Evroult
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« Il sait bien, le chasseur, où tendre ses filets à cerfs ;
il sait bien les vallées que hantent les grognements du sanglier ;
l'oiseleur connaît le bocage ;
celui qui tient l'hameçon suspendu connaît les eaux où nagent beaucoup de poissons. »
Ovide, L'Art d'Aimer, LIVRE I.
« Il sait bien, le chasseur, où tendre ses filets à cerfs ;
il sait bien les vallées que hantent les grognements du sanglier ;
l'oiseleur connaît le bocage ;
celui qui tient l'hameçon suspendu connaît les eaux où nagent beaucoup de poissons. »
Ovide, L'Art d'Aimer, LIVRE I.
- Cétait une de ces maisons de passe qui ny paraissait pas, lovée en plein cur de la ville entre le taudis & la place du marché, auberge particulière aux services nombreux. Il y avait élu domicile comme il faisait souvent, proposant ses talents contre une maigre rétribution qui entendait le couvert, le toit, & quelques maigres piécettes bien durement gagnées. La veille, un groupe de plus avait pris quelques chambres, laissant la soirée calme & la nuit agitée. Lui, pourtant, navait fait que veiller, couvant les filles de joie dune illade attentive, protecteur malgré lui de leur bon traitement.
- Chasseur, attends !
Il se figea, un pied dans lescalier, lautre trop près du comptoir.
- Lauberge est pleine, jtai mis une fille dans la piaule.
- Une fille ?
Le sourcil haussé, garni de quelques cernes, attestait sil le fallait dun épuisement non feint. Il rêvait dun sommeil profond, & lannonce dune cliente aussi tard, aussi tôt, ne sembla pas lexciter autant quil le fallait.
- Ouais, une fille elle est tombée comme une pierre, hier. Tente dla contenter avant dte rposer. La maison fait pas dans linsatisfaction.
Un grognement répondit à lépaisse maquerelle, qui finit sa réplique dun bougon étouffé lancé à la paresse dune jeunesse si fraîche. Elle indiqua les cuisines où il prépara, armé de bâillements bruyants, le plateau nécessaire à un réveil en douceur. Quelques brioches de gros sucre, un brouet trop solide en cannelle & des poires si finement coupées quil failli par deux fois y perdre le bout dun doigt.
Là, enfin, il monta, pieds nus traînant la carcasse lassée dune soirée improductive. Ce nest quune fois le plateau déposé sur un guéridon vacant quil redressa le buste, vint se pincer les joues, secouer sa mèche folle, & enfin paru tel le courtisan quil avait bien la flemme dêtre au petit jour.
- Bonjour, rayon de soleil, souffla-t-il au creux dune esgourde recouverte de lépais duvet. Il nétait pas encore temps de découvrir les chairs, & malgré la chaleur diffusée par lâtre au rez-de-chaussée il faisait assez frais pour que lodeur de cannelle la séduise tout à fait. Lui pourtant nétait toujours vêtu que de braies aux lacets lâches, torse nu invitant, comme si la fatigue navait plus lieu dêtre déjà, à une luxure bien matinale. Un doigt caressa la joue molle de sommeil pour relever une mèche & voir un peu mieux la créature quil allait devoir baiser.
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« Avant tout, que ton esprit soit bien persuadé que toutes les femmes peuvent être prises :
tu les prendras ; tends seulement tes filets.
Les oiseaux se tairont au printemps, en été les cigales, le chien du Ménale fuira devant le lièvre,
avant que la femme résiste aux sollicitations caressantes d'un homme.
Celle même, dont tu pourras croire qu'elle ne veut pas, voudra. »
Ovide, L'Art d'Aimer, LIVRE I.
« Avant tout, que ton esprit soit bien persuadé que toutes les femmes peuvent être prises :
tu les prendras ; tends seulement tes filets.
Les oiseaux se tairont au printemps, en été les cigales, le chien du Ménale fuira devant le lièvre,
avant que la femme résiste aux sollicitations caressantes d'un homme.
Celle même, dont tu pourras croire qu'elle ne veut pas, voudra. »
Ovide, L'Art d'Aimer, LIVRE I.
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