Hel_
- Froide chambre accueille en son cur éteint, la roide toujours drapée de noir. D'un geste, pourtant, les lourdes fripes se voient délaissées au profit d'une nudité orgueilleuse. Naguère marmoréen, le minois dénonce en ses traits hautains, l'effroyable affliction qui agite son giron. Sous son masque de givre éternel, Camarde accueille pourtant en ses bras, la langoureuse carrure de son soupirant. Qui, pour l'heure, n'expire que son émoi sur la peau lactescente, celui-ci serpentant les accrocs pour venir s'échouer et mourir sur un sein qu'elle porte arrogant. En son étreinte, Nivéenne cherche à émaner ses sentiments secrets et à distiller le réconfort recherché. A défaut de paroles bien placées, ses tendres gestes tendent à rassurer l'esprit agité.
- « - Ne la prends pas, Hel. »
Il murmure à peine la prière qui s'échoue sur son sein.
« - Hel ne prend pas les plus vaillant. C'est assuré, qu'elle en est. »
A l'entente de ces mots, nivéen palpitant ne peut s'empêcher de louper un battement et si la réponse paraît anodine, elle n'en est pas moins éloquente.
« - Elle l'est... Elle a déjà tant porté sur ses épaules, je crois.
Mais si... mais si elle la prenait, tout de même ? »
« - Alors, en les doux rayons venant échauder ta peau, en ce souffle venant l'enrober, tu pourras toujours la retrouver. »
« - Tu parles... Tu parles comme s'il y avait quelque chose, après. »
« - Peut-être. Mais je te parle d'attention et de souvenirs. Tout ce qui peut te faire sourire, peut être un peu d'elle. »
« - Je ne veux pas de ses souvenirs... je ne veux pas de ses attentions. Je veux... Je ne veux pas qu'on me l'arrache, elle aussi. »
« - La mort peut paraître bien impitoyable et cruelle. Mais quand les maux nous dépassent, elle prend des allures de libératrice. Mais elle est vaillante, tu le sais. »
« - Libératrice... Libératrice... Libératrice, elle ne l'est pas pour ceux qui restent. »
Il pousse un long soupir, les mâchoires crispées, chef cherchant réconfort plus doux dans la finesse de son giron.
« - Je le sais. Et c'est en ça que les souvenirs importent. Puis.. Tu n'es pas seul. »
Dans un tendre mouvement, les doigts de la Roide viennent gratifier la joue apparente, d'une caresse imprimée. Evroult saisit ses doigts, retenant la caresse pour mieux presser sa main.
« - Je ne peux t'infliger ça... Si elle... Si elle part, je... »
Il se tait, l'onyx un instant levé sur l'oeil céruléen revient au tableau de son corps, peiné.
« - Tu le peux pourtant. Si notre amour est unique, c'est parce qu'il permet de se reposer sur l'autre. Que feras-tu ? Dis-moi. »
L'oeillade inquiète s'abaisse trop vitement pour donner le change, sur le regard Aimé. Les bras attentifs resserrent encore l'étreinte.
« - J'étais fou, lorsque j'ai appris pour... pour Blanche. Te souviens-tu de... Te souviens-tu de Panorea ? »
« - Était-ce la seule raison à ce jeu que tu as mené ? Et ne sais-tu réagir que ainsi ? Je peux être le réceptacle de tes peines, comme de tes joies. Je ne suis pas qu'un corps sais-tu. »
Il garde le silence, comme l'enfant qui sait qu'il a fauté. La pulpe de l'index trace quelques arabesques timides sur la marmoréenne.
« - C'était d'ailleurs ce que nous avions écrit. Nous voulions tout deux être le confident de l'autre. Nous voulions connaître l'autre par cur. »
Le cur de la biche tambourine légèrement en sa cage. Brièvement douloureux à l'idée de ne pas avoir ce rôle espéré.
Adonis semble loin, & murmure pour lui-même qu'on écrit beaucoup de choses pour n'en faire qu'un brin. Un soupir à nouveau, & le nez redressé vient se heurter à la glace des iris qui le veillent.
« - Pourquoi te le cacherais-je ? Je suis fait de chair, je réagis de chairs... J'ai besoin de... de ça. »
Les prunelles céruléennes s'écartent de celles à présent relevées, masquant en leur fuite, la peine provoquée.
« - Tu as ma chair alors. N'est-ce pas ce dont tu as besoin ? »
« - Tu... »
« ... ne me suffis pas », mais les mots ne sortent pas. Il hoche la tête, sans rien ajouter qu'un baiser sur la pointe d'un orbe opalescent.
« - Je ? Dis-moi. »
Elle agite légèrement son buste, soustraignant la petite poitrine à ses lèvres. Craignant trop que la conversation ne soit écourtée par cette distraction.
« - Tu.... es ce dont j'ai besoin. »
Il ose même un sourire, effacé par ses lèvres qui reprennent possession quand elle voudrait s'enfuir. Pourtant, il est trop tard, déjà. Il a faim.
Et, à l'heure où les chastes âmes s'endorment, l'éternelle mélopée s'élève au creux de la chambre assombrie. Les deux amants senlacent pour qu'il exulte sa détresse en l'amour provoqué et ressenti.
Rédigé à quatre mains avec JD Evroult !
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