Melissandre_malemort Mélissandre connaissait Aeglos depuis de nombreuses années, sans que jamais elle ne l'ai vu dans une telle colère. L'angle blond s'était transfiguré. Il rappelait un peu la bête sauvage de Beaumont, dans l'éclat turquoise de ses prunelles. Il n'y avait plus rien du duc, les traits de son visage parfait se déformait, ses muscles se tendaient jusqu'à étirer la peau, ses tendons saillaient sur sa gorge, et elle n'eu que le prime réflexe de cacher son visage quand dans un hurlement l'Aumale dégainait et commençait à tout détruire autour de lui, hachant menu tout ce qui l'entourait avec des rugissements primaires empreint de quelque chose qui oscillait entre la rage et la souffrance.
Une autre femme se serait enfuie. Elle aurait enjambé les meubles renversés, aurait traversé l'Hotel en courant et ne se serait jamais retourné, retrouvant la torpeur réconfortante du Louvre ou il était si aisé de croire que le monde ne se distinguait qu'en noir et blanc, exempt de toutes nuances grisâtres. Les hommes étaient bons ou mauvais, sages ou cruels, sains d'esprit ou complètement fou. L'entre deux n'existait pas. La noblesse se voulait péremptoire par définition, et Mélissandre était née dans la soie, éduquée dans le culte du paraitre, sculptée pour une vie de volupté.
Pour autant, jamais elle n'avait trouvé sa place dans ce monde là, fuyant les jugements à l'emporte pièce pour se forger son propre avis sur toutes choses. Elle jouissait bien sur de l'intransigeance de ses quinze ans, mais essayait de toutes ses forces de saisir les situations dans son ensemble. Elle pouvait donc assister à lintolérable chagrin d'amour d'un homme qu'elle aimait depuis si longtemps sans se sentir blesser dans son amour propre. Ce qu'elle ressentait n'était qu'une profonde compassion. Plus que tout au monde, la princesse aurait voulu pouvoir s'emparer du tourment du duc pour se l'approprier et le soulager. Aussi, lorsque la lame heurta le sol, n'hésita t'elle pas à se précipiter vers lui pour l'entourer de ses petits bras. Ce dernier sursauta, ne s'attendant probablement pas à ce qu'elle soit encore présente.
Même prostré sur le sol, Aeglos était massif, et elle ressemblait presque à une enfant quand elle le blottie contre sa poitrine en chuchotant des paroles de réconfort, les doigts enfouis dans sa crinière blonde. Instinctivement, elle oscillait d'avant en arrière pour le bercer, chassant de son front quelques mèches collées par les larmes et la sueur, aussi calme et impassible que si elle avait eu trois fois son âge et qu'elle ne venait pas d'assister à un déferlement de violence qui aurait tordu les tripes de plus aguerrie.
C'était Aeglos d'Orkney Bressay, que diable! Même ivre de souffrance, il aurait été incapable de lui faire le moindre mal. En l'instant, il n'était qu'un homme pétri de souffrance, et ses lèvres glissèrent dans ses cheveux.
- Shhh...