Afficher le menu
Information and comments (0)
<<   1, 2   >   >>

Info:
Une rencontre suspecte, une fille qui me prend pour un fat, et une vieille connaissance qui réapparait è un moment fort inopportun : il n'en faut pas plus pour trianguler des asperges.

[RP ouvert] La triangulation des asperges

Gwennegh
Ce RP est ouvert à quiconque veut y participer, qu'importe l'endroit où il se trouve IG. Je ne définis pas l'endroit où ça se trouve pour ne rien empêcher, alors n'hésitez pas le moins du monde : participez si vous le voulez ! Juste quelques points de cohérence à respecter quant au paysage, à la saison et à l'heure de la journée où commence ce RP. Et c'est touuuut ! Bon jeu ! Et les PS sont bienvenus aussi !



    « Quand on ne sait pas où l'on est, on peut difficilement savoir où l'on va. »
    Réflexion d'une Galloise en France


𝒰ne fois n'est pas coutume à ce que l'on dit. Pourtant c'était bien la cinquième ou sixième fois que Gwenn se perdait depuis qu'elle était en France, alors peut-être que si une fois n'est pas coutume, au bout de trois, on peut commencer à appeler ça une habitude. Tout ce que savait la Galloise de l'endroit où elle se trouvait, c'était qu'il y avait un bosquet d'arbres assez touffus à une vingtaine de mètres de là, qu'une rivière serpentait au loin — elle en voyait le scintillement — et qu'une croix se dressait au carrefour de quatre sentiers de terre battue. Elle était devant un calvaire, et la pierre sous la croix était gravée de mots qu'elle ne savait pas déchiffrer. Tout cette histoire ne commençait pas très bien pour la Galloise, en résumé.

𝓔lle tourna sur elle-même à plusieurs reprises, poings sur les hanches et sourcils froncés. Sa robe était pleine de poussière, elle avait faim, soif, et mal aux pieds. Cela faisait deux fois qu'elle remontait son épaisse crinière rousse, bouclée, en chignon qu'elle maintenait à l'aide d'un pic en bois. Elle n'en supporterait pas davantage. Elle voulait que tout soit écrit en gallois, que les gens parlent gallois, que tout soit aussi limpide et simple qu'à Anglesey... bref, elle aurait voulu une immense île, bien comme la sienne, où tout aurait été bien comme il faut. Et surtout pas comme ça !

𝒢wenn pesta haut et fort dans sa langue natale, jurant comme un charretier et insultant tout le monde, depuis l'inventeur des sentiers de terre battue au Bon Dieu qui n'animait même pas la statut d'Aristote en pleine souffrance pour lui indiquer la bonne route. C'était pourtant bien simple, non ? Les miracles, c'était son truc, au Bon Dieu, non ? Il ne se donnait vraiment pas de mal...

𝒞ela n'était pas très compliqué. Elle était partie de cette ville, là-bas plus loin, et voulait atteindre l'autre ville, là-bas plus loin aussi. Alors pourquoi y avait-il quatre chemin ? Si elle excluait celui d'où elle venait, ça en laissait quand même trois. Et c'était deux de trop. Gwenn n'aimait pas quand c'était compliqué. Elle tapait sur les choses compliquées jusqu'à ce qu'elles deviennent simples, mais taper sur chemin ne servirait à rien. Un chemin, c'était encore plus têtu qu'une Galloise. C'était peu dire !
    - A fydd rhywun yn fy helpu i ddod o hyd i fy ffordd ?

𝓔lle avait parlé en gallois sans s'en rendrecompte, la colère faisant remonter sa langue maternelle à la surface. Elle se racla la gorge et répéta, dans un français moyen, à peu de chose près la même chose, précisément au cas où quelqu'un passerait miraculeusement par-là.
    - Est-ce qu'un gens va m'aider à emprunter ma route bonne vers la ville ?

𝓔lle tapa du pied, pour faire bonne mesure, et jeta son sac par terre. Pitié, implora-t-elle en levant les yeux vers le calvaire. Quelqu'un, n'importe qui !


[Titre issu d'un épisode de la série Big Bang Theorie]

_________________
Soren
     
    « Quelque part dans la campagne angoumoisine, Printemps 1465 »


- Vous en pensez quoi Poissac?

- Ben, y’a pas d’doute chef! Elle ressemb’ à la description d’la victime.

- Ouais…Enfin...vous voulez dire la description qu'en a faite la victime j'imagine... Ceci dit, une description pareille correspond à la moitié des habitantes du royaume hein!

- Mais y’en a combien des donzelles pareilles qui trainent sur les lieux d’un brigandage?

- Et il y a combien de brigandes qui cherchent leur direction ?

- C’te fourbe une brigande chef! Ça louvoie tout l’temps, ça noie l’pichon! la meilleure des brigandes c’te celle qu’on prend pour une sainte-nitouche qu’a l’air perdu au plein milieu d’la campagne... alors qu'en fait, elle appâte l'niaiseux.

Les avant-bras appuyés sur le pommeau de ma selle, cela fait un moment que j’observe la scène qui se présente devant moi. Seule. Perdue…mais correspondant au signalement effectué par la victime. Comme l'a dit Poissac. Le brigandé avait même ajouté : « un regard de démente, un petit nez pointu capable de flairer les passants à une lieue à la ronde, une langue trop bien pendue avec un accent étranger ». Manifestement, elle est folle ou elle joue bien son rôle mais la route entre Rochechouart et Angoulême commence sérieusement à me taper sur les nerfs. Alors perdue ou pas, il fallait l’interroger. Je ne pouvais me permettre le luxe de laisser passer un coupable…quitte à suspecter un innocent. Et puis, si c'est vraiment une brigande, j'ai besoin de savoir si le Limousin suggère vraiment aux brigands d'oeuvrer ici, leur offrant aide et protection contre une partie de leur butin. D’un geste du menton, j’ordonne aux gardes de se déployer de part et d’autre de la croisée des chemins. La donzelle n’a pas l’air bien dangereuse mais comme a dit Poissac, on ne peut tout de même pas juger un individu sur son faciès.

Quelques instants plus tard, Poissac revient à ma hauteur et d’un signe de la tête me signale que tout est en place. Maintenant, il ne reste plus qu’à agir.


- Gardez ma monture Poissac, je n’en ai pas besoin.

Adossé à un vieux chêne biscornu situé de l’autre côté du calvaire, les bras croisés sur la poitrine, un pied appuyé sur le tronc, j’observe la suspecte. Le problème, c'est que plus je l’observe et plus le doute s’insinue dans mon esprit. Elle tient plus d’Orkaange ou de la Mère Crouzy que de Satyne ou Enjoy Corleone.

    -« Et quand tu as rencontré Syuzanna NicDouggal, pensais-tu qu’elle aurait pu commanditer le pillage de Sarlat parce que tu as rompu avec elle ? »

    - «  La ferme! Je travaille! »

    - «  Mouarf! Laisse-moi rire! T’appelles ça travailler toi? Six hommes de la maréchaussée pour s’attaquer à une Daaaaangereuse criminelle solitaire? J’espère au moins que la comtesse va t’octroyer une médaille pour cet acte de bravoure! Peut-être même un titre de noblesse ?

    - « Tu sais où je les mets tes médailles et ton titre de noblesse ? »

    - « Oh mais je vois que Mossieu fait dans la grossièreté aujourd’hui. Je doute que ta mère aimerait entendre son fils avoir un langue aussi cru. »

    - « Ma mère est comme toutes les écossaises. Si elle ne jure pas et ne crache pas par terre après chaque phrase, c’est qu’elle est malade. »


L’Autre avait le don de m’agacer parfois. C’était son rôle. Ces derniers temps il avait changé de tactique. D’habitude il cherchait à instiller la haine en moi. Il cherchait l’affrontement, le choc frontal. Il n’avait aucune subtilité. Il jouait sur les détails qui me mettaient rapidement en colère. Et voilà que maintenant, il fait preuve d’ironie, d’humour noir parfois. A t-il perdu en force? L’exorcisme de soeur Marie-Clarence porte-il finalement ses fruits? Ou bien est-ce un effet secondaire du baptême? Ou un changement de tactique délibéré?

- Dieu ne vous répondra pas! Il déteste l’architecture de ce calvaire…à moins que ça ne soit parce que celui-ci est utilisé par les brigands du Limousin pour y cacher bières et vivres lorsqu’ils sont en vadrouille de ce côté de la frontière.

Et voilà! C’est ce qu’on appelle une prise de contact amicale.

    -« Tu devrais te poster devant elle en mâchonnant une tige de surelle ou de blé. Tu vas l’impressionner comme ça. Ça fait plus viril!»

    - «  Tais-toi! »


Petite vérification de dernière minute : d’ici, je ne vois aucun des gardes. Au moins, ils ont trouvé un endroit dissimulé de la route. La dernière interception il y avait deux jours tenait plus du défilé militaire que de l’opération de sécurité intérieure. Bah! Au moins cela avait été l’occasion de leur expliquer pourquoi Gertrude était maréchale, que Poissac était leur supérieur avec ses dix années d’ancienneté dans la maréchaussée du comté et que eux n'étaient encore que de simples gardes. J’avais omis de leur préciser que cela faisait dix ans que Poissac essayait de graduer comme maréchal. Si on veut avoir un discours qui a de l’impact il faut parfois tourner omettre le superflu.

- Vous êtes ici sur le sol du Périgord et de l’Agoumois…

Finalement, l’Autre a raison : parler à distance c’est prendre le risque de ne pas se faire comprendre. Les bottes soulèvent la poussière d’une route qui n’a pas vu la pluie depuis une semaine. Arrivée à la hauteur de la "voyageuse", je jette négligemment un regard à gauche puis à droite puis la toise de toute ma hauteur.

- Par là, vous allez à Rochechouart… De l’autre côté, la route vous mène à Angoulême. Sur votre droite, la route va se rétrécir dans une lieue et mener à la hutte du père Manganate, un vieil ermite, sorte de réfugié politique de l’après révolte castillonaise. Et sur votre gauche, ça mène aux mines de fer comtales. J’Imagine que c’est ça que vous cherchez, n’est-ce pas?

    -« Pssssitttt… T’as encore oublié de te présenter. »


- Mais avant d’aller extraire le minerai…. Si on vous demande quel est cet individu à l’étrange accent nordique qui vous a interpellé à la croisée des chemins, vous pourrez simplement répondre : Oh lui? Il a prétendu s’appeler Seurn…Seurn MacFadyen Eriksen…ou un truc comme ça. Ah! Et il a aussi dit qu’il était prévôt du comté du Périgord-Angoumois et que je pouvais mander un avocat avant de répondre à ses questions.

    -« Mon Dieu… »




edit pour correction de typo

_________________
Gwennegh
    « Les ennuis c'est comme les tantes célibataires, ça te poursuit quand tu les évites. »
    Réflexion d'une Galloise qui sait de quoi elle parle.


𝒯rop occupée à pester contre l'ensemble de l'humanité qui était évidemment responsable de sa situation actuelle, Gwenn n'entendit l'homme arriver que lorsqu'il ouvrit la bouche pour parler. Lentement, elle tourna le nez vers lui pour le dévisager. Il s'agissait immanquablement d'un homme. Blond. Aux yeux clairs. Il n'avait pas l'air très vieux, mais quand même un peu plus qu'elle. Et surtout, il n'avait pas l'air d'avoir remporté le titre du boute-en-train de l'année. Autre chose notable à apprendre, il lui parlait. Il disait des mots. Elle ne les comprit pas tous, mais elle n'allait certainement pas le montrer. Gwenn se redressa donc de toute sa petite taille et acquiesça d'un air savant, en tapotant le calvaire du plat de la main.
    - Ça, l'architexture est bien dense ! Je comprends que Dieu n'aime pas. Mais c'est du caillou c'est forcément solaire, non ?

𝒜rchitecture, texture, c'était pareil, non ? Solide, solaire, ça sonnait pareil, pas vrai ? Et puis il était Français, il comprendrait. Les Français comprenaient bien, en général. Sauf que celui-ci avait un nom qui lui tira un large sourire. Un Mac ? Voilà qui devenait intéressant !
    - Oh MacFadyen, ie ? Scottish ? Moi, cymraeg. Presque voisins ! Heureuse, heureuse !

𝓔lle lui flanqua une grande tape amicale sur l'épaule en souriant jusqu'aux oreilles. Cela faisait toujours plaisir de rencontrer des cousins, surtout en terre étrangère. N'avait-elle pas de la famille, d'ailleurs, en Écosse ? N'y avait-il pas cette tante, du côté de sa mère, qui s'était établie en Écosse avec un paysan du coin ? Le coup du grand amour, et tout ça ? Si, il y avait bien ça, chez les Cadwell. Même si Gwenn n'avait quasiment jamais vu ladite tante devenue Écossaise par alliance, elle n'était pas sans ignorer qu'une petite partie de la famille s'était installée en plein coeur des munroes. Bien que cette pensée ne l'occupe pas plus d'une demi-seconde par an.
    - Je suis Gwennegh. Gwennegh Cadwell mais on me nomme Gwenn alors... Et puis c'est un racorni et j'aime bien.

𝒮i Gwenn connaissait le véritable sens du mot « racorni », elle aurait probablement aussitôt appris à dire « raccourci », mais comme elle n'en savait rien, elle se contentait de sourire, très sûre de son français pourtant terriblement bancal.
    - Mines ? Fer ? Mais non, que veux-tu que je fasse avec du fer ? Aucune besoin de ça.

𝓔lle partit d'un grand rire, certaine que l'autre se payait sa tête, et lui donna une nouvelle tape, sur le bras cette fois. Puis elle secoua la tête et reprit son sérieux, tâchant de bien comprendre ce que l'homme venait de lui dire.
    - J'ai réalisé ! La bonne chemin est ici. Dans la droiture ! C'est délicat ici les chemins, le sens... Beaucoup de villages. Délicat de s'y trouver. Merci, mon ami !

𝓔lle s'apprêtait à repartir d'un bon pas lorsqu'elle s'arrêta soudain, en fronçant les sourcils. Gwenn venait d'entendre un mot nouveau, et elle devait comprendre sa signification. Ça lui ferait toujours un peu plus de vocabulaire, après tout. Et on ne crachait pas sur le vocabulaire.
    - Pardon mais... C'est quelle race, ça, un âne voca ? Je n'en ai jamais observé... À quoi cela a l'air ?


ie : oui
cymraeg : galloise

_________________
Soren

     « Les Français croient qu'ils parlent bien le français parce qu'ils ne parlent aucune langue étrangère. »
    Tristan Bernard


For fanden! Mais qu’est-ce que c’est que ça? Un caillou forcément solaire ? Qu’est-ce qu’elle veut dire par là? J’ai déjà eu cette sale impression que l’on ne me comprend pas toujours. J’ai mis ça sur le compte de mon accent danois et de son incompatibilité avec l’occitan. L’un est plus guttural tandis que l’autre a tendance à rouler en bouche. Mais là…

- Solaire je ne sais pas mais je peux vous dire que c’est de la pierre de Bergerac.

    - « C’est quoi cette réplique? Pourquoi tu te donnes la peine de lui dire d’où vient la pierre qui a été utilisé pour le cavlaire? »

    - « J’en sais rien. » 

    - « Et puis, tu es sur que c’est du silex de Bergerac? »

    - « J’en sais rien. »

    - « Ouais! Mais tu sais quoi finalement? »

    - « Euh…J’en sais rien. »


Mon père…Enfin mon oncle…Celui qui se prétendait mon père mais qui en fait était mon oncle quoi..Bref Lars Eriksen avait ce don de rester impassible devant ses interlocuteurs : que ceux-ci cherchent à le déstabiliser, à le flatter, à l’entourlouper. Il pouvait rester de marbre devant n’importe qui, qu’il comprît ou pas la langue de celui-ci, qu'il saisisse les tournures de phrases ou pas. Il gardait le même air hautain devant un paysan du Jutland que devant un émissaire du Duc de Valachie. Il fallait reconnaître que malgré le nombre incommensurable de ses défauts, mon oncle avait au moins cette qualité… et en cet instant, j’espérais que cela fit partie de l’héritage familiale.

- Un rat cornu? Vous voulez faire référence à l’invasion de rats qui..euh…a envahi nos villes et nos compagnes ?

    - « Une invasion qui a envahi? Là au moins tu ne peux pas te tromper.  »

    - « Qu’est-ce que tu dis ? » 

    - « que si tes compagnes sont envahis par les rats, achète des chats! »

    - « Hein? »

    - « Non rien. Laisse tomber. Je vérifiais si tu suivais. C’est tout. »


De deux choses l’une. Soit elle se fout de ma tête parce qu’elle a quelque chose à cacher et qu’elle a choisi de jouer la niaiseuse pour cela. Soit elle se fout de ma tête parce qu’elle déteste les prévôts. Dans tous les cas, elle se fout de ma tête. D’ailleurs, son accent n’est guère crédible. Elle force tout de même un peu trop pour se faire passer pour une estrangère.

- Scottish ouais! Par ma mère! Mais laissez tomber, je ne sais pas faire le haggis, mon beau-père n’a jamais voulu m’apprendre à la cuisiner.

Ni à parler gaélique, ni à manier une claymore, à lancer le tronc d’arbre. En plus, il ne buvait pas de bière mais ce satané hypocras que seul lui pouvait avaler. Quand au port du kilt, il avait dit que je faisais honte au clan MacFadyen lorsque je le portais.

- Vous venez de Rochechouart? Ici on ne parle pas le limousin mais l’occitan! Vous comprendre moi?

Mais c’est qu’en plus elle se permet des familiarités? Dites donc ma petite dame, c’est une chose de brigander sur les routes, c’en est une autre de se permettre des familiarités avec les prévôts hein! A ce que je sache on n’a pas volé les poneys ensemble. Une fois n’est pas coutume, ce fut Poissac qui me sortit du trouble. Il venait de sortir de sa planque et se dirigeait vers nous, un sac entre les mains.

- Chef ! R’gardez c’qu’on vient d’trouver !

Celui qui ne sera sans doute jamais maréchal et restera toute sa vie simple grouillot-maréchal me tend le sac qu’il avait au préalable et de toute évidence fouillé. A l’intérieur, il y avait des braies de couleur bourgogne, une chemise blanche, un surcot bourgogne agrémenté d’un rebord en laine de mouton et d’une ceinture de cuir.

- Tiens! Tiens! Tiens! C’est à vous ces vêtements? Vous allez peut-être me dire que vous aimez vous accoutrer en homme parce qu'un homme qui voyage seul attire moins les brigands ?

- Et c’te pas tout Chef. L’Guimond a aussi trouvé dans l’creux d’un arbre d’quoi bouffer pour une s’maine au moins. Y’avait même un tonnelet d’bière. D’ls Ste-Illinda en plus!

- Ah oui? Intéressant. Dites-moi damoiselle…

On va peut-être me reprocher ma fermeté lorsque j’attrape l’inconnue par le bras, l’empêchant ainsi d’avancer plus loin sur le chemin mais comme les suspicions se font de plus en plus fortes et qu’en plus elle se paie ma tête…

- Ce n’est pas ce chemin-là que je vous conseille mais plutôt cette route-là! Celle qui mène à Angoulême. Je vous emmène pour interrogatoire dans le cadre du brigandage du sieur Bradwen il y a deux jours, ici même. Poissac va vous fournir la liste des dragons, je vous conseille fortement de choisir le meilleur. Il parait qu’il y en a même qui font de la traduction en simultané du Limousin à l’occitan!

Décidément, les brigands devraient prendre de meilleurs cours de comédies. Ah les professeurs de Belrupt! Ils ne sont plus ce qu’ils ont déjà été!
_________________
Gwennegh
    « Rien ne semble plus bizarre qu'un autochtone, quand on est étranger. »
    Réflexion philosophique d'une Galloise qui va avoir des problèmes.


𝒢wenn mit quelques instants à comprendre ce que l'homme lui racontait. Quelle était donc cette histoire de rats ? Et de compagnes ? La Galloise savait ce que voulait dire ce dernier mot, un marin Français n'avait eu de cesse de lui demander si elle voulait bien devenir la sienne, jusqu'à ce que finalement, elle lui envoie un coup de poing en pleine figure. Cela avait quelque peu refroidi les ardeurs du jeune matelot. Fallait pas déconner avec ce genre de choses.

    - Pas de rat. Vous mettez les rats dans vos femmes vous ? Weird, dyn.

e reste de la conversation lui échappa complètement. Qu'est-ce qu'il entendait donc « vous venez d'un rocher noir ? » C'était une blague sur son île ? Là, elle allait le prendre mal. Très mal, même. Gwenn était aussi profondément attachée à son pays qu'un arbre pouvait l'être à sa terre. Personne n'avait le droit de se moquer d'Anglesey, pas même l'un de ces foutus Écossais. Quand on portait la jupe, fallait pas trop la ramener.

𝓔t puis voilà que sorti de nulle part, un homme débarqua avec un sac dans les mains. Celle de Gwenn glissa légèrement vers son poignard. Il commençait à y avoir beaucoup d'hommes, ici. Non pas qu'elle ait peur, elle était Galloise après tout, des types comme ça, elle en ferait son goûter avant d'en trouver d'autres pour la soupe du soir. Mais savait-on jamais, avec ces Français. Ils n'étaient pas bien nets, tout le monde à Anglesey s'accordait à le dire.

𝒱oilà que le premier des deux, le blond, brandit une espèce de chemise et des braies et l'accusait visiblement d'en être la propriétaire ! Mais ce n'était pas tout ! D'après ce qu'elle put en saisir, ce grand type déclarait qu'elle était coupable de quelque acte violent envers un sieur quelconque. Qu'est-ce que c'était que cette comédie ? Gwenn freina aussitôt des deux pieds et refusa d'avancer, quitte à s'en arracher le bras. Les talons enfoncés dans le sol, elle ruait en arrière et hurlait, mélangeant gaiment les deux langues :

    - Je ne suis pas d'un rocher noir, dyn dwp ! Je vais pas à Anglême ! Je suis Galloise ! Ynys Môn ! Sut ydych chi'n ei ddweud... Anglesey ! ANGLESEY ! Galloise ! On ne se rit pas de mon île, vieux poireau !

𝒟'un geste agacé, elle désigna le sac et les vêtements.

    - C'est des... des... des vêtements, oui, de garçon ! Je suis une fille, moi. Ouvre tes grands yeux ! Et puis dragon, c'est chez moi.

𝒜gacée, Gwenn lui tapa sur le dos de la main assez vivement, juste assez pour qu'il en ressente une légère douleur, comme quand on se pique le bout du doigt avec une aiguille. Fulminant des pieds à la tête, outrée d'être ainsi accueillie en terre étrangère par un quasi-cousin, elle était bien décidée à aller se plaindre aux autorités. Il fallait mettre ce siphonné au cachot, ou mieux, lui couper les mains. Voire la tête si c'était plus simple.

    - Lâche-moi ! Je vais demander justice pour le traitement ! Mauvais homme !



Weird, dyn : Bizarre, cet homme
Dyn dwp : homme stupide
Ynys Môn : Anglesey
Sut ydych chi'n ei ddweud... : Comment dit-on...

_________________
Samsa
    "La patrouille des éléphants
    S'achemine pesamment
    La trompe en avant,
    Les oreilles au vent,
    Et circule militairement !
    Et circule militairement !"
    (Le Livre de la Jungle - La patrouille des éléphants)



En vadrouille dans le Poitou, la Conquérante d'Anjou circulait à cheval sur son Cleveland Bay au doux nom de Guerroyant. Le fier destrier portant bricole fleurdelisée était relayé au rang de cheval de trait depuis que l'armée de Samsa s'était vidée sans pour autant être détruite. Il fallait dire que l'étendard sinople des Crocs du Basilic II effrayait tout brigand, même les plus fous. C'est donc un étrange convoi que mène la Prime Secrétaire Royale, juchée sur le cheval qui tire en même temps sa charrette de maigres provisions, les rênes dans la main droite et l'étendard dans la gauche. De son plein gré, Cerbère patrouillait, envoyait des rapports aux autorités, proposait son aide pour escorter des marchands; c'était parfois délicat à gérer avec les plus hautes autorités mais Samsa avait le don de savoir mener sa barque. Enfin, son armée en l’occurrence.
Vêtue martialement comme à son habitude, sa cotte de maille sous sa chemise grise et son tabard en damier noir et bleu bordé d'or où était brodé une fleur de lys de même couleur à la poitrine gauche -signe de son statut d'officier royale- et dans le dos, elle portait l'épée à sa taille et des gantelets de combat à ses mains. La Cerbère savait les routes du Périgord sûres, c'est pourquoi elle ne portait pas son bouclier sanglé à son épaule gauche, ni sa barbute, laissés tout deux dans la charrette.
En route pour Périgueux, il lui fallait cependant passer par Angoulême pour y parvenir et ainsi retrouver ses amis Poneys. Les Poneys Roses, ce clan composé qui ne connaissait pas toujours tous ses membres mais ils avaient tous en commun l'amour de la folie. Ils avaient tous, quelque part et à des degrés moindre, un grain comme on disait. Solidaires, amicaux, les Poneys vivaient en harmonie avec les leurs et participaient à rendre ce monde plus... plus rose.

Presque arrivée au carrefour, ce sont des éclats de voix qui se font entendre et Cerbère incline légèrement de la tête, intriguée. Les rênes passent dans la main gauche avec l'étendard pour que la droite vienne se poser sur le pommeau de l'épée, prête à être dégainée et à se battre. Samsa était une femme de combat, qui ne vivait presque que pour cela, c'est pourquoi elle était bien souvent la première à se jeter au coeur de la mêlée pour le simple plaisir de taper, de couper, voire de tuer. Surtout les angevins. Et les berrichons. Et les bretons.
Ses petits yeux sombres, enfoncés sous des arcades sourcilières marquées, aperçurent enfin l'objet de ce qu'elle avait entendu. Un homme visiblement déterminé à emmener une femme qui, elle, l'était tout autant de ne pas l'être. La capitaine, en temps normal, aurait réfléchi à savoir qui était en tort et qui avait raison avant d'agir mais la jeune femme est rousse et ça, ça parle à celle qui a des cheveux semi-roux, perdus quelque part entre le brun avec de puissants roux, ou l'inverse; chacun disait ce qu'il voulait mais personne ne pouvait la qualifier de brune ou rousse exclusivement. En plus elle est anglaise et la Prime Secrétaire Royale les adore.


-M'enfin pardi ! Mais qu'est-ce qui se passe ici té ? Mais lâchez donc cette pauvre demoiselle allons té !

L'accent est bordelais, la voix est, elle, légèrement plus grave que la moyenne féminine sans pour autant paraître masculine et des tics de langage viennent ponctuer chacune de ses phrases. Juchée sur le cheval qui tire la charrette, il y a quelque chose de ridicule à la situation de Samsa qui est pourtant tout ce qu'il y a de plus fière, ça se voit à son port de tête et à la façon dont elle tient droite sa carcasse trapue et robuste.

-Vous n'avez pas honte de vous en prendre à cette jeune femme sans défense té ? Pis vous êtes qui d'abord pardi ? Un maraud té ? Je suis capitaine d'armée, vous feriez mieux de parler avant que je ne vous exécute de la lame de mon épée pardi !

Samsa était diplomate. Vraiment. Mais parfois, elle n'avait pas conscience du ridicule de ses paroles, ni de son impulsivité. Elle était un Poney après tout, elle avait donc un grain et cela se voyait en l'instant. La Prime Secrétaire Royale les fixait chacun tour à tour, son visage aux traits majoritairement figés dans une immobilité qu'on supposait martiale lui donnant un air impassible immédiatement contredit par les commissures de ses lèvres qui remontaient légèrement dans un sourire inconscient.

Alors, qui allait être embroché par cette charmante journée ?

_________________
Soren
     
    « Tant va la greluche à l’eau qu’à la fin, elle nous les casse! »
    Søren MacFadyen Eriksen


- Elle vous prend pour un fat Chef! Elle s’moque d’vous et la comtesse dirait que quand on s’moque du prévôt du Périgord-Angoumois, c’te de tout l’comté qu’on s’moque.

Elle m’agace. Je ne comprends strictement rien de ce qu’elle me raconte. For fanden! Mettre les rats dans les femmes ? Soit elle veut parler de torture…soit elle évoque des accouplements que la morale, le Très-Haut et tout le toutim récusent! Avec raison. Bon, c’est décidé, l’acte I n’a été qu’une bouffonnerie sans nom. Il est temps maintenant de passer à l’acte II. Deux doigts dans la bouche et un sifflement strident se fait attendre. J’aime ça quand je peux donner des ordres aussi facilement que ça.

- Ou alors elle a pas toute sa tête chef! Elle est un peu follette quoi…Ça expliqu’rait pourquoi elle arrive à s’perdre sur une route.

Follette ou pas, ces vêtements appartiennent sans aucun doute à la victime et ils ont été retrouvé ici même, là où elle se trouve. elle correspond à la description qui a été faite lors du dépôt de la plainte. Elle se paie ma tête et ose frapper un maréchal dans l’exercice de ses fonctions. Qui d’entre vous hésiterait s’il était à ma place? Hum? Après Poissac, ce sont les 5 autres gardes qui font désormais irruption, appliquait scrupuleusement la tactique de la tenaille pour empêcher tout fuite en avant…ou en arrière. Vu qu’elle est totalement perdue, elle peut bien fuir n’importe où. Si ça se trouve, elle ne sait même pas où elle veut aller.

- C’est bon! J’en ai assez entendu comme ça! Embarquez-là moi! Saucissonnez-là et mettez le fardeau sur ma monture! J’ai attrapé un mal de tête à force de l’écouter déblatérer.

- Bien Chef! Est-ce qu’on doit lui dire ses droits.

- Si vous voulez. De toute façon, je ne suis pas sur qu’elle a ce qu’il faut pour comprendre ce que vous allez lui dire.

Ma présence est désormais inutile. Poissac et ses gardes feraient ce qu’il faut pour clore l’affaire. Ils en avaient l’habitude. Il ne me reste plus qu’à tourner les talons et à réenfourcher ma monture pour prendre la direction d’Angoulême. Je crois que la première chose que je ferais sitôt arrivé, c’est de la faire ausculter par Patou. Elle doit surement avoir quelque chose de casser à l’intérieur.

- Alors, ça vient ou il faut que j’appelle du renfort pour que vous maitrisiez une faible femme, aussi brigande soit-elle ?

Fin de l’acte I. Jetons ici un voile pudique sur cette scène dont la violence pourrait offenser même les censeurs les plus libertaires. Sauf que…

- Euh… Chef! J’crois qu’y a un problem’ !

Me dirigeant vers ma monture, j’avais le dos tourné à la scène quand Poissac m’interpelle à niveau.

- Quel problème? À six, vous n’êtes pas capable de saisir cette donzelle ?

Pivot de 180 degrés ( ou encore de Pi radians pour les puristes mathématichiens) pour finalement apercevoir devant moi cinq gardes de la maréchaussée du Périgord-Angoumois figés dans le temps et l’espace comme si le Vésuve venait subitement de libérer sa colère, Poissac qui tient encore le bras de la démone mais qui se demande ce qu’il doit et devant tout ce petit monde, il y a ce qui ressemble manifestement à l’avant-garde d’une armée. For fanden! Une armée?!?!?!? Ici en sol de l’Angoumois? Et elle a l’agrément du Périgord-Angoumois cette armée? Matpel For fanden! La maréchaussée n’est pas équipée pour lutter contre les armées, juste les petites bandes de brigands qui font la loi dans le royaume de France! Pourquoi vous n’êtes pas ici avec vos hommes quand il y a une armée en vadrouille dans le coin? Hein? Hein?

- QUI VA LÀ ? VOUS ËTES ICI SUR LES TERRES DU PÉRIGORD ET DE L’ANGOUMOIS!


    - « Euh….C’est une armée…ou l’avant-garde d’une armée que tu as en face de toi hein? Cà n’est pas le Manouche et sa bande de traine-savates ! »

    - « Tais-toi! Ce n’est vraiment pas le moment que tu me casses les pieds avec ce genre de détail! »

    - « Détail? Détail ?!?!?!? »



Marche arrière. Il faut que je passe au travers de cette ligne de gardes qui pourraient servir de gargouilles pour décorer le calvaire. Il faut que je vois qui se permet d’intervenir dans une arrestation parce que si ce sont finalement les lances du clair obscur dont la comtesse Orkaange rêve la nuit dans ses draps froids, Il y a bien mieux à faire qu’à intercepter une personne suspectée de brigandage.

- QUI SE PER…… Oh nooon!… Merdasse!


    - « Tu jures en françois toi maintenant ? Tu files un mauvais lin mon bonhomme… »


Ah non! Pas elle! For fanden! Pas elle! Pas Samsa! Dites-moi que je rêve! For fanden Très-Haut, tu ne peux pas me faire ça! Pas là! Pas maintenant!
_________________
Gwennegh
    « Et maintenant, qui c'est qui rigole ? »
    Jubilation galloise


𝒞'est qu'il insistait, le bougre ! Tout un tas d'hommes se trouvaient tout autour d'eux et Gwenn, loin d'avoir peur, sentait au contraire la colère l'envahir. Cet homme était bien un stupide Écossais. Ou alors il était tout simplement stupide de manière très naturelle. Trois fois de suite, elle lui avait dit qu'elle était Galloise. Il tenait absolument à voir en elle une brigande ? Qu'à cela ne tienne. Elle était débrouillarde et ne comptait pas se laisser enfermer. Il y avait mille façons de fausser compagnie à quelqu'un, fut-il armé jusqu'aux dents. Elle avait six frères aînés, Gwenn savait donc parfaitement se tirer de situations délicates. Et puisque ce limité intellectuel ne voulait pas comprendre quand elle tentait de parler sa langue de barbare, eh bien, il n'y avait plus qu'une seule autre forme de dialogue. Qui nécessitait très peu la langue et beaucoup plus l'usage des poings et des pieds.

ais Gwenn n'eut pas besoin d'en venir aux mains. Elle n'aurait même pas besoin de courir. Une femme, toute vêtue comme pour la guerre, se mêla à la querelle. La Galloise tourna le nez vers elle, tandis qu'un sauvage lui serrait le bras à lui en faire mal. Elle était indubitablement impressionnante. Quelque chose de martial se dégageait d'elle, c'était plus que certain. Et si ses lèvres semblaient légèrement étirées en un demi-sourire, cela ne diminuait en rien son attitude fière et déterminée. Gwenn se gaussa intérieurement. Visiblement, l'idiot du village ne semblait pas ravi de la voir là, même s'il tenta vaguement, au début, d'affirmer son autorité de fête foraine.

𝒟'un coup sec, Gwenn écrasa le pied de celui qui la retenait en otage. Elle montra même les dents en grondant comme un chien furieux, et fit un pas en direction de la femme dont les cheveux, plutôt foncés, semblaient s'illuminer de milliers de reflets roux dès lors que le soleil y glissait ses rayons. Gwenn était bien décidée à la trouver sympathique. À condition évidemment qu'elle ne cherche pas elle aussi à l'enfermer quelque part.

    - Je suis Gwennegh Cadwell. Je voyage en France. Je suis Galloise.

es présentations étaient faites, l'essentiel était dit. Gwenn jeta un regard méprisant et furieux à l'autre Tartempion qui, peut-être, finirait par réaliser que les vrais brigands ne se présentaient pas à tout bout de champ, surtout après un méfait. Mais depuis quand un homme — qui n'était pas Gallois — réfléchissait profondément ?

    - Lui m'accuse d'être une voleuse ! Je suis égarée sur les routes nombreuses ! Quatre chemins, je savais pas qui choisir ! Et lui il dit que je suis une voleuse ! C'est un mensonge et lui est idiot ! Un méchant homme ! Il a fait mal à mon bras !

𝒟'un geste agacé, Gwenn désigna l'endroit où les mains des deux individus s'étaient refermées sur elle. À coup sûr, demain, elle aurait un bleu. Elle n'était pas pas un sac de blé qu'on tirait à sa guise dans un sens ou dans l'autre ! La Galloise s'éloigna un peu plus de son bourreau et croisa les bras, aussi têtue qu'un troupeau d'âne et fière comme un ménagerie de paons. Elle releva le nez, son gros chignon se balançant sur le sommet de son crâne. Une moue hautaine tordait ses lèvres rondes. Elle était bien décidée, telle qu'elle était là, à provoquer un petit incident diplomatique.

    - Il a voulu me arrêter juste parce que je suis Galloise. Je lui dis plein de fois que je suis d'Ynys Môn mais il fait comme si il ne savait pas ce qu'est le Pays de Galles. Il m'accuse d'être une brigand mais non ! Il est trop bête comme ses bottes pour voir ailleurs où est le vrai méchant. Il a vu une fille et il a... — Gwenn se tapota l'oreille, cherchant le bon mot pour désigner ce qu'elle voulait dire. On le lui avait appris, ça... Qu'était-ce donc déjà ? — Ie, entendu mon langue alors il a dit qu'il m'arrête et il dit que les vêtements dans le sac sont la preuve mais c'est faux ! Il est juste... — de nouveau, elle chercha le mot juste. Celui-là, elle ne le maîtrisait pas bien et l'articula lentement, avec un accent encore plus prononcé si possible — in-comp-é-tant !

𝓔t voilà, l'empaffé d'Écossais, songea Gwenn avec jubilation, tout en affichant un air de martyr outragé. C'était ce qu'il se passait quand on s'en prenait injustement à une Cadwell ! Elle balançait la sauce avant même qu'il puisse exposer les faits selon sa drôle de théorie bizarre. Pour ne pas dire fumeuse. De coupable injustement désignée, elle passait à victime malmenée. Toc, dans les dents. Un petit ajout final, peut-être ?

    - Aidez-moi, Dame, plaît-il !


Ynys Môn : Anglesey
Ie : oui

_________________
Samsa
    "Regarde cette photo;
    Chaque fois que je le fais ça me fait rire.
    Comment nos yeux sont devenus si rouge,
    Et que diable y a-t-il sur la tête de Joey ?"*



-Non c'est vrai pardi ?!

Heureusement qu'on lui disait, sinon Samsa n'aurait jamais deviné qu'elle se trouvait en Périgord. Si, en fait, elle le savait très bien puisqu'elle y était de son plein gré pour rendre visite à ses amis Poneys. Qui donc était l'idiot qui insultait ainsi son sens de l'orientation ? Des sens, il est vrai, Samsa n'en avait pas beaucoup : celui de la diplomatie disparaissait parfois, celui de l'intelligence était aléatoire, mais celui de l'orientation, c'était comme celui du courage; on pouvait compter dessus. Parlant de ça, qui étaient ces hommes ? La Cerbère commençait à croire qu'il s'agissait là de brigands très bien équipés qui s'en prenaient à une pauvre innocente malheureuse. Rousse. Et anglaise de surcroît. Cerbère allait les déchiqueter, c'était certain, et déjà la lame de son épée commençait à luire à la lumière du jour, légèrement dégainée. Le cercle masculin s'écarta et un homme en particulier s'en extirpa.

La Prime Secrétaire Royale ne pu s'empêcher de rire.

Ce bon vieux Soren ! Il était la preuve qu'on pouvait recevoir des baffes sans être détesté pour autant. La main gantelée de combat délaisse la poignée de son épée au même moment où la voyageuse se rebiffe. Samsa apprécie son caractère et Cerbère note immédiatement les crocs qui se découvrent, cette similitude entre elles, en plus de la rousseur plus ou moins présente et des yeux sombres. Mon Dieu, ça y est, elle l'aime, c'est certain ! Quelque part en la Bordelaise, elle se dit qu'elle va la sortir de ce mauvais pas, envers et contre tout, et si la théorie passait rarement à la pratique chez certain, il était connu en revanche que Samsa ne faisait jamais les choses à moitié. Parfois c'était drôle, d'autres fois magnifiques, et sinon c'était une catastrophe à retardement.
Appuyée sur l'encolure de Guerroyant, c'est d'un oeil amusé qu'elle couve désormais les événements et écoute les explications de la dénommée Gwennegh de Cadwell. Énième raison de l'aider, une des filles de Samsa s'appelle Gwenn.


-Samsa Treiscan, dicte Cerbère, Prime Secrétaire Royale, capitaine des Crocs du Basilic II et après c'est les titres et c'est pas important là pardi.

Ça aurait fait pédant, une catastrophe quand on est juste fière. D'un petit coup de talons, Samsa fait avancer Guerroyant pour se rapprocher de la jeune voyageuse et ainsi signifier subtilement à Soren ce qu'elle pense de la situation.

-Soren, mon cher Soren pardi... Je suis contente de te revoir ceci dit té ! Tu es maréchal maintenant pardi ? Non pardon té, je vois à ta tête que je t'insulte pardi ! Prévôt té ! Oui c'est mieux, c'est... plus au-dessus té. Et puis ça sonne plus... mieux... joli et... et tout pardi.
ET DONC TÉ ! Une Galloise pardi, tu veux arrêter une galloise té ? Une Cadwell pardi ! Tu sais ce qu'on fait les Cadwell pour le Royaume de France lors des guerres contre l'Anjou té ? Le Domaine Royal particulièrement leur doit beaucoup pardi, la Couronne donc et moi avec té. Faut faire gaffe avec la diplomatie té ! Y'a déjà eu des guerres pour des disputes sur des miettes de pain pardi, je te jure té ! C'était en Royaume de Serbie pardi.


Fumigène. Bullshit comme qui dirait. De mémoire, Samsa ne connait aucun Cadwell mais les anglais, elle ne ment pas, ont toujours rendu grands services aux entités citées précédemment. Il ne sera pas dit qu'une officier royale ayant parfois combattu à leurs côtés dans des guerres qui n'étaient pas les leurs laisserait l'un des leurs en difficulté. Il était peu dire également qu'elle n'avait jamais entendu parler d'une guerre, disons, des Miettes de Pain. Ni en Serbe, ni ailleurs, mais Cerbère déployait ses ailes -Cerbère croisé Pégase.

-Regarde pardi, un de tes hommes a manqué de lui casser le bras en l'empoignant et je suis presque sûre qu'une claque la met par terre té. C'est pas une brigande ça pardi ! Les brigandes petites existent, mais jamais toute minces té !

Satyne s'imposait à l'esprit de Samsa en cet instant. Il y avait de tout chez eux, mais pas de faibles. Cerbère s'excuserait plus tard d'avoir insinué ceci envers Gwenn, si elle en avait l'occasion. Ses petits yeux sombres brillants de malice semblent sourire à la voyageuse alors que la cavalière s'avance un peu plus à sa hauteur, le large poitrail de l'équidé écartant au besoin quelques hommes un peu trop sur le passage; "pardon, place, je passe".

-Vous alliez où pardi ? Je vous emmène té.

"Ouais, même si c'est en Norvège". Samsa fonctionnait bien plus aux coups de coeur qu'aux programmes. Samsa ne fonctionnait, en règle générale, avec aucune règle, justement. Seuls ses principes et son honneur guidaient ses actes, ce qui avait souvent le don de la mettre dans des situations délicates. On pouvait cependant dire d'elle qu'elle était une personne entière et fiable puisque stable. Forcément, une fois comme tant d'autre, il était peu probable qu'on la laisse simplement aller comme ça avec la jeune galloise, le prévôt Soren n'apprécierait peut-être pas cette outrecuidance, ce manquement de hiérarchie presque flagrant sur ce sol; incompétent, peut-être. Pas consciencieux, certainement pas.


* = paroles traduites de Nickelback - Photograph

_________________
Soren
     « Tous les chemins mènent au rhum… et à Angoulême aussi! » Søren MacFadyen Eriksen



- Samsa Treiscan, capitaine royal? On dirait qu’le Prévôt la connait.

- En tout cas, j’l’avions jamais vu avec lui.

- L’a pas l’air heureux d’la voir là l’chef

- Ça, c’est peu dire…

Samsa…Comme un souvenir qui ressurgit brutalement du passé. Depuis combien de temps nos chemins ne s’étaient pas croisés? Un an sans doute. Peut-être deux. Voir plus. Samsa et ses menaces. Samsa qui ce jour-là me fit l’honneur de compléter ma collection de baffes reçues par la gente féminine. Il y avait eu Loh, puis Erraa, puis Syu, Enigma, Zephyre…Et puis il y eut Samsa. Il y avait eu des menaces aussi. Des menaces de mort qui manifestement étaient restés au stade… de menaces.

- Samsa…. Comme le monde est petit parfois. Mes hommages Capitaine!

Il y avait dans le ton de ma voix une pointe d’étonnement, une once de désappointement, un brin d’orgueil, une lichette de résignation. De la provocation? Ouais…Je me demande comme elle allait réagir à mes propos. Même si nos chemins ne s’étaient que peu croisés, l’image que j’avais d’elle était celle d’une femme dangereuse car imprévisible. Comme moi quoi…mais en femme! Enfin…en femme: ainsi bardée de métal, elle ressemblait autant à une femme que Poissac à un maréchal… mais ce n’est toutefois pas suffisant pour ne pas se fendre d’une respectueuse révérence, si respectueuse d’ailleurs que j’en ramasse de la poussière.

- Maréchal n’est point une insulte Capitaine! Si vous me connaissiez, vous sauriez que je ne recherche ni les titres, ni les postes, ni les honneurs.

Ainsi donc la suspecte était une galloise? Voilà qui expliquerait tout ce charabia. Mais qu’est-ce qu’une galloise viendrait faire seule dans la campagne angoumoisine?

- Cette donzelle que voilà…

Montrer du doigt, ça n’est pas poli, surtout en présence d’un officier royal. Il parait qu’ils tiennent aux bonne manières à Paris. Les angevins peuvent en témoigner. Mais je n’ai vu nul part qu’il était impoli de montrer d’un geste du menton.

- … va être emmenée à Angoulême pour y être interrogée par la maréchaussée du Périgord-Angoumois dans le cadre d’une affaire de brigandage. C’est…un témoin.

Effectivement, le ton employé est péremptoire, à l’indicatif et non au conditionnel. J’ai pris le pari qu’on n’en viendrait pas aux mains entre un représentant royal et un officier assermenté du Périgord-Angoumois. À 5 contre 1. Non, ce n’est pas le rapport de force entre armée c’est maré, c’est la côte du pari.

- Capitaine, vous êtes sans doute aussi bien placée que je le suis pour savoir que le passé n’est pas garant de l’avenir. Ce que les Cadwell ont fait pour le royaume dans le passé m’importe peu je dois dire. Quand bien même, ils auraient bâti de leur propre main le Périgord-Angoumois…

Je n’ai aucun doute : cette petite subtilité n’a point échappé à Samsa et Il est bon parfois de rappeler où sont nos priorités.

- …Cela ne m’empêcherait pas de les interroger dans le cadre d’une enquête criminelle.

- Parait qu’le prévôt est pas un grand admirateur des institutions royales.

- Ouaip! Il aime à dire qu’y vote pas aux royales…même quand il est conseiller comtal.

- Tu crois qu’il irait jusqu’à s’rebeller contre la Reyne ? Comme les angevins ?

- Nan. D’façon, la comtesse l’laisserait pas faire.

- Mais tu penses qu’y pourrait créer du trouble avec Paris.

- Ça, créer du trouble, y sait y faire ouais! D’ailleurs parfois, j’me d’mande s’il sait faire aut’chose qu’ça!

Témoin, suspect… J’ai déjà eu récemment quelques soucis avec cette nuance. Pour la plupart des personnes, quand vous êtes mandé par la maréchaussée, vous êtes suspect. Parfois, C’est pourtant juste pour confirmer un fait, pour corroborer une déclaration. Pour tout interrogatoire, la maudite loi-qui-ne-fonctionne-pas nous oblige à signaler leurs droits à tous les témoins parce qu’un témoin peut devenir suspect, et qu’un suspect peut devenir un accusé. Les avocats jouent bien trop sur les mots et les vices de procédures. Ils ne savent faire que cela d’ailleurs. Ils se foutent du fond des choses. En un sens, j’ai bien plus d’admiration pour les brigands que pour les avocats…Enfin, mon faux-frère excepté. D’ailleurs, je vous laisse deviner s’il est avocat ou brigand. Mais pour en revenir à la Cadwell, puisque c’est comme ça qu’elle se nomme, elle en l’occurence, elle est suspecte. Suspecte…mais pas encore accusée.

- Jolie monture que vous avez là…

D’habitude quand on veut faire un compliment à une dame on lui dit quelque chose comme : « vos yeux sont aussi profond que l’océan »…ou encore plus sobrement « Cette robe vous va à ravir » …ou… « votre coiffure est d’une telle élégance qu’on dirait que vos cheveux ont été sculptés par le Très-Haut en personne » … Encore que je ne suis pas sur pour la dernière possibilité. Mais là, j’ai fait allusion à son cheval comme j’aurais pu faire allusion à son épée…. « La décoration de votre garde est splendide. Est-ce ça coupe? »… ou encore « Vous devriez faire attention en la trimballant. Elle pourrait vous blesser ». Ou bien dans un autre registre… « C’est très joli, je le reconnais…mais je pense quand même qu’une vulgaire branche bien taillée ferait un bien meilleur bâton de marche ». Mais comme la comtesse m’a dit : « Soeur Robert, soyez polie avec les dames hein! », je vais me contenter de faire des commentaires sur son cheval.

- Vous êtes ici sur les terres du Périgord-Angoumois, terres placées sous la juridiction de sa Grandeur Orkaange, dame de Bors et Vicomtesse de Blanzac. Je pense que Paris a le soucis de respecter la souveraineté de ses provinces vassales n’est-ce pas ? L’ingérence dans les affaires comtales n’est point une habitude parisienne..ni poitevine d’ailleurs.

Quand on n’a pas la force de son côté, mieux vaut avoir un peu de réparti ? Non?

    - « Dis, c’est pas ta mère qui prétendait que les poitevins se sont fait complices de Vonafred pour lui prendre le château de Périgueux ? »

    - «  Chut! Je négocie. »


- Alors, croyez-moi Capitaine, mes hommes et moi-même seraient honorés de rentrer à Angoulême en compagnie d’une si prestigieuse escorte. Té pardi! Ce n’est pas tous les jours que l’on se fait escorter par une armée royale pour rentrer dans nos casernes. Et si le coeur vous en dit, Il y a suffisamment de tonneaux aux « Challengers » pour tout le monde! Puisque vous êtes nos invités, comptez sur moi pour régaler.

De toute façon, si on dépasse les bornes, que risque t-on? Je veux…à part avoir la tête qui roule au sol?

- Ah! J’allais oublier : si jamais votre protégée a vraiment le bras cassé, elle aura l’occasion de le faire constater par notre médecin à Angoulême…et déposer une plainte contre la maréchaussée du comté. Voyez Capitaine, je suis bon joueur non ?

Edit : corrections de fautes
_________________
Gwennegh
    « Y a aiguille sous poche... »
    Réflexion galloise


𝓘ls discutaient tous les deux de choses qui dépassaient visiblement la petite Galloise. D'ailleurs, elle ne comprenait pas tous les mots qu'ils employaient. Ils parlaient beaucoup trop vite, pour cette novice en langue française. Gwenn fronçait les sourcils tout en tâchant de se rapprocher de la dame. Si elle ne saisissait pas tout, elle comprenait bien l'essentiel. Essentiel qui était que la femme en armure venait de lui proposer de l'emmener où elle voulait, et que l'homme voulait l'embarquer pour lui poser des questions. Et s'il y avait bien une chose que Gwenn détestait par-dessus tout, c'est qu'on lui pose des questions en sous-entendant qu'on ne croirait pas un mot de ce qu'elle dirait puisqu'on avait déjà décidé de la juger coupable.

a femme avait parlé des Cadwell en disant qu'ils avaient aidé durant une guerre, ce que Gwenn s'était bien gardée de démentir. Sa famille toute entière était plongée dans la culture de céréales — exception faite de l'un ses frères qui était devenu batelier, mais toute famille comportait au moins un membre bizarre — il ne faisait aucun doute que sa sauveuse avait tout inventé. Déjà qu'on ne les avait pas réquisitionnés pour la guerre des Deux Roses qui faisait rage, il était bien impensable qu'on leur demande d'aller se battre en terre étrangère. Mais quelle importance ? Ça faisait drôlement bien, drôlement sérieux, et si elle-même laissait entendre qu'elle était la meilleure amie de la fille de la reine, à coup sûr, elle s'en tirerait à bon compte. Encore fallait-il arriver à caser ça quelque part dans la conversation...

    - Toi, là ! L'homme. Je vais pas aller avec toi. Je vais avec la dame.

𝒮ans plus hésiter, Gwenn grimpa derrière la femme avec la souplesse que confère l'habitude de l'équitation. Les deux mains posées sur la taille de Samsa, elle jeta un regard méprisant à Soren. Une lippe moqueuse affichée clairement sur son visage, Gwenn se cala plus confortablement et arrangea les plis de sa robe qui lui couvrait soigneusement les jambes.

    - Je suis coupable que d'avoir rencontré toi. Je suis perdue ici, je cherche ma route vers la Majesté, amie de famille. Elle entendra parler de toi, MacFadyen.

𝒞e n'était pas trop mal placé, jugeait-elle. Prendrait-il le risque de l'arrêter après ça ? Pouvait-il être absolument certain qu'elle ne connaissait pas la reine ? Gwenn se redressa, se tenant toute fière, une moue dédaigneuse aux lèvres. N'avait-elle pas l'air noble, en cet instant précis, la fille Cadwell ?
Gwenn tapota la hanche de Samsa et lança d'un air assuré :

    - Vas-y, dame. Vers Rochouart.

_________________
Samsa
    "Je, je, je sais je peux les battre.
    Je n'abandonne pas car j'y crois.
    Combattre pour l'amour du jeu, inarrêtable,
    C'est pourquoi je, je suis inarrêtable."*



Un sourire en coin habille le visage bordelais aux hommages de Soren. "Ouais, t'as vu, je suis devenue bien badass hein ! Enfin... Officiellement badass, parce que je l'ai toujours été". Elle ne relève pas l'ironie, la provocation, tout ce savant mélange qui en aurait vexé d'autres. C'est un des paradoxes de Samsa, avoir le sang-chaud -très chaud- mais être capable de sang-froid -très froid-. L'orgueil presque flatté des paroles et de l'attitude de Soren, Cerbère se met un peu plus à l'aise sur sa selle, renvoyant étrangement l'image d'une personne digne qui trouve l'histoire bien ridicule et compte la régler avec efficacité.
Ainsi donc, la demoiselle devait être interrogée. Répondant simplement par un "humhum", Cerbère le laisse terminer bien que la moue de son visage laisse voir qu'elle ne cèdera pas à des arguments qui, si bons soit-ils, ne viendront pas à bout de son entêtement si facilement. Ce sera un duel de dupes entre le Prévôt et la Prime Secrétaire Royale et au fond, Cerbère les aimait autant que les violentes charges de cavalerie. C'était des techniques différentes, des faux-semblants, des sourires renfermant des lames qui laminaient, l'air de rien. C'était un jeu où la seule vraie défaite était de ne pas savoir perdre.


-Merci pardi, vous avez l'oeil té.

"Dans le mille mon petit". Quoi de mieux que de flatter Samsa sur son équipement de combattante ? Soren le savait, sans doute. Une main gantelée de combat vient flatter l'encolure du bai qui a l'air de s'en moquer éperdument. Mais rien ne sert de faire des efforts pour rallier le Cerbère si on ne s'en sert pas, n'est-ce pas ? Alors, quand est-ce que la contrariété vient ? A quoi bon être faite dominante si on ne domine rien ? Ah, ça y est.

"Lâchez le Chien".

Un sourire un peu moqueur aux lèvres, Samsa s'appuie d'un avant-bras sur l'encolure de Guerroyant. Ses petits yeux sombres légèrement plissés auraient découragé n'importe qui de continuer les explications, les arguments, mais Soren est bon joueur, ça plaît à la Cerbère. Autant qu'il parle, elle prépare la riposte; chacun son tour. Ca y est, c'est à elle. Samsa se redresse sur sa selle et le sourire gentiment moqueur se fait légèrement condescendant, palpable du fait que la capitaine se met soudainement et brièvement à vouvoyer celui qu'elle tutoie pourtant naturellement.


-Je connais parfaitement la comtesse té, c'est mon amie et je suis Poney comme elle pardi. Étant qui plus est Prime Secrétaire Royale et cette demoiselle étant anglaise té, il y a des enjeux diplomatiques qui vous échappent sans doute pardi, mais je ne vous en veux pas té. Par cette double amitié qui nous lie et par des choses bien plus officielles té, je suis persuadée que ma personne conduisant cette étrangère sous bonne garde ne la froissera pas pardi.

Cette histoire de provinces vassales, ça commence à bien faire aussi. Depuis quand une figure d'autorité royale devait faire profil bas devant un prévôt local ? Dans un tout autre registre, Samsa avait détesté devoir écrire des demandes de Laisser-Passer pour son armée agrémentée royale pour se balader sur les provinces vassales. "Vassales", c'était pourtant bien explicite non ? Cerbère ne cessait d'imaginer un suzerain se faire rembarrer dans ses quinze mètres par son vassal lui reprochant de ne pas avoir prévenu de son passage sur ses terres ou se rebiffer d'une quelconque autorité. Les vraies valeurs se perdaient dans l'esprit du chaos, et non dans celui de la liberté comme l'arguaient tant de provinces, avides de toujours plus de pouvoirs au nom de la précédente valeurs dans le seul but de ne plus avoir de contraintes. Et pourtant, sans ces contraintes, qu'advenait-il de l'unité du Royaume ? Qu'advenait-il de l'amitié, de la paix ? La liberté était une chose mais l'ordre en faisait parti et Samsa se battait pour ce dernier car la liberté sans ordre n'était qu'un chaos de destruction.
Un sourire sincère vient cette fois souligner les paroles de Samsa qui n'ignore pas que Soren doit connaître Orka, son petit grain de folie à elle aussi, la solidarité et la confiance qui régnaient entre elles, Poneys Roses. Samsa lui aurait offert le monde si Orka lui avait demandé, si n'importe quel Poney -même un inconnu du clan- lui avait demandé; ça fonctionnait comme ça pour eux, l'ordre des priorités était clair mais différent de celui de la majorité des gens.


-Et donc pardi, mon cher Soren té, je soustrhééééé pardi !

Il y a un instant, Gwenn était les deux pieds au sol près de la jambe de la cavalière et la voilà maintenant en croupe du destrier transformé en cheval de charrette. Peu habitué, celui-ci a quelque peu gigoté le temps que la rousse se hisse à la surprise de la Prime Secrétaire Royale qui la regarde avec un air effaré. A-t-on jamais vu autant de toupet ? Mais soit ! La Cadwell dit-elle la vérité quand elle se prétend amie de la reine ? Samsa en doute sérieusement puisqu'elle n'a jamais lu de courrier de sa part au pigeonnier royal mais elle sait qu'il existait des canaux de communication auxquels elle n'avait pas accès. C'est la vie. Aussi, Gwenn ne ment-elle pas forcément, et Samsa n'en doutera de toute façon certainement pas maintenant. Elle adresse un rictus à Soren qui lui signifie qu'il est mal parti pour gagner le jeu.

-Tu sais pardi, je comprends bien ce que tu me dis té. Mais la demoiselle est amie de la reine et anglaise pardi, je ne peux pas la laisser faire un détour pardi. Tu te rends bien compte qu'on risque nos têtes si la reine savait ça té ? Toi pour l'avoir emmené et retardé et moi pour ne pas l'avoir tiré de là alors que je suis officier royale et en pleine connaissance de cause de plusieurs tractations diplomatiques et autres affaires avec les anglais pardi.

Non, décidément pardi, je ne peux pas laisser faire ça té. Je préfère aller en prison en essayant de faire mon devoir et de servir ma reine plutôt que de renoncer en manquant d'honneur et en la servant mal pardi, et en mettant en péril l'avenir du Royaume té !

Par contre pardi, t'as entendu la demoiselle Cadwell té ?


Ça sortait du "demoiselle Cadwell" à présent pour renforcer le respect à lui apporter, renforcer l'image d'importance. Samsa ne le faisait pas exprès mais tout rentrait inconsciemment dans son esprit, une forme mutante de l'instinct de survie qui force l'adaptation le plus rapidement possible. C'était, au final, ce qui permettait à la Prime Secrétaire Royale de paraître naturelle en l'instant, comme si elle ne combattait plus par jeu de dupes mais bien par intérêt et embarras réel.

-Elle va à Rochechouart pardi, c'est visiblement l'étape de sa nuit avant de continuer sa route vers Paris pardi. Tu veux nous accompagner té ?

Samsa ou "comment brillamment retourner une situation". Rien n'était joué mais la performance restait belle, tant dans la manière de mener les tractations que dans l'expression des sentiments qui, d'abord peu naturels du fait de la gentille moquerie, s'étaient soudainement calqués sur la perspective de la réalité. Si Cerbère avait continué son petit jeu, il est une phrase qu'elle ne se serait pas privée de ressortir :

"Vois Prévôt, je suis bonne joueuse, non ?"



* = paroles traduites de Skillet - Undefeated

_________________
Soren
    « Tu es dangereux parce que tu es imprévisible. » Brygh Ailean MacFadyen

    - « Mais il ne va pas faire ça ? »

- Mais il ne va pas faire ça?

- Mais il ne va pas faire ça?

Ainsi donc Samsa était un poney rose elle aussi? Décidément, il faut croire que tous les poneys s’étaient dit « Rendez-vous dans 10 ans, place des grands hommes en Périgord ». Et puis? Est-ce que cela changeait quelque chose à la présente situation? Hum?

    - « Oui! »

- Oui!

- Oui!

Oui, ça devrait peut-être changer quelque chose. Si Samsa se plaint auprès de la comtesse Orkaange, cette dernière risque d’être de fort mauvaise humeur. Elle va passer un savon à son prévôt, lui disant qu’il outrepasse ses prérogatives, qu’un poney rose n’avait pas à subir les foudres de la maréchaussée du Périgord-Angoumois, qu’ils étaient des personnes de confiance, etc, etc… Mais voilà, le poney rose n’avait ici rien à craindre de la maréchaussée. Quand à la galloise, elle devait juste subir un interrogatoire à Angoulême et sans doute faire face à la victime d’un brigandage. Rien de plus. Pour l’instant. Est-ce que cela valait la peine de risquer mon poste de prévôt pour ça? Ça, en l’occurence, ça portait un nom. Ça s’appelait des principes. Est-ce que je devais prendre le risque de perdre ma fonction au nom des principes? La réponse est oui. Indéniablement. Au nom des principes, j’ai perdu mon pays natal. J’ai failli mourir. J’aurais dû mourir. Oui, je serais mort en cet instant si je n’avais pas eu l’outrecuidance de choisir la peine la plus lourde : le bannissement plutôt que la mort. Alors, oui, le fait que Samsa connaisse Orkaange ne faisait aucune différence.

- Je ne sais pas ce qu’est un Prime Secrétaire royal. Je ne connais guère les institutions royales. Plus l’administration est haute, plus elle est loin des préoccupations des gens. Moins elle est utile.

Évidemment, je pense plus ou moins ce que je venais de dire. Certes, je ne m’étais jamais intéressé aux institutions royales exceptées celles que j’ai eu besoin de fréquenter pour mes fonctions comtales passées. Je pense sincèrement que pour combattre l’acédie qui frappe le royaume de France, les institutions royales sont fichtrement inutiles voir négatives. Elles soustraient des forces vives aux comtés et duchés, des forces qui ne sont plus disponibles pour faire vivre les villages, pour faire renaître l’envie dans ceux-ci. Et pour ceux qui recherchent un but dans leur vie, les institutions royales sont totalement inutiles.

- Et vous avez tort: cette femme que voilà n’est point angloyse. Elle vient de dire qu’elle était galloise. Traiter un gallois d’angloys, c’est un peu comme dire à un écossais qu’il est angloys…ou à un mainois qu’il est angevin. C’est insultant…Enfin moi qui suis à demi écossais, je me sentirais outré de m’être fait traité d’angloys.

… Et mon beau-père de Urquhart aussi d’ailleurs. J’ai comme l’impression que les mots ne suffiront pas. Pas assez percutants. Et puis, Samsa est têtue. Elle ne se laissera pas imposer. Un quart de tour à droite, à quart de tour à gauche, je jauge les soldats de la maréchaussée qui m’accompagnent. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il n’ont guère fière allure mais Samsa ne doit pas être de celle qui juge sur les apparences. J’en parierais. Alors je prends le risque de m’approcher. Je pousse même le bouchon jusqu’à tenir le cheval par la bride, comme pour lui montrer que si elle passe ce n’est pas de son plein gré, mais ce sera avec ma bénédiction…ou de force.

- Vous venez avec vos gros sabots Samsa et vous ne mesurez même pas le geste que vous vous apprêtez à poser. Puisque vous semblez tout ignorer des tensions qui existent entre les provinces vassales, sachez que cette route où vous vous trouvez qui relie Angoulême à la limousine Rochechouart est l’objet de très fréquents brigands. De l’opinion de certains conseillers du Périgord-Angoumois…et pas seulement du prévôt… Le Limousin incite les brigands à venir commettre leurs méfaits ici, en sol du Périgord-Angoumois, puis de se replier vers Rochechouart. Moyennant une taxe sur le résultat de leur brigandage, le Limousin leur assure l’impunité pour les forfaits qu’ils ont commis. Le Limousin est contre les coopérations judiciaires? Évidemment, sa politique pro-brigands l’exige. Le limousin ne veut entrer dans l’alliance du centre? Les obligations auxquelles il devrait se soumettre iraient à l’encontre de sa politique actuelle envers la racaille qui écume le royaume. Alors…

Alors? Tu cherches à lui montrer quoi là?

- … Alors si vous amenez cette personne que la maréchaussée désire entendre en tant que témoin…M’entendez-vous?…En tant que témoin. Si vous persistez à la soustraire à la justice du Périgord-Angoumois, alors vous donnez crédit à ces assertions…et de surcroit vous les cautionnez. Prendriez-vous le risque d’augmenter les tensions entre provinces vassales voisines Samsa, prime secrétaire royale? Au Nom de la Reyne?

    - « Ahem…Elle n’avait pas dit que l’Angloyse…enfin la galloise…enfin l’estrangère était l’ami de la Reyne? »

- Et comme vous le savez, tout le monde est égal devant la justice, qu’elle soit celle des hommes ou celle du Très-Haut.

    - « Ouais! Si je comprends bien, tu te fous complètement de la Reyne? Non. Inutile de répondre, j’ai saisi.»

- Alors non, je ne maltraiterai pas un officier royal…ni un témoin d’ailleurs.

    - « Sauf si je réussis à te faire entrer en crise mon grand blond avec une chose sournoise en lui.»

- … Mais croyez-moi, si vous bafouez la souveraineté du Périgord-Angoumois en soustrayant cette donzelle à l’autorité du comté, il vous faudra accepter toutes les conséquences qui viennent avec, que ce soit pour vous… pour le Périgord-Angoumois…pour le Limousin… pour le royaume.

Dangereux…parce qu’imprévisible.
_________________
Gwennegh
    « Je vais le renvoyer tout droit à la maison mère... Au terminus des prétentieux. »
    Les Tontons Flingueurs


𝒢wenn ne comprenait pas tous les mots qui étaient prononcés devant elle. Déjà rien que ça, ça commençait à la gonfler sévère. Et les joutes verbales à coup de « Moi j'ai la plus grosse alors écarte-toi si tu veux pas que j'te crève l’œil » ça l'agaçait encore plus. Elle soupirait, dans le dos de la brune en armure, et ce n'était jamais bon, quand Gwennegh Cadwell commençait à soupirer. Fallait pas trop la chercher non plus. Ce n'était pas une bonne menteuse, et elle était franchement nulle quand il s'agissait de jouer la comédie. Et il était temps qu'elle agisse.

𝓔lle glissa au bas de la monture et s'approcha du blond. Pas trop quand même, pas déjà, c'était moins drôle. Les poings plantés sur les hanches, elle le regarda, ses deux billes noires le scrutant avec une attention terriblement proche de l'insolence. Trop proche, en fait, pour que ce ne soit pas de l'insolence déclarée. Agissons et réfléchissons après, c'était là sa devise. Et jusque-là, ça n'avait pas trop mal fonctionné. Pourquoi en serait-il autrement aujourd'hui ? Ce type voulait la coller en prison pour Dieu savait quels faits. Il était têtu, borné et pourrait sans doute faire preuve d'une grande stupidité si on le poussait un peu. Et justement, Gwenn voulait qu'il soit stupide. Devant ses troupes, ce serait amusant.

    - Tu veux que je aille avec toi pour parler de le pluie et le bon temps ? Tu veux me faire porter le bonnet pour un vol ? Tu sais comme moi que c'est pas crédible ton affaire. Mais si tu tiens à m'arrêter... Je peux t'aider.

𝓔t là, sans préavis, magistralement, avec grandiose et panache, Gwenn Cadwell, première du nom, flanqua un coup de poing en plein dans le nez de l'insolent blondinet qui entendait la faire accuser d'un crime qu'elle n'avait pas commis. Elle ressentit une vive douleur dans les doigts au moment de l'impact, mais ce n'était pas grand chose. Là au moins, elle avait commis un crime. Là d'accord, elle voulait bien se faire arrêter. Il n'y avait que comme ça qu'on raisonnait un têtu. En lui donnant raison de toutes les façons possibles. Elle en savait quelque chose, elle était bornée bien avant sa naissance.

𝒢racieusement, Gwenn pivota vers la femme en armure, tout en secouant son poing d'un air détaché. Elle s'en fichait comme d'une guigne, et affichait même un sourire tranquille, comme si elle ne venait pas de faire une chose plus grave qu'arracher un plant de cigüe qui aurait poussé au milieu du persil.

    - Là il peut m'emmener. Là j'ai fait une bêtise.

𝓔t pour faire bonne mesure, elle employa une expression que les Français semblaient apprécier tout particulièrement.

    - Oups.

_________________
Samsa
    "À cache-cache
    Nous allons jouer tout en arpentant la forêt;
    Une drôle de combine en un après-midi ensoleillé."*



Si Soren espérait vexer Samsa en minimisant le rôle de Prime Secrétaire Royale et en allant jusqu'à le traiter d'inutile, il serait bien déçu. Habituée depuis presque quatre règnes à ce genre de remarques et d'ignorance, la Cerbère n'en faisait plus cas. Mais une perche était tendue, une mauvaise perche pour le prévôt, et la Bordelaise ne manqua pas de lui retourner en pleine face avec un sourire moqueur et une attitude dédaigneuse.

-En fait pardi, le Secrétariat Royal est de ce qu'il y a de plus proche des gens parce que quand tu écris à la reine pardi, c'est moi qui lui amène ton joli pli té. Et c'est ma belle écriture que tu lis en retour pardi. Pendant ce temps-là pardi, la reine peut ainsi se pencher sur toutes les requêtes que le peuple lui amène via ce chemin pardi.

"Et bim".

-Et le Pays de Galle étant sujet de la Couronne d'Angleterre pardi, il n'est pas faux de dire qu'elle est anglaise té. C'est un peu comme si je traitais un poitevin de français pardi...

"Et re-bim".
D'un air las, Samsa avait écouté le discours sur les provinces vassales, leurs petits rapports dont elle se moquait éperdument. Pourquoi personne ne voulait comprendre que la Couronne, c'était la Couronne ? C'était la Cheffe et c'était comme ça, les Sergents qu'étaient les provinces vassales n'avaient pas à discuter ou à l'accuser de leurs querelles. De plus, Samsa connaissait parfaitement les rouages du Louvre; si Soren disait vrai et que les provinces se retournaient contre la Couronne, Sa Majesté n'aurait qu'à accuser sa Prime Secrétaire Royale et de la virer, et tout serait réglé. En revanche, si l'histoire de la jeune rousse avait été vraie et que les conséquences avaient été minimes, Samsa aurait été remerciée. En politique locale comme royale, il n'y avait toujours qu'un seul chef. Tout le reste n'était composé que de pions qu'on pouvait bouger, éliminer, faire encaisser, attaquer. Samsa acceptait parfaitement cette réalité parce que malgré les apparences, malgré son réel idéalisme, son dévouement à certaines causes était le plus fort. Que n'accepterait-on pas pour les défendre ?
Ne prêtant plus attention à Gwenn, Cerbère était dans sa joute verbale avec le prévôt et c'était un jeu qui lui plaisait. Et la Prime Secrétaire Royale ne se débrouillait pas mal, sa principale compétence étant l'audace.
"Tu es imprévisible ? Moi je suis courageuse."


-Parfaitement pardi, et je persiste donc té. Je soustrais cette demoiselle à t...

La Bordelaise est interrompue par la vision de la jeune femme près de Soren qui, petite mais costaude, lui assène une droite en plein dans le nez. Les petits yeux sombres de la Cerbère s'agrandissent et sa mâchoire inférieure se détache quelque peu. Les personnes capables d'impressionner Samsa ou de gagner son respect via l'admiration n'étaient pas nombreux. Vraiment pas. Mais pour cette anglaise là, c'était fait. En quelques minutes, elle venait de s'attacher la loyauté du Chien de Garde. Impressionnant.

-Euh bah... Puisque vous le voulez pardi... Mais je vous accompagne té.

Cerbère allait surveiller qu'il n'arrive rien à sa nouvelle petite protégée. L'occasion de donner du sens à leur histoire d'amitié avec la reine; la Prime Secrétaire Royale ne l'aurait pas abandonné, tout de même !
Cerbère fit pivoter Guerroyant pour le mettre prêt au départ et gloussa discrètement en passant devant Soren. L'avait-il mérité ? Peut-être pas. Mais Samsa ne pouvait s'empêcher de faire un parallèle avec les baffes qu'elle lui avait collé et le fait que ce poing -pire qu'une baffe !- vienne d'une jeune femme étrangère ne rendait pas Soren plus glorieux.



* = paroles traduites de Baltimora - Tarzan boy

_________________
See the RP information <<   1, 2   >   >>
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)