Je restais debout sur mes quatre pattes tel un chef, à observer le jeune loup. Imprudent tel un jeune loup. Cette odeur lorsquil revient vers nous. Cette odeur je la reconnais aussi, Vieux loup nous avait raconté et il mavait montré le morceau de tissu quil gardait comme un trésor de chasse.
Je fixais aussi le petit sac du petit homme. Et je me souviens de ce que Vieux loup nous avait conté.
La légende du Vieux Loup blanc.
Chaque décennie écoulée, les loups, uniquement les chefs de clan et quelques élus entreprenaient le grand voyage.
De toutes les régions du Nord de l'hémisphère, ils convergeaient en un même lieu,
une vaste clairière au centre d'une forêt profonde et noire, quelque part dans un pays que l'on appellera plus tard la France.
Certains venaient de très loin, c'était le grand rassemblement au cours duquel les loups mâles et femelles encore solitaires allaient sceller une nouvelle alliance, ils venaient là trouver le compagnon d'une vie.
Les chefs partageaient leur savoir et les jeunes bâtissaient leur descendance.
Cette année-là, Loup blanc, chef de clan encore solitaire venait pour y trouver une compagne, chemin faisant il pensait au lourd secret qui était le sien.
Loup blanc jeune venait y faire alliance, il l'espérait depuis longtemps mais depuis l'été dernier, il était habité par la peur, son chemin avait croisé celui d'un homme blessé,
au lieu de le dénoncer à la meute comme il se doit, il l'avait caché, recouvert de feuilles et de branchages et l'avait nourri jusqu'à ce qu'il puisse se débrouiller seul. L'homme n'avait jamais manifesté la moindre crainte face au loup, au contraire il aimait à lui parler, à le caresser, il lui faisait des confidences comme il l'aurait fait à un de ses semblables.
Il rêvait d'un monde où les hommes et les loups feraient la paix, un monde où la haine de l'autre n'existerait plus.
Un soir alors que Loup Blanc venait le retrouver, il était parti en laissant sur le sol son écharpe, un peu de son odeur qu'il prit plaisir à renifler et quil ramena dans sa tanière.
Souvent, depuis lors, il venait s'allonger au pied de l'arbre qui avait été le témoin de leur amitié.
Quelques mois plus tard, au cours d'une chasse, il avait été traqué par des hommes voulant le tuer. Une flèche lavait blessé au flanc. Au moment où il avait voulu se mettre à labri, il avait découvert un très jeune enfant évanoui dans la neige fraîche.
Il s'était approché de lui doucement, avec méfiance comme on lui avait toujours appris, de longues minutes s'étaient écoulées ainsi, quand soudainement le petit enfant bougea, il entrouvrit les yeux et loin d'être terrifié par la vue du loup, il lui sourit.
Il tendit une main et caressa la fourrure de l'animal, celui-ci accueillit cette marque d'affection d'abord avec surprise puis bientôt avec plaisir, lenfant portait sur lui lodeur de lhomme, lhomme blessé.
Sans savoir qu'il pouvait le comprendre, lenfant, dans son langage de petit enfant, lui expliqua sa peur lorsqu'il s'était vu égaré dans la forêt, en entendant du bruit, il s'était mis à courir sans voir une grosse branche qui barrait le chemin, il avait trébuché lourdement et s'était évanoui.Tout en lui parlant le petit garçonnet n'avait cessé de le caresser. Celui-ci saperçut que Loup blanc était blessé et son pelage tâché de rouge.
Il le regarda droit dans les yeux et lui demanda de l'emmener jusqu'au refuge de son meilleur ami qui le soignerait surement, dit-il, je ne retrouverai jamais ma route seul si tu ne maccompagne pas.
Loup blanc s'exécuta tant bien que mal, il le conduisit jusqu'à l'entrée du refuge et longtemps il resta là, à le regarder partir, attendant, couché en gémissant, que lhomme vienne récupérer lenfant. Ce dernier appelant lhomme sortit et vit loup Blanc épuisé. Sans crainte, Loup blanc se laissant faire lorsque lhomme sapprocha de lui, posant même sa truffe dans le creux de la main de celui quil reconnut. Lhomme le porta jusquau refuge et le soigna.
Quelques jours plus tard, alors que Loup blanc avait repris des forces, il décida quil était tant de rejoindre sa meute. Il gémit, un dernier regard sur lhomme et lenfant et partit en courant. De retour dans la tanière du clan, il comprit qu'il ne serait plus jamais le même, jamais plus il ne verrait les hommes de la même manière.
Tel est le récit que le Vieux loup avait raconté à sa meute avant de mourir.
Dans un gémissement, je baissai la tête. Puis dun pas hésitant tout en gémissant je mapprochai des deux hommes pour me frotter à eux. Ils étaient des nôtres.
Puis soudain il y eut un bruit , un craquement, craintif, je reculai, ma meute suivit.
* inspiré des différentes légendes Les hommes et les Loups.