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[RP] "Au boudoir de soi" maison close

Maryah
La Bridée est tendue. C'est un genre de combat dans lequel elle est moins douée que sur un terrain de bataille. Quoiqu'il se passe actuellement, elle est encore avec Arael, et même si elle pense au blond qui lui a fait l'amour comme un dieu, même si elle a failli défaillir en sentant les mains du brun faire lentement pé-né-trer le baume sur sa blessure, même si à l'instant présent l'Italien l'enflamme lui rappelant les milles délices de la fois précédente, elle ne peut pas. Elle ne doit pas. ça ne se fait pas.

Elle se raisonne, devant ses grands yeux gourmands. C'est un ... prostitué. Oui elle a appris le mot depuis. C'est mieux que p'tite pu** ! Il est là pour vider les bourses de ses clients, en vidant les siennes. Ni plus ni moins. Elle déglutit, cherche à croiser ses jambes ; mais la blessure l'en empêche. Le toucher lui est encore douloureux, et elle ne veut pas tenter de péter à nouveau le fil qui retient ses chairs meurtries. Rose la couperait en plusieurs morceaux et les disperseraient aux quatre coins du duché. Elle le sait.

Mais il est fort, il est très fort. Et l'essence de vanille, dont les coûts sont juste exorbitants sur les marchés de la capitale, lui laisse comme une vision de rêve. Les détails ont été validés par la Mère Maquerelle, l'alcôve noire choisie, il ne reste plus qu'à demander à Luigi ses talents de masseurs.

Repoussant vivement sa main de son ventre creux, elle reprend doucement en se penchant pour siroter son rhum :


Je veux te présenter à une amie.
Le ton est donné. Fait ton travail !
Elle est blonde, aux formes pleines, magnifique, tendre, enthousiaste, généreuse, affectueuse, pacifiste, réconciliatrice, paisible ... et ... seule, depuis le départ de son mari.
Je suppose qu'aucun homme "normal" ne sera assez bien pour ... effacer sa vie avec lui. Et je soupçonne surtout que personne n'ose l'approcher, en souvenir du défunt.
ça n'en reste pas moins une femme. Avec ses envies, ses désirs, ses besoins.


Il écoute, attentif, et elle se doute qu'il cherche déjà à s'en faire une idée et quoi lui proposer pour la faire rêver, la faire dépasser son quotidien. Elle a bien fait de le choisir lui, elle sait comme il est à la fois convaincant et compréhensif.
Elle sourit en coin, éclatant quelques grains de raisins entre ses dents, puisqu'il faut qu'elle mange et qu'il lui creuse l'appétit ...


Ta matrone est d'accord pour mettre à disposition ce salon privé. Je le voulais noir pour qu'elle ne soit pas trop pudique, et en contact avec elle ... et son ... obscurité. Tu comprends ?
Il approuve et rajoute :
- On pourrait mettre des bougies là .... et là ... Il ne faut pas que ce soit angoissant pour elle ... et des ... fleurs ? De grands bouquets à chaque coin, et pourquoi pas des pétales sur la couche ... soyeuse ...

Elle ne peut que sourire. Elle aime cet esprit vif, connaisseur, qui est force de proposition. Un homme entreprenant ... épatant non ? Elle se mord la lèvre, le goûter n'est pas pour elle. Il répond en passant une langue rose parfaite sur ses lippes masculine. Merde ... cet homme est un tentateur né ...
Et la bridée se répète sans discontinuer : c'est son métier, c'est son métier, c'est son métier ...

Les bougies oui ... les fleurs ... pas trop ; je voudrais que ça reste simple, humble ... comme elle. Pas de faux semblant, pas d'artifice ... juste l'essentiel ... qu'elle soit focalisé sur les sens ... sur le toucher ... sur ...
...
Luigi ...
...
Ne me regarde pas comme ça ...
...
S'il te plait ...

Regard implorant. Il rit et se redresse, goutant lui aussi le rhum.
- J'aime t'entendre parler des sens et de l'essence-ciel ...
- Grrrrrr ... Luigi ...
- Pardon ... pardon ... alors nous disions : des bougies, et quelques fleurs de jasmin, juste là, pour leur parfum.
- Oui et un bandeau pour cacher ses yeux ... et des draps brillants ... blanc ... Toi aussi tu devras être en blanc ...
- Bien sûr, je suis un chevalier blanc.
Le regard qu'il lance en cet instant relève plus du feu que de la blanche pureté, et le rythme cardiaque de l'Exotique s'accélère. Bon sang... Ober va passer un instant délicieux !

Le lieu sera sombre, et enfumé, la chaleur intense. C'est comme ça qu'on fait fondre les carapaces ... les tensions ... chez moi. Ce sont nos bains. Il y aura la cheminée et quelques tisons, icy et là. ça diffusera de la vapeur, des huiles à l'orange. Tu auras un simple bout de tissu blanc autour de la taille ... Tu aur....
- Tu viendras me huiler, jolie étrangère dont j'ignore toujours le nom ... ?
- Non toi tu n'as pas besoin d'huile ! Tu glisses bien assez comme ça !
Non mais j'suis sérieuse là !
Il faudra être tendre avec elle tu entends ? ... et si elle dit non, c'est non ... tu ne la brusques pas ...

- Vos désirs sont des ordres ...

Maryah ne put que rouler des yeux et finir ses explications. Elle y tenait, elle ferait le massage pour renouer avec ses origines, et que son amie puisse se détendre en toute tranquillité.
Ensuite seulement, quand la blonde aurait suffisamment bu, et fumé de chanvre, la bridée passerait le relais à Luigi ... et elle ne voulait absolument pas savoir ce qu'il se passerait à partir de ce moment là.
Elle irait sagement attendre au comptoir, de toute façon, elle avait payé pour la nuit !

Après quelques heures, l'affaire était conclue.
Et Maryah pu retourner au campement de l'armée, ni vue ni connue, avec l'envie furieuse d'accélérer le temps.





Nuit Suivante ...


- Mais si Ober t'es parfaite dans ta tenue ... pas besoin de frou-frous hein, tu vas finir à poil pour le massage ! ...
- [murmure non porté à notre connaissance, chers lecteurs]
- Non ... on est presque arrivées ... l'auberge surprise n'est pas loin ... Garde ton bandeau, fait moi confiance. Tu le veux ce massage ou pas ? C'pas facile de trouver un endroit où faire des bains de vapeur ...
Encore quelques pas et voilà ...


Un sourire discret au tavernier, quelques mots échangés avec la mère maquerelle, et il n'en fallut pas plus pour se faire conduire au Salon Noir, qui était plongé dans une épaisse fumée, des arômes de cannelle et d'orange venant chatouiller leur narine.
- Voilà, on est seules. Déshabille-toi ma belle et passe cette petite étoffe autour de toi ... tu peux retirer ton bandeau si tu veux ... ou le garder ... je te conduirai à la couche ...

Se dévêtissant également, car c'était juste Infernal de rester vêtue dans cette moite chaleur, et s'entourant d'un bout de tissu noir soyeux, qu'elle noua autour de son cou, l'Exotique regarda ce que la mère maquerelle avait fait de cet endroit. Les Enfers venaient de prendre vie. La chaleur était intense, la fumée dense, les bougies et leur faible lueur créait une atmosphère toute particulière ...
Le boudoir de soi,
L'éveil des sens.


Prête ... ça va Ober ?
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Oberthur
Elle devrait, pourtant.
Mais non.
Elle n'a pas peur.
A vrai dire, elle n'a plus peur de rien, elle a déjà vécu le pire.
Elle s’agrippe au bras de la Bridée, prenant plaisir à ce sentiment de dépendance, voulue pour la circonstance.

Docile, elle hume les fragrances, celles de l’automne, tout d'abord, fraîches,piquantes, puis celles, suaves, intenses de la pièce qu'elle avait réservée, préparée.
L'orange, la cannelle, Maryah avait tout bien fait comme il faut pour que le moment soit parfait. Rien que ces odeurs-là la faisait voyager, pas pour ces pays qu'on appelait exotiques, elle n'en connaissait pas assez pour en rêver, mais non, simplement à l'intérieur d'elle-même et là était le plus initiatique des voyages.


- Voilà, on est seules. Déshabille-toi ma belle et passe cette petite étoffe autour de toi ... tu peux retirer ton bandeau si tu veux ... ou le garder ... je te conduirai à la couche ...

- Il me plait de garder ce bandeau. Il n'est pas besoin de voir, juste de ressentir n'est-ce pas?

Souple, elle retire chemise et braies sans vaciller.
Sans doute devra-t-elle retrouver sa houppelande dans sa malle à l'avenir, pour paraître plus féminine, les gens accordent tellement d'importance aux vêtements, sans qu'elle comprenne pourquoi.

La dextre cherche celle de son amie, délaissant le fin tissu qu'elle lui tendait.
La blonde acceptait les défauts de son corps, les autres s'en accommoderaient.


- Je suis prête, Maryah.
Maryah
Le courage de cette femme l'émeut au plus haut point. Dans cette nudité, c'est un paradoxe de force et de vulnérabilité qui se dessine au fusain, entre les volutes de fumée.
Maryah n'a pas ce courage. Se mettre à nu reste toujours une grande épreuve. Elle n'arbore jamais de décolleté, veillant toujours à cacher sa marque, et le tissu qu'elle a enroulé autour d'elle cache la récente cicatrice à la cuisse.
Elle laisse un regard bienveillant glisser sur la silhouette d'Ober, se demandant si l'As pardonnera d'où il est la folie de la Bridée. Elle se convint que oui, qu'Ignace l'aimait tellement fort qu'il n'aurait jamais souhaité qu'elle reste seule à s'en déssécher cœur et corps.
Et en parlant de se dessécher, Maryah laisse en plan Ober et son bandeau, allant remplir silencieusement deux cornes de vin rouge. Elle s'amuse à verser le vin de velours de haut, laissant résonner dans la pièce le bruit du liquide emplissant les deux contenant.

En revenant auprès de la Blonde, elle lui prend la main et y glisse la corne d'abondance, trinquant avec elle :


A ce pur moment de plaisir, ma belle ...
Parce que tu le vaux bien !
Vient par là ...


S'éloignant de la cheminée, la laissant apprécier le parfait breuvage aux tanins subtils et aux arômes évolués digne de l'élevage en fût de chêne, la Bridée la conduit par la main à une large paillasse moelleuse :

Attention en t'asseyant ... c'est bas ... à même le sol ...
Quand tu reviendras à toi, tu tomberas de moins haut héhé


Oui, la Bridée était un peu nerveuse à l'idée d'autant de contacts, et l'humour était une jolie façon de contourner cette légère tension. Elle attrapa la longue pipe remise par Luigi et la bourra de boulettes de chanvre, qu'elle embrasa les unes après les autres, avant de tirer délicieusement à son bec et de souffler la fumée sur le corps de la princesse d'Or, petit sourire en coin.
Après avoir tiré longuement sur la pipe, elle les débarrassa des cornes de vin, et effleura de la pulpe de son index les lèvres ourlées d'Ober, avant d'y glisser le bec de la pipe.


Un petit cadeau pour beaucoup d'effet ...
Et si tu es prête, je te propose de t'allonger sur le ventre, pour commencer.


Le feu crépitait dans la cheminée, les tisons recouverts des petits poêlons continuaient à dégager de la vapeur, et l'Exotique attrapa l'un des petits flacons pour s'enduire les mains de l'huile à l'essence d'Orange, venue tout droit de Provence. Comme quoi, on pouvait faire certaines choses bien, en Provence.
Faisait fi de sa blessure, elle s'accroupit aux pieds de la Blonde et commença à étaler langoureusement l'huile parfumée sur ses pieds, ses chevilles, remontant en cercle sur ses mollets.
Quand ses mains se furent habituées à ce contact, elle prit un temps pour appuyer sur les points plantaires dont elle se rappelait la démonstration de sa défunte mère, alors qu'elle n'était qu'une petite fille de 5 ou 6 ans à peine. Il y avait une petite chanson qui allait avec, et c'est donc dans une langue étrangère qu'elle se mit à fredonner.

Elle y passa du temps, cherchant à se rappeler chaque parole du royaume de Majapahit, langue qu'il lui semblait avoir oublié, redécouvrant le plaisir du toucher, dénouant les nœuds d'une pression ou d'un frottement plus léger. Le corps de la Blonde réagissait sous ses paumes, et Maryah souriait. Action Réaction.
Dans un souffle, elle interrompit sa chanson et murmura :


Tu me dis si ça ne va pas ... Respire tranquillement ...
On ... continue ?

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Oberthur
Le vin glougloute à ses oreilles. Elle en hume le bouquet. Sous-bois, champignon, fougères, tout l'automne dans un verre. Elle aime la saison aux feuilles qui s'envolent, depuis toujours.

- Merci. A toi, à nous, à ce moment que tu m'offres.

La blonde n'a rien d'autre à faire que se laisser faire, justement. Obéir en toute conscience, goûter l'instant présent.
Elle s'interdit juste de regarder, aiguisant ainsi l'ensemble de ses autres sens, l'ouie subitement aux aguets, l'odorat et le goût dont le champ s'élargit, et sa peau toute entière, frissonnante, réceptive.

Tailleur haut sur la paillasse, le temps de s'enivrer des arômes du vin, nectar qui enrobe la bouche, glisse le long du gosier, réchauffe son coeur.
La fumée légèrement âcre emplit ses poumons, s'expulse par ses narines.

Sourire.
La main libérée, elle s'étire, avant de s'offrir. Se priver de la vue aide grandement à annihiler toute pudibonderie, si elle en avait eu un tant soit peu.
Le temps est pris pour s'allonger. Le drap est tiède, le feu crépite, l'huile fleure l'orange. Un instant de plaisir à l'état brut.
Maryah chantonne, les lèvres pulpeuses d'où émanent des sons d'ailleurs sont belles. Elles savent offrir le meilleur, parfois. Ses paumes effleurent et pressent. Délicieux.


- C'est juste merveilleux... Encore.
Maryah
Moment suspendu.
Il lui semble que le temps s'arrête. Rien n'est plus, si ce n'est cette bulle de chaleur, de torpeur, et de douceur. Instant des plus rares dans cette ville Angevine, sauvage, brute, féline. La minute câline tout l'monde l'a icy, mais on s'en cache. On fait les durs en public, pour paraître plus fort, plus guerrier, moins humain, moins vulnérable. Et pourtant, ce sont bien ces affinités diverses et variés qui font rester les étrangers en Anjou, et l'adopter. Un pote, une amie, une liaison où l'équation se fait à deux ou à plusieurs, et chacun trouve sa raison de rester. De s'installer.

En glissant ses mains sur les cuisses fermes de la blonde, Maryah ne peut s'empêcher d'y penser. Une place. Un entourage défini. Une famille. Le palper rouler qu'elle effectue est à la hauteur de toutes ces questions : un mal pour un bien. Une pression relative pour un résultat définitif. Une petite claque sur le haut des fesses de la Dorée, ponctue cette réflexion, qu'elle ne peut que chasser pour le moment. Un sourire étend ses lippes, constatant la surprise d'Ober.


Oui ... une petite fessée, j'avais envie ... pis j'voudrais pas que tu rates le reste du massage, en tombant endormie. Le dodo c'est pas prévu ... pas cette nuit.

Et sans que l'amie puisse la voir, elle sourit davantage, pensant à l'entrée de Luigi. ça passe ou ça casse, comme on dit. Maryah reste tout de même persuadée qu'une étreinte ... charnelle, sensuelle, sexuelle, ne pourra que faire du bien à Ober. Depuis quand la belle aux cheveux d'or n'a pas touché un homme ? Depuis quand ne s'est elle pas laissée approcher par un homme ? Elle en connaît déjà la date ... le triste événement. Mais tout change, et elle a juré de ne pas laisser Ob' s'isoler, se renfermer. Elle la veut épanouie, joyeuse comme avant ... pour elle et pour le petit Giani.
Luigi n'est qu'une étape dans cette "réhabilitation" toute maryesque, visant à satisfaire l'amie et à lui redonner confiance en elle.

Pensant cela, elle remplit à nouveau les cornes pour une petite pause vin, et tend en suivant la pipe d'opium. Puis sans un mot, savourant à son tour ces délices du soir, elle s'huile à nouveau les mains et les avant bras, afin de continuer par un massage du dos, tonique et ferme sur le début, plus doux par la suite, et carrément frissonnant sur la fin. La chair massée est humide et les doigts y retrouvent leur habileté, glissant de ci de là, pinçant chaque disque de la colonne, malaxant chaque muscle trop dur, terminant par un simple frôlement de la pulpe de ses doigts sur la peau qui se colore d'une légère teinte rosé.
Elle a menti, elle a pratiqué ces massages à la Rose pourpre, pour le Duc et pour Niallan. 8 ans, comme si c'était hier. Ses doigts dessinent les contours de chaque partie du dos, glissent sur les flancs, s'amusent à tapoter sur les bras, caresse la main. Ils disent à leur façon tout le bien qu'ils pensent d'Ober, de son courage, de ses épreuves, de sa force. Ils cherchent à lui dessiner un royaume serein, dans lequel elle s'inscrit si bien. De l'amour, des rires d'enfants, des amis et des festivités à n'en plus finir.

Et c'est comme si, à cette simple pensée, le corps d'Ober se détendait encore plus profondément. L'instant dure ... suspendu dans l'espace temps, et une fois le dos totalement détendu, Maryah glisse ses mains dans la chevelure brillante, s'attachant à réaliser un divin massage du cuir chevelu, celui qui vous fait ronronner ou grogner. Celui peut être qui abattra ses dernières résistances avant l'arrivée de l'italien.

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Evroult.
Au JD de la maquerelle et/ou des filles, si l'incrust' ne convient pas, n'hésitez pas !


    ***
[AU BAR]

    Elle lui avait donné du fil à retordre. Des pudiques, pourtant, il aurait pu en faire un roman tant il les connaissait sur le bout des doigts. Celle-ci possédait une espèce de frigidité dont il n'avait su définir, au premier abord, si elle venait de lui ou d'une mauvaise expérience. Car si les femmes qui passaient les portes des bordels venaient bien en quête d'une jouissance impossible à retrouver dans les bras de leurs maris, elles trainaient derrière elles des années de souffrances, de hontes, & d'hommes malhabiles pour ne pas dire violents. A l'habitude, Evroult s'en sortait toujours bien. Sa jeunesse rassurante, son sourire avenant, ses paroles douces & mesurées faisaient de lui un Adonis parfait, qu'elles pouvaient rarement comparer à leurs conjoints. Il n'avait rien de gras, rien de mauvais sur lui, & tout d'un homme-enfant qu'on voudrait protéger. Il équilibrait leurs avances maternelles en imposant d'un regard charbonneux, ci une bouteille de vin, là un effeuillage en règle. Et au lit, quoi qu'elles en disent, quoi qu'elles en pensent, il dominait de loin toute pouliche récalcitrante, dégoulinant de romantisme quand il le fallait, jusqu'à l'heure même où elles devaient payer.

    C'était là toute la difficulté d'être l'homme au service de ces dames, paraissait-il. D'une discussion abrupte avec un de ses collègues passés il avait cru comprendre qu'avec les mâles en demande, les rôles plus souvent s'échangeaient. Et il avait du se plier, malgré lui, aux affirmations du pompeux qui lui faisait face, lui qui n'avait jamais offert ses charmes à des bourses égales. L'opportunité, sans doute, ne s'était jamais présentée. Ou peut-être plutôt que les rares occasions n'avaient pas retenu son attention, tant les bourses des femmes avaient toujours été mieux garnies. Dans tous les bordels où il avait travaillé, il avait été l'homme de ces dames, & lorsqu'il avait cessé d'y mettre les pieds pour aller foutre en quelques maisons de bourgeoises étouffantes de richesses il n'avait côtoyé les hommes que parce qu'il se faisait prendre à baiser la femme du maître. Il pouvait dire, avec fierté même, qu'il connaissait mieux la femme que son propre sexe, quand bien même ses aventures pouvaient s'étonner qu'il ne trempe pas partout.

    Quand bien même, elle lui avait donné du fil à retordre. Mais il avait vaincu, une fois de plus. Il l'avait travaillé si bien & si longtemps qu'il se sentait vidé sans n'avoir rien lâché. Il l'avait même faite déborder, tant & si bien qu'il lui avait presque fallu l'équivalent d'un bain avant de redescendre avaler une large rasade d'un Gamay misérable. De là, il écoutait la fille qui l'avait servi & répondait à ses questions de quelques grognements flemmards.

    Il n'avait eu aucune difficulté à se faire admettre ici. De ses manières un peu bourgeoises malgré lui, il avait expliqué à la Mère maquerelle le pourquoi de sa venue & la nécessité qu'il avait de se trouver un petit emploi le temps de quelques jours. Il n'avait commencé à proposer que ses services de ménage & de cuisine, voire de bricolage, n'espérant guère plus & gageant de trouver une bonne bourgeoise en manque d'amour chez qui il pourrait ensuite crécher. L’œil avisé de la maquerelle, pourtant, ne l'avait pas laissé poursuivre, & il s'était retrouvé à présenter ses talents d'amants à ses filles & à elle-même. Elle avait dit que ça suffirait, & ça lui avait suffit à lui, aussi. Il n'avait décidément plus les manières des lupanars, & lui qui avait pourtant grandi parmi les louves dénotait étrangement avec le reste des employés. Blanche Aliénor, sans doute, lui avait trop bien appris à louvoyer entre les catins sans plus trop s'y frotter. L'ambition le perdait un peu plus chaque jour, & ses rêves de richesse & de bonne place prenaient de plus en plus d'ampleur à mesure que sa réputation se faisait. Il en venait, même, à rêver de Paris, à rêver des cuisses bourgeoises de la capitale jusqu'à atteindre la noblesse & les invitations à la Cour...

    - A quoi tu rêves, Chasseur ?


    Il accueillit la question d'un sourcil arqué, puis fléchant la poitrine débordante que sa collègue étalait sur le comptoir d'une œillade amusée, glissa deux doigts fins aux ongles impeccables sous le menton de la rousse.

    - A toi, ma flamboyante.
    Ressers-moi, veux-tu ? Je peux bien finir ivre, je ne prendrais plus de cliente ce soir. La dernière m'a achevé.
Oberthur
Quel est ce phénomène étonnant? Comment expliquer l'étrange pouvoir du toucher sur l'âme?
On peut s'échiner à expliquer par a+b, montrer des preuves, rien n'y fait, notre âme refuse souvent l'évidence. Mais les mains sont toutes puissantes Elles sont la vérité. De l'instant certainement.

Comment définir le ressenti de la massée, juste là?
Il suffirait sans doute de promener un regard curieux sur les deux femmes. La brune, attentive, différente dans sa culture, dans son passé, amie particulière pour ce moment particulier et la blonde alanguie, abandonnée, le derme nacré, tiède, parsemé ça et là de duvet blond.
La claque sur la fesse retrousse à peine les commissures des lèvres, elle sait que ses lobes fessiers ont été bien souvent irrésistibles pour toute main avertie.
D'aucuns seraient étonnés d'en connaître toute l'histoire, mais il n'en sera jamais dit que peu, que valent les confidences fasse à l'imaginaire, le fantasme?...

Se laisser aller à la détente ne signifie pas gésir mollement, c'est aussi éparpiller ça et là des frémissements, des brefs étirements prolongeant l'action manuelle, c'est également divers borborygmes, remerciements peu orthodoxes du plaisir ressenti.

Elle en est là, la blonde, à se tortiller mentalement de contentement, aspirant volutes opiacées, respirant notes boisées du crû.
Il fait bon.

Les dextres se font conquérantes d'un cuir chevelu qui ne rechigne jamais à être malaxé, étiré, soulevé, bien au contraire. L'entreprendre signe une reddition complète.
_luigi_


L'Anjou est un endroit particulier, où les brigands pullulent et se côtoient gaillardement, où les femmes sont de vraies guerrières et occupent des postes importants, et où la guerre fait partie à part entière de la vie et de chaque année de grâce. On constitue des réserves, on travaille d'arrache-pied, toujours dans l'attente des prochains combats, qui feront briller le commerce local et valoriser le paysan du coin.

Nous, au Boudoir, c'est pareil ; on fait l'effort de guerre. On contribue. On veille à assouvir les besoins les plus simples comme les plus sophistiqués. La Maquerelle a modifié ses équipes en conséquence : elle a recruté dernièrement deux femmes à femmes, un homme à hommes et un homme à femmes. Le goût de l'interdit attire les invertis, et les rendez-vous avec les angevines sont plus fréquents, bien qu'elles préfèrent de loin nous faire venir dans un lieu neutre, au lieu de venir ici elles-mêmes.

Mais ce soir, j'ai doublé l'homme à femme. Evroult, le nouveau. Parce que l'étrangère m'a demandé, MOI. Et je ne me suis pas privé de le lui dire, et de lui répéter. Et vu la somme d'argent avancée pour l'agencement du salon et la nuit spéciale pour la veuve, la matrone m'avait fait confiance à Moi. Il était temps que j'entre en scène et satisfasse l'amie de l'étrangère. En passant devant le Bar, j'envoyais un léger regard narquois à Evroult ... Pauvre bichon, c'est moi qui avait eu le marché. Et oui la vie c'est comme ça ... qu'il fasse une passe à 30 écus, je décroche la nuit à 200 écus. Prends en de la graine, jeunot !

Je pénètre dans le salon noir, vêtu d'un simple linge blanc autour de ma taille. Je bande mes muscles, et mon corps brillant et svelte se dirige lentement au milieu des volutes de fumée, vers la paillasse improvisée au sol. La vue est des plus intéressantes. La Noire, la Blanche. L'Exotique et une magnifique blonde, dont le corps est étendu lascivement, abandonnée aux caresses de la noiraude. Mais je me rappelle que celle-ci avait déjà refusé une nuit à trois, par le passé.
Mon comportement doit être irréprochable, et j'ajuste ma vision à la faible luminosité de la pièce. A la chaleur également, c'est assez impressionnant. La payeuse ne semble pas me voir et je pose délicatement ma main sur son épaule. Je m'accroupis à leur hauteur, et sans un mot lui fait comprendre que je peux prendre le relais. En fait ... je suis payé pour ça, et la Maquerelle a fini ses mille et une recommandations. Je préfère être ici, que là bas à l'entendre.

L'Etrangère m'arrache un sourire, en recouvrant d'un geste rapide le fessier de son amie d'une étoffe évanescente. Elle est bizarre cette fille, elle dépose au bordel une amie veuve pour que je la console et la fasse rêver, ... dans un bordel ... et là voilà qui protège la pudeur de son amie. Quelle drôlesse ! Elle a du mal à partir, à la laisser. Je l'entends murmurer :

- Je ne serai pas loin si besoin ...

Me prendrait-elle pour un goujat ? Je lui adresse un sourire rassurant, en l'invitant du regard à sortir. Elle ne voudrait pas voir tout ce que je vais faire à la ravissante blonde. Une de mes mains glissent sensuellement sur la jambe de la femme, remonte sur son dos, alors que mon torse nu s'incline vers elle et que mon visage glisse dans sa chevelure aux mèches d'Or. L'Etrangère n'a pas menti, son amie est magnifique, généreuse, et mon divin odorat se remplit d'elle. Mes lèvres avancent doucement dans son cou, et après quelques baisers délicatement déposés du bout des lèvres, je chuchote aux creux de son oreille :

- Ce soir, je suis celui que vous voulez ... je suis là pour colorer vos rêves et vous enchanter ... laissez-moi faire ...

Une main sur sa nuque fragile, une autre sur sa hanche, je l'invite doucement à rouler sur le dos et découvre ses mille richesses. Je souris en regardant son beau visage dont les yeux sont couverts.

Je crois que votre amie n'a pas terminé son massage
...


Mes lèvres se perdent à nouveau dans son cou, remontent moelleusement jusqu'à ses lobes d'oreilles, qu'elles effleurent à peine, suivant le chemin des mâchoires et je dépose un tendre baiser sur chaque joue, avant de m'aventurer sur l'ourlet de ses lèvres. Un baiser de surface, un autre plus insistant ... une myriade de baisers recouvrent son visage qui rosit.
Encore ... et encore ...
La nuit risque d'être longue ... très longue ...
Maryah
L'arrivée de Luigi avait laissé Maryah bouche bée. Ses sens étaient en éveil, et le voir là, si beau, si séduisant, si ... légèrement vêtu ... si ... déroutant. La douceur et la sensualité aiguisées par le massage, lui donnaient bien des idées. Des jours, des semaines, peut être même un bon mois qu'elle ne s'était pas laissée toucher par un homme ... L'arrivée en Anjou, la blessure, son attitude fuyante devant Arael, non rien n'avait contribué à cela. Et il lui semblait que son corps allait imploser devant la scène qui avait lieu. Encore une raison de boire. Encore une raison de tirer sa pipe opiacée de sa besace ... besace qu'elle avait laissé au campement de l'armée ! Et merd... !

Luigi ... Ober ... Luigi ... Ober ... Son regard passait de l'un à l'autre, son imagination lui envoyant mille scènes&postures ... ce genre de choses qu'on imagine pas sur les amis, et qui la fit rougir instantanément. Il fallait vraiment qu'elle quitte le salon noir ... qu'elle s'éloigne. Elle murmura à l'oreille de la Blonde Amie qu'elle ne serait pas loin ; elle savait Luigi doué, mais sa confiance dans les hommes restaient toute limitée. La seule garantie qu'elle pouvait offrir, c'était la jolie bourse d'écus rutilants qu'elle avait remise à la Matrone. Après un regard enflammé à l'Italien, elle sortit sans même prendre la peine de se rhabiller.

Elle se contenta de passer sa cape, histoire de pouvoir librement aller chercher de quoi boire. Boire & Fumer, un quotidien qui lui allait comme un gant en ce moment, et retenait toute son attention. Elle avait constaté qu'en consommant suffisamment, son humeur s'améliorait et se stabilisait. Elle était bien moins à fleur de peau, et elle arrivait même parfois à enchainer 2 ou 3 heures de sommeil. Alors là, elle allait boire ... boire jusqu'à oublier la plus petite de ses envies, jusqu'à étouffer la moindre parcelle de colère. Maryah, un Lac.

Elle s'approcha pieds nus du bar, enveloppée dans sa longue cape noir d'armée, et tomba sur Solange en grande discussion avec un homme. Elle adorait les faux prénoms des filles du boudoir, Mathilde lui avait expliqué que Solange venait de "saut de l'ange" et que c'est comme ça qu'elle la vendait aux clients. Elle tendit l'oreille, avant d'oser les interrompre, s'accoudant discrètement au bar :



- A quoi tu rêves, Chasseur ?
- A toi, ma flamboyante.
Ressers-moi, veux-tu ? Je peux bien finir ivre, je ne prendrais plus de cliente ce soir. La dernière m'a achevé.

- J'vous l'fais pas dire m'sire ! Y a des soirées é-rein-tantes ! Et celle-ci en fait plus que partie ...

Dire qu'elle était censée être au campement, en train de vérifier et approvisionner les stocks ... boarf elle s'en arrangerait ... plus tard. L'avantage des insomniaques. Puis, ayant compris que l'homme était un prostitué, tout comme Luigi, elle continua à l'attention de Solange :
Tu peux m'servir un rhum s'te plait ?
J'vais aller m'poser dans l'salon bleu ... j'suis claquée et j'vais devoir attendre une bonne partie de la nuit j'pense ... T'peux me faire porter un tonnelet de rhum et un peu de raisin ... et un peu d'chanvre ...
J'réglerai tout ça à Mathilde.


Et ne voulant pas les déranger plus longtemps, elle prit la corne remplie de rhum et fit volte face. Le boudoir de Soi, LE lieu pour voir tous ses désirs réalisés. Qu'il était bon de lâcher prise et de laisser les autres s'occuper de ses envies. Ober ... devait d'ailleurs passer un excellent moment !

Alors qu'elle s'éloignait, elle pouvait voir Solange préparer un plateau ; l'avantage d'être connu, et de payer grassement. La Maquerelle Mathilde le lui avait fait comprendre que tant qu'elle se montrerait si "généreuse", ses désirs seraient des ordres. Excellente commerciale que cette femme.

Ce qu'elle n'entendit par contre pas ce fut la suite de la discussion entre le Courtisan et Solange :


Tu devrais peut être te forcer encore un peu, mon tendre Passionné. Cette femme est une figure de l'Anjou ; enfin ici. Elle nous a ramené pas mal de soldats, depuis que Mathilde a voulu qu'on l'aide à s'habiller pour le mariage d'une amie. Et si je te disais l'acompte qu'elle a versé pour cette nuit, tu en tomberais de ton siège.
La poule aux œufs d'Or ... Ton passe-droit vers une riche maisonnée ...
En plus, elle a dit qu'elle n'était pas intéressée directement. Elle vient pour son amie. Tu devrais lui porter son plateau au salon bleu, et sans même te fatiguer, tu pourrais en obtenir quelques noms. Il parait qu'elle est proche d'une duchesse, et lors de la campagne précédente, on la disait proche de l'Archiduchesse en personne. Il parait qu'elle devait se marier, mais ce n'est qu'une roturière ... et avec sa face d'étrangère, j'imagine que la famille l'a vite repoussé.
Elle est bizarre cette fille. Je pense qu'elle aime les femmes, mais Luigi a craqué pour elle ; et ils ont passé UNE soirée ensemble. Et si tu veux plaire à la Maquerelle, prends soin de sa Cliente, une des rares femmes qui osent se montrer ici. J'ai même entendu Mathilde l'appeler Commandante ...
C'est ta chance ... elle ramène des clients et paie bien.
Allez vole, petit moineau ...

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Evroult.

    ***
    Maryah aurait pu être la reine de France qu'Evroult n'aurait sans doute pas plus réagi, à l'instant. Il la salua d'un mouvement de tête alors qu'elle interrompait la discussion qui n'en était pas une, son regard s'accrochant à peine à des traits à la saveur étrangère, & acquiesça d'un sourire approbateur en perdant ses lèvres dans sa coupe de vin. Si Solange n'avait pas été aussi bavarde, il aurait été raisonnable & sage, serait monté dans la chambre qu'on lui avait attribué, & s'y serait écroulé de fatigue sans même finir son Gamay. Il aurait fait ce qu'on attendait de lui, parce qu'il débarquait à peine & que son embauche rapide ne l'aidait pas à accrocher la confiance de ses collègues.

    Le regard que Luigi lui avait lancé était sans équivoque. S'il lui avait fallu rester encore & prendre ses quartiers ici-même, il aurait du redoubler de courbettes & bassesses avant d'obtenir le moindre avantage. Après tout, les lupanars n'avaient rien de maisons de charité, & les personnalités qui y travaillaient s'apparentaient toujours à de fortes têtes. Ceux qui n'en avaient pas le cran ne restaient pas bien longtemps. Il fallait être le favori, l'indispensable, ou se battre bec & ongles pour la moindre passe minable. Evroult avait sourit, alors. D'abord parce que la compétition dans un endroit qu'il voyait comme un lieu de passage ne l'intéressait pas. Il n'était là que pour être au chaud, grailler sans peine & se faire quelques écus de côté, tout juste. Ensuite, parce que son statut d'homme à femme le rendait méprisable pour certains, jalousé par d'autres, d'un côté parce qu'il se permettait de poser des conditions à des passes qui ne lui appartenaient finalement pas (une bonne part de ses recettes retombaient chez la maquerelle), de l'autre parce que justement, il était suffisamment confiant sur ses capacités - & sans aucun doute présomptueux - pour tenir tête à ses employeurs. Enfin, parce que malgré lui, la fierté de Luigi réveillait ses instincts de prédateur. Car il aimait jouer, Evroult. La raison, sans aucun doute, à ce qu'il se fourre toujours dans des situations impossibles.

    Si Solange n'avait pas été aussi bavarde, il serait resté tranquille, aurait sans doute fait deux ou trois jours de plus ici, avant de filer sans un mot, dans un souffle, s'épuiser contre des hanches plus généreuses, du moins par les rentes qu'elles lui versaient. Si Solange n'avait pas été aussi bavarde, Luigi aurait sans aucun doute finit par l'apprécier. Au lieu de ça, il écoutait Solange quand ses lèvres encore trempaient dans sa coupe, un sourcil légèrement arqué témoignant de l'intérêt qu'elle avait su éveiller. Pire encore, il vint poser sa propre coupe sur le plateau que Solange préparait, glissa le tonnelet de rhum sous son bras, & saisit le plateau de l'autre main, tout ça après avoir déposé un baiser chaste sur les lippes agitées de la rousse pour la faire taire tout à fait.

    - N'en fais pas tant, j'y vais.
    La prochaine fois que tu voudras déléguer le service, raccourci, ma flamboyante.


    Déjà pourtant, en avançant vers le salon bleu, Evroult allongea sans le vouloir sa démarche, assouplit sa posture, adopta l'allure qui lui avait voulu le surnom de Chasseur. Il déposa sa cargaison, le plateau sur un guéridon, le tonnelet aux pieds de l'étrangère. Il lui servi son rhum dans un gobelet d'étain, n'attendit pas plus pour préparer la pipe longue & enflammer le chanvre, tirant à peine pour attiser les boulettes avant de la tendre à la bridée.
    Alors, seulement, il s'affala sur un fauteuil près d'elle, colora ses lèvres d'une gorgée de vin, & finit par déclarer :

    - Ce n'est pas un endroit pour s'alanguir seule, dit-on. Permettez que je me joigne à vous ? En toute innocence, si vous le souhaitez.

    La dernière phrase fut ponctuée d'un pli à la commissure de ses lèvres, comme une blague pour lui-même, alors qu'il se voyait assis en face d'elle, pieds nus, les braies ne tenant que par un nœud léger, la chemise ouverte sur un torse finement sculpté sur lequel quelques jeunes & rares poils se battaient en duel. Il n'avait, certes, pas la virilité des trentenaires, mais dégageait tant d'impudicité qu'il hurlait à l'abus.
    Fourbe était l'Evroult. Il prônait l'abstinence quand de tout son corps & son regard charbonneux il invitait à la débauche.
Maryah



Le salon bleu. Petite pièce où crépite un bon feu, qui permet à Maryah de revenir progressivement au climat angevin, après avoir traversé les Enfers juste à côté. Le mobilier est sobre : une banquette rustique, deux fauteuils, un troisième à bascule près de l'âtre, un lectrin domestique portant un ouvrage fait d'images suggestives, un bureau d'explorateur avec une longue vue pour les plus aventuriers, et un paravent pour les plus ... voyeurs. Là juste à côté, dans le coin opposé à l'entrée, une commode rustique également où le matériel pour les soins corporels trône. La Bridée en profite pour aller laver ses mains huilées et rafraichir son corps. L'eau fraiche la saisit au sortir d'un instant onirique : que peut il bien se passer dans la pièce d'à côté ?

La décoration quant à elle est cossue et d'une dominante bleue, qui a valu son nom à l'alcôve : couverture, tapis épais, rideau lourd, toute la pièce semble comme drapée d'une intense couleur bleue. Couleur froide qui encourage l'Exotique à sortir de sa torpeur et reprendre ses esprits.
La cape de l'armée est jetée négligemment sur le paravent, la petite étoffe noire enroulée à son cou est resserrée, son regard embrasse la pièce vide. La banquette ... dormir, serait une excellente idée. Mais sans opium, cela risque d'être des plus compliqués. Elle attrape la brosse sur la commode, histoire de se donner quelque chose à faire et va s'asseoir ... s'avachir plutôt, sur la banquette, coiffant sa longue chevelure noire.

L'espace d'un instant, elle a l'impression d'être la Courtisane. L'Exotique. Celle qui attend l'arrivée du Duc. Celle qui offrira ses charmes pour une somme coquette. Si quelqu'un entrait icy, il pourrait le penser. ... Un inconnu vous offre des fleurs. Et vous fait vibrer jusqu'au petit jour ... Ses joues s'empourprent à cette pensée. Dire que son compagnon l'attend là bas, à l'auberge des vrais saigneurs, et qu'elle est là ... au lupanar. Se plaisant à rêver d'inconnus, de séduction, de défis à relever, de nouvelles peaux à conquérir, de nouveaux charmes à élever ... Fantastiques. Fantasmagoriques. Maryah et les rêves éveillés ...

Et comme par Magie, la trame se déroule devant ses yeux. Il entre. Discret. Parfait. Souple. Félin. Elle le scrute, décortiquant ses moindres mouvements. Prompt. Habile. Ses longs doigts qu'elle imagine agiles caressent l'étain et font pleuvoir des larmes de rhum, ces gouttes qui vont rouler l'instant plus tard dans sa bouche. Son regard s'embrase. L'innocence. L'indifférence. La constance. A t-il conscience des ombres qu'il fait naitre à ses yeux ? Elle déglutit. Il referme ses lèvres sur l'objet, ses joues se creusent pour aspirer, et les lippes s'arrondissent pour en laisser sortir une volute de fumée. Elle frissonne. Il porte la pipe aux lèvres épicées et elle l'aspire doucement, il l'inspire. Elle ...

Elle comprend qu'en fait, il ne s'agit pas d'un rêve. Il est bel et bien là. Il est beau certes. Il est prostitué surtout. Elle secoue la tête et avale sans grimacer une longue gorgée de rhum. Bon sang ... quelle jeunesse et quelle sensualité !
Elle l'observe s'installer, le remerciant d'un doux regard. Elle adore les hommes qui savent s'occuper des femmes. Il est charmant, serviable, dévoué ... Par tous les dieux ! Le démoniaque Luigi contre l'angélique .... Ha. Elle ignore encore son nom. L'Angélique. L'herbe aux Anges, aux mille miracles : elle aidait dans les mauvaises digestions, mais aussi à trouver le sommeil, on lui prêtait des vertus sédative, anxiolytique, et on en accrochait souvent une poignée au cou des enfants pour éloigner les esprits maléfiques.

Sourire. Tendre. Un Ange qu'elle détaille méticuleusement. La force d'un homme, la fragilité d'un enfant, la magie d'un ange. Rêve ou réalité ?


- Ce n'est pas un endroit pour s'alanguir seule, dit-on. Permettez que je me joigne à vous ? En toute innocence, si vous le souhaitez.
- Je permets.


Elle fume légèrement, satisfaite par la vue qu'il lui offre. Son regard glisse sur son torse imberbe, sa peau si nette qu'elle invite au toucher, les braies à peine tenues qu'il serait si aisée de les faire tomber. Grande inspiration, suivit d'une gorgée de rhum pour faire passer le tout. Cet homme la déstabilise, c'est assez rare.
Il est tout le contraire de ceux qu'elle a aimé, un jour, une nuit, une semaine. Elle est habituée aux mercenaires, à la peau rongée de coups et de bleus à l'âme, de cicatrices, et transpirant d'assurance, d'orgueil, de désir bestial.

Lui, il se contente d'être là. Attentivement. Admirablement. simplement. Sans ravage, sans passion, sans contrôle, sans détermination, sans intention de l'impressionner, de la faire rire, ou la séduire.
Hoooo ...
C'est étrange ... sensation inconnue pour cet inconnu.
Un inconnu vous offre du repos.
Cest lui.

Elle reste un long moment à s'oublier dans son intérêt pour lui. Elle boit, elle fume, elle ne le quitte pas des yeux. Il est son Angélique. Son sédatif. Elle voudrait se lever, le rejoindre, et s'endormir tout contre lui. Sa blancheur, sa pureté, son innocence, effacerait peut-être tous ces doutes et ennuis du moment.
Merdeeeeeeeeeee ...
Il faut qu'elle redescende sur Terre, icy, là au boudoir de soi. Le Chanvre et le Rhum n'y contribuent peut être pas. Lui non plus. Surtout pas. Il faut qu'elle revienne à elle, qu'elle reprenne ses esprits, qu'elle lui parle ... qu'elle dise quelque chose ...
Briser ce rêve vaporeux et alcooleux ...
Ou le nourrir encore un peu plus ...


C'est quoi votre petit nom ? ça fait longtemps qu'vous travaillez icy ? Je ne vous y ai jamais vu ...

Merde ... Elle est troublée, elle ne sait pas quoi dire, et elle lui pose des questions digne d'un interrogatoire à l'armée : nom, âge, village d'origine, mensurations, rations, armes en votre possession ...
Elle va finir aussi ennuyeuse que les piliers de comptoirs, complètement paumés et sans vie.

En même temps, faire la conversation à un prostitué, vous avouerez que c'est pas commun !

Elle doit rajouter quelque chose ... mais la seule chose qui lui vient, et qu'elle a vraiment envie d'entendre, se noyant un instant dans l'espace du bel éphèbe :


Alors épuisante cette nuit ? J'imagine que ça ne doit pas toujours être simple de s'occuper des envies des autres ...

" J'imagine " ... bah tient, bonne blague. Et un instant son esprit s'évade du côté de Niallan et des salons de la Rose Pourpre.
Pourtant son regard reste accroché à l'homme de la nuit. Entrer en lui, et le temps de son récit, oubliez la guerre, ses combattants blessés, ses âmes esseulées & écorchées ...

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Evroult.

    ***
[SALON BLEU]

    Chasser était un art compliqué. Sans y exceller tout à fait, Evroult avait l'avantage d'être un chasseur né qui sans même le vouloir attirait les proies les plus difficiles dans des filets de sensualité. Il continuait à apprendre, pourtant, & s’enorgueillissait de savoir s'adapter aux moindres aspérités de ses conquêtes. C'était en fait une aptitude que chaque courtisan digne de ce nom se devait de maîtriser. Qu'elle glisse une mèche derrière son oreille & il l'imiterait. Qu'elle pousse un soupir profond & il ferait de même. Qu'elle détourne le regard une fois & tel son miroir il oublierait de poser les yeux sur elle.

    Mais avant même de s'adapter, ce qui sous-entendait qu'elle avait déjà posé la première patte dans le filet, il se devait de la laisser approcher. Se laisser observer, détailler, analyser, sans la brusquer, sans l'inviter, sans intérêt. Il se laissa disséquer du regard, un instant encore plus intéressé par le contenu de sa coupe qui finissait d'effacer l'âpreté que sa dernière passe lui avait laissé sur la langue. Il prit le temps pour répondre, entrouvrit les lèvres pour laisser passer un son, qui s'effaça alors qu'elle tentait de rattraper son enchaînement de questions. La bouche resta ouverte, accueillit une gorgée de rouge, se referma en se plissant d'un sourire de circonstance. Il n'allait tout de même pas la laisser continuer à se noyer dans son trouble.

    - Le plus compliqué... c'est de les empêcher de s'occuper des nôtres.


    Il avait gravé un sourire au coin de ses lèvres dont il n'arrivait plus à se séparer. Il releva la tête vers elle, se perdant volontairement dans la profondeur de ce regard étranger. Il ne se choquait plus des peaux de bronze & des accents exotiques tant son métier l'avait rodé à la diversité. Il ne s'intéressait, à l'instant, qu'à sa place dans la société angevine & à la longueur de son bras. Mais s'il fallait en passer par là... il pouvait bien être le jeune fou bandant au caramel de sa peau, tout comme l'indifférent blasé qui ne verrait même pas qu'elle pourrait être esclave. Il pouvait bien être ce qu'elle voulait qu'il soit.

    - Parfois de les faire jouir.


    Le sourire l'avait quitté alors qu'il finissait sa coupe. Il hésita à se lever pour faire signe à Solange, derrière la porte, qu'il était à sec, ou à piquer à Maryah un peu de ce rhum beaucoup trop fort pour lui. Evroult ne buvait pas, ou plutôt, buvait peu. Trop habitué à ne faire qu'accompagner, il ne s'était en vérité jamais pris de cuite & se laissait tourner la tête à la moindre bolée de bière avalée sans repas. Se redressant sur son fauteuil, il finit par déposer la coupe vide sur le plateau, & saisit deux grains de raisins.

    - Evroult. Je ne suis que de passage.
    Le premier éclata sous la dent blanche & saine d'un Evroult qui s'était ostensiblement rapproché de la Panthère.
    - Et vous ? Quelle folie vous amène à vous épuiser sans goûter aux spécialités de la Mathilde ?

    Il le savait, tant Luigi l'avait nargué à propos de ce contrat juteux. Mais où était le jeu, si toutes les cartes déjà devaient être dévoilées ? Le second vint rejoindre la lippe tendre de la bridée, l'empêchant de tirer à nouveau sur la pipe pour accueillir la rondeur de la chair sucrée. Il forçait l'intimité, d'un coup, sans prévenir, pour tester les réactions comme on tente un premier pas vers la proie tendue. Et quand il retira son doigt, glissant chair contre chair, il se surprit à se dire qu'elle ferait une sublime courtisane. Car il n'aurait jamais osé penser qu'elle aurait pu l'être dans une de ses vies passées, non. Evroult n'était pas si bon à l'analyse des autres.
Maryah
    Allume-moi, allume-moi,
    Fais moi venir entre les lèvres
    Et puis brûler à planer jusqu'à mourir dans la bouche,
    Jusqu'à mourir dans la bouche, jusqu'à mourir, jusqu'à mourir ...


[SALON BLEU]


Non, mais ... il l'allumait carrément là ?!
Le petit sourire au coin de ses lippes pétillantes, le regard impassible, les lèvres qui s'arrondissent pour prononcer le mot "jouir", le corps souple qui s'arque vers le plateau, la main de velours qui repose le godet, le grain de raisin qui jute sous ses dents saines, ...
Elle vient de comprendre l'expression " donner le bon dieu sans confession ". Elle voudrait que cet homme dans la fougue de l'âge baise sur sa tombe, si elle devait tomber au combat. C'est sûr, la tentation qu'il fait naitre lui ferait rouvrir les yeux.


- Evroult. Je ne suis que de passage. Et vous ? Quelle folie vous amène à vous épuiser sans goûter aux spécialités de la Mathilde ?


Son corps se tend, bouillonne ; l'abstinence, depuis la blessure, ne l'aide pas. Bon sang, sait-il comme il est craquant là ? Plus encore que ce grain de raisin dont elle aimerait boire le jus à même la bouche ... Elle se sent fébrile, elle tente de se convaincre qu'elle ne va pas craquer, qu'Arael l'attend là bas sur la couche de l'auberge des vrais saigneurs, qu'elle n'a pas besoin de se faire un jeune, de se payer un courtisan, de céder à ce corps qui refuse de guérir ...
L'alcool ingurgité toute la soirée, le chanvre, les sens aiguisés par le massage, ... n'aident en rien à garder la tête froide. Elle pourrait craquer .... elle va craquer ...

Mais ça c'était avant ...
Avant le geste malheureux, avant que son pouls ne s'emballe, avant que sa méfiance reprenne le dessus, avant que sa tête prenne malencontreusement le dessus sur son corps brûlant.
La pipe glisse, laissant le passage au grain de raisin ... et le doigt blanc glisse sur les lèvres brunes. Contact. Réflexe. L'instant d'avant le doigt effleurait sa lèvre inférieure, l'instant d'après, les dents de la féline se referment autour du dit doigt.
Mauvais réflexe. Mauvaise cliente. Elle l'a mordu ! Et là, c'est le drame !


Han ... pardon ... pardon ...
Maryah percute. Quelle conne ! ça a été plus fort qu'elle, elle était tendue, elle ne s'y attendait pas, elle s'est défendue comme si un royaliste était venu l'attraper par le cou. Quelle imbécile ! Lâcher prise ... se défaire de toute tension ... une soirée loin des combats ! Bon sang, mais où avait-elle la tête ?!
Elle se jette à ses pieds, un mouchoir en tissu extirpé à la hâte de sa cape, et entoure le doigt blessé, relevant ses yeux vers lui.

Je suis désolée Evroult, désolée vraiment ... j'sais pas c'qui m'a pris ... j'm'y attendais pas ... enfin votre avancée ... votre approche ... arf ....

Ridicule. Dangereuse. Ingérable. C'est n'importe quoi. Elle se lève, encore désolée. Avale une gorgée de rhum, lui en sert un fond, lui tend le godet, ne sachant quoi faire pour s'excuser de ce geste.
Peut être pouvait-elle reprendre la conversation comme si de rien était, comme si elle n'avait pas brisé le charme. Elle s'éloigne de lui, honteuse de son comportement, se méfiant même d'elle même, gagnant le bureau du fond et s'y appuyant :


Pardon ... un triste réflexe ...
Un petit mensonge, ça paie pas de mine et de toute façon rien ne sortirait d'icy. Et puis, icy, elle avait bien le droit de se faire passer pour qui elle voulait ... elle le faisait déjà ailleurs.

Vous le garderez pour vous, je sais qu'icy les secrets sont bien gardés. Je ... je suis Capitaine, icy, en Anjou. Je mène des hommes au combat, parfois à la mort. Je m'interdis ... tout ... contact, vous voyez. C'est une ... discipline. Un sens moral. Et une habitude.
J'emmène facilement mes soldats au Boudoir pour le repos du guerrier, ça fait passer l'attente des combats, mais je m'accorde rarement cela. Vous comprenez, j'ai l'habitude de tout garder sous contrôle.
Mais mes hommes sont ravis de venir icelieu, Mathilde leur donne entière satisfaction et ils sont d'autant plus déterminés aux combats.

Et euh ... vous ... vot'doigt ça va ?
qu'est c'qui vous a amené à choisir cette vie ?

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Evroult.

    ***
[SALON BLEU]

    Non, Evroult n'était pas bon à l'analyse des autres. Et quand bien même l'aurait-il été, jamais, ô grand jamais, il n'aurait pu imaginer une telle chose. Il s'attendait à beaucoup de choses, pourtant. Qu'elle succombe, déjà, tant son regard suait de désir pour lui. Qu'elle le repousse, peut-être, par cette droiture qu'il avait cru cerner & qui ne devait finalement pas la définir. Qu'elle rougisse, qu'elle s'offusque, qu'elle se lève royale & lui donne congé, peut-être même qu'elle le gifle parce qu'il serait allé trop vite. Et il aurait approuvé chacun de ces scenarii sans se vexer ni s'étonner, tant il était rodé.

    - PUTAIN DE T...

    Il s'était reculé sur son siège, manquant d'en tomber en arrière, les yeux écarquillés sur son doigt qui portait tout à coup la marque des crocs de la Panthère. Les lippes closes pour ne pas prononcer ce qui dépasserait sa pensée - ou pas vraiment au vu de la scène -, il la laissa cacher le crime d'un mouchoir sorti de nulle part sans rien ajouter à son cri de surprise. Il avait eu si peur de la violence de son geste qu'il levait les yeux sur elle sans vraiment la voir, tentant de comprendre comment il avait pu se laisser avoir aussi vite.

    Oh, il arrivait souvent qu'Evroult soit chasseur inattentif. Il se laissait duper par les courbes alléchantes, l'excitation de l'interdit & du risque de se faire prendre, son côté joueur prenant trop souvent le pas sur une prudence qui n'avait rien de naturel chez lui. De là naissait un don étonnant à se foutre dans toute situation impossible.

    Improbable. Elle était imprévisible. La douleur qui vrillait son pouce lui réchauffait les joues, les mots qu'elle déversait pour tenter de se rattraper effleuraient ses oreilles sans s'y accrocher, & Evroult là dedans observait celle qui n'était pas sa cliente & qui, par ce fait peut-être, semblait tout à coup bien plus dangereuse. Un soupir franchit ses lèvres alors qu'il se demandait un instant ce qu'il fichait encore là.

    - Je ... je suis Capitaine, icy, en Anjou.


    Voilà donc la raison. Il secoua la tête, se passa une dextre en parfait état sur le visage, tentant d'effacer la retenue crispée imprimée sur ses traits. Il n'était pas désespéré au point de se jeter les yeux fermés dans la gueule du loup, mais il lui fallait reconnaître que prendre congé ici-même rendrait son intégration dans la société angevine beaucoup plus compliquée. Et bien qu'assez mal à l'aise, il finit par desceller ses lèvres pour affirmer, d'une voix douce & un peu rauque :

    - Ce n'est rien.

    Il n'en était pas convaincu, mais d'un sourire qu'il voulait franc, après avoir avalé d'une traite le fond de rhum qu'elle lui avait servi, il se redressa, jeta un coup d’œil rapide à son pouce rougi aux marques incrustées avant de balayer d'un revers de la même main les inquiétudes de Maryah. Lentement, comme s'il attendait son approbation, il avança jusqu'au bureau, hésita à glisser une main sur la joue de la panthère avant de se raviser & de s'appuyer à son tour contre le meuble. Il n'allait pas se faire avoir deux fois, songeait-il, & se contenta alors de lui prouver qu'elle ne l'avait pas échaudé & qu'il était prêt, malgré tout, à continuer l'échange.

    - Vous... Vous devez en dérouter plus un, si vous les croquez tous ainsi.
    Il l'observait du coin de l’œil, guettant ses réactions par précaution.
    - Qu'importe, ce n'est rien. Pour vous répondre, & bien... Vous allez trouver ça drôle...

    Le bureau fut abandonné un instant, le temps qu'il lui fallu pour aller servir à nouveau du rhum, & il revint prendre place aussi vite. Une gorgée lui brûla la gorge avant qu'il ne rende le gobelet d'étain à la buveuse, & se raclant la gorge, il annonça :

    - C'est vous voir perdre contrôle qui m'a convaincu d'exercer.
    Je veux dire... Je suis fils de catin. J'étais prédestiné. Mais vos spasmes... J'aime vous voir exulter.


    Sans pudeur, il appuya ses mots d'un regard pétillant, laissant le trouble quant à ce qu'il désignait par son vous. La morsure ? Oubliée. Evroult était à nouveau en chasse. Enfin... Un peu plus prudemment, tout de même.
Maryah
Capitaine d'Anjou ? Voyez-vous ? Rien que ça ... Son esprit tordu n'avait pas pu trouver autre chose ! Capitaine ! Enfin, vu le coût qu'elle devrait payer pour cette nuit, il lui faudrait au moins ça ... des bourses de Capitaine.
Il n'y avait plus qu'à rendre tout ça crédible, repousser la fatigue, ne pas se laisser subjuguer par le jeune courtisan, craquant à souhait ... frais comme jamais.

Alors qu'elle le mordait, il pardonnait. Alors qu'elle s'éloignait, il se rapprochait. Il avait dit qu'il était fatigué, et pourtant il se tenait là à ses côtés ... ... S'ennuyait-il ? ou avait-il envie d'elle comme un homme "normal" ? ou avait-il juste envie d'arrondir sa fin de mois ? ou ... Mathilde l'avait-elle missionné ?

Elle se tenait juste là, les fesses appuyées contre le bureau, simplement vêtue de l'étoffe enroulée autour de son cou, ... et lui, il était juste là ... à ses côtés, appétissant et compatissant, oubliant la morsure. Elle tourna le visage vers lui, et savoura la vue quand il répondit :


- Vous... Vous devez en dérouter plus un, si vous les croquez tous ainsi.
Qu'importe, ce n'est rien. Pour vous répondre, & bien... Vous allez trouver ça drôle...


Son regard avait glissé de ses yeux provoquants, à ses lèvres gourmandes, jusqu'à son torse finement sculpté. Nerveusement, Maryah avait repoussé une mèche derrière son oreille. Ultime tentative d'échapper à ce charme nouveau :
- J'ai un compagnon ... je ne croque personne. Je me réserve pour les armées Royalistes.
Réponse tout à fait bête. Inutile. Parce que le désir était bien là, malgré Arael, malgré sa blessure à la cuisse gauche, malgré tout en fait ... Et si Ober ne se dépêchait pas, Maryah sentait le combat déjà perdu.
La phrase qu'il articula en la regardant sans ciller, finit de l'achever :

- C'est vous voir perdre contrôle qui m'a convaincu d'exercer.
Je veux dire... Je suis fils de catin. J'étais prédestiné. Mais vos spasmes... J'aime vous voir exulter.


La Bridée s'empourpra, et il lui sembla que la rougeur l'avait recouverte de la voûte plantaire jusqu'à la moindre implantation de cheveux. Son regard se figea sur ses lèvres lorsqu'il articula : " contrôle " et " exulter ". Sa poitrine se souleva plus vite. Un feu s'embrasa dans son bas ventre.
L'instant d'après, elle était contre lui, le poussant contre le bureau, volant à ses lèvres un baiser passionné, enflammé, réclamant un butin qu'elle ne pouvait s'offrir. L'Angelot, ou plutôt le diablotin, venait de lui arracher ses dernières résistances.
Glissant une main à sa nuque, une dans ses cheveux, ses lèvres se firent plus insistantes, sa langue avide de nouveaux territoires.

Ses contrastes l'excitaient, l'interrogeaient, et la désarçonnaient. Elle aimait la fantaisie, les originaux, les différents. Adieu les platitudes et les bonnes manières. Sa fraicheur, sa spontanéité, et cette attitude presque indifférente ... tout ça lui semblait si simple, si rare, qu'elle avait cédé à cet ardent baiser. Ses mains avaient envie d'en découvrir plus, son ventre chaud s'était collé à lui d'une façon bien indécente, et il lui semblait que ses pensées enfin trouvaient à se taire.

Reprenant son souffle, c'est là qu'elle se rappela qu'elle n'aurait jamais du venir dans cet endroit, que quand on était instable on ne jouait pas avec le feu, et que même blessée par l'ennemi elle avait des envies charnelles, et que même blessée par la vie il y avait toujours des gens pour faire tout basculer.

D'une voix rauque et essoufflée, elle grinça entre leurs lèvres ... :

- Bon sang Evroult, je n'ai pas l'droit ...
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