Un pli était parvenu entre ses doigts longilignes. Un vélin de qualité, mais surtout, un sceau qu'elle reconnaîtrait parmi des millions. Et la légende ne faisait que confirmer sa pensée. Fut un temps c'était, pour le meilleur, pour le pire. Que pouvait il bien lui vouloir ? Elle qui l'avait à contre coeur, laissé s'envoler loin d'elle, sans avoir en réalité aucun choix, cet être qui lui était si cher. Il lui avait brisé l'âme, et l'avait laissé ainsi, sur le carreau, partant avec une blonde possessive parano, qui avait décrété qu'il était son jouet personnel et que personne d'autre n'avait le droit de l'approcher. Et lui, amoureux, approuvait. Il tirait un trait sur un passé si fort et si long, revenait sur une promesse, pour... cette femme.
Mathilde n'avait jamais compris, et elle ne comprendrait jamais. Car si le coeur à ses raisons, que la raison ne connaît pas, certaines choses sont trop marquantes pour les laisser se produire. Et, ce n'est pas comme si il ne la connaissait pas sur le bout des doigts pour savoir l'épave qu'il avait laissé derrière lui. Mais, il ne s'était même pas retourné. Il avait prononcé des mots, qui étaient rentrés dans l'oreille de Mathilde comme on se dirige dans un désert aride absolu. Des paroles, qui n'avaient trouvé aucune vie pour les entendre, aucune âme pour les écouter. Un écho qui avait retenti dans le néant absolu.
"On sera toujours ami"
[...]
Comme si, il pouvait encore se permettre le droit de choisir pour elle, si ils seraient amis ou pas dans l'avenir. Elle ne le voulait plus comme ami. Même plus comme ombre dans une vie lointaine future. Il l'avait foudroyé, purement et simplement. Et elle avait été tellement ravagé par ses décisions, et son attitude envers elle, qu'elle n'avait même pas trouvé la force de le retenir.
Ce soir là, elle s'était refermée un peu plus dans son cocon, trouvant refuge auprès des gens qu'elle aimaient, et qui, ne l'avaient pas trahi. Son époux, ses enfants, et, à l'époque, sa chère et irremplaçable, Missanasthasia.
Le temps s'était écoulé, elle avait appris qu'il était devenu comte, puis qu'il s'était marié avec cette même femme pour laquelle Mathilde n'avait aucune estime, que se soit sur sa façon de s'accaparer les gens, que celle de s'engager dans des responsabilités de travail qu'elle n'assumait même pas. Bref, une vicomtesse insignifiante aux yeux de la brune.
Il y a peu de temps, elle avait appris, le divorce. Elle était tombée par hasard dessus, ou on le lui avait confirmé, quand un détail l'avait fait tiquer sur le coup. Etait ce les armes de Goddefroy qui étaient différentes ? une annonce qu'elle avait pu lire en bibliothèque héraldique en cherchant une toute autre chose ? elle ne s'en rappelait plus. La nouvelle avait glissé sur elle comme une goutte d'eau de pluie qui vient lamentablement s'écraser sur le sol, et que le soleil s'empresser de sécher jusqu'à la moelle jusqu'à ce qu'elle disparaisse.
Oui, c'était tout ce que lui inspirait à présent, la vie du de Silly.
Dans ce cas, pourquoi faisait elle tant de manière à ouvrir ce parchemin, si elle s'en fichait, n'est ce pas ? Car hélas, pour son plus grand regret, malgré tous les efforts qu'elle s'évertuait à faire pour le sortir de son esprit, après l'avoir sorti de sa vie, elle n'y parvenait pas. Il y a des personnes qui entrent dans votre vie, avec qui vous partagez des moments plus intenses que puissants, plus secrets qu'interdits, plus insensés que folie, et pourtant, bien réels. Un ange et une fleur devant la chancellerie du Périgord Angoumois, liés à jamais au fer rouge, par l'inavouable.
Oui, il était tout ça. Et elle aurait beau chercher tous les subterfuges possibles et imaginables pour qu'il en soit autrement, changer le passé était impossible.
Elle soupira, ouvrant le courrier avec un regard lointain. Ses aigues marines se baladaient sur la lettre, alors que son esprit n'était pas là. Mais à mesure des lignes, ce dernier fut rappelé à l'ordre par un intérêt plus important que d'habitude.
La première chose, était que pour une fois, ce n'était pas une nouvelle dont elle ne voulait rien savoir, puisque c'était une invitation personnelle. Vu que, de toute évidence, elle n'avait pas été conviée au premier mariage. Ou alors, elle ne s'y était pas rendu. Pire encore, elle ne s'en souvenait pas.
L'invitation qu'il lui envoya la toucha. Et, quand elle lu le nom de la future épouse, elle se réjouit ! Car, même si Goddefroy ne le savait probablement pas, la duchesse elle, savait qui était Alvira. Elle ne la connaissait pas personnellement, mais c'était une femme qui avait travaillé avec son père, le duc Estalabou en gascogne et qui se trouvait faire parti de la famille de Riwenn, alias Comminges, quand Mathilde travaillait avec. Et encore bien d'autres choses que la duchesse savait de la baronne. Bref ! une union qu'elle approuvait à deux cent pour cent, quand bien même, elle n'avait pas son mot à dire.
Ah !!! ba il était temps ! Déjà, qu'il l'invite quelque part. De deux, qu'il ai une épouse qu'on peut respecter pour ses valeurs. C'était dit, elle irait. Il ne faudrait pas lui adresser la parole car elle serait un brin irritable, tant qu'elle n'aurait pas clairement retourné une violente baffe à Goddefroy, qui l'avait bien cherché. Mais sinon, elle en serait.
Elle se prépara donc, pris quelques affaires, une jolie tenue pour ne pas paraître trop vieille et contrariée, et s'en alla en direction de l'Eglise Saint Martin, au domaine des Castel Villar.
Et alors, qu'elle pensait se mettre juste dans un coin, à fixer le marié de toute la cérémonie pour lui mettre la pression, mais d'adorer déjà intérieurement la nouvelle dame de Silly, il n'en fut rien.
Car il est des personnes, que Mathilde est TOUJOURS, heureuse de voir. Oui oui, des êtres vivants humains étaient capables d'une telle prouesse. Des demi-dieux assurément, mais ils existaient bel et bien. Et parmi ces personnes, se trouvaient la sublime duchesse Laure de Troy ! Une pure beauté, d'une gentillesse divine, qui avait toujours enjolivé la vie de la brune, à chaque instant passé à ses côtés. C'est donc, non sans un sourire lumineux, que la duchesse profita de la voir pour aller la saluer. Mais comme cette dernière était bien entourée de toute sa famille, Mathilde les salua également, mais s'éclipsa rapidement, pas très à l'aise avec les groupes en trop grand nombre.
La seconde personne, qui attirait irrésistiblement sa grâce, et qui semblait très discrètement en recueil dans un coin, c'était Leanore, la nouvelle comtesse de Rodelle, et femme de son éternel ami, Arnaud. C'est donc en douceur, respectant le calme et la paix qui se dégageait de la baronne de Bréthencourt, qu'elle alla se mettre à côté d'elle, dans un silence absolu. Elle attendit que celle ci relève la tête, pour simplement la saluer d'un sourire chaleureux, aussi doux que la chaleur d'une source chaude naturelle.
Elle fini par apercevoir le marié, qui, avec quelques années de plus, n'avait pas vraiment changé. Elle ne savait pas si lui la verrait avec tout ce monde, alors elle demeura dans sa position secrète, près de Leanore.
Et ce fut d'ailleurs à cet instant, qu'elle vit parmi la foule de convives, le prélat ! Ce même religieux qui la rendait complètement folle avec sa façon bien à lui de porter sa foi. Elle si coincé sur le sujet, l'adorait, mais n'adhérait toujours pas, pour le moment en tout cas, à sa façon très humaine, d'enchaîner les paroles déplacées. Elle lui fit un signe de tête de loin, laissant libre choix à ce dernier de la rejoindre, auprès de la comtesse de Rodelle.
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Blason en réfection - EN DEUIL ROYAL