. Pis t'es partie dans un truc plus sérieux pardi et je voulais juste t'aider té.

Elle essuie le filet de sang qui a coulé d'un revers de manche, remue la mâchoire et se frotte la joue. Elle n'aura décidément jamais prit autant de coup par une seule personne, le plus beau rappel étant l'estafilade sombre qui suit la ligne de son sourcil gauche, résultat d'un coup de botte, involontaire celui-là.

-Tu parles pas beaucoup de toi, de ce que tu ressens pardi. Tu crois que ça m'empêche de voir certaines choses té ? Tu t'es rangée pour moi té, tu t'es battue pour moi té. Et moi, qu'est-ce que je peux faire pour toi pardi ?

Les petits yeux sombres se relèvent vers l'Espagnole et au fond y brille la lueur fugace d'un regret de ne pas avoir entendu en face ce que Shawie vient de confier si facilement à ce qu'elle pensait être un parfait inconnu, un homme d'Église qui plus est. Et elle, Samsa, sa compagne, elle n'avait dû se contenter que de ses propres observations ou presque pour savoir ce qui manquait à l'Espagnole, ce qu'elle ressentait pour elle, ce qu'elle pensait d'elle, ses doutes même. L'ombre d'un reproche passe brièvement, incapable de s'ancrer dans le regard chaud.

-T'as pensé à partir pardi ? Pourquoi tu m'as rien dit pardi ? C'est vraiment mon égo qui a retenu les mots que j'ai entendu té ?

Si les deux premières questions sont réelles, la dernière question, elle, est rhétorique car Samsa se doute bien que ce n'est pas la seule raison du silence de Shawie à propos de ses sentiments pour elle, de ses sentiments tout court d'ailleurs. Elle a en tête son détachement simplement apparent quand elle lui parlait de Satyne, de l'abandon, de la trahison, ses paniques qui la prenaient parfois dans leur intimité et qui, eux, n'ont rien à voir avec l'orgueil bordelais.
De nouveau, elle efface de sa manche la commissure de ses lèvres et se passe la langue à l'intérieur de la joue, y imprimant un goût de fer qu'elle évacue en un nouveau crachat de sang et de salive.


-Putain pardi... !
Moi qui m'attendait à un pot de confiture pardi... J'paye un peu plus cher que prévu le fait de t'avoir écouté pardi mais ça vaut le coup té. Sans mauvais jeu de mot té...


Si elle avait voulu être poétique, elle aurait dit que les coups s'en vont mais que les mots restent gravés. Seul l'esquisse de son sourire le traduit peut-être alors que, incapable de lui en vouloir pour une frustration finalement légitime, Cerbère quitte sa gravité pour gagner les sommets de la légèreté et de l'humour pour ouvrir la porte du refuge à Shawie dont Samsa sait qu'elle en apprécie la place. Assez fine pour le signifier sans le dire, pour inviter sans forcer, il reste sur le visage bordelais la profondeur de la conversation qui reste l'autre alternative à la légèreté si les choses doivent être dites maintenant. Malgré elle, dans son être, résonnent les mots entendus précédemment qui lui ont rendu le sourire stupide, le cœur chaud et dégoulinant et les yeux brillants et qui sont à la limite de lui rendre cette même expression idiote face à une Espagnole qu'elle aime autant qu'elle admire.
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Shawie
Mais ça t'amuse en plus ?


Oh mais ça ne serrait pas si simple. La colère ne s’arrêterait pas à une simple estafilade, bien sur que non. Elle se sentait trahie et nue devant Sam. Si elle était venue ici, c'était pour parler librement sans avoir à se soucier ce que Sam pourrait penser. Mais la. La Cerbère avait tout entendu, de force, c'était comme un viol dans l'esprit de l'Espagnole. Et plus Sam expliquait, plus Sha bouillonnait de l'intérieur. Une cocote-minute prêt à exploser pour un simple détail finalement. Le détail qui fait finalement tout.

La patience a des limites et l'explication de texte sur la confiture et la cerise sur le gâteau.



Toi, tu me trahie.

Tout ce que j'ai pu dire, tu n'étais pas censée l'avoir entendu sinon jé serai venue te les dire ces choses. Là, tu m'as prise en traite comme un pleutre qui attaque de dos. Jé ne supporte pas ça. Admettons qué jé me sois posée et qué t'es pas fais gaffe qué c'était moi, à un m'en donné, tu l'as su et bah, tu aurais du té faire connaitre et pas mé laisser continuer.

Tu n'avais pas à t'immiscer comme ça, dé force.



Les mots étaient crus et durs mais finalement, il fallait bien cela. Dire qu'elle en voulait à Sam, c'était vraiment peu dire. Cette sensation d'être nue et découverte est tellement inconfortable qu'elle eut envie de l'étranger la sur le champs, de continuer de la frapper pour qu'elle se taise. Evidemment, elle ne fit rien de tout cela, les mots peuvent faire bien plus mal que les actes. L'amour mélangé à la colère, c'était pas un bon mélange, surtout pas chez Sha. Difficilement contrôlable quand il s'agissait de "son intimité". Maintenant, il était difficilement possible de réfuter tout ce qu'elle avait pu dire.

Elle secoua la tête, la regarda, détaillant chacune partie de son visage comme si elle pouvait les oublier désormais. Oh oui, elle était attachée à Sam, elle pourrait donner sa vie pour la sauver mais paradoxalement, elle avait cette capacité à se défaire de toute relation du jour au lendemain. Un instant puis quelques minutes dans le silence, elle secoua la main qui venait de frapper et lâcha un froid et distant :



On va arrêter la.
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Samsa
    "Si loin de moi,
    Un grain de poussière ici-bas.
    Si loin de moi,
    Un grain de poussière au combat."
    (Louise Attaque - Anomalie)


Loin de calmer Shawie, les explications bordelaises ne semblent qu'aggraver la situation. Même l'humour qui pointe ne suffit pas et pour que Shawie refuse d'y aller, c'est qu'elle était vraiment très en colère, au grand damne de la Cerbère. Elle ouvre la bouche pour répliquer encore mais les mots tombent, giflent, sont finalement pire que la gifle et le coup de poing dont le sang en résultant coule maintenant jusqu'à l'os de sa mâchoire à l'indifférence complète de sa propriétaire qui reste là, figée et sonnée sous, finalement, le pire mot qui puisse être pour elle : celui de la trahison. Dédain avant elle était parvenue à la mettre par terre simplement en l'insinuant. Dès lors que Shawie l'exprimait aussi clairement, c'était à en faire exploser Samsa qui, pourtant, reste parfaitement immobile en fixant l'Espagnole. Elle voulait jouer sur rien et tout lui avait échappé, du sérieux à la trahison. A son tour, la colère la prend en même temps que l'inévitable chagrin du mot, de Son mot. Il étreint sa gorge puissamment, étrangle sa voix et l'empêche de déglutir. Les minutes s'écoulent durant lesquelles Cerbère ne baisse pas le regard, le gardant accroché à celui de Shawie. Elle, peut-être, elle prendrait conscience de ce qu'elle vient de dire et ferait marche arrière. Samsa, la Vengeresse, avait l'indéfinissable capacité à oublier les coups quand elle obtenait des regrets. Un jour, sans doute, cela lui jouerait des tours mais en attendant, c'était sa nature, un peu naïve et surtout parfaitement aimable envers les autres.

L'Espagnole a le ton le plus froid et le plus distant que Samsa lui ait entendu et, immédiatement après, elle se lève, faisant face à Shawie sans que sa colère et sa nouvelle blessure n'aient desserré sa gorge. La perte de contrôle est, cette fois, absolue.


-Comment peux-tu employer le terme de trahison pardi ? Comment peux-tu me dire que je t'ai prise en traître comme une pleutre pardi ? Je t'ai pas forcé la main té, tu as parlé toute seule et moi pardi, je t'ai juste écouté té, je ne voulais que t'aider pardi. Je voulais t'aider à améliorer le confort de la situation pardi, je voulais t'aider à avancer dans la voie que tu viens d'énoncer pardi, celle de la mesure té. Je t'ai jamais forcé la main sur quoique ce soit pardi, je t'ai jamais demandé pourquoi tu me parlais peu de toi et de ce que tu ressens pardi, je t'ai pas demandé d'où vient la panique que tu as parfois quand on est entre nous té, je t'ai jamais forcé à parler pardi, même pas là pardi, j'ai pas été vicieuse pardi. Je voulais pas profiter de la situation té et j'en ai pas profité pardi, je t'ai posé aucune question pardi, j'ai fait que t'écouter et te répondre objectivement comme je l'ai toujours fait et comme je l'aurais fait pardi.

Je pensais que je pourrais t'aider quand tu t'es lancée pardi, voilà pourquoi j'ai rien dit pardi.


Un geste rageur du coude vient essuyer le filet de sang dont une partie a glissé dans le cou et qu'elle n'efface pas, inconsciente autant de la position avancée de la coulée que de son état qui commence à sécher et laisse sur le côté bas de son visage une trace sale, un peu glauque. Après lui avoir adressé une moue de colère, elle s'échappe du confessionnal grâce à un coup d'épaule qui écarte Shawie de son passage et elle rejoint un pilier de l'église, laisse sa main gantée glisser dessus en regardant en haut et en bas.

-Et dire qu'à la base, je cherchais juste des carottes ici pardi...
... Et puis c'était... doux... ce que tu disais té...

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Shawie
Des fois, c'est tellement logique qu'elle ne comprend pas pourquoi les autres ne comprennent pas. Ecouter sans y être invitée, c'était pas joli-joli et encore moins quand il s'agissait d'une confession. Si ? Non ? A vrai dire si la situation avait été inversé, l'Espagnole aurait sans doute prit un malin plaisir à lui tirer les vers du nez. Mais pas qu'un peu, le truc à fond. Mais c'est jamais agréable quand ça vous arrive à vous.


Tu n'avais pas à écouter cé que je disais bordel de merde. Ça me parait tellement logique qué je comprends pas qué tu ne comprennes pas. Merde. Tu as bien écouté oui, t'as même lancé des perches pour mé faire encore plus parler avec tes conneries de péchés et de confession. T'as tout fait pour mé faire parler et en tirer les avantages. J'avais confiance Sam, shepa à quoi tu joues mais franchement, ça mé plait du tout. Tu l'as fais à l'envers la.

Et t'es en train dé changer dé sujet ! La question n'est pas dé savoir pourquoi jé cause pas trop dé moi ni pourquoi ... jé panique pas du tout quand on est entre nous déjà. La question, c'est porqué t'as jugé utile dé faire ça ? Hein ? T'as rien dis parcé que tu voulais profiter de la situation.



Les bras étaient croisés et viennent finalement menaçant vers l'accusée. Bien sur, le coup d'épaule reçu n'arrange rien du tout. De toute façon, rien ne pourra la calmer, même des aveux. Sa raison lui disait de la prendre dans ces bras et de lui souffler que ce n'était pas grave, que tout le monde s'en fiché et basta, elles seraient à autre chose. Elle aurait sans doute prit plaisir à jouer la médicastre sur Sam. Pour une fois que les rôles auraient pu s'inverser.


Si jé ne t'avais pas découvert, m'aurais tu dis un jour qué c'était toi derrière ?


Un bras se pose sur l'épaule de Sam. Décidément, c'était bien compliqué de lui en vouloir longtemps.


Sam ... ?
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