Merance
- La fraîcheur du matin faisait frissonner Mérance et pourtant, brave petit soldat des sorts et de la mort, elle s'en allait faire sa cueillette afin de trouver quelques petites bêtes bien sympathiques parmi quelques plantes encore vivantes malgré la froidure d'octobre qui s'installait. Et la sorcière s'en allait sur les chemins, panier au bras, un sentiment qu'elle était là où elle le devait même si cela n'avait pas été simple ces dernières semaines.
Le fait de quitter le clan Azzuro avait laissé quelques traces chez la rouquine, comme si une part d'elle s'était éteinte, morte pour ne plus jamais revivre. Et même si elle en avait l'habitude, si elle maîtrisait cet aspect de néant éternel, la jeune femme avait eu du mal à se relever. Sans doute parce qu'elle avait espérait beaucoup de choses qui, au final, s'étaient révélées inexistantes ou à l'opposé de ce dont elle avait rêvé mais "le Roy est mort, vive le Roy" chantait la cour des miracles et Mérance s'y accoutumait "Un homme chasse l'autre et une femme prend la place qui lui revient. Ainsi allait la vie et celle de la sorcière avait toujours subi des fluctuations alternant des périodes d'activité intense à celles de longue solitude. Et elle en aimait chaque aspect surtout à l'approche de l'hiver qui viendrait la solliciter un peu plus, lui permettant de tourner la page et de fermer une fois pour toute certains épisodes de sa vie.
Tous les ans c'était pareil, tous les ans les maladies et autres petits bobos se répandaient comme une traînée de poudre sans oublier l'ennui qui était le pire de tous les maux. Ce dernier favorisait la méchanceté et la jalousie et faisait de Mérance une jeune femme riche dès que le printemps revenait. Car lorsque le gueux tout comme le noble devenait oisif par la saison où aucune guerre et aucune récolte ne pointait son nez à l'horizon, il faisait de son voisin le pire de ses ennemis et là, à Mérance d'inventer le bon dosage pour rendre malade ou bien jeter un sort sur la personne qui le méritait
Le panier remplit de quelques champignons mouchetés et d'une ou deux araignées à la robe bigarrée qui viendraient adoucir quelques potions dont l'issue serait tout à fait Mérance ne préférait pas y penser pour le moment car suivant ce que le commanditaire voudrait, la future victime finirait sans doute au cimetière un sourire presque funeste vint étirer les lèvres de la jeune femme tandis qu'elle poussait la porte de la taverne. Ça faisait déjà presque trois heures qu'elle était partie gambader au travers des champs afin de récolter ce dont elle avait besoin et il lui fallait se réchauffer et reprendre un peu de couleurs.
- Quelque chose de fort tavernier et apporte-moi par la même occasion un bol de soupe qui hume si bon dans ta taverne
Mérance posa sur la chaise à côté de là où elle allait s'installer son panier qu'elle ne perdait pas de vue. Un tissu dissimulait son contenu afin de ne pas attirer l'attention des pairs d'yeux qui viendraient fureter. Les doigts de la jeune femme tiraient déjà sur les mitaines de laine qu'elle portait ce matin-là puis doucement, défirent la fibule qui retenait sa cape. Se mettant à l'aise, elle attendit que l'aubergiste vienne jusqu'à elle avec un bol fumant de cette soupe qui sentait bon le lard et les légumes et le verre de remontant puis elle se cala dans son siège tout en l'apostrophant.
- Qu'est-ce qu'il y a de neuf dans le village, quelques activités qui changent de l'ordinaire ?
La main de Mérance attrapa au vol le verre d'alcool avant que le tavernier n'ait eu le temps de le poser sur la table puis le porta à sa bouche. La sorcière huma le breuvage avant de vider le godet tout en frissonnant longuement. L'instant d'après, elle sortait de sa bourse quelques écus qu'elle posait au creux de la main du tavernier tout en se penchant un peu en avant afin de chuchoter.
- si tu entends parler de personnes qui ont besoins de chose particulière, des remèdes ou bien de conseil il y en aura beaucoup d'autres pour toi...
Pas la peine de prononcer certains mots. Après tout, elle pourrait très bien être vendue à l'inquisition pour quelques deniers de plus alors à demi-mot, cela était bien suffisant. Et puis, elle avait vu le regard que le bonhomme avait eu sur sa chevelure et son visage Il savait...
- Tu n'auras qu'à me les envoyer là-bas au fond, à cette table un peu en retrait. Elle deviendra mienne à partir de ce jour aux heures des repas.
Quelques autres écus vinrent rejoindre la première fournée. Mais déjà le regard de Mérance se détournait de l'homme afin de prendre son repas qui refroidissait à force de palabre. L'aubergiste comprit le message et s'éclipsa pour reprendre ses activités. Ainsi tout rentrait dans l'ordre, la vie reprenait son cours
Et le soir même, Mérance fut installée devant un bon repas chaud à la dite table. La lueur de la bougie se faisant craintive et laissait la jeune femme dans une pénombre bien venue qui lui permettait observer les coutumiers et les nouveaux visages qui la détaillaient en coin. Elle savait, avec l'expérience des années, que les gens mettaient un temps avant de venir à elle. Certains villageois ne le feraient pas ouvertement d'ailleurs, ils attendraient de la croiser sur un chemin ou au détour d'une ruelle mais au moins, on savait qui elle était. Et pour l'heure, elle croquait allègrement dans un bon morceau de faisan rôti au miel.
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