L_aconit
[J'ai fait tous les troquets, tous les rades de province, tous
les trous à rats, les endroits branchés.
J'ai crié ton prénom dans les tourbillons de la nuit]*
L'Anjou. Ses rencontres, turbulentes parfois. Silencieuses rarement.
Pincez-moi je rêve. Quels secrets le restent ici bas? Quel avenir si ce n'est le gibet, pour celui qui s'y cache, tout entier, corps et âme. Trainée de poudre, les arcanes Laconiques. Poudre aux yeux, la quiétude de leur repaire. Nicolas sentait pointer l'orage, épais tumulte à venir, dans les regards des autres, coulants sur le capuchon qu'il tentait de dresser entre lui et eux. Dans son attitude taciturne, fuyante lorsque les conversations s'orientaient de trop vers lui. Chaque porte claquée le ramenait à son état de fugitif. Les malentendus s'accumulaient. A trop se taire, on laisse interpréter.
Avant hier, Ansoald était emporté par une mauvaise fièvre, brune aux yeux tirés. C'est qu'en mettant un pied en Anjou, il avait omit de préciser à Nicolas que le moindre recoin du duché, la moindre femelle, le moindre mâle arrogant constituait un pan entier de son histoire personnelle. Et de découverte en découverte, le jeune spadassin le sentait lui échapper. Sournoisement. Pour les beaux yeux de l'inachevé.
Hier, il avait été désemparé de devoir se cacher d'Alessia, lorsque sans crier gare elle était apparue au seuil d'une taverne. Moment désagréable, qu'Ansoald alerté par la pression d'une main sur son genoux comme un avertissement, avait saisit.
Puis, plus tard comme une couronne posée sur ces moments d'intense tourment, l'éclat de colère de Maryah, enchevêtrée dans les non dits. Les interprétations. Les ragots. Tous ces mots que l'on dit trop ou pas assez. Maryah. Carapace contre carapace. Elle et sa sensibilité masculine. Lui et sa sensibilité féminine. Il s'était prit d'affection pour cette rencontre, attiré sans doute par ce qui émanait d'elle. Une mélancolie certaine, et des douleurs à faire taire sous la cuirasse. L'Aconit avait ce don merdique d'apprécier les gens qui taisent leurs maux, et les dissimulent sous d'autres formes. La réticence. L'ivresse. L'humour, parfois. Mais le déballage public qu'il avait supporté la veille avait eu raison de son envie de se montrer encore dans de tels lieux, confinés, propices à être tout sauf anonyme. Privilégier Ansoald. Son aura rassurant, quand il ne décidait pas de foutre un coup de pied dedans pour des besoins primitifs mais nécessaires à son épanouissement... Les charmes et l'exhalaison de toutes ces fleurs vénéneuses.
Pour sauver sa dignité et mettre un point final à ces situations qui l'exposaient plus qu'il ne le devait, l'Aconit s'était mis à table. Dans l'implosion de ses dix sept ans. Dans la maladresse des phrases qu'il exécrait à dire. Lui, si pudique en public. Acculé, la beste avait envoyé les dents, avant de déguerpir et de regagner sa piaule.
Si la Medicis était dans les parages, à sa recherche, si tout le village connaissait les liens qui l'unissaient au Renard voleur, et si même la plus inatteignable des dures à cuire vrillait sa colère sur lui, c'est qu'il avait dejà trop trainé. Il lui fallait regagner les foules, et arrêter paradoxalement de trop se dissimuler dans des lieux où chacun pouvait l'examiner de trop près. Pour ne pas attirer l'attention. Le meilleur moyen de passer inaperçu n'était-il pas de faire comme si l'on ne redoutait rien?
Pour regagner l'état d'insouciance que les rixes et les altercations venaient émousser, il avait décidé de ne plus aller en taverne. La nuit est une sage conseillère. Les rues, les marchés et les champs seraient le terrain de ses jeux et de ses amours interdites, comme au commencement, bravant la menace grondante de se faire rattraper trop vite en lui levant son doigt insolent.
Les Roses, il s'en méfiait, comme de tous ces jolis brins qu'il jugeait de par leur sexe menace à son bonheur discret. L'église? Il la fuyait comme la peste, soucieux de ne pas se faire émasculer dans le tendron. Quant à se cacher dans les rangs, Nicolas ne connaissait que trop la propension du Retz à la guerre, pour redouter de se trouver d'une manière ou d'une autre un jour face à lui, adversaire.
* Saez, Lula.
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les trous à rats, les endroits branchés.
J'ai crié ton prénom dans les tourbillons de la nuit]*
L'Anjou. Ses rencontres, turbulentes parfois. Silencieuses rarement.
Pincez-moi je rêve. Quels secrets le restent ici bas? Quel avenir si ce n'est le gibet, pour celui qui s'y cache, tout entier, corps et âme. Trainée de poudre, les arcanes Laconiques. Poudre aux yeux, la quiétude de leur repaire. Nicolas sentait pointer l'orage, épais tumulte à venir, dans les regards des autres, coulants sur le capuchon qu'il tentait de dresser entre lui et eux. Dans son attitude taciturne, fuyante lorsque les conversations s'orientaient de trop vers lui. Chaque porte claquée le ramenait à son état de fugitif. Les malentendus s'accumulaient. A trop se taire, on laisse interpréter.
- La main opaline étire un vélin, les yeux le relisent.
Avant hier, Ansoald était emporté par une mauvaise fièvre, brune aux yeux tirés. C'est qu'en mettant un pied en Anjou, il avait omit de préciser à Nicolas que le moindre recoin du duché, la moindre femelle, le moindre mâle arrogant constituait un pan entier de son histoire personnelle. Et de découverte en découverte, le jeune spadassin le sentait lui échapper. Sournoisement. Pour les beaux yeux de l'inachevé.
Hier, il avait été désemparé de devoir se cacher d'Alessia, lorsque sans crier gare elle était apparue au seuil d'une taverne. Moment désagréable, qu'Ansoald alerté par la pression d'une main sur son genoux comme un avertissement, avait saisit.
Puis, plus tard comme une couronne posée sur ces moments d'intense tourment, l'éclat de colère de Maryah, enchevêtrée dans les non dits. Les interprétations. Les ragots. Tous ces mots que l'on dit trop ou pas assez. Maryah. Carapace contre carapace. Elle et sa sensibilité masculine. Lui et sa sensibilité féminine. Il s'était prit d'affection pour cette rencontre, attiré sans doute par ce qui émanait d'elle. Une mélancolie certaine, et des douleurs à faire taire sous la cuirasse. L'Aconit avait ce don merdique d'apprécier les gens qui taisent leurs maux, et les dissimulent sous d'autres formes. La réticence. L'ivresse. L'humour, parfois. Mais le déballage public qu'il avait supporté la veille avait eu raison de son envie de se montrer encore dans de tels lieux, confinés, propices à être tout sauf anonyme. Privilégier Ansoald. Son aura rassurant, quand il ne décidait pas de foutre un coup de pied dedans pour des besoins primitifs mais nécessaires à son épanouissement... Les charmes et l'exhalaison de toutes ces fleurs vénéneuses.
- Da sa main libre, il caresse les mèches brunes du voleur endormi à ses côtés.
Pour sauver sa dignité et mettre un point final à ces situations qui l'exposaient plus qu'il ne le devait, l'Aconit s'était mis à table. Dans l'implosion de ses dix sept ans. Dans la maladresse des phrases qu'il exécrait à dire. Lui, si pudique en public. Acculé, la beste avait envoyé les dents, avant de déguerpir et de regagner sa piaule.
Si la Medicis était dans les parages, à sa recherche, si tout le village connaissait les liens qui l'unissaient au Renard voleur, et si même la plus inatteignable des dures à cuire vrillait sa colère sur lui, c'est qu'il avait dejà trop trainé. Il lui fallait regagner les foules, et arrêter paradoxalement de trop se dissimuler dans des lieux où chacun pouvait l'examiner de trop près. Pour ne pas attirer l'attention. Le meilleur moyen de passer inaperçu n'était-il pas de faire comme si l'on ne redoutait rien?
- Nicolas,
Lis ce courrier s'il te plait.
Je sais qu'il y a des moments si compliqués dans la vie ... qu'on aurait envie qu'elle s'arrête.
Changer de nom, changer de peau, changer d'ville et parfois même changer d'royaume.
On croit toujours qu'on va toujours tout pouvoir recommencer, comme si on renaissait, comme si on était tout neuf, ... mais le passé toujours nous rattrape.
Tu me fais penser à un jeune garçon que j'ai connu à la cour des miracles. On passait des heures sur les toits à observer les gens. On se détendait. On rigolait. On papotait. On cherchait cette part d'innocence qui nous manquait trop. Qui nous était interdite le jour levé.
On fuyait, aussi souvent. Pour ne pas être rattrapé par les uns par les autres.
J'sais pas c'est qui le Monfort. Mais je te promets je ne dirai rien. A aucun de mes compagnons d'armes angevins. Je sais trop ce que c'est.
Par contre, ce que je peux te dire, c'est que tu pourrais demander à Rose de te protéger. Elle te cacherait dans une de ses armées, et tu serais sauvé. Crois-moi, il y a deux lieux dans lesquels on ne viendra jamais te chercher : l'église et le campement d'une armée. En armure, tu seras méconnaissable.
Y a un troisième endroit où tu pourras te cacher le temps de ton séjour en Anjou ; ma chambrée à l'auberge des vrais saigneurs. Je te file la clé, tu peux passer par la fenêtre aussi, elle est toujours entrouverte.
Sache que j'ai grandement apprécié ton courage de ce soir. Et ce que j'ai dit compte dès aujourd'hui. Si tu as besoin, je serai là, aujourd'hui, dans un jour, dans un mois, dans dix ans, ...
Il ne me reste qu'à te prier de prendre soin de toi,
Amicalement,
Maryah
- Un léger sourire étire ses lèvres, la gueule enfarinée du réveil. Il délaisse les crins noirs pour le nécessaire à écriture qui en a vu couler d'autres.
Pour regagner l'état d'insouciance que les rixes et les altercations venaient émousser, il avait décidé de ne plus aller en taverne. La nuit est une sage conseillère. Les rues, les marchés et les champs seraient le terrain de ses jeux et de ses amours interdites, comme au commencement, bravant la menace grondante de se faire rattraper trop vite en lui levant son doigt insolent.
Les Roses, il s'en méfiait, comme de tous ces jolis brins qu'il jugeait de par leur sexe menace à son bonheur discret. L'église? Il la fuyait comme la peste, soucieux de ne pas se faire émasculer dans le tendron. Quant à se cacher dans les rangs, Nicolas ne connaissait que trop la propension du Retz à la guerre, pour redouter de se trouver d'une manière ou d'une autre un jour face à lui, adversaire.
* Saez, Lula.
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- (En Bleu italique, les pensées Laconiques.)