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[Rp] Avez-vous la carte de fidélité?

Yohanna.
La meilleure façon de résister à la tentation, c'est d'y céder.

Oscar Wilde - fait péter l'originalité.


« Je n'ai pas envie d'être le cocu du village »
Ca te fait rire, un peu. Tu as du arrêter de compter au bout du sixième homme qui t'a dit ça. Et le sixième, c'était il y a très longtemps. Puis il y a eu Marc. Et cette phrase t'as percuté en pleine face. Ne pas faire de lui le cocu du village. Dans sa bouche, cette phrase prenait tout son sens. Il semblait tellement fragile, tellement abîmé. Ce serait le coup de poignard qui l'achèverait totalement, lui qui t'avait sauvé. Lui qui te respectait plus qu'aucun autre ne l'aura jamais fait. Alors tu tétais tenue tranquille, autant que possible. Aussi longtemps que possible. Et tu avais fini par étouffer. Comme toujours.
Départ. Route. Adieu. Chute.

Il n'était pas le cocu du village, il était cocu juste par une rencontre, l'abandon d'un soir, parce que tu avais oublié à quel point coucher pour coucher, ça faisait du bien. Puis étaient venu les remords, les vrais, les puissants. Tu ne pouvais plus lui mentir. La Yoh, sa chère Yoh, tu venais encore une fois de la tuer. Celle qu'il avait réussi à réveiller, à tenir éveillée, tu l'avais effacé d'un revers de main. D'une gorgée de trop en taverne. La lettre de rupture avait été écrite dans les larmes et le sang, lettre qui n'a jamais reçu de réponse, et tu étais enfin de nouveau H. L'ancienne, la libre, sans remord ni regret. Sans question, sans attache.
Après deux demandes en mariage et trois propositions de ''vraie histoire'' plus tard, que tu avais dégagé tant bien que mal – et encore, vachement mal pour l'une d'entre elle – tu es tombé sur un homme… Ce genre d'homme secret, qui d'abord t'as possédé avant d'exiger plus. Il avait touché du bout du doigt la façon de t'attraper pour de bon. Et ça te perturbait. Il t'hypnotisait. Il savait parfaitement jouer de toi par les mots, les gestes, les provocations. Tu le voulais. Et il te voulait Mais pourquoi ? Impossible à savoir. Peut-être ce goût de l'inconnu. Sa façon de ne pas s'ouvrir pour continuer à te tenir par cette curiosité qui te ronge. Il était plus fort que toi. Il semblait te connaître mieux que toi même.

Le « Je n'ai pas envie d'être le cocu du village » avait suivi un « quand vous aurez fait jouir la moitié de la ville. » Et ça, tu l'avais mal pris. Parce qu'il avait touché juste, comme à chaque fois qu'il te lançait un reproche ou te révélait un fait que tu t'échines pourtant à cacher. Finalement, quoi ? Tu n'étais plus qu'une catin sans valeur ? Tu avais perdu toute ta dignité à céder à toutes les avances qu'on te faisait, et tu continuais ainsi la route, cherchant à faire céder ceux qui n'avaient pas fait le premier pas.
Yohanna, tu n'es plus la H, tu es la souillon, la tapineuse qui se perd dans un chapelet de jouissances pour oublier le vrai but de ta vie ou de tes envies. Tu n'es plus que l'ombre de toi-même, perdue car personne pour te guider avec une lumière plus forte que celle que tu dégageais, avant… Tu te crois libre, mais tu es plus prisonnière que jamais. Prisonnière de toi même. Liens plus serrés que n'importe quelle bague au doigt. Torture plus grande que toutes les geôles d'Angers.

Il veut que tu sois fidèle. Comme tous les autres. Il veut que tu essayes. Comme toujours.
Alors tu vas essayer. Te tenir à carreaux. Savoir tes limites. Tester tes limites.
Oui, voilà… Tester… Dans tes veines se met à couler ce désir… De tester. Tu as envie d'aller chasser. Goûter. Savoir si tu sais résister. Le désir est la plus puissante des drogues. Et y succomber n'est pas si dangereux pour la santé. Alors pourquoi t'en empêcher ?….

Dans les ruelles d'Angers, tu marches d'un pas lent, analysant les visages, te rappelant. Angevin. Royaliste. Pauvre habitant en train de crever la dalle. Jeune fille inconnue.
Jeune homme. Déjà vu.
Proie.
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Evroult
      Proie.
    On se laissait souvent à penser que, en tant que courtisan, l’éphèbe se contentait de plaisirs monnayés pour assurer sa faim. Evroult, pourtant, aimait à distinguer ce qui relevait d’un métier embrassé par conviction & ce qui n’en tenait pas. C’était simple ; d’un côté, les clientes s’entassaient dans les chambres & alcôves des bordels où il officiait, étoffant une réputation qui n’avait que peu à envier aux galants de trente ans ; de l’autre, il semait des proies faciles & délicates qui, éplorées, rêvaient pendant des semaines un amour qu’il s’était trop amusé à entretenir. Loupiot était joueur, ma foi, & courir les jupons était une distraction bien plus à sa portée que les cartes, les dés, ou les carafes de vin.

      Proie.
    Chasseur ainsi nommé retenait avec peine une éternelle fringale. Plus tôt dans la semaine son unique amour, la seule, la vraie, la pure, lui avait fait promettre de ne plus courtiser. Quoi qu’elle jura cent fois de l’accepter entier, elle ne souffrait soudain plus de le voir si enclin à se faire aimer des autres quand elle lui apportait, enfin, le lot de sentiments qu’il avait cru impossible de par sa condition. Être son premier amour, & le seul sans doute, ne lui suffisait plus. Il ne lui fallait rien de moins que l’exclusivité de ses couches sans bourses échangées.

      Proie.
    Alors, transi d’amour, Adonis céda. Trois jours passèrent sans qu’il ne touche une femme qui n’avait pas payé, délaissant même Solange, sa catin favorite, qu’il s’aimait tant à prendre au début de la nuit pour avoir la fierté d’être chaque fois le premier. Il avait tout claqué. Pour une femme, une seule, à la jambe d’albâtre, il n’avait plus baisé sans être bien payé.

      Proie.
    Repos & retenue. Pour l’Amour, ce mensonge, il lui serait fidèle.
      Proie.
    Regarder seulement ne lui coûterait pas.
      Proie.
    Ces jeux de badinage & ces coups trop rapides n’étaient à la hauteur d’aussi grands sentiments.
      Proie. Proie. Proie.
    Baste ! On était courtisan, ou on ne l’était pas.

    - Pardonnez mon audace, mais… nous nous connaissons ?
    Un coup vieux comme le monde assorti d’un éternel sourire mutin.
    Au pire, la proie fuirait. Au mieux, Hel, mon amour, n’en saurait rien du tout.

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Yohanna.
L'instinct du chasseur : prévoir l'intention immédiate de l'adversaire afin de conserver l'avantage de l'offensive.

François Moreau



Pardonnez mon audace, mais… nous nous connaissons ? 

L'audace. C'est ta ligne directrice en ce moment. C'est ce qui te pousse à aller toujours plus loin. Celle des autres que tu cherches à dépasser pour ne jamais être en reste. La tienne que tu as travaillé et que tu manies comme une dague.
Ton sourire se fait franc en réponse au sien que tu comprends joueur. S'il t'aborde, et de cette façon, ce n'est sans doute pas pour te demander sa route ou l'heure de la messe. Et puis tu as un radar de stupre. Étonnant, ce jeune homme, tu l'as vu avec la belle brunette qui voulait le ''protéger''. Maintenant elle est seule. Tu sais qu'il traîne avec une autre. Les histoires d'adolescents ne t’intéressent pas plus que ça, tu sais que ce n'est qu'une passe. Qu'il n'y a pas plus changeant qu'un cœur de jeune personne. Mais ce serait un peu trahison que voler, même un instant celui qui a fait battre le cœur d'une belle rose à laquelle tu tiens…

Cruelle.
Tu es en chasse. Tu ne vas tout de même pas s'encombrer d'états d'âme. Il est jeune, il est beau, il est là. Vous vous souriez. Qu'as-tu besoin de plus ?


Il me semble oui. Vous avez fait une apparition subtile dans ma taverne un jour où l'on venait de me dire que j'étais vieille. Et ridée.
Comprenez que votre vaporeuse apparition m'ait mise plus que mal à l'aise.
Est-il encore temps de nous rattraper ?

Inutile d'en rajouter. L'éphèbe connaît les femmes. Leurs complexes, leurs peurs. Il a compris tous les sous entendus de tes phrases, même si tu t'es abstenue de lui faire comprendre que le malaise était l'opposition avec sa jeunesse et sa beauté.
Heureusement, il était alors trop occupé à se disputer avec la brune Rose. Le sujet avait glissé sur le vin, les herbes et les délires enfantins avant que les jeunes ne partent en claquant la porte pour finir leurs ébats au calme.

Il est temps de tout reprendre à zéro.
Engageant quelques pas pour avancer lentement, tu ne sais pas où il va, tu t'inventes une raison d'être ici. Trouver de quoi remplir ou décorer ta taverne. Et l'y guider. A moins qu'il ne prenne d'autres initiatives plus alléchantes et te guide ailleurs…

Le jeu est engagé.

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Evroult
    L’onyx étincelant du manège engagé s’attarda un instant sur les ridules fines, marquées au coin d’un regard qu’elle savait faire de biche. Elle était savoureuse : femme fatale assumée, elle ne s’encombrait pas d’une retenue hypocrite. Pis ! elle engageait d’elle-même. Il n’eut pas même le temps de formuler ce qu’il savait si bien dire & faire croire, que l’expérience des femmes les rendait fascinantes & que l’âge l’avait, elle, sublimée plus que de raison. Non, il ne dit rien de plus, & emboita son pas en proposant son bras.

    - Toujours. J’aurai ainsi l’occasion de me faire pardonner pour vous avoir embarrassée ainsi.
    On me dit assez doué pour bien me rattraper.


    Tranquillement engagé, il se paraît fièrement de ces airs mutins qu’on lui connaissait trop. Ah ! tenir le compte de toutes celles qu’il avait fait craquer d’un sourire espiègle lui aurait pris des jours. Cet air-là était bien trop facile, & assez passe-partout : jeune fille ou femme forte, il les terrassait toutes.
    Ainsi le jeu, en cet instant précis, lui paraissait d’un attrait tout particulier. Il chassait la chasseuse qui le chassait lui-même, & pas suffisamment idiot pour ne pas le comprendre, Loupiot n’aurait pas parié sur l’issue de la partie.
    Déjà, il ne savait même plus qui, le premier, avait lancé les dés.

    - Permettez, de fait, que je vous offre un verre. Ou deux… ou trois. Qu’importe. Tout ce qu’il vous plaira. Et si vous nous trouvez un petit coin tranquille, je promets de vous être bien moins… vaporeux. Je suis trop impatient d’une bonne conversation.


      À mon tour, je lance deux dés truqués.
      • 4. Je te rentre dedans.
      • 6. Tu me rentres chez toi.

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Yohanna.
Tout ce qu’il vous plaira.

Une ruelle sombre, ça passe aussi ? Quand on est dans la ville… Et qu'on est pressés… Mais justement. Tu n'es pas pressée. Tu veux faire durer. Tu veux profiter un peu. Et voir si tu peux résister. N'es-tu pas là pour ça à l'origine ? Te prouver que tu peux résister. Et lui, fougueux, veut déjà t'embarquer dans une… ''conversation''. Après un verre, ou deux, ou trois. Amusant.
Il serait si facile de lui céder, de l’entraîner tout de suite dans un "petit coin tranquille" dont tu as le secret. En retour à ce petit air si craquant qu'il porte à merveille et dont il joue en toute conscience, ton regard se fait doux sur le sien, un peu maternel, toujours très joueur. Et ton sourire suit le mouvement.
Son bras est pris par le sien, une main opposée s'y pose même, pour capturer. Tu es à moi charmant enfant.


Mon bon Ami, allons ! Je suis ici pour faire des achats pour ma taverne, savez-vous ? J'ai besoin de temps.. De choisir mes produits. D'autant qu'ici, ils sont très coûteux. Il me faut donc marchander. Étudier ce que j'ai sous la main.

Alors que tu lui parlais en regardant autour de vous, tes noisettes se posent lourdement sur lui pour la dernière phrase. Qu'il se sente l'objet. Juste un instant, fugace, pour ne pas qu'il s'enfuie trop vite. Il semble rompu aux jeux de l'amour, ça n'est pas pour autant qu'il est tamponné sur son front « A louer ».

Accordez-moi ces quelques instants de marche. Je vous donnerai ensuite le droit à une saine… Conversation.
Mais d'abord, nos nom ! Yohanna de Chambertin, ou H, pour les ennemis. Mais si vous voulez vraiment me faire plaisir, appelez-moi Baronne. Et vous ?


    Nos dés à nous sont justes :

    • 3 – Convaincs-moi.
    • Second lancé : cassé.

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Evroult
    - Baronne…
    Appelez-moi Evroult.


    Il hochait la tête d’un air tout à fait convaincu, acceptant sans un mot la diversion qu’elle tentait d’amener. Les femmes étaient ainsi – il le disait souvent –, elles n’aimaient rien de moins que de paraître toujours un peu inaccessibles. Comme un masque craquelé, elles voulaient faire croire, aux yeux de ceux qui s’en fichaient, qu’elles maîtrisaient leurs désirs & leurs vices, & qu’il fallait se battre pour obtenir leurs faveurs. Mais lui le savait bien, pourtant ! elles étaient trop faciles. Il l’aurait elle, comme toutes les autres, & il s’en nourrirait tout aussi goulûment que si c’était la première.
    Insatiable, il l’était.

    Plus encore, lorsqu’elle en valait la chandelle. Tout occupé qu’il avait été ces derniers mois, entre une sœur de lait disparue, une mauvaise grippe qui avait trop trainé, & ses premiers émois d’amour véritable, il avait été trop peu attentif aux opportunités qu’on ne cessait pourtant de lui mettre sous le nez. Là, l’esprit bien à sa place & le cœur accroché, il revenait à lui. L’ambition ne l’avait pas quitté, & le « baronne » qu’elle avait lâché d’un air si innocent ravivait son orgueil. Il y avait bien longtemps qu’il n’en avait pas baisé.

    Hel était loin, maintenant. Loin, du moins, de ces préoccupations. Peut-être comprendrait-elle que ce n’était pas en couchant en bordel qu’il en deviendrait riche, & qu’il fallait pour cela se faire bien voir des dames, baronnes & autres vicomtesses pour espérer un jour entrer chez les comtesses… ou mieux ! les marquises & princesses. Ainsi, il n’allait donner de sa personne que pour mieux s’élever… Hel le comprendrait bien.
    Bien sûr. Elle le comprendrait bien.

    - Alors dites-moi Baronne, de quels produits avez-vous donc besoin ? Je pourrais vous aider à négocier vos prix… J’ai certains arguments dont je me garde jalousement le secret. Et puis ! à deux, nous irons bien plus vite… Je ne peux vous cacher mon impatience quant à retrouver l’ardeur d’une bonne cheminée, un peu d’Anjou charnu, & quelques gourmandises. Je suis tout à vous, Baronne… dites-moi tout.

      Car détrompe-toi ma belle… si ce n’est sur mon front, c’est plus bas, qu’il est noté « à louer ».

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Yohanna.
Frisson. Délice. Baronne. Ce titre que tu t'octroies sans le posséder vraiment devient un compliment malsain dans la bouche d'un menteur. Les meilleurs. Ceux que tu sais, au fond, ne pas avoir besoin de croire, mais faire semblant pour que tout le monde s'y retrouve. C'est si bon… Et tu sens, au fond de toi, comme une profonde intuition, comme le serpent du doute qui s'immisce sans se montrer vraiment, tu sens au ton de sa voix, à ses iris qui s'élargissent imperceptiblement, tu sens qu'il aime ça. Qu'il a trouvé dans ce mot une accroche suffisante pour rester auprès de toi. Au moins une heure. Peut-être deux… Tu vas devoir tenir le masque. Ce sera aisé, car si tu n'as pas le titre, tu as toujours l'argent. Bien que ta tenue de cuir soit masculine à souhait, tes gants sont brodés et ta cape immaculée. Tu aimes le luxe, et la décoration de ta taverne a du le lui prouver s'il n'avait pas trop la tête ailleurs quand il y a fait une brève apparition.

Ses propositions te donnent envie. Elles font naître en toi quelques idées d'amusement. Est-ce le ton qu'il utilise ou ce qu'il évoque que tu trouves doux comme le miel ? Sont-ce plutôt les tournures de ses phrases ou les mots choisis qui te parlent si bien ? Tu pourrais l'écouter ainsi pendant des heures s'il avait assez de patience et d’énergie pour jouer à ce petit jeu assez longtemps. Mais la jeunesse est impatiente, et il faut entretenir la fougue, lui donner du feu à consommer pour garder la flamme ardente.


Me Laisserez-vous le loisir de vous observer marchander les prix ? Je m'occupe du vin. Le vendeur est un… ami… Que je connais fort bien. Nous avons déjà nos habitudes. En revanche, j'ai découvert une petite boutique de… Gourmandises ! La vendeuse est a croquer. Une petite demoiselle qui semble aussi sucrée que ses bonbons…

L'idée venait de tomber. Parce qu'il avait proposé. Et que l'image de la petite vendeuse t'était revenue à l'esprit. Les gourmandises n'étaient pas ta priorité d'habitude, trop occupée à nourrir les soldats en leur trouvant du pain non rassis et du vin qui saoulait vite, mais après tout, pourquoi ne pas s'offrir quelques instants de plaisir… Cela te coûterait un bras. Ou deux. On est en guerre. Mais pour le jeu du jeune Evroult, tu es prête à débourser toutes les sommes.

D'abord l'alcool, donc. Le jeune homme peut t'observer le premier. Il peut capter les sourires, les œillades discrètes et la poignée de main avec le commerçant. Il n'est qu'une transaction, un passeur pour son alcool, sans doute de contrebande, c'est pourquoi tu dois le choyer, ce pourvoyeur. Alors tu en rajoutes un peu. Un petit plaisir gratuit fait toujours baisser le prix. Le tout sera livré chez toi. Le paiement aussi attendra là bas. Parfait, on peut maintenant passer à la suite.

La devanture est rouge et blanche, exposant quelques boites délicates de fines gourmandises. Bonbons au miel, sucres anisés, caramels normands. Tu te demandes comment la demoiselle arrive à faire venir toutes ces petites choses. On se croirait presque dans la ruelle chic du beau Paris. Toutefois, la porte semble un peu abîmée, preuve que les affaires ne tournent pas forcément au mieux. Heureusement, le sucre, sa conserve.
La poupée est bien là, à l’intérieur, prête à attraper le peu de clients osant franchir sa porte.

Le jeu change d'orientation pour un petit instant, mais on est toujours dedans.
Tu glisses à l'oreille du courtisan :

Lâche toi mon beau. Fais-nous ressortir avec les meilleures confiseries. Tu as carte blanche pour l'argent. Je paye.


Case chance : Vous gagnez 1000 écus.
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Evroult
    Ce n’était pas la première fois qu’on le poussait à faire spectacle, à dévoiler ses cartes, comme si elles n’étaient pas déjà victimes de ses talents. Il y avait une sorte de fascination malsaine dans la demande & sa contemplation, où la femme tentait d’entrer dans ce qu’elle supposait être l’intimité d’Evroult, pour mieux le comprendre, mieux l’analyser, mieux s’en garder. Sans aucun doute y avait-il la volonté de se mettre suffisamment en recul pour se croire inattaquable, intouchée des flèches du jeune Cupidon, la tête haute & le cœur barré. À bien y réfléchir, pourtant, & ça se vérifiait dans chacune de ses expériences, ces femmes-là se plongeaient encore bien plus dans le jeu une fois le spectacle terminé. Elles voulaient se prouver d’être plus maligne que lui & de le faire tomber à leurs pieds délicats.

    En fait, elles se persuadaient que voir ce tableau sans en être actrices les rendaient plus spéciales. Moins naïves. Plus uniques. Qu’à cet instant précis, une fois la scène close, elles auraient une place en son cœur plus particulière que toutes les autres.
    Ah ! jamais il ne l’aurait détrompé. Lui voulait sa place dans le cœur de toutes les femmes, en plus de l’avoir en leur corps. Insatiable, nous disions. Il pouvait bien se plier à tous ses désirs pour le plaisir du jeu, à la condition tout de même qu’elle finisse par être sienne. Il lui fallait sa récompense.

    Ainsi, il entra en scène. Tantôt, coude appuyé sur le comptoir soutenant un menton joueur dans une nonchalance qu’on lui connaissait trop, tantôt, redressé & le cœur sur la main, le chef se baissant dans une révérence que même la plus pouilleuse de toutes les paysannes ne pouvait qu’apprécier. Une femme, ça se flattait. Il fallait les rendre belles, il fallait les rendre fortes, il fallait qu’elles se pensent singulières & aimées. Là, distiller un sourire mutin pour la faire craquer, ici, plonger l’onyx brillant au fond de sa pupille pour la faire tressaillir. Deux doigts entre les siens, un léger baise-main, le rire bref & joyeux invitant à l’emphase.

    « Vous m’êtes ravissante » & les joues qui rougissent. S’il se gardait bien d’user de ce subterfuge ridicule auprès des femmes d’expérience – il n’aurait jamais dit vieilles – il en abusait sans honte aucune auprès des demoiselles de sa génération. Ainsi, pour les premières, il prenait l’air grave & solide longuement travaillé, celui des hommes mûrs ou au moins décidés, en vieillissant ses traits d’un regard rugueux. Et puis, pour les secondes, il se faisait timide, comme osant pour la première fois adresser la parole à une péronnelle, subjugué par une beauté fraîche qui parfois, même, était vierge. Là, c’était le gros lot. Bien sûr, il existait toujours exceptions & entre deux, tout l’art du courtisan était de savoir quand, où, & comment s’y adapter. Il s’y disait doué, encore.

    Là pourtant, la jolie confiseuse faisait, à vue de nez, partie de la seconde catégorie. Vierge ou non, elle sucrait de son innocence l’entièreté de sa boutique, au point où il en oublia presque sa première conquête en posant rendez-vous à la jeune blondinette. Il paya, ou du moins fit payer puisqu’elle voulait être généreuse, décocha un dernier clin d’œil à sa prochaine proie & sans s’attarder plus, sortit Baronne au bras. Le regard dépité de la petite vendeuse ? Baste. Il se rattraperait. Plus tard. Beaucoup plus tard.

    Au croisement, la ruelle accueillit la toute première étreinte. Sous sa main impérieuse, la taille de Yohanna se vit en courbes & cambrures, alors qu’il se servait du mur, comme l’on fait souvent, pour mieux la dominer. Il brillait de l’onyx comme un trop passionné, le souffle mêlé au sien dans un baiser flottant qu’il lui laissait encore l’audace d’engager. La jolie confiseuse n’avait fait qu’attiser son ardeur, & les jeux d’infidèles avaient bien trop duré.

    - Vous ai-je dit déjà que j’étais impatient ?
    N’hésitez plus, Baronne, venez. Venez prendre ce que vous désirez.


      Prison. Ne passez pas par la case départ, ne recevez pas 1 000 écus, fermez la grille, jetez la clé, oubliez vos doutes & profitez. Vous avez trois tours.

_________________
Yohanna.
Il te coince, le charmant, il cherche à te dominer, et le frisson te traverse, délicieuse engeance qui te pousse à céder fasse à son impatience. Presque contre ses lèvres, tu ris un peu, haleine anisée d'un bonbon que tu as choisi en dégustation. Et Dextre se glisse entre vous, pour frôler son impatience, pour deviner son envie pour tester la dureté de sa volonté.

On dirait que le petit jeu l'a excité, et qu'il en revient à la proie la plus disponible à présent. Pourtant tu as aimé le regarder jouer, parfaitement à l'aise dans le rôle du petit touriste en quête de sucreries délicates, de choux à la crème ou de saveurs raffinées. Tu lisais sur son visage tant de mensonges si bien joués que tu aurais pu les croire toi-même. Il semblait sous le charme. Il avait eu un coup de foudre. Ca y est, il était presque prêt à déclarer sa flamme dans l'instant et la demander en mariage. Il resta sagement sur une invitation, pour ne pas brusquer la belle, et les douceurs furent payées. Ne voulant pas perturber, tu avais gardé un air distrait, comme si seule la marchandise t'intéressait. Jusqu'à son bras qui glissa à nouveau sous le tien. Hé oui ma jolie, il était à toi. Pardon pour l'erreur de casting. Elle te le rendra sans doute pour l'heure de votre rendez-vous. Pas avant.

Là, au coin de cette ruelle, tu décides à ses mots qu'il est temps. Jeune impatient. Les emplettes sont faites. Tu as aimé la rencontre. Tu as aimé le jeu, mais il a assez duré. Fidéliquoi ? Pardon ? Ha oui, tu étais là pour te tester.
Trop faible.
Beaucoup, beaucoup trop faible.
Mais qui ne le serait pas devant un petit Eros qui joue si bien de persuasion qu'il semble avoir envie de te dévorer ici ? Senestre glisse dans sa nuque pour attirer son visage vers ton cou, seul présent de ta peau accessible dans ce lieu, et tes lèvres cherchent esgourde pour y susurrer :


Evroult… Puisque vous me semblez moins disposé à attendre, acceptez-vous d'être à moi pour le reste de la journée ? Ou moi à vous, selon votre préférence…

Le mur accueille ton dos à nouveau pour lui afficher ton sourire le plus doucereusement taquin. Tu demandes pour savoir sur quel pied danser avec lui. S'il faut qui tu imposes tes règles ou si les siennes te conviennent. Et tu lui prend la main pour le guider. Il voulait un endroit chaud ? Un endroit douillet ? Ce sera chez toi dans ce cas.
Deux hommes se disputant tes faveurs ont fait de cette petite maison en ruine un nid tellement confortable que tu as failli finir par les mettre en relation pour que, dans leur dispute, ils en fassent un palace. Mais, sage, tu t'es raisonné à temps pour finalement maintenir cet équilibre discret de ne jamais les faire se rencontrer. Jonglant avec les hommes et les mensonges comme le saltimbanque que vous croisez sur le chemin qui joue avec des bâtons enflammés. Pourvu que cette fois, la maison soit vide. Et qu'ils aient laissé de quoi manger.

Porte franchie, laissant tes yeux scruter la pièces, tu ne vois personne dans le coin cuisine. Juste une table encore couverte de reflets d'un repas à deux. En face, côté salon, personne sur le canapé orangé face à la cheminée où le bois crépite doucement. Les locataires sont parfaits. Côté chambre, la porte entre-ouverte ne laisse apparaître qu'un lit aux drapés gris et ocre, tiré à quatre épingles, vide de toute présence. Tu invites donc ton nouveau jouet. Il te plaît. Si charmant, si souriant. Il est beau, à croquer, pas farouche, habitué à se plier aux volontés… N'aurait-il pas finalement un prix ? Même pour une soirée ?

Le laissant un instant découvrir les lieux, choisir sa place, tu vas chercher dans un petit meuble une bouteille de vin. D'Anjou, cela va de soi. Pas le meilleur, mais le plus accessible. Et tu demandes, car tu as réussi à décrocher tes yeux de lui, d'un ton paisible sans jugement, juste par curiosité :


Alors ?… Qu'est-ce qui te fait réellement rester ici ?
L'ennui ?
Le ciel est gris, on s'amusait, je t'ai traîné ici, tu as cédé par ennui.
L'argent ? Tu m'as vu allonger l'argent, monnayer, tu m'appelles par un titre et tu sens que toi aussi tu peux en profiter…
Mon… Age ? Nan, je n'suis pas si vieille que ça ! T'y fie pas ! C'est juste pour qu'on ne me croie pas une femme sans expérience que je fatigue mes traits *mensonge à moi-même*
Ou juste cette fameuse impatience de la chair ? Tirer ton coup, partir, merci pour l'instant, c'était chouette.

Tu reviens vers lui, attendant la réponse, un seul verre à la main dans lesquels tu trempes tes lèvres. Il est impatient, tu aimes prendre ton temps. Mais s'il fait le premier pas, tu ne l'empêcheras pas. Vous êtes à vous, uniquement à vous pour le moment.

_________________
Evroult
    S’il avait fallu choisir entre se laisser guider & dominer la danse, le jeune Loup qu’il était aurait sans sourciller choisi seconde option. En fait, il était convaincu que même lorsqu’elles imposaient leurs règles & leurs volontés, la faiblesse qu’elles avaient à céder à la chair les rendaient toutes esclaves de passions & de fièvres. Qu’il soit tout aussi faible qu’elles, incapable de réprimer cette humeur animale, ne lui effleurait pas l’esprit : pour lui, c’était une force. C’était montrer toute la force de sa jeunesse & de ses dons d’amour.

    Aussi, il lui laissa sa main, cet éternel sourire mutin vissé aux lèvres comme une insulte à la conscience des femmes si elles avaient pu lire en des pensées qu’il tentait, difficilement pourtant, de taire tous les jours. S’il cachait bien son jeu lorsqu’il était en chasse, on le savait suffisamment impétueux pour craquer ce masque voilant sa suffisance d’un simple éclat de voix ou d’une orgueilleuse réplique. Quoi ! sa jeunesse après tout n’avait pas encore eu l’heur de siffler son dédain.

    L’onyx piqué de luxure s’attardait sur les courbes faussement baronnesques alors qu’elle louvoyait, reine en son sobre royaume. Observer la masure ne l’intéressait pas, & il nota tout juste la table encore pleine, songeant un bref instant à l’éventualité de sortir par la fenêtre si un mari, conjoint, amant venait à débarquer. Ça n’aurait pas, loin de là, été la première fois, & il fallait au moins avoir l’œil attentif pour les issues de secours.

    Il revient bien vite à elle alors qu’elle s’approchait, & faisant un pas de plus, vint effleurer sa lippe de la pulpe du doigt pour récupérer une goutte carmine qu’il gouta, insolent.

    - L’ennui, l’argent, cette fameuse impatience de la chair, reprit-il d’un sourire en omettant volontiers de retenir son âge. Et puis, vous, surtout… vous me cherchiez.

    C’était audacieux, & il était convaincu qu’il avait tapé juste. Pour l’affirmer encore, son souffle vint glisser de ses lèvres qui ne lui appartenaient pas encore à l’esgourde qu’il posséda d’un baiser mordillant le lobe. Un clapotis discret confirma que le godet de vin était en mauvaise posture & qu'il tacherait bientôt, si ce n'était déjà fait, une chemise ou deux.

    - Et je suis là. Tout à vous.

    Réponse n’était pas attendue, & si elle vint, fut étouffée par le corps tout entier qui acculait son hôte contre la table aux restes, comme une ultime insulte à la fidélité que ni l’un, ni l’autre ne semblait vouloir respecter aujourd’hui. Qu’elle se laisse faire un peu & il la prendrait là, & sortirait d’ici fier & pompeux d’avoir marqué son territoire là où un autre sans doute se croyait en sécurité.
    C’est qu’elle était sienne, uniquement sienne pour le moment.

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Yohanna.
Oooh ! Mais qu'il est poli le petit garnement, en omettant ton age ! C'est sans doute sa façon de te rappeler qu'il joue. Qu'il n'est pas réellement celui qu'il laisse paraître. L'idée te fait froncer les sourcils. Quand vous n'avez plus à parader, tu aimes, tu préfères l'honnêteté. Même si elle est blessante. Toi qui n'hésite jamais à dire les vérités d'une personne en soutenant son regard, tu n'en attends pas moins des autres, bien que tu les sache, de par leur nature humaine, fourbes, vils et calculateurs. Ne l'es-tu pas un peu toi aussi ? Non, toi, tu l'est beaucoup quand il le faut.
D'ailleurs, il fait partie d'un mensonge. Tu l'as amené ici pour te prouver que…

Tu le cherchais.
Pourtant, n'étais-tu pas en train de fuir ?

Le bruit du liquide éclatant au sol réveille tes sens qu'il était en train d'étourdir, et tu cherches à redresser le verre qui risquait de t'échapper des mains. A peine fait que déjà tu rencontres le plateau de la table où ta main libre s'accroche pour garder l'équilibre.
Tes cuisses s'écartent, traîtresses habituées à répondre instinctivement à un plaisir naissant. Naissant ? Noooon… Explosant en toi en une seule seconde.
Ta main tremble quand tu essayes de poser à l'aveugle le verre sur la table. Le bord est manqué. Trop court. Le vin se répand dans un bruit de fracas et ton bras agrippe la taille de l'amant pour ne pas qu'il s'en effraie. Vous avez d'autres choses à penser.

Contre ton bassin son désir tendu qui cherche le sien.
Si tu commences à répondre à ses pressions, tu ne vas plus te retenir. Et tu n'auras rien réussi à te prouver. Sinon que tu es toujours la même. Une catin soumise à ses pulsions, incapable d'avoir de l'empire sur elle-même…
Oui mais voilà. La tentation est là. Belle, jeune, affamée. Qui ne demande qu'à être assouvie...

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Evroult
    Il possédait. C’était une évidence encore confirmée par le choc des assiettes sur le sol déjà souillé de quelques os rongés, de mie sèche, de timbales écoulant leurs fonds. Bientôt déjà, après qu’une main fébrilement aveugle ait balayé la table, les deux corps enflammés démarraient un dîner bruyant de souffles erratiques & de grognements rauques.

    Il possédait. C’était une évidence, & qu’importait son âge après tout ? Elle ou une autre, elle & les autres, l’onyx lubrique voyait la femme comme ce qu’elle se devait d’être : rompue à ses désirs. De candeur ou d’expérience, pouvaient-elles seulement comprendre cet instinct dévastateur & cette inaptitude profonde à raisonner ses braies ? Pour se satisfaire, apaiser cette brûlure insistante, cette vivacité qu’encore aujourd’hui l’on mettait à tort sur le dos de la jeunesse folle, il jouerait bien un peu plus ce rôle d’éphèbe malléable à l’envi & trop courtois pour être honnête. Vérité n’était pas dans ses priorités. Ce cul, si.

    Ainsi, Adonis se moulait à la Hache en évitant soigneusement le fil qui se révélerait assurément coupant. L’âge importait décidément bien peu, & la rouille & les rides même ne l’auraient empêché de la prendre aujourd’hui comme si elle lui avait toujours appartenu. Elle sentait l’anis & le caramel mou, & lui s’en entêtait trop pour prendre garde aux ridules & aux mèches grisonnantes. Ne le voyait-elle pas, après tout ? Lui, Loupiot qu’on disait par médisance trop jeune courtisan, ne la prenait-il pas sans même qu’il ne soit question de passe & de bourses échangées ? Ne violait-il pas là le serment lâché trop hâtivement pour calmer la jalousie de sa favorite, parjurant ses paroles légères pour les quinquets plissés d’une madone audacieuse qu’il n’hésitait plus, maintenant les derniers remparts abattus, à découvrir de toute la pulpe de ses doigts ?

    Là, senestre s’affairait sous l’étoffe trop épaisse, manquant la crampe juste pour le plaisir du jeu & de l’exploration. Là, la toile gênait trop, & les mains impatientes firent craquer une ou deux coutures trop faibles. Là, il possédait les lèvres passionnelles & sucrées des gourmandises d’une autre. Là, il faisait ployer l’exaltante en la dévorant d’un regard qui brûlait de sa flamme. Elle ou une autre, elle & les autres, oui mais c’était elle, & elle seule, qui recueillait la première la frustration d’un éphèbe enchaîné par le bon vouloir de ses sentiments. Car les clientes, jamais, n’avaient la même saveur, la même liberté, la même folie que ces conquêtes-là.

    Hel avait toutes les raisons pour vouloir le brider. Ces femmes-là, pour qui il se permettait de froisser les fripes, de profaner les domaines, de désirer & de prendre sans plus aucun contrôle, ces femmes-là, disais-je, étaient toutes plus singulières les unes que les autres.
    Un bref instant, entre le claquement des bottes tombées & le bruissement des chairs dévoilées, il pensa sans doute que ce devait être ça, l’angoisse de la Blanche : n’être pas tout à fait la seule à jouir de l’éclat rendant unique chaque femme au fond de la prunelle du Loup. Un bref instant, seulement, & puis il reposa son onyx exalté sur les courbes capiteuses de la divine tentatrice. Il possédait.

      Consommer pour consumer.
        Consumer pour contenter.
          Contenter pour consoler.

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Yohanna.
Trop tard. Il happe. Il prend. Il impose dans une doucereuse fureur qui te contamine sans te laisser le choix. Non, tu ne l'a pas souhaité. Non tu ne l'as pas invité ici. Oui, tu l'as repoussé, violemment, tu lui as dis de partir, tu lui as même balancé des objets au visage. N'y a-t-il pas des verres et des assiettes répandues au sol ? Tes cheveux ébouriffés, ce sont les victimes d'une lutte, tiraillée entre la possibilité de le tuer d'un coup de hache et l'envie de le laisser en vie pour ne pas faire plus de victimes en cette ville de guerre. Bien sûr que tu l'as empêché. Repoussé. Il n'a même pas réussi à atteindre tes lèvres. Elles sont gercées, c'est tout. Parce qu'il fait froid dehors.
Voilà la version officielle. Celle qui va remplacer dans ta bouche ce que tu vas garder au fond de ton crâne.

Pourtant tu n'oublieras pas la moindre caresse, la moindre brûlure de ses mains sur ta peau. Tu n'oublieras pas la folie de ses baisers, la force de ses lèvres.
En revanche tu oublieras quand exactement tu as arrêté de penser. Quand tu as commencé à aimer. Parce qu'il a ce don de faire exploser les barrières, de ne pas laisser le souvenir d'une possible fuite. Tu ne se souviendras plus à quel moment tu t'es retrouvée dévêtue face à lui, ni quand il s'est retrouvé en toi. Tu ne doutes pas de l'avoir aidé habilement, d'avoir guidé chaque geste dans une danse parfaitement maîtrisée, dans un jeu dont vous êtes tous les deux experts. Tu sais juste que tu as aimé. Aussi fort que l'interdit te le conseillait. Plus fort donc qu'un amour partagé. Tu étais là, contre lui, mais ça n'était pas pour lui. Il était là, en toi, mais il pensait sans doute à une autre. Ou n'étais-tu qu'un casse-croûte, qu'un passage d'intérêt.

C'est ainsi que tu les préfères. De passage. En beauté. Le goût de la découverte. Le goût du nouveau. De la première fois. C'est grisant. Brûlant. C'est la meilleure des étreintes.
Mais où sont donc passé tous vos habits ? Où as-tu laissé ton esprit dans l'union de vos corps ? Qu'importe, il t'a. Tu l'as. Et emportée par cette étreinte qui ne te suffit plus, tu en redemandes, tu guides, tu imposes, puis tu te soumets, tu t'offres.
Cette impression de tout donner dès la première fois, comme pour être sûre de ne pas regretter qu'il n'y en ait pas de seconde.

Ce corps d'Apollon, ce divin messager au corps parfait de jeunesse et de beauté. L’éphèbe qui en cet instant donne l'image la plus parfaite de lui. Un tableau. Une œuvre d'art qu'il faudra conserver telle qu'elle. Vous vous offrez la plus rare des prisons : la liberté. Tu ne sais pas qu'il te prend sans accord, il ne sait pas que tu te donnes dans l'interdit. Et pourtant… Pourtant… Evroult. Ton opposé, ton double, ne faire qu'un encore et encore. Ses yeux brûlent parfois dans les tiens, quand tu n'arrives plus à embraser ses lèvres alors que ton souffle se fait court, ta peau rougit de s'éloigner de lui quand tu veux aller ailleurs, visiter avec lui chaque recoin de la pièce. Plus aucune pensée pour les marques de combats sur ton corps. Juste la vision du sien, impeccable, préservé, furieux de vigueur.

    Il t'ébranle. Tu aimes.
      Tu ne regrettes pas. Jamais.
        Faute non dévoilée, à jamais pardonnée.

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Evroult
    Jamais la table seule n’eut pu suffire à ses besoins. Il lui fallait les chaises, le guéridon, les murs & tout ce qu’elle possédait, & même tout ça réuni ne sembla jamais être assez. Il fit durer, longtemps, recommença, souvent, osa l’indicible, joliment. Hache qu’elle était, elle devait bien connaître le bois vigoureux & récalcitrant à se laisser fendre, & sans doute n’en fut-elle pas choquée. Que voulait-elle, sinon l’amant fait robuste & endurant, prêt à tout pour la mener à l’extrême tromperie, l’interdite volupté des bras étrangers ? Que voulait-elle, sinon le capiteux galant, égoïste du plaisir qu’il prenait à contenter la belle pour se contenter lui ? Et lui, que voulait-il, sinon l’outrageuse joie de jouir de l’abandon d’une inconnue presque parfaite, de faire éclater, de sanglots s’il le pouvait, celle qui n’était pas sienne, celle qui n’était pas Hel ?

    Oui, il les voulait toutes. Mauvais garçon voulait le beurre, l’argent du beurre, le cul de la baronne, de sa favorite, & puis de la crémière. Oui, il les voulait entières. Son ambition ne s’effrayait pas même de la couche redoutée par tant d’amants furtifs, celle qui recueillait les secrets & confidences de couples desquels ils ne feraient jamais partie. En fait, ce fut la note ultime, l’accord parfait de l’offense qu’ils faisaient tous deux à leurs ménages, le péché imprimé, maculant les draps & les échos d’étreintes trop sages pour être suffisantes. Pour la toute première fois, parce que jamais avant il n’avait su aimer de cet amour charnel qui liait & déliait nombres de liaisons, Loupiot néophyte en ces eaux-là eut le sentiment sale & profondément malsain de tromper.

    Et la trahison, ô malheur, ô violence, ô Hel & tes diables de dieux nordiques, était d’un grisant qui lui échappait tout à fait. Lui, fou de foutre & courtisan par passion, découvrait en les bras enivrants d’une madone friponne le mystique du véritable interdit, celui qui déchirait les filets de l’Amour, seul, unique & exclusif, l’exaltant parfum de la trahison. Quand en avait-il pris conscience ? Alors qu’il conquérait ses lèvres inédites qu’il convoitait tant, ou bien lorsque leurs corps lourds & écœurants de félicité s’étaient écrasés sur la couche violée de leur débauche ?

    Peut-être seulement lorsqu’il lâcha, joues rouges & souffle court, le fin mot de cette entrevue-là. Car il espérait bien qu’il y en ait beaucoup d’autres, vorace qu’il était, & la senestre affirmée sur la croupe trentenaire ne laissait nul doute quant à ce qu’il estimait être sa nouvelle possession.

    - Baronne, je vous aime. Bordel.

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Yohanna.
Loupé.
Loupé. Foiré. Avorté. Ridiculement salopé. Absolument bousillé.
Brillamment explosé ton effort de fidélité. Délicieusement rompue ta promesse d'essayer. Echec critique.
Failure.
Try Again.
Oh oui… Try Again… And again, and again….

Et quand il avoie, tu ris. Plus, même, un éclat cristallin d'une voix légèrement enrouée par le temps et l'alcool fait vibrer tes tempes, soulève ta poitrine déjà par trop essoufflée et emballe de papier brillant ce moment de pure extase.
Ces déclarations qui te mettent en général hors de toi viennent d'être toutes effacées par une seule, que tu cueilles comme le jour, sur les conseils de ce bon vieux poète Horace. Le corps repu contre toi reçoit en réponse de nouvelles attentions, pour goûter sur sa peau le sel de votre folie, la chaleur de vos élans, l'épuisement âcre d'une passion consumée jusqu'à la cendre. Tout est sens dessus- dessous autour de vous, vos tignasses ne ressemblent plus qu'à un champs de bataille qui se marie parfaitement au décors. Et vous souffles, quelques sourires.
Il est ton échec.
Encore.
Oh oui… Encore. Et encore. Et encore….


Il ne faut plus nous revoir, jeune homme. Plus jamais jamais… Jamais… Sinon…

Ta bouche parle. Tes yeux disent l'inverse. Ton corps reprend en canon ce que tu ne dis pas. Pas besoin de mot là où tous deux, vous savez.
Comment pourrait-il en être autrement ? Comment pourrais-tu faire semblant ?
Tu sais qu'à la prochaine rencontre, un regard suffira à rallumer le feu, à raviver le désir. D'ailleurs, en sortant de cette pièce, tu seras décidée plus que jamais à ne pas restée enfermée dans cette promesse que tu as faite. Si seulement tu étais tombé sur un mauvais. Un pressé. Un timide. Ou même un homme marié ? Mais non, il a fallu que tu tombes sur l'ange de la chair, sur l'Eros dans toute sa splendeur. Rien de tel pour te rappeler d'où tu viens, et ce que tu es.

Qu'il va être difficile de desserrer les bras pour laisser partir le rêve…

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