Merance
Il est des blessures qui ne s'ouvrent qu'à la nuit,
à l'heure où les rires se taisent,
où l'âme a froid et fait trembler le corps.
- *Richard Bohringer -
à l'heure où les rires se taisent,
où l'âme a froid et fait trembler le corps.
- *Richard Bohringer -
- Il y a des choses qui passent et d'autres qui s'installent, prennent racines et ne veulent plus être délogées. Dans la vie de la Maudite, ses errances faisaient partie de celles qui étaient profondément ancrées, de sorte que même si la jeune femme voulait changer, son besoin de partir loin reprenait toujours le dessus. Et c'était ce qui lui était encore arrivée
encore et toujours
A peine avait-elle pris ses aises au cur des cielo Azzurro qu'un besoin irrépressible de prendre la fuite était venu ronger son âme déjà bien dérangée. A croire que jamais elle ne saurait trouver la paix, à croire que de partir à la recherche de quelque chose dont même elle ne savait pas encore s'il existait était devenu primordial voir vital. Alors elle fuyait, inlassablement toujours et encore .
Et pourtant, c'était toujours à Paris qu'elle revenait. La Capitale avait ce petit je-ne-sais-quoi qui faisait que Mérance s'y rendait toujours les yeux fermés. Même si ce n'était pas la ville dans laquelle elle avait vu le jour elle s'y sentait chez elle. Et puis depuis le temps, elle avait appris à connaitre les quartiers, les gens, les bons et les mauvais et faisait avec ce mélange hétéroclite que la vie lui servait. Personnellement cela ne la dérangeait en rien. Elle allait aussi bien chez la catin du bordel comme chez la duchesse de la tronche en biais, du moment qu'à la sortie on lui filait une bourse remplie d'écus et qu'on la laissait partir sans lui exiger quoi que ce soit de plus ou de moins. Pas d'avantage en nature et encore moins la certitude que le sort ou la potion ferait des miracles. Mise à part les breuvages qui ôtaient la vie, les autres avaient ce petit côté aléatoire qui charmait tant la sorcière. Combien de fois en avait-elle rit avec Midia quand elle lui contait cette drôle de vérité et puis sérieusement, si les gens faisaient appel à une sorcière c'était que dans tous les cas soit elle était leur dernier recours, soit ils voulaient garder cette histoire secrète donc personne ne viendrait déposer une réclamation à l'inquisition de peur de se voir obliger de partager la peine affligée. Donc Mérance allait et venait dans Paris, en plein milieu de la nuit.
Première escapade, elle l'avait passée sur les toits des chaumières. Regardant le ciel, son regard s'était vite obscurci. Là haut, entre les étoiles qui scintillaient de mille feux passaient quelques trainées de poussières d'étoiles qui n'arboraient rien de bons. Et depuis plusieurs nuits déjà, Mérance avait pu constater cet état de fait. La chaleur étouffante, le scintillement anormal du ciel, des trainées de feux à en croire certains prédicateurs dans la rue, la fin du monde n'était pas loin. Et c'était une main éternellement glacée qui tenait prisonnier le cur de la sorcière. Et Mérance n'aimait pas cette sensation que sa vie allait s'arrêter comme un simple claquement de doigt. Pour elle, rien n'avait jamais été facile et cette nuit encore moins que les autres. Pourtant, la lune lui offrait une vision ronde et éclairée qui fit se décider Mérance. Il lui fallait maintenant chasser un gibier. Jeune de préférence parce que sinon, il y aurait de la résistance et puis son âme pouvait très bien s'accorder avec ce qui suivrait
La chasse était donc ouverte en cette nuit étoilée et lunaire. Sourire aux lèvres, la sorcière sautillait de toit en toit, prenant soin de ne pas faire trop de bruit ni d'aller trop haut. Le but n'étant pas de se rompre le cou avant d'avoir réussi à vivre ce qu'elle avait encore à vivre et puis soudainement, son regard fut attiré par une silhouette. Saisie d'un long frisson, Mérance hésita. Ce passé pas si éloigné que ça ne pouvait pas revenir ainsi. Ce ne pouvait être celle qu'elle croyait. Dormant mal depuis des semaines, la sorcière se persuada qu'elle avait la berlue mais pragmatique quand même, elle décida d'en avoir le cur net. Et puis elle aimait les défis surtout quand ils lui permettaient de retrouver des gens qu'elle aimait.
D'un pas léger, la rousse continua son petit bonhomme de chemin oubliant un instant la chasse qu'elle avait l'intention de mener. Plus tard, cela pouvait attendre quelques heures. Le levé du soleil était encore loin et lui laissait un laps de temps pour renouer avec le passé. Les dieux ne pouvaient pas être si cruels et lui jouer ce tour... non pas ce soir, pas cette nuit où la vie devait offrir un dernier souffle afin de sauver l'humanité. C'était trop important pour que cela soit une coïncidence. Et Alors qu'elle tentait de prendre appui sur un rebord de fenêtre un peu plus étroit, Mérance perdit l'équilibre et tomba lamentablement dans un tas de foin qui servait à approvisionner l'écurie du maréchal ferrant à quelques pas de là. De la chute retentit un bruit sourd qui fut suivi d'un grognement avant de laisser s'échapper une longue plainte. Et ce fut une Mérance se tenant le côté de la hanche droite et les côtes qui sortit de la paille en maugréant tout ce qu'elle savait.
- Mais depuis quand je me casse la gueule comme ça . et par les cornes du bouc... que j'ai mal
Son souffle était encore coupé et elle le cherchait au fin fond de ses chausses quand elle se rendit compte qu'elle en avait perdu une dans la chute. Secouant lamentablement sa tête, elle tenta de lever le pied chaussé afin d'en extirper l'unique rescapée et de la balancer au loin ce qui eut pour effet d'effrayer un chat qui dormait paisiblement sur un tonneau. Et comme une catastrophe n'arrivait jamais seule, la bestiole prit la fuite en faisant tomber un pot de fleurs. Décidément cette nuit s'annonçait longue et fastidieuse !
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En constante recherche de RP... n'hésitez pas à me MP