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[RP] Nous irons tous au paradis

Hristo.montoya
 
" Flashback - Paris - Été 1464 "



L’invitation ne l’avait guère emballé. Un bal. Un énième bal organisé par Louise-Marie de Nemours, une dame qui n’avait guère d’esprit, non plus qu’un jolie corps pour rattraper sa balourdise. Louise était l’épouse du comte de Nemours, un homme bien plus attaché à ses écus qu’aux attraits de son épouse. Cette dernière en souffrait et elle requerrait parfois aux services de courtisans pour oublier les affres de sa vie morose, pour prendre un peu de bon temps avant que le Très-Haut ne la rappelle à lui. Le catalan avait été l’un d’eux. Certes, ce n’était guère l’appât du gain qui l’avait amené à accepter une telle proposition, ni les rondeurs un peu trop voluptueuses de la dame de Nemours. L’homme avait toujours été attiré par les intrigues de cour. Cela lui permettait de sortir de son oisiveté et de d’exercer son esprit, de l’aiguiser, de le rendre prompt à la réparti. Hristo Montoya aimait le jeu. Tant celui qu’il pratiquait dans les différentes cours d’Europe que ceux autour d’une table avec une paire de dés. Ce soir-là, le hasard ne devait pas faire partie du menu proposé par Louise-Marie de Nemours. Point de table de jeu, point de dé, point d’écu à perdre ou à gagner, seulement une piste, quelques musiciens et des invités de qualité venus des quatre coins de Paris.

Son visage était masqué d’un loup de métal mat . Portant une perruque blanche étagées de boucles s’arrêtant en dessous de l’oreille et disposant d’un queue de cheval nouée en catogan, il avait également légèrement poudré son visage d’un blanc à la mode de Paris. Sa chemise de soie blanche était ornementée d’un jabot noir de geai aux larges manches bouffantes. Des boutons finement ciselés parcouraient le côté de ses jambes, de part et d’autre jusqu’à la hauteur de son genoux. De large bottes noires remontaient jusqu’à la hauteur de celui-ci. Une cape noire également, attachée sur l’épaule droite complétait le tout. Enfin, sur son côté droit pendait sa rapière, mat, dont il n’aimait se séparer.

Un coupe de vin d’Italie à la main, le regard de Montoya balayait la salle de bal à la recherche de l’éclat de la soirée. Louise-Marie discutait en compagnie d’un groupe d’homme dans lequel il reconnut d’autres courtisans de bas étage qui sans doute cherchaient à se mettre en valeur pour décrocher le « contrat » de la soirée. Le catalan n’était pas d’humeur à se mettre de la partie. Sa dernière soirée avec la maitresse de maison avait été plus que décevante au niveau des ragots qu’il avait pu collecter. L’attrait de l’or l’intéressait de moins en mois. Par ailleurs, il se savait suffisamment bien placé dans l’estime de la dame de Nemours pour obtenir les faveurs qu’il désirait quand il le désirerait.

Non Louise-Marie n’était pas l’attrait de sa soirée. En revanche cette dame aux cheveux aussi noirs que l’ébène portant un masque d’étoffe et une robe noire sans excès d’ornements, de dentelles et de broderies avait attiré son attention. Était-ce la rondeur de ses épaules, le côté mystérieux qui ressortait de sa personnalité ou le regard d’un bleu opalescent qui avait capturé son attention? Il ne savait le dire. L’inconnue exerçait comme une fascination sur lui, un sentiment qu’il ne savait définir, circonscrire. Hristo Montoya avait toujours été attirant par ce qu’il ne comprenait pas, par les secrets qui lui résistaient, par le mystère qui entourait certaines choses…ou personnes. Qui sait après tout? Peut-être que c’était finalement une bonne idée que d’avoir accepté cette invitation? S’emparant d’une coupe de vin que les domestiques des lieux servaient à la ronde aux invités, le catalan s’approcha de l’inconnue, lui tendant la coupe lorsqu’il arriva à sa hauteur.


- Il parait que cela vous appartient…et qu’il est d’excellente facture.

Finalement, peut-être que le hasard était au menu de cette soirée après tout? Et peut-être qu’il serait du côté du Montoya?

Edit pour correction : castillan remplacé par catalan.
Comtesse_de_remscheid

    Paris...
    La Nemours et ses réceptions...
    Abondance et décadence...
    La Nemours et la noblesse...

    Les mondanités et les fanfreluches n'étaient pas des préférences de l'ébène mais son veuvage précipité ne lui laissait d'autres choix que de participer à ces bals d'un ennui certain, n'offrant à la comtesse que bavardages insipides et ragots de la Cour dont elle se moquait éperdument ayant bien d'autres aspirations que celles du royaume de France.
    Les relations se devaient cependant de rester cordiales entre la Rhénanie et son proche voisin, ainsi donc Loreleï se devait de se soumettre à ces réunions de la noblesse où tout à chacun tentait de se faire une place par divers stratagèmes plus ou moins avouables.
    Louise Marie avait cette fois opté pour une mascarade masquée, ce qui les changeaient un peu des habituels banquets trainant en longueur, y avait-il au moins l'attrait de ne pas forcement savoir avec qui la conversation pouvait s'engager au cours de ce genre de soirée.

    L'ambiance était plutôt bonne et chacune des dames avaient joués de toilettes rivalisant de couleurs, de perlages, de pierreries, de tout ce qui se voulait clinquant et ostentatoire pour se faire remarquer au plus possible par ces messieurs, La Nemours avait fait montre d'un excès de zèle certains que les papillons qui espéraient ses faveurs au terme de la bacchanale ne pouvaient ignorer.
    L'habitude de la germanique était de jouer de sobriété, elle ne dérogeait pas, une fois encore, masque d'étoffe voilant son regard translucide et robe d'une simplicité sophistiquée sans faille, pas de fioriture, pas de froufrous, manches de dentelles et dos dénudé étant les seules fantaisies de cette tenue d'une noirceur profonde, étant supposément encore en deuil de son époux.
    La coiffure n'avait rien de fastueux non plus, exit les perruques qu'elle trouvait d'un ridicule à toute épreuve, ordre avait été donné à sa suivante de lui crêper ses longs cheveux noirs et de les réunir en un chignon habilement coiffé pour paraître informe.

    Les iris glacées parcouraient l'assemblée, repérant au mieux les convives, la dame en noir avançant en laissant les doigts de sa dextre filer sur la paroi du mur, ne portant comme elle le redoutait que peu d'intérêt à tout ceci.
    La lente progression désabusée fut stoppée par l'intervention d'un enfariné au masque métallique que les abysses opalescents parcoururent de haut en bas en esquissant un léger sourire, la mise de l'homme était intéressante, en revanche la poudre à outrance et ce postiche, ne pouvait que la faire sourire intérieurement.
    La légère pliure du genou en guise de révérence au sieur fut effectuée sans point trop n'en faire, ignorant bien à qui elle pouvait avoir en face d'elle, acceptant le verre tendu avec une inclinaison de tête pour le remercier, enroulant ses digitales autour du cristal.

      Danke*... Il est aimable messire.
      L'impudent avait décidé de ne point venir seul jusqu'à ma personne, votre bienveillance aura pallié son outrecuidance.


    Le verre porté aux pulpeuses déversa lentement son contenu carmin sur la gouteuse de la comtesse, l'inertie des opales s'éclairant d'une pointe de plaisir sous la saveur du liquide italien venant lui éveiller papilles et palais.
    Lent mouvement où la dextre confia le verre à senestre, la comtesse avança doucement sa main vers l'homme afin de démontrer son intérêt et l'envie de converser.

      De belle facture effectivement.
      Loreleï...


    Le titre et ses origines sont très volontairement tus, même si l'accent prononcé et les mots qui lui échappent parfois dans sa langue natale, ne doivent guère laisser de doute sur ses origines, tout comme la note chantée dans la façon de s'exprimer de son interlocuteur permet de supposer une ascendance ibérique.


    Danke : Merci

_________________
Hristo.montoya

- L’impudent mérite le fouet pour une telle ignominie!


Et le catalan ne doutait pas un instant que la comtesse de Nemours appliquerait elle-même cette sentence lors des réjouissances d’après-soirée. Par une fois déjà le Montoya avait été témoin de ce genre d’activités particulières dont raffolait la maitresse des lieux. Même si cela n’était qu’un jeu sensuel pour elle et rien d’autre, Hristo s’en était trouvé surpris. Il avait commis l’erreur de juger la Nemours sur les apparences. C’était certes une erreur sans gravité mais le chevalier n’aimait jamais être pris en défaut. Dans le monde où il évoluait, ce pouvait être fatal. La comtesse de Nemours n’était qu’une dame délaissée qui avait besoin d’égayer sa vie en sortant (à peine) des sentiers battus de la noblesse. Elle n’était qu’une innocente victime qui se ferait broyer par ceux qui le jugeraient nécessaire, quand ils le jugeraient. Tout ça pour quoi? Pour s’être simplement laissée aller aux plaisirs de la chair hors des liens du mariage. Les individus que fréquentaient le catalan, eux, étant souvent d’une autre trempe. Lorsque l’on avait pris le parti de jouer, on ne pouvait se permettre de telles erreur sans se retrouver déclassé et hors du coup.

Le catalan hocha la tête en guise de remerciement pour la révérence octroyée et la main tendue fut acceptée et portée à ses lèvres pour la gratifier d’un protocolaire baise-main. Effleurement des lippes sur les premières phalanges. Signe de courtoisie, marque de respect, de politesse et savoir-vivre. Hristo s’inclina profondément, pliant humblement le genou pour accepter cette main qui n’était point gantée.

Si le « danke » ou même l’accent qui ponctuait ses phrases ne l’étonnèrent point, en revanche ce qui suivit lui fit marquer un bref moment d’hésitation, à peine perceptible. Pourtant Hristo n’avait aucun doute sur le fait que son interlocutrice l’avait remarqué. Loreleï ? Vraiment? Quelle merveilleuse coïncidence! L’homme ne put retenir un léger sourire alors qu’il se redressait. Le destin lui faisait parfois des clins d’oeil amusant. Alors qu’il se trouvait à assister à une soirée des plus ennuyeuse, voilà que son regard fut séduit par une Loreleï. Devait-il s’en méfier? Un homme qui s’intéresse aux livres anciens ne pouvait oublier quel était le sort réservé à ceux qui étaient attirés par Loreleï. Dans la mythologie germanique, Loreleï avait un chant si magnifique si envoutant, si mélodieux que les marins sur le Rhin en oubliaient les courants pernicieux et les écueils du fleuve. A n’en point douter, l’inconnue portait ce prénom à ravir. Et s’il fallait voir là une mise à garde du destin, alors le Montoya n’hésiterait pas un instant à emboiter le pas de l’inconnue et à plonger avec elle dans les tourments. Quoi de mieux après tout pour oublier une morne soirée qu’un peu d’action? Le gout addictif du danger?


- Hristo Montoya, chevalier de Figueres et…votre servant pour cette soirée.

… ou autrement dit: il va vous falloir me signifier vous-même mon congé si tel est votre bon vouloir car je n’ai nullement l’intention d’aller finir ma soirée contre cette colonne là-bas avec qui la discussion est aussi passionnante que celle d’un escargot aux relents d’anachorète. Loreleï… Son esprit resté accroché à ce prénom. Simplement Loreleï. Pas de titre, pas de moyen de s’adresser à elle de manière courtoise. De fait, il ne la connaissait pas pour pouvoir se permettre de l’appeler simplement par son prénom. La dame était prudente. Elle se laissait approcher sans pour autant se découvrir totalement. La grâce extérieure promettait-elle un esprit vif et cultivé? Montoya se tourna alors vers le centre la pièce, prenant place sur la gauche de l’inconnue. La coupe aux lèvres, le catalan contemplait la médiocrité de son regard critique.

- Cette soirée est d’une insignifiance affligeante. Heureusement que ce n’est point la comtesse qui a choisi les musiciens.

Et sans jeter un regard vers la dame d’outre-Rhin…

- Il ne me reste qu’à espérer que vous daignerez m’accorder cette danse afin que je puisse conserver malgré tout un bon souvenir de cette soirée… ou alors…

La pause dans son débit de parole était volontaire. Le Montoya porta une nouvelle fois le vin à ses lèvres moins pour en savourer le bouquet que pour exacerber l’intérêt de son interlocutrice pour ses paroles.

- …ou alors il me faudra vous enlever.

Regard droit en direction de la Nemours. Nouvelle gorgée de vin. Attente d’une réaction.
Comtesse_de_remscheid

    Un rictus à peine visible étira fugacement les lippes de la comtesse alors qu'elle faisait glisser quelques gouttes du vin italien entre ses carmines, son regard froid s'illuminant d’une pointe supplémentaire d'intérêt pour son interlocuteur.
    L'impudent en question se voyait actuellement plutôt sous de douces caresses de sa gourmande que sous le joug d'un fouet lui meurtrissant l'échine jusqu'à lui marquer l'épiderme avant de lui faire saigner les chairs, mais celui qui avait réparé l'affront pourrait tout à fait subir le châtiment évoqué.
    Une partie cachée de sa personne trouvait l'idée fort tentante, mais la comtesse n'en avait cure et se devait de maintenir les apparences.

    Léger sourire retenu au baise-main des plus soigné, l'homme n'était donc pas courtisan, ceux-ci bavant quasi instantanément sur le dos de la main au lieu d'en effleurer le bout des doigts, et pour s'être essuyée plus qu'à son tour sur le vêtement des sires indélicats pour manifester son désintérêt et la répugnance qu'ils lui inspiraient, la finesse du geste se nommait savoir-vivre et noblesse et fut apprécié à sa juste valeur.
    La légère variation de pression sur ses doigts à l'évocation de son prénom provoqua chez l'ébène une évolution dans l'inclinaison de sa tête, devinant plus qu'elle ne vit le sourire au faciès farineux de l'ibérique.
    Noble et instruit de toute évidence... Plus l'interaction se prolongeait et plus l'envie d'en découvrir davantage se faisait grandissant.

    Nouvelle inclinaison de tête à la présentation du sire, pas de titre évoqué, la chose était de bonne guerre et peut-être n'en possédait-il d'ailleurs pas, noblesse n'était pas synonyme de titre, un écuyer l'était tout autant qu'un comte ou duc, seule la charge imputée différait.
    Son servant ?
    L'esprit de la comtesse s'éveilla d'une idée bien peu avouable en ce lieu et en cet endroit, et les iris glacées suivirent le mouvement de celui qui venait rendre cette mascarade un peu plus distrayante, et peut-être même enivrante.
    Les hostilités s'ouvraient entre la germanique et l'ibérique, choc de culture et danse d'accents, la froideur de l'un et la chaleur de l'autre contrastant violemment promettant un feu d'artifice probablement... beau à voir.
    Opales inertes reportées sur la mouvance globale au sein de la pièce, observant le même spectacle désinvolte des convives qu'Hristo, dans un soupir d'exaspération lasse.

      Insignifiance affligeante... Je pense qu'il est même de bon ton de parler là de turpitude burlesque.
      Quand à conserver un souvenir de cette soirée, je ne saurais vous le promettre bon Sire Montoya...
      Vous parliez d'ignominie nécessitant affliction... Je ne sais si mon courroux vers l'impudent ne sera transféré vers son porteur afin de soulager l'infamie de cet affront...


    Port de tête dirigé vers le sire au postiche bouclé, le corps nimbé de noir se décala du mur avant d'achever de se délecter du nectar carmin, déposant le cristal vide de tout contenu sur le premier meuble à portée.

      Avant d'envisager un enlèvement Messire Montoya, faites-moi dont danser dans un premier temps... Je vous prie.
      Et...
      Peut-être mon chant s'élèvera jusqu'à vous pour affirmer votre servitude si je vous en juge capable


    Sourire mystérieux irradiant le visage au teint diaphane, une nouvelle fois la dextre s'avançait vers le seul être qu'elle pensait digne d'un quelconque intérêt en ce lieu, à lui de prouver que son jugement n'était pas faussé par son récent incident et ses séquelles.


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Hristo.montoya

Une lueur s’alluma dans les yeux de l’ibère. Visiblement, la nymphe rhénane - ou du moins c’est ainsi qu’il la considérait eut égard au prénom qu’elle portait - aimait les joutes verbales. Elle savait défendre. Mieux, elle ne se contentait pas de parer les coups mais se plaisait à passer à l’attaque. Quarte - « Je ne sais si mon courroux vers l'impudent ne sera transféré vers son porteur afin de soulager l'infamie de cet affront », sixte - « Peut-être mon chant s'élèvera jusqu'à vous pour affirmer votre servitude si je vous en juge capable ». Elle avait de la répartie, cela ne faisait aucun doute et cela contribuait également à mettre en valeur certaines formes au demeurant déjà fort attirantes et qui n’avait rien de pronominale, verbale ou transitive. Nul doute que Loreleï avait bien plus d’attraits que ce qu’une simple danse pourrait révéler. Un sourcil approbateur s’arqua lorsqu’elle déposa le verre sur le petit meuble situé à ses côtés. Le geste était gracieux et d’un regard de connaisseur, Hristo suivit le mouvement de sa main, appréciant le velouté de sa peau pâle. Puis il leva sa main à hauteur de son épaule afin de l’emmener au centre de la pièce. Lorsqu’il était en belle compagnie, le catalan appréciait de se faire remarquer. Il aimait l’idée que chacun dans cette pièce puisse voir la personne qui avait accepté de danser en sa compagnie. Il aimait faire des envieux, instiller la jalousie dans l’esprit des autres. C’était son côté paon… à la différence qu’il préférait une attitude naturelle plutôt qu’exagérée. Il tourna la tête en direction des musiciens, leur signifiant qu’ils étaient prêts.


- Mes sieurs, offrez-nous la plus belle volte qu’il vous ait jamais été donné de jouer. Il me faut impressionner cette gente dame si je ne veux point subir son courroux et faire les frais de son mécontentement.

Ne lui avait-elle pas promis le fouet s’il la déplaisait ? Pour soulager l’infamie? Montoya leva le menton, cherchant à croiser son regard en tournant légèrement la tête dans sa direction. Puis, avant que la danse ne commence, il lui murmura sans même dévier la calebasse dans sa direction

- Maintenant, s’il m’arrive quoi que ce soit de fâcheux ce soir, tout le monde pensera que j’ai dû mécontenter la plus belle et la plus mystérieuse des princesses de Rhénanie…et que c’est sans doute elle qui a commandité ces crève-la-faim pour me donner cette bastonnade…ou ces coups de fouet.

Un défi. Une joute amicale. Montoya n’en n’était pas à la parade amoureuse mais nul doute qu’il cherchait à laisser bonne impression, à se mettre en valeur, à éviter les faux-pas. L’inconnue avait capté son attention et l’homme n’était pas du genre à la laisser filer à cause d’un simple faux-pas. De danse, de paroles ou de comportement.

- Maintenant que nous sommes intimes…

Le menton toujours pointé vers les plafond, les petits sauts s’enchainaient au rythme de la musique. La main à hauteur d’épaule, les doigts qui se touchaient à peine, il tournait autour d’elle au diapason des envolées de le musique. Demi tour à gauche, changement de côté, croisé, demi-tour à droite. Lorsqu’il passait dans son dos, Le frôlement des corps se fit plus marqué, à peine perceptible pour celle qui n’y ferait pas particulièrement attention. Les regards se croisèrent, se jaugèrent, se défièrent.

- …daignerez-vous me dire comment je puis vous appeler? Duchesse? Comtesse? Baronne?

les bras vinrent prendre position le long du corps. Le genoux se replia lorsque l’autre gambette esquisse un petit bond. Pivotement d’un demi tour, et c’est reparti reparti dans l’autre sens.

- Le noir vous va à ravir. Un véritable plaisir pour les yeux…

Le compliment coïncida avec le moment où il mit ses mains sur ses hanches pour un bref porté dans les airs. Tournent, tournent les danseurs l’un autour de l’autre. Virevoltent les pieds sans jamais s’emmêler ni empiéter sur leurs vis-à-vis. Cabriole dans les airs la cariatide drapée de noir au son de la viole et de la flute. Main dans la main, côte à côte, les pieds sautillent sur le côté. Avant, arrière, avant arrière dans un rythme soutenu qui empêche le catalan de converser plus que nécessaire. Et lorsque cesse la musique, Montoya se fend d’une courbette en guise de remerciement à sa partenaire d’un soir alors que certains quittent déjà la salle de bal.

- Manifestement, la soirée tire à sa fin. La Nemours s’esquive dans ses appartements entrainant à sa suite ceux qu’elle a choisi pour ses libations vespérales. Saviez-vous que ce château est truffé de passages secrets et que le seul intérêt que la maitresse de maison leur ait trouvé est de les utiliser pour s’adonner à son côté exhibitionniste? Oh…et…sachez que d’habitude la dame est bruyante mais qu’il est de bon ton de ne rien laisser paraître.

Si la Loreleï du passé attirait les marins dans ses rets par la grâce de son chant, la Loreleï du présent avait aussi un don certain pour la danse mais le catalan n’eut jamais le loisir de lui demander si le verdict dont elle l’avait précédemment « menacé » en était un de culpabilité ou de relaxe car un incident vint altérer radicalement son état d’esprit. Tout sourire disparut brutalement de son visage. L’homme de cour céda sa place au chasseur, à l’aventurier, à l’homme d’action. Les coups d’oeil à droite et à gauche furent brefs. Il lui fallait estimer la situation prestement et l’analyser tout aussi rapidement. Il n’y avait plus de place à la tergiversation. Raffermissant sa poigne sur la main de Loreleï, la mine résolue, il se dirigea vers le fond le fond de la pièce.

- Venez!

Pas une explication. Un impératif qui sans être une injonction formelle n’en n’était pas moi une demande insistante, un mandement d’un chasseur qui ce soir devenait une proie.

Comtesse_de_remscheid

    Avec délicatesse, le velours de la paume de sa dextre vint rejoindre le haut de la senestre masculine, enjoignant son pas jusqu’au centre de la pièce à danser restant stoïquement à l’endroit où son « partenaire » l’avait délaissé pour aller réclamer aux musiciens son désir du moment.
    Une volte… Et une provocation subtile quant à son courroux qu’il allait finir par aiguiser, mais pour l’heure l’ébène semblait plutôt, et étrangement, amusée de cette joute verbale qui s’installait entre eux.
    L’homme aimait donc à se pavaner et qu’on porte attention à sa personne, il en serait donc ainsi, premières notes s’élevant, Loreleï emprisonna les pans de sa robe de ses doigts, pliant grandement genou dans une révérence gracieuse, et bien plus accentuée que précédemment, sans délaisser la silhouette au visage fardé de l’ibérique.

    Balancement de l'étoffe des jupons, tantôt à droite, tantôt à gauche, se rapprochant de son compagnon de danse, port de tête haut et regard glacé dirigé vers l’enfariné, passant de côté sur un temps d’arrêt, genoux pliés, étirant un fin sourire aux dires du Montoya sur ordre donné à l’encontre de sa personne, tout comme à la princesse mystérieuse, ne répondant aucunement en poursuivant la parade, se glissant dans son dos dans un frôlement d’épaule subtil, mais savamment orchestré.
    Retour dans une virevolte, la comtesse déposa délicatement ses doigts sur le dos de la main alors qu’il évoquait une intimité, en entamant à son tour la parade de ronds de jambes au masculin de cette volte, les abysses opalescentes ne suivant nullement la silhouette masculine, tête raide à contrario des carmines qui s’animait d’un fin rictus à chaque effleurement qu’elle supposait tout à fait calculé et volontaire, les rétines se rejoignant en cet instant précis.

    Point de réponse non plus au questionnement sur son titre, la rhénane drapée de noir accompagnant les soubresauts en harmonie totale avec Hristo, le laissant cependant guider l’envolée apposant ses mains aux épaules en baissant un instant le bleuté quasi translucide de ses pupilles vers lui.

    Tournent, tournent les vièles et flutiaux, tout autant que les jupes volètent et les gambettes tressautent, la comtesse s’oubliant un temps en se laissant aller à cet échange au second porté, mains portées au cou saupoudré dans une caresse du bout des empreintes.
    Touchant terre au terme de la ritournelle, La Remscheid rendit à la courbette du Montoya, une révérence au buste et à la tête incliné, pour se redresser dans un sourire aux confidences du noble courtisan, intime de La Nemours.

      J’ai ouï dire sans pour autant vérifier la véracité des rumeurs, et il semble de manière effective que les convives prenn…


    L’expression faciale, une sensation et surtout la poigne se faisant familière sur le satiné de sa main, firent froncer sourcils à Loreleï, qui plissa son regard clair en direction de l’ibère fardé alors qu’il l’attirait au tréfond de la pièce de danse sans autre bienséance.



    Un instinct ou une habitude, l’ébène ne chercha guère plus d’explication, il n’en donnerait de toute façon pas, pas plus qu’elle ne regarderait derrière elle pour essayer de voir ou d’apercevoir ce que l’homme pouvait bien vouloir semer, la tentative eut été vaine sans aucun doute possible.
    Les sens en éveil, l’attrait de l’ibère ou l’aspect grisant du pourquoi inconnu de cette fuite ayant potentielle de devenir… « distrayante »… Loreleï accompagna la fuite d’Hristo sans plus de façon, ni de manière, attrapant le pli de son jupon pour le relever et facilité une possible course.
    Qui plus est le courroux supposé n’avait pas été apaisé… Et il était bien hors de question que la comtesse n’obtienne satisfaction pour l’infâme…

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Hristo.montoya
Il ne prit pas le temps de lui expliquer, l’heure n’était pas aux longs discours. Il aurait pu la laisser choir là, dans cette salle de bal mais cela n’était guère dans ses habitudes. De facto, il avait donc considéré qu’elle serait consentante pour la suivre. avait-il réellement le choix? Dans l’esprit du Montoya, il ne faisait aucun doute qu’ils l’avaient vu en sa compagnie. La laisser seule derrière lui aurait non seulement été de la dernière des goujaterie mais cela aurait pu la mettre en danger et l’ibère, même s’il ne la connaissait que depuis le début de la soirée, s’était attaché à elle. S’ils la lui rendaient en plusieurs morceaux, faire plus ample connaissance aurait été d’un seul coup plus compliqué et de toute évidence beaucoup moins intéressant.

La porte du mur du fond donnait sur un cabinet de travail, vide pour l’occasion. Montoya connaissait les lieux. Il était maintes fois venu ici à la demande de la Nemours. Si certains se seraient contentés de la satisfaire, l’ibère avait en revanche tirer le maximum de ses visites: plan des lieux, passages secrets, habitudes du personnel de maison, relations entre les différents individus. Chaque détail comptait et c’était peut-être l’un de ceux-là qui lui sauverait la peau ce soir. Hristo n’hésita pas un instant. Il lâcha la main de Loreleï pour se hâter en direction du mur opposé. Il prenait le pari que l’oiseau de Rhénanie n’en profiterait pas pour s’envoler. De toute façon il n’avait pas le choix. Il ouvrit la porte au fond de la pièce, jeta un coup d’oeil dans le couloir attenant puis revint sur ses pas. A la hauteur du bureau de travail situé face à la fenêtre, il stoppa brièvement son élan, revenant de deux pas en arrière. Sur le bord du meuble, trônaient des plumes et de multiples vélins mais aucun flacon d’encre. L’avant-bras du catalan balaya la surface dorée du plan de travail, jetant à bas ce qui s’y trouvait. Puis, reprenant sa marche, il se dirigea vers l’immense porte-fenêtre qu’il ouvrit prestement. Le vent s’engouffra dans la pièce faisant voler les parchemins épars. La chance était décidément de son côté ce soir-là: là-haut dans le ciel dégagé de tout rideau nuageux, la Lune montrait son orgueilleux visage à la face des parisiens. Au sol, le pavé luisait d’une lumière diffuse, résultat du rayonnement de l’astre maudit sur une surface rendue humide par la fine pluie qui tombait sur Paris depuis le début de la soirée.

Le moment n’était guère propice à la visite des lieux. Montoya reprit la main de sa compagne d’un soir, se dirigea vers la tapisserie qui ornait le mur derrière le bureau, la soulevant pour révéler un passage sombre dans la paroi. Le catalan porta son index à ses lèvres, signifiant ainsi le silence le plus complet à Loreleï. L’heure n’était pas aux confidences non plus. A peine fut-il entré à son tour, la tapisserie remise en place afin de masquer leur présence que la porte par laquelle ils étaient entrés s’ouvrit brutalement. Des pas empressés résonnèrent dans la salle. Le réduit dans lequel le Rhénane et le catalan se trouvaient avait été conçu pour qu’une personne y soit à l’aise. A l’étroit, le dos de la dame en noir prenait appui contre une fraiche paroi de bois. Devant, Montoya se pressait contre elle. La promiscuité des lieux l’empêchait de garder une distance protocolaire entr’eux. L’ibère tentait de contrôler les mouvements de sa poitrine ainsi que les sons de sa respiration haletante dus aux efforts réalisés et à la tension nerveuse de l’instant présent. Il s’excuserait plus tard de cette situation pour le moins embarrassante pour eux deux.

Derrière eux, des bruits de pas se rapprochaient, hésitaient, revinrent au centre, résonnaient tout près d’eux derrière la tenture. Montoya glissa sa main droite entre leurs deux corps plaqués l’un à l’autre. Elle ne put le voir mais il grimaça comme si cela l’aidait à ce que cette initiative fasse le moins de bruit possible. A hauteur de leur abdomen, il l’obliqua vers son flanc et quelques instants plus tard, Loreleï put sentir la froideur du métal contre son ventre, au dessus de l’étoffe de sa robe. Le souffle retenu du catalan s’écoulait le long de sa nuque, roulait sur ses épaules nues. S’ils étaient découverts, il ne resterait à Hristo qu’à frapper. Aveuglément. Il était prêt. Pour cela, il n’aurait besoin que d’une fraction de seconde.


- Vous! Par là! Fouillez les rues alentours, il ne peut pas être loin… Toi, tu viens avoir moi, on prend ce couloir… Toi et toi! Vous restez ici. Surveillez les lieux au cas où il aurait l’heureuse idée de revenir.

La voix était impérieuse, celle d’un homme habitué à donner des ordres et à se faire obéir. Si les paroles avaient été prononcées en françoys, l’accent en revanche était manifestement transalpin. Des pas précipités quittèrent l’endroit, un tumulte d’individus enjambant le balcon et se réceptionnant au sol se fit entendre. Dans le réduit, le bras droit du Montoya enveloppa la taille de la Rhénane. Un léger clic se fit entendre. L’ibère se pressa contre le corps de sa complice pour s’engouffrer silencieusement dans le passage qui venait de s’ouvrir derrière elle. Entre temps, une conversation s’était engagée entre les deux gardes restés dans le bureau.
Comtesse_de_remscheid
    Délaissée une fois supplémentaire seule au fond de cette pièce, lui se faufilant par-delà d'une porte à la dérobée d’un mur, d’où Loreleï se trouvait rien ne lui était à portée de vision, cela étant son ouïe plus qu’aiguisée pouvait deviner ce qui se tramait, se demandant bien pourquoi tout ce remue-ménage alors que de toute évidence l’ibère se trouvait seul dans la pièce.
    La comtesse n’avait aucunement cherché à voir les potentiels poursuivants, tentative inutile dans cette demi pénombre où la lumière des bougies vacillantes en fin de vie ne l’aidait en aucune façon sur la possibilité de distinguer quoi que ce soit, y avait-il seulement le moindre assaillant ?
    Lasse d’attendre sans savoir, et sa patience ayant des limites assez faibles pour ce qui était de poireauter sans but, parti avait donc été pris d’avancer prudemment en direction du brouhaha du Montoya, sans aucun repère fusse-t-il visuel ou tactile, le pas quelque peu hésitant se guidant au son uniquement.
    Ce fut à ce moment très à précis que l’enfariné revint se saisir de sa main sans aucune réelle délicatesse, l’entrainant à travers couloir et bureau pour la faire glisser dans l’alcôve d’une cache sous tenture, le doigt posé avec irrespect sur ses carmines pour lui signifier de tenir ses lèvres scellées dans un mutisme absolu.
    Mordre l'index impudent ? L'idée lui traversa l'esprit, mais un cri s'en serait suivi et si poursuivant il y avait réellement nul besoin de les alerter.

    Regard glacé porté sur l’homme, la rhénane recula autant que faire se peut pour laisser place à son "servant" qui jusque-là ne lui avait servi qu’à, semble-t-il, la mettre dans l’embarras, à tout point de vue, protocole et ennui, en apparence au moins.
    Distance réglementaire était tout bonnement à mettre aux oubliettes, car bien que le dos de la comtesse et son épiderme dénudé puisse attester de la dureté du mur de bois ciré, s’y écrasant de tout son être pour offrir espace, le masculin et le féminin entassés ici lieu ne pouvaient, à l’évidence, éviter de s’effleurer pour ne pas dire carrément se toucher, franchement presser l’un contre l’autre, dans une inconvenance indéniable.
    Sur l’instant, Loreleï fut bien heureuse d’avoir laissé bustier corseté rouge sang au placard et d’avoir revêtue la simplicité de cette robe, pas d’entrave, pour une respiration devenue problématique à ne vouloir intensifier le contact de leurs bustes respectifs, arrachant à la comtesse un long soupir d’exaspération venant s’écraser sur son vis à vis.



    L’homme était plaisant il était vrai, mais telle proximité en un laps de temps si court relevait purement et simplement de l’indécence, si pas de la luxure tout juste digne d’un lupanar de bas étage, pourtant le souffle chaud s’écrasant sur le satin de sa peau tendait à réchauffer l’intransigeance de la rhénane, qui n’en laisserait rien filtrer, par principe, et parce que ni le lieu, ni le moment n'y était propice.

    Les poursuivants se faisant enfin entendre, le regard inexpressif se figea avant de se voiler de ses volets de chair, pour ne laisser que ses oreilles analyser la scène derrière la tapisserie, dans le même temps le mouvement d’Hristo surpris légèrement La Dame en noir qui restait concentrée sur ce qu’elle entendait, préférant ignorer l’attitude outrageuse du postiché qui se faisait de plus en plus familier.
    Pourtant sa concentration fut perturbée par la sensation à son ventre, la fraicheur du métal dans un premier temps, puis le contact du tranchant dans un second, le ventre de l’ébène se contracta d’instinct pour offrir plus d’espace et briser l’association de son abdomen et de cette lame, ne tenant nullement à se voir gratifiée d’une nouvelle cicatrice.

    Lentement la poche cachée de son jupon fut fouillée de sa dextre, index et majeur ressortant habillés d’un ornement singulier, bague métallique articulée recouvrant les deux premières phalanges pour s’achever sur la troisième d’une espèce d’ongle acéré, telle griffe et savamment gravée.
    Les bijoux ne quittaient jamais Loreleï, à ses doigts ou dans sa poche mais en permanence avec elle, l’objet disparaissant au creux de l’étoffe pour le paraître qu’elle se devait d’arborer en public, mais dans le cas présent si attaque elle devait subir, ses griffes d’argent ne seraient très probablement pas un luxe.

    Le brouhaha fracassant à ses oreilles semblait vouloir s’estomper, la plupart des protagonistes à la poursuite de son partenaire particulier avait pris congé, partant vers des pistes habilement faussées, mais l’endroit n’était pas sécurisé pour autant, le silence était toujours de mise.
    C’est pourtant cet instant que l’ibère choisissait pour s’enhardir à un geste aussi troublant que déconcertant, provoquant un léger grondement de la noble, ses abysses opalescents se fixant sur le visage dans le raidissement de son corps. Même si le voir était mission impossible, la main qui parcourait sa taille et le souffle court venant s’écraser contre le sien distillant sa chaleur étaient eux tout à fait perceptible.
    Etait-ce vraiment le lieu et le moment pour la badinerie ?

      *Clic*
      Clic ?


    Petit bruit tout juste audible et le bois dans le dos de la comtesse se déroba subitement, manquant de la faire vaciller, dextre attrapant dans un réflexe le jabot sombre pour ne pas choir, doigts métalliques déchirant l’étoffe pour griffer le poitrail dans une coupure nette et précise, à l’instant où se collant encore davantage contre elle, Hristo l’enjoignait à s’enfoncer dans le boyau secret qui s’ouvrait derrière elle.
    Déjà insinuée dans le couloir, n’y voyant strictement rien, et marchant qui plus est à reculons avec une robe lui tombant aux pieds, les froufrous du vêtement attrapé ne furent nullement lâchés, La comtesse assurant sa stabilité en portant sa main gauche au niveau de la hanche droite de son cavalier d’un soir, pour le laisser mener la danse de nouveau, vu qu’il semblait très à l’aise de l’endroit.
    Les visites à La Nemours avaient dû être d’une régularité sans failles pour qu’il connaisse aussi bien coin et recoin du palais de la pompadour locale.

    Le suivre pour se distraire, à l’évidence, c’était une chose réussie, voir même un peu trop, assaillants avec lesquels un cache-cache c’était joué et se jouerait peut-être encore, échauffement et danse au creux d’un lieu sombre et inconnu, blessure et odeur âprement ferreuse du résiné, tout ceci s’engageait bien.
    Débouchant au terme du boyau sombre, la comtesse de Remscheid plissa son regard inexpressif en pivotant légèrement la tête pour découvrir l’endroit, par tous les saints des enfers, où l’enfariné l’avait-il dévoyé, le voile de ses rétines et le changement de luminosité ne lui permettait aucunement d’en juger.

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Hristo.montoya
- Posez vos mains sur la paroi. À mi-hauteur vers la droite vous devriez sentir un courant d’air. Lorsque ce sera le cas, vous serez au bon endroit. Pressez prestement et la porte se dérobera.

Derrière eux, le vide et le silence. Hristo jeta un coup d’oeil en arrière pour s’assurer qu’ils n’étaient effectivement pas suivis. Les deux gourdes devaient être tranquillement restés dans le bureau derrière la salle de bal attendant un hypothétique retour de leur part, retour qui ne viendrait jamais. Suivant les indications de son cavalier, la Rhénane laissa filer ses griffes sur la portée dérobée suivant le fin filet d'air jusqu'à le sentir plus précisément caresser ses empreintes. Elle appuya fortement sur la paroi et celle-ci s’ouvrit sur une étroite ruelle que le Montoya avait prétendu être peu passante. Elle plissa son regard voilé en peine avec la brillance de l'astre lunaire reflété par les pavés humides, marquant un temps d'arrêt et finit par poser les bottines hors du boyau en portant prudemment la dextre sur l’encadrement pour la laisser glisser sur le mur. Elle tendit l’oreille pour vérifier si des pas résonnaient dans l’alcôve de la rue dérobée mais ne perçut rien. 

- Et maintenant, il ne nous reste plus qu’à éviter la patrouille qui arpente les rues du quartier.

dit le catalan soulagé de respirer un air moins fétide. La tension venait de tomber d’un cran. Hristo prit appui sur le mur opposé à l’entrée qu’il venait de refermer précautionneusement. De son côté, la Comtesse l’observait, son visage masqué par la pénombre ambiante. Elle approcha une main vers son visage enfariné.

- Je pense que vous passeriez plus facilement inaperçu sans cette farce sur votre tête Sire Montoya

Hristo se sentit troublé par sa présence et cette main si proche de ses lèvres. Machinalement, il ôta la perruque blanche et la jeta au loin. Puis il lui tendit la main et elle sortit de son corsage un morceau d’étoffe dont il se servit pour retirer la poudre blanche qui lui masquait le visage, lui révélant ainsi son vrai visage. Alors qu’il s’exécutait, elle remonta ses mains sur l’arrière de sa tête, fouillant son chignon crêpé pour défaire le noeud du masque d’étoffe qui lui couvrait le haut du visage. L’ibère se figea un instant lorsqu’il découvrit le trésor qu’elle venait de lui offrir, lui faisant temporairement perdre paroles et contenances.

- Mylord il serait sans doute judicieux de songer à quitter l'endroit à présent ne croyez vous pas ? …Mylord? Seriez-vous troublé?

Troublé, il l’était de toute évidence.

- Moi? …Non….Je...Cela doit être dû aux cris de la Nemours de tantôt…

…Cris qu’ils avaient entendus quelques instants auparavant dans le passage secret alors qu’ils passaient à hauteur de la chambre de la maitresse de maison et qui avaient fort impressionné la Rhénane.

- C'est une possibilité. Si l'envie est votre de rejoindre le joyeux trio par la dérobée ne vous attardez pas de ma présence Mylord, j'arriverais sans doute à retrouver mon chemin.

- Souffrir autant est inhumain.

- Je ne l'aurais surement pas dit en souffrance....

Il avait beau être catalan, noble avec de belles manières, il n’en n’était pas moins homme et il avait en face de lui une dame à l’esprit aussi vif que le visage avenant. Montoya plaça ses mains de part d’autre de son corps, l’entourant d’une prison de chair, plaquant son corps contre le mur. Puis il leva lentement la tête et son regard se figea profondément dans celui de celle qu’il avait emmené dans cette aventure inattendue. Le ton de voix trahit les sentiments qui le submergeait à l’instant présent.

- Je n’ai aucune envie de rejoindre ce trio ce soir, demain, ou quelque jour que ce soit…

Surprise, la comtesse frissonna au contact humide de la pierre dans son dos. Elle cala ses mains sur la paroi avant de relever un regard glacé vers le souffle chaud qui s’écrasait sur son visage, sentant son regard sur le sien. Lui était tiraillé entre le fait de prendre là ce qu’il désirait et celui de respecter la bienséance due à leur rang dans la société.

- Troussez ma jupe...

Lui, son esprit ne lui appartenait plus. Il ne le contrôlait plus. Il était sous le joug de ses propres émotions. Elle posa sa main sur la joue de l’ibère, apposa ses lippes à la commissure des siennes.

- …Vos amis approchent Mylord, courir serait vain.

Les pas résonnèrent dans la ruelle, allant en se rapprochant. Hristo hésita un instant puis posa sa main sur le cuisse de Loreleï, la remontant le long de sa jambe en emportant avec elle l’étoffe de sa jupe, laissant percevoir un spectacle que la décence réprouvait même en cette heure avancée de la nuit. Ses lèvres happèrent ses carmines, se laissant aller à cette envie retenue depuis qu’elle a retiré son loup. Nul besoin de feindre pour paraître crédible. Ouïe en éveil pour percevoir les mouvements des poursuivants, Loreleï n’en n’était pas moins fortement déconcentrée par les effleurements et la chaleur de ses lippes sur le velours de ses pulpeuses. Elle se laissa aller au suave de contact physique hors des convenances bafouées depuis un long moment déjà. sa main gauche glissant de la joue sur la gorge de l’ibère. Lui oublia en cet instant la prudence élémentaire. Souffle court, la raison pour laquelle elle lui a permis une telle familiarité était déjà loin dans son esprit. Il se laissa alors alors à une plus grande intimité alors que deux individus passaient derrière eux. Enfouissant son visage au creux de sa nuque, son baiser s’étira de ses lèvres jusqu’à l’extrémité de ses épaules, la pointe de sa langue laissant une trainée humide sur sa peau satinée. Sa main sur le haut de sa cuisse avait plus le toucher d’un amant que celui d’un inconnu dont la vie était en danger.   

De son côté elle tentait avec grand peine de garder à l'idée la surveillance auditive des poursuivants du brun goutant ses lippes avec délice, ne percevant réellement leur présence qu'en sentant le Montoya enfouir son visage dans une caresse buccale à sa gorge, le manque de souffle à la parodie, si elle en était une, d'étreinte sensuelle sur sa personne, ouvrant opales glacées sur les deux hommes passant dans leur dos démontrant une intransigeance complète à leur égard quand à stopper l'amorce d'un ébat impulsif de la noblesse dans les entrailles d'une ruelle parisienne, les hommes se contentant d'un hochement de tête respectueux vers la comtesse dont la respiration se faisait plus haletante à l'étreinte se faisant plus aventureuse ainsi qu'au sillon humide marquant perfidement la peau fine de son épaule lui faisant mordre sa lippe inférieure. Suivant les ombres s'éloigner pour disparaître.

La menace avait disparu mais il ne faisait pas bon trainer sur ces lieux. La comtesse s’enquit de savoir si ces reitres savaient où le Montoya résidait. Voyant qu’il acquiesçait, elle lui proposa qu’il l’accompagnât jusqu’à l’hôtel particulier situé à côté de l’auberge du chat noir.



Première partie du post à 4 mains écrit avec JD Loreleï de Remscheid.



     « Une heure plus tard, dans un hôtel particulier rue du Parvis à Paris »


- Chiabrena! Vous les avez laissé s’enfuir!

- Si…

- Si?!?!? Si!?!?!? Et c’est tout ce que vous trouvez à me dire ? Comment ont-ils pu s’enfuir? Par où?

- Personne ne le sait. Ils se sont comme…volatilisés. Par contre, Salvatore a trouvé ça dans une ruelle.

- Montrez-moi!

L’italien regarda la pièce que son homme de main venait de lui transmettre. Son regard trahissait toute la haine qu’il ressentait après l’échec de la soirée.

- Une perruque?!!?! Une perruque ?!?!?! Où l’avez vous trouvé? Dans quelle ruelle?

- Une ruelle derrière l’hôtel de la Nemours, là où une dame de la haute se faisait trousser par un courtisan.

- Abrutis! Vous n’êtes qu’une bande d’incapable! Cette perruque, c’est la sienne. J’en donnerait ma main au feu. Et si elle était là, c’est qu’il est passé par là. Et s’il est passé par là, peut-être que le fameux courtisan en question n’était autre que l’homme que l’on cherche? Cette dame, qui était-elle ?

- La comtesse de Remscheid. Elle était invitée à la soirée de la Nemours.

- Demain, dès l’aube, je veux que vous vous mettiez en quête de trouver où cette comtesse réside. C’est la seule piste qui peut nous conduire jusqu’à lui. Vous n’avez pas le droit à l’erreur. Sinon, vous devrez répondre de votre incompétence devant qui vous savez.

- Si Padrino. Si… 
Comtesse_de_remscheid
    Robe réajustée et bras de son cavalier accroché comme l’usage le préconisait, et non mains liées, qui eurent attirés l’attention plus que de raison, la rhénane se laissait guider par l’ibère, qui connaissait vraisemblablement bien mieux qu’elle les dédales de la ville parisienne.
    Même si les festivités de la noblesse du royaume l’obligeaient régulièrement à venir ici lieu, certains souvenirs, bien peu enviables, ne lui avaient jamais donné l’envie d’approfondir son exploration de la ville de toutes les merveilles et joyaux, mais aussi de tous les vices.
    Se remémorant un instant son premier séjour sur Paris, Loreleï avançait au côté d’Hristo sans réellement porter attention au chemin qu’il empruntait, se contentant d’emboiter le pas de l’intriguant brun, en portant de temps à autre son regard translucide sur lui.

    La silhouette du chat noir qui servait d’enseigne à l’auberge se dessinait maintenant à quelques mètres d’eux, l’ébène avait au moins ce repère lorsqu’elle allait parfois en promenade dans le quartier de ses appartements, chose rare mais certains besoins nécessitaient de faire emplettes par soi-même.
    Main se resserrant sur l’avant-bras du Montaya, la comtesse indiqua d’un mouvement de tête une porte adjacente à l’auberge, l’hôtel particulier où se trouvait ses appartements était devant eux, endroit plus sécurisé que ceux du moustachu en toute logique.

      Nous sommes arrivés Messire Hristo


    Le statut de guide changea de main et délaissant le bras, Loreleï précéda son "invité" en montant les marches les séparant de la porte, l’ouvrant pour déboucher sur un vestibule de belle taille desservant différents escaliers menant à différents appartements.

      Par ici je vous prie


    Main gauche tendue vers le Montoya, la droite agrippait la rampe pour rejoindre à l’étage supérieur son havre parisien, alcôve cossue ornée de plus beaux tissus, mobilier de belle facture et autres petits trésors plaisants qu’offraient son titre.
    Les pas entendus par la dame de compagnie de la comtesse, la porte s’ouvrit sur une très jeune femme brune, qui s’effaça entre le mur et la porte pour laisser entrer sa maitresse et l’homme qui l’accompagnait, se dissimulant à la vue de l’étranger.

      Le cochet est revenu sans vous, je me demandais ce qui était arrivé à Madame
      Tout va bien, une découverte nocturne de Paris en bonne compagnie, rien de plus.
      Bien Madame
      Si on vous demande il n’y a que vous et moi ici, est-ce bien compris Ama ?
      Oui Madame


    Sans s’étendre davantage, Loreleï entrainait Hristo dans le cœur de son antre parisien, petit salon aux multiples sièges moelleux, ayant ici tous ses repères et se mouvant avec une bien plus d’aisance, presque féline, délaissant la main captive du brun en inclinant la tête.

      Bienvenue chez moi Chevalier

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Hristo.montoya
Le soleil était déjà haut dans le ciel de la capitale lorsque Hristo Montoya sortit de l’hôtel particulier de la comtesse de Remscheid. La journée était déjà bien avancée, l’astre paradisiaque entamant déjà la deuxième partie de son périple journalier. La nuit avait été courte et fort occupée pour le catalan. L’homme n’avait eu le temps que de sommeiller une heure ou deux, guère plus, et la fatigue marquait son visage et ses yeux. Sur le perron de l’hôtel, il réajusta son couvre-chef, s’assura que celui-ci était bien enfoncé sur la tête et plume au vent, il se mit à déambuler dans les rues de Paris. En ce milieu de printemps, une chaleur étouffante accablait la capitale. La fange qui d’habitude maculait les bottes des parisiens avant fini par former une croute dure au dessus des pavés. Une odeur nauséabonde s’était installée depuis quelques jours. Les plus nantis ne tarderaient pas à aller s’installer dans leur résidence d’été, dans la proche campagne parisienne. Quand aux autres, ceux qui ne pouvaient ou ne voulaient quitter la ville, ils devraient se contenter des bords de Seine pour respirer un air plus sain.

Montoya portait le même accoutrement que la veille. La chaleur et la transpiration rendait la chemises et les braies humides et collantes. Se trouver des vêtements propres et mieux adaptés à la situation était sa priorité numéro deux de la journée. Quand à la première…mais non. Je ne vous dis rien encore. Encore un peu de patience. La troisième? Un bain! Pour se rafraichir, pour se débarrasser de cette sueur qu’il détestait. Prenant la direction de la porte d’Orléans, il entra dans le premier relai de voyageurs qu’il croisa et le quitta presque immédiatement après s’être procuré une monture. Il ne tarda pas à quitter la route qui, bien qu’il était proche de la capitale, était infestée de coupe-jarrets et de détrousseurs de tout poil. Il coupa à travers la forêt, direction Versailles mais avant d’atteindre la ville, il bifurqua de nouveau pour reprendre un petit chemin de terre qui menait à une chapelle peu fréquentée en cette saison. Les fréquents coups d’oeil qu’il avait jeté en arrière lors de son périple lui avaient confirmé qu’il n’était pas suivi. Il lui fallait agir et vite. Les sbires qui avaient retrouvé sa trace hier chez la Nemours ne tarderaient pas à le localiser à Paris. Si Loreleï (qui n’avait toujours pas de nom ni de titre pour le Montoya) avait accepté de l’héberger pour quelque temps, il fallait en revanche que Hristo soit tout à fait honnête avec elle. Enfin….Honnête… Nul besoin d’expliquer en détail sa vie passée, ses manières de se comporter, ses petits défauts…ou qualité selon le point de vue que l’on adoptait. Elle devait par contre mesurer toutes les conséquences de son offre et être consciente des risques qu’elle prenait en accueillant sous son toit le catalan.

Comme il l’avait escompté, la chapelle était vide de monde lorsqu’il y entra et c’était heureux. Ce qu’il avait à faire là n’intéressait personne. Ou plutôt : personne ne devait savoir ce qu’il s’apprêtait à accomplir. L’ibère sortit son poignard de son fourreau et en dévissa le pommeau. A l’intérieur, se trouvait un morceau de parchemin enroulé et tenu serré par une cordelette de lin ainsi qu’une clef. Il prit la clé et la posa sur l’autel de la chapelle, en face de lui. Il referma précautionneusement le manche de son arme, s’assurant que le parchemin s’y trouvait toujours, qu’il n’avait pas glissé au sol, puis la remit dans son fourreau. Du dessus de l’autel, il retira la nappe qui le recouvrait ainsi qu’un livre des vertus qui se trouvait là. Après tout, qui aurait l’idée de voler un livre des vertus? La pierre taillée composant le dessus de l’autel représentait une scène tirée du celui-ci et liée à la destruction d’Oanylone. Montoya inséra la clef dans la serrure d’une porte de maison d’Oanylone et la tourna d’un geste ferme. Un « clic » résonna dans le lieu saint, ce qui fit grimacer le catalan. La porte s’ouvrit, non pas sur les condamnés de la fin du monde mais sur une petite fente de laquelle Hristo sortit un livre. Il souffla sur la couverture pour faire disparaitre la poussière de pierres qui s’y était déposé et passa sensuellement sur le cuir tanné par les années, un peu comme le font les amants avec leur maitresse. En lettres d’or, sur la couverture bourgogne, s’étalait en langue d’oc un titre énigmatique : «  Nous irons tous au Paradis par le Bon Homme Pierre-Roger, seigneur de Mirepoix* »  . Montoya n’avait cependant guère le temps de flâner. Il enveloppa son précieux dans un sac en toile de jute, qu’il cala ensuite dans ses fontes. Tout avait été remis en place dans la chapelle. Il était temps de regagner la capitale.

Le soleil venait de se coucher quand ses bottes claquèrent à nouveau dans le corridor d’entrée de l’hôtel particulier de Loreleï. Si la priorité un de la journée avait été réalisé, les deux autres en revanche étaient passées à la trappe. Hristo grimpa l’escalier quatre à quatre, le fruit de son escapade sous le bras. Il passa au peigne fin la chambre que la Rhénane lui avait octroyée, à la recherche d’une place où il pouvait mettre le livre en sécurité. Le lit? Impossible. En évidence sur ou dans la table de chevet? Trop risqué. Certes, c’est un endroit que ceux qui le poursuivaient ne penseraient peut-être pas de vérifier tellement ll est évident mais pouvait-il vraiment prendre ce pari là? Dans la bibliothèque avec d’autres livres? Là encore c’était un pari risqué. Le regard du catalan s’arrêta sur la cheminée. En été, avec cette chaleur, il y avait fort peu de chance que quelqu’un veuille l’allumer. Par ailleurs qui voudrait aller jouer dans le noir de suie? Le livre, dans sa gangue en toile de jute ne craindrait rien. Enfin..en principe. Par bonheur, comme il l’avait espéré, le manteau de la cheminée comportait un rebord intérieur assez large pour y déposer ce genre de trésor. Évidemment, jouer dans ce type d’endroit comportait certains inconvénients assez visibles. Maintenant, il avait un urgent besoin de s’atteler aux priorités deux et trois et ce d’autant plus que des bruits de pas se faisaient entendre dans l’escalier. Mais…De un, il n’était pas vraiment présentable pour un chevalier. De deux, Le noir qu’il devait avoir sur le visage et la chemise le trahirait de tout évidence. En toute hâte il retira la chemise et les braies et enfila une chemise de nuit qu’il avait trouvé dans la penderie. Le vêtement n’était pas encore totalement passé par la tête lorsque l’on frappait à la porte.


- Un instant s’il vous plait. Je ne suis guère présentable.

Ce qui en soit était on ne peut plus vrai. Le livre à ses côtés, désormais, s’il devait quitter Paris en toute hâte, il pourrait emporter avec lui ce pour quoi il avait mis sa vie en danger.



* Oeuvre fictive.
Comtesse_de_remscheid
    Tard… Soleil haut, il n’était pas des habitudes de la comtesse de se lever si tardivement, ni pour Ama de laisser sa maîtresse dormir si longtemps, mais la nuit avait été très courte et ordre donné.
    Le carillon sonnait midi pétante quand la dame de compagnie de Loreleï vint ouvrir les rideaux de la chambre, en déposant sur la coiffeuse un morceau de parchemin qu’elle avait découvert en ouvrant la porte.
    La rhénane ouvrit lentement son regard glacé sous la chaleur des rayons de l’astre solaire qui s’immisçait par la fenêtre fermée, repoussant la fine étoffe satinée qui lui servait de drap en cette période estivale.

      Ouvrez la fenêtre je vous prie


    Linge repoussé, le corps de l’ébène s’extirpa du lit, attrapant brosse à cheveux comme chaque matin, heurtant le morceau de vélin à proximité, longs doigts fins s’emparèrent du parchemin relevant ses abysses opalescents sur sa suivante en se rapprochant de la clarté de la fenêtre pour prendre connaissance de son contenu.



    Merci pour la nuit. Si vous le permettez je vais encore abuser de vous (enfin de votre hospitalité) pour quelques jours. Je m’absente pour me trouver de nouveaux vêtements afin de paraître plus présentable devant vous.

    H


      Mon invité ?
      Parti Madame
      Bien, longtemps ?
      Quelques heures Madame
      Nous allons sortir Ama
      Je fais prévenir Madame. Une destination ou … ?


    Sourire entendu à la jeune femme qui lui est nécessité utile et bien plus qu’une simple dame de compagnie.

      Nous allons faire des emplettes « publiques » Ama
      Bien Madame


    Préparatifs d’usage avant de sortir dans la vie parisienne avec sa suivante et la calèche, visite à ses fournisseurs habituels lorsque les envies de dépenser sans compter la prenait, étoffes précieuses, brillance des satins, touché du velours, finesse des brocards, tout était un plaisir des sens et le touché de la germanique était à la fête chez les tisserands qui lui déroulaient tapis rouge à chacun de ses passages dans la capitale.
    La requête du jour était pourtant quelque peu inhabituelle, les tenues sobres étaient de mise comme toujours, mais ce jour, atours masculins avaient été demandés aux couturiers, étonnant les artistes la sachant veuve, mais quand les écus coulaient à flot, les bouches se fermaient et se scellaient, que la comtesse eut un mignon sous sa coupe pendant ses escapades parisiennes ne regardait qu’elle.
    Fin de journée, Ama les bras chargés remontaient les escaliers en précédant cette fois sa maîtresse pour lui ouvrir la porte et déposer les paquets dans le salon, avant de prendre les ordres pour la soirée. L’ébène dans son sillage huma une odeur singulière, sans réussir à déterminer exactement quoi, en revanche l’essence du Montoya planait dans la pièce.

      Ama… Allez voir si mon invité a des besoins particuliers ensuite vous ajouterez de l’eau chaude au baquet.
      Courir Paris par cette chaleur m’a donné envie d’un bain.
      Bien Madame


    Sans attendre, la dame de compagnie alla frapper à la porte de la chambre du chevalier, l’entendant répondre ne pas être « présentable », grimaçant la jeune femme s’enquit donc au travers de la porte.

      La comtesse voudrait savoir si vous avez des besoins particuliers ?


    La réponse lui parvint alors rapidement, faisant sourire la brune comme-ci sa maîtresse et le sire étaient en connexion sur les besoins, vêtements lui avaient été trouvés dans l’après-midi quant au bain, elle allait s’en occuper juste après.

      Bien Messire


    S’apprêtant à prendre congé, elle entendit de nouveau la voix résonner derrière la porte avant de faire réponse à son tour.

      Souvent après ses ablutions, donc l’horaire varie mais elle vous attendra pour diner je pense qu’elle escompte votre présence.
      Hum… Des vêtements sont à disposition pour vous dans le salon, Madame a pensé que vous pourriez en avoir besoin.


    Deux bains à préparer, à moins qu’il ne partage le baquet de la comtesse, autant lui demander, d’un simple signe de tête Loreleï acquiesça à la requête de sa dame de compagnie, inutile de lui faire subir supplice d’une double charge, un rapide passage pour ôter la pellicule de sueur suffirait à la comtesse.
    Le baquet prêt l’ébène s’y glissa furtivement prenant juste le temps de s’y délasser rapidement, sortant en laissant Ama l’enduire de l’essence parfumé qu’elle avait acquis dans l’après-midi, fragrance subtile de jasmin et de rose entremêlées.
    Usant de la porte adjointe à sa chambre, Loreleï libéra donc pièce d’eau pour le Montoya, qui devait probablement patienter ici ou là dans les appartements de la Remscheid, afin de se vêtir pour le diner.

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Hristo.montoya

Il flottait une odeur de fleur dans la salle d’eau. Fragrance de rose sans aucune doute mais également d’une autre fleur que le Montoya n’arrivait pas à distinguer. L’homme n’était familier ni avec les plantes ni avec les fleurs. Quelques instants auparavant, suivant les directives de la domestique, il était passé par le salon pour récupérer des vêtements propres. Si cela faisait ses affaires, Hristo fut cependant étonné que la Rhénane dispose en son hôtel parisien d’un tel ensemble masculin. Loreleï utilisait-elle cet hôtel pour ses escapades libertines? Lors de leur conversation la veille, elle n’avait point fait mention d’un époux malgré les compliments galants de l’ibère. Hristo en avait conclu que d’époux, il n’y en avait point. D’ailleurs, amène t-on en pleine nuit chez soi un homme lorsque l’on est marié? Bras dessus bras dessous? Invite t-on un inconnu à trousser sa jupe…même pour se dépêtrer d’une situation tendue? Non, point de mari pour la Rhénane. Un amant? Régulier? Occasionnel? Un courtisan payé pour égayer ses nuits parisiennes? Les vêtements posés sur la chaise en face de lui n’avaient rien de vulgaires oripeaux. Ils étaient neufs ou peu fréquemment utilisés. Leur discussion de la veille avait été interrompue par l’arrivée des italiens. Manifestement, elle se devait d’être reprise pour éclaircir certains zones d’ombres.

D’ombres justement il en fut question dans les pensées oniriques du catalan. Les bras appuyés de part et d’autre sur les bords du baquet, l’homme ferma les yeux et laissa son esprit errer à mi-chemin entre conscience et sommeil. La fatigue de la nuit passée commençait à le rattraper et le voyage à cheval sous le soleil parisien n’avait rien arrangé… La chambre était plongée dans le noir. Il n’y voyait rien. Il savait cependant qu’il était confortable allongé dans un lit à baldaquin, enveloppé dans des couvertures de satin. Un halo lumineux se découpa progressivement dans les ténèbres pour finalement devenir une fenêtre. Le contraste noirceur - lumière éclatante l’aveuglait mais peu à peu cette dernière s’atténua. Au delà de la fenêtre, des nuages apparurent puis des toits faits de tuiles rouges, des façades de maison. Le son fit son apparition avec le brouhaha de la rue. A nouveau l’obscurité prit le dessus mais cette fois elle avait la forme d’une silhouette, un corps de femme qui se dessinait en contrejour devant cette fenêtre. Un corps de femme au petit matin, baigné par les rayons du soleil de Paris. Des zones d’ombre à éclaircir? Ou à enlacer? Elle avait le menton relevé, la tête légèrement penchée vers l’arrière. Une cascade capillaire retombait sur ses épaules, rebondissait et suivait ensuite les courbes naturelles d’un pays qui lui était encore inconnu. Elle avait croisé les mains derrière la tête, le buste à peine arc-bouté vers l’avant. Il s’était approché. A cette silhouette féminine, il avait adjoint la sienne, plus masculine. Ses bras étaient devenus l’écrin d’une pierre noire se reflétant dans les rayons du soleil. Sa tête s’était penchée vers le cou de sa captive, ses mains découvraient une Terra Incognitae faite de creux et de vallons, les explorant de la paume de chacun de ses dix doigts. De l’extrémité de sa cuisse jusqu’aux sources de son buste. Elle s’était retournée dans ses bras et ses lèvres s’étaient approchées inexorablement des siennes. Lorsqu’elles entrèrent en contact, le décor s’évapora. Ils se retrouvèrent tous les deux enlacés dans la même position, vêtus l’un et l’autre d’épais manteaux. Le vent balayait avec force l’éperon rocheux sur lequel ils se trouvaient. Il s’emberlificotait entre les murailles et les tours du château, s’immisçait dans les interstices entre les pierres disjointes, passait au dessus des remparts fragilisés par l’assaut incessant des machines de guerres comme ces mangonneaux et ces trébuchets qui se dessinaient au loin. Elle s’était retournée, avait appuyé son dos contre le torse de son compagnon. Il n’avait pas relâché son étreinte, ses bras enserrant toujours sa taille. Elle avait porté son regard vers l’horizon au delà des cimes et des monts, scrutant ces lieux avec un mélange d’angoisse et d’espoir. Lui ne parlait pas, n’exprimait ni crainte ni espoir. Son regard ne portait pas si loin. Il observait le camp des assiégeants au pied de l’éperon rocheux et il serrait les dents, le visage empli de haine contre cet ennemi viscéral, ceux qui les nommaient ironiquement les parfaits.

Combien de temps le Montoya avait sommeillé? Il l’ignorait. l’eau avait refroidi et avait pris une teinte grisâtre lorsqu’il avait plongé la tête pour laver ses cheveux maculés de suie. Il sortit du bain et s’enroula dans un grand drap blanc. Il vivait là une étrange situation tout de même: il était là, dans la maison d’une presque inconnue, vêtu du strict minimum. Pourquoi? Le Montoya se demandait pourquoi elle s’était embarrassée de lui? Pourquoi lui avait-elle proposé de passer la nuit chez elle? Pourquoi prendre la peine de lui trouver des vêtements? Et maintenant, pourquoi l’inviter à diner en sa compagnie? Certes, il eut été flatteur de penser que le charme irrésistible de l’ibère ait été pour quelque chose dans la présente situation. Même s’il n’était pas trop méchant homme, Montoya savait qu’une inconnue ne prendrait autant de peine pour lui, simplement pour fleureter avec sa moustache finement taillée. Alors quoi? Elle le connaissait à peine. Que pouvait-elle bien lui vouloir? Cette femme l’attirait. Cette femme l’intriguait. Une partie de lui-même le poussait à la découvrir, l’autre disait de s’en méfier mais lorsqu’il se remémorait le goût de sa peau sous ses lèvres, le catalan se disait que la vie n’avait aucun gout si l’on se privait sans cesse de prendre des risques pour l’embellir.

Il déposa son linge sale dans un bac en osier, s’habilla de pied en cap avec les vêtements mis à sa disposition par la domestique, ceux dont il ne savait pas s’ils appartenaient à un ancien amant ou s’il était le premier à les porter : chemise blanche à large manches, jabot en dentelles, gilet de brocart bourgogne parsemé d’entrelacs or, braies unies assorties au gilet et boutonnés en dessous du genou, chaussures noires à boucles dorées. Ce fut cependant le dernier détail qui fit sourire l’ibère : visiblement, la Comtesse avait remarqué la veille son intérêt pour les catogans. Celui-là était de la même couleur que le gilet. Il se mira, veillant ainsi à réaliser les petits ajustements requis à la barbe et à la moustache. Il brossa ses cheveux et les laissa libre pour qu’ils puissent finir de sécher rapidement. Il était hors de question qu’il se montrât à elle dans une tenue qui n’était pas impeccable. De retour dans la chambre, l’ibère s’allongea sur le lit, dévissa une nouvelle fois le pommeau de son poignard et focalisa son esprit sur le contenu mystérieux du parchemin qu’il tenait en main. Ce n’était pas la première fois qu’il s’attaquait à cette tâche. Et jusqu’à présent, elle lui résistait encore et toujours. Le livre de Mirepoix et ce parchemin étaient complémentaires. Montoya en était convenu. Il était parti de l’hypothèse que l’oeuvre contenait un secret dont la clef était ce morceau de parchemin. Mais comment arrimer l’un à l’autre? Il n’avait pas encore trouvé.

Ses cheveux étaient secs à présent. Le soleil avait totalement disparu derrière les murs de Paris. Il était temps d’honorer l’invitation que la comtesse lui avait lancée. Montoya cacha sous sa couche le parchemin dument replacé dans son écrin. Se faisant, il tomba au même endroit sur un objet qui lui parut insolite : un fouet? Vraiment? Se peut-il qu’elle soit prudente au point de cacher des armes un peu partout ou l’utilisait-elle pour punir ses domestiques lorsque ceux-ci faillaient ? A moins qu’elle était une adepte de la pénitence, qu’elle portait un cilice et se mortifiait chaque nuit avant de s’endormir? Intéressant. Il devait en apprendre plus sur cette femme. Jusqu’à présent, elle ne s’était guère révélée. A vrai dire, lui non plus. Peut-être que le repas serait l’occasion de faire plus ample connaissance? Un dernier détour vers la salle de bain pour remettre en place le catogan et Montoya se présenta enfin dans la salle à manger.


- Comtesse, le bonsoir!

Il tourna sur lui-même, bras levés pour mieux la laisser le découvrir.

- Comment trouvez-vous votre invité ?

Comtesse_de_remscheid
    Chambre de la Comtesse de Remscheid


    La subtile combinaison du jasmin et de la rose sur le satin de sa peau était un pur délice pour l’odorat de l’ébène, la créatrice lui avait donné le nom de ce parfum mais pour l’heure celui-ci lui échappait… Ce n’était d’aucune importance, la seule essence qu’elle voulait retrouver dans la fragrance qu’elle portait était celle de cette magnifique petite fleur blanche dont la senteur lui enivrait les sens dès qu’elle atteignait son nez.
    Ama ne serait pas bien longue à venir la rejoindre, dans l’attente, Loreleï se dirigea vers sa coiffeuse en tenue d’Eve et y prit place, observant son reflet dans les grandes lignes en dénouant ses cheveux retombant en cascade sur le haut de son buste.

      Navrée j’ai été longue, je dressais le couvert
      Tout est bien Ama ne t’inquiètes pas


    Main portée sur la brosse à cheveux, les doigts s’en emparèrent pour la tendre à sa brune confidente, avec qui les convenances disparaissaient dans l’alcôve de sa chambre, prenant son avis en la laissant peigner ses longs cheveux obsidiennes.

      Qu’est-ce que tu penses de mon invité Ama…
      Il a l’air « correct »
      Il m’intrigue…
      Et c’est plutôt une bonne chose non ?
      Je ne sais pas encore Ama, nous verrons…


    Discussion close avec la fin du brossage de cheveux, l’ouïe fine de la comtesse captant les clapotis de l’eau dans la pièce adjacente, le Montoya avait donc pris possession du baquet, il ne lui fallait alors point s’attarder quant au temps pour s’apprêter, de toute façon la chevelure de jais resterait libre.
    Il fut convenu entre les deux femmes de quelque chose de sobre, comme à l’habitude, fluide et sans fioriture, noir, la suivante aidant la comtesse à se parer de cette tenue en resserrant le petit laçage dans le dos qui cintrait le haut de la robe choisie.
    Ama remerciée fut laissée libre d’aller vérifier en cuisine que l’orchestration du diner se déroulait sans accroc, un cuisinier ayant été réquisitionné en ville lors de leur virée de l’après-midi, si le chevalier comptait abuser de son hospitalité autant que celle- ci soit bonne.

    Lentement la dame, de nouveau vêtue de noir, glissa jusqu’à la fenêtre laissant entrer la fraîche de la nuit tombante, les rétines translucides profitant des teintes rougeoyantes du crépuscule sur les toits parisiens, qu’elle soit en Rhénanie, dans le Sud ou ici, le spectacle de ce ciel enflammé avait toujours ravi ses pupilles.
    Le dos légèrement dévoilé appuyé sur le bâti de la fenêtre, les opales passèrent outre les rivages d’ardoise et de tuiles, esprit divaguant pour atterrir dans les geôles de la Sainte Inquisition où elle s’était rendue bien plus qu’elle ne l’aurait souhaité, y ayant découvert suffisamment d’atrocités pour ne jamais les oublier.
    Finalement l’envol de ses pensées la fit rejoindre une crypte, dans cette Cour si singulière du tumulte parisien, une ombre s’y dessinant, massive et familière, encore une bure inquisitrice, celle d’un frère… son frère.

    Voile de chair se refermant sur l’ouverture à son âme et retour à la réalité du moment, la pénombre s’étant installée, depuis combien de temps était-elle partie en réminiscence… Peu importait, pour l’heure le clapotis avait cessé dans la pièce d’eau, il était temps de tomber le masque et surtout de rejoindre son convive, tenter d’en savoir plus, sur lui, sa fuite, ce livre mais surtout sur lui.
    Pourquoi l’avait-elle sorti de ce mauvais pas ? La question devait surement lui tarabuster la cervelle, et rien que cette idée la fit grandement sourire, une douce torture que celle de l’esprit, mais peut-être la plus perfide, car instillée sans que l’autre n’en soit forcément conscient.
    Index droit bagué fut déshabillé et le stylet singulier déposé sur la coiffeuse, la comtesse aux pieds nus sortant de son alcôve pour rejoindre Ama s’affairant dans la salle à manger, pas de bottines, pas de son sur le plancher, fluidité de la robe aidant, l’ébène semblait flotter dans son avancée.

    ~~~~~~~~~~~~
    Salle à manger


    La table du repas était dressée, chaque chose à sa place et un nombre de chandelles relativement important éclairant la pièce, le regard glacé se porta sur la silhouette de sa suivante avant de se diriger vers elle.
    Tout était bien et les plats froids souffriraient aisément d’attendre le Montoya qui semblait vouloir se faire désirer, prenant de toute évidence un temps certain pour se préparer, Ama fut remerciée après avoir vérifié auprès d’elle que les habitudes avaient été respectés.
    L’endroit n’attendait plus que la touche masculine de son convive, Loreleï ouvrit la fenêtre, cheveux voletant légèrement dans le fin filet d’air mêlant fraicheur et pesanteur de l’été parisien quand Hristo fit son entrée, entre subtil et magistral, habile dosage qui lui fit lentement étirée un sourire alors que ses pas dénudés la portèrent vers lui, pendant que l’homme se prenait presque pour une danseuse, s’attendant presque à le voir orchestrer saut de biche et autres entrechats.

      Bonsoir Chevalier


    Portant sa main droite vers le gilet, deux doigts lissèrent l’étoffe, les opales glacées remontant vers le visage du brun barbichu, il avait donc opté pour le brocard, ce rouge sang caillé qui lui avait été présenté par son tisserand et le toucher de ces fils d’or brodés avait achevé de la convaincre que ces atours lui iraient comme un gant.
    Jouant du prédateur autour de sa proie, la dame en noir se mit à jouer le jeu du paon, le contournant pour tourner autour de lui, profitant de la luminosité suffisante pour l’observer laissant l’index de sa dextre soulever les cheveux soigneusement noués sur sa nuque.

      Mon invité est plaisant à ma personne… Je ne doutais point que cette couleur vous aille au teint… Je n’en jure pas cependant si de poudre de riz vous vous fardez très cher.


    Sourire aux carmines en achevant sa ronde autour de l’ibère, Loreleï orchestra fanfaronnade similaire à celle du paon ayant déployé sa parure colorée, pivotant lentement sur elle-même, la fluidité de l’étoffe s’envolant légèrement dans le tournoiement, dévoilant pieds non chaussés.

      Votre hôtesse est-elle à la hauteur de vos attentes…
      D’autant plus maintenant que vous me savez Comtesse par je ne sais quelle subtilité Mylord(*)…
      Loreleï reste cependant le prénom que l'on m'a donné lors de ma naissance.


    La question était sous entendue mais bien présente, comment avait-il eu cette information ? Loin de s’en cacher, le fait de le garder dissimulé dans le cadre présent l’arrangeait plutôt, il n’y aurait là pas eu de faux semblant ou de barrage dû à son rang.
    Avait-il pris renseignement au cours de la journée ? Si oui, pourquoi ? Et par qui ?



    (*)Mylord : mon seigneur


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Hristo.montoya

La comtesse aux pieds nus… Avait-elle décidé de faire fi de tous les principes de bienséance? Les pans de sa robe noire virevoltaient dans les airs alors qu’elle tournait autour de lui, les pieds et même les chevilles ainsi dévoilés à un inconnu. Hristo se tenait coi pendant qu’elle dansait, la tête penchée vers le bas, suivant du coin de l’oeil le mouvement de ce corps qui tentait de l’enivrer par la sensualité de ses arabesques. Elle cherchait à le provoquer, ajoutant le toucher à la vue, tâtant du gilet, se permettant même de jouer avec ses cheveux serrés en catogan. Manifestement, la rhénane était d’humeur badine. Si elle était mariée, elle ne s’empêchait pas de se comporter en séductrice. Si elle avait un amant régulier, eh bien, l’homme devait se poser des questions sur le pérennité de son titre, ce qui n’était pas pour déplaire au Montoya. Manifestement, il n’y avait aucune gêne entre eux. Elle jouait au jeu du chat et de la souris. Le tout était de savoir qui tenait le rôle du chat et qui tenait celui de la souris. Le rongeur était-il blanc ou gris?

A peine avait-elle terminé sa danse lascive qu’il bloqua net son mouvement, enroulant son bras autour de sa taille. Il l’attira tout contre lui dans un geste qui ne souffrait aucune contestation. Sa dextre partit à la recherche de sa main alors que son visage était si proche du sien qu’elle pouvait sentir son souffle rouler sur sa peau satinée, de part et d’autre de son cou. Se penchant vers elle, il l’obligea à se cambrer légèrement vers l’arrière. Il resta un court instant silencieux, détaillant chacun des traits de son visage, les gravant dans sa mémoire comme le ferait un peintre avec son modèle.


- Pieds nus, cheveux détachés, dos…

Sa main remonta d’un cran le long de son échine, la paume de ses doigts exerçant une pression à la lisière du tissu de sa robe puis s’aventurant sur la partie découverte de son dos jusqu’à atteindre la base de sa nuque…

- …nu. Robe affriolante…

… pour finir par reprendre sa place initiale après avoir repris au retour le même chemin qu’à l’aller.

- Vous prenez des risques comtesse. Vous ne me connaissez pas. A jouer à ce petit jeu, je pourrais perdre le contrôle de mes émotions et vous basculer en arrière sur cette table.

Oui, il aurait pu. Oui, il le voulait. Le pouvait-il? C’eut été un grave manquement à l’étiquette. La comtesse avait pris quelques libertés avec cette dernière. En un sens, elle lui avait ouverte quelques portes. Cela ne voulait pas dire qu’il pouvait se permettre toutes les familiarités avec elle. Hristo se mit alors à effectuer quelques pas de danses, tournant avec elle dans les bras sans pour autant lui permettre de se détacher de lui. Puis il leva leurs bras et la fit tourner sur elle-même pendant que son regard suivait les circonvolutions de sa silhouette. Cela n’avait rien à voir avec un pas de danse connu. L’ibère improvisait des mouvements au gré de son humeur, inspiré par ses provocations du moment. Elle voulait se pavaner devant lui? Exacerber son désir? Alors pourquoi s’en priverait-il? Il enroula une nouvelle fois son bras autour de sa taille et telle une toupie, la fit tournoyer sur elle-même en desserrant son étreinte.

- Grâce et sensualité…

Lorsqu’elle revint à nouveau se nicher dans son giron, il murmura à son oreille.

- J’espère que vous avez donné congé à votre domestique.

dit-il en envoyant à son tour ses chaussures aux quatre vents.

- Mais si vous voulez que je réponde à vos questions, il vous faudra alors accepter de répondre aux miennes Comtesse.

Question? Elle lui avait posé une question?

- Qu'est-ce qui vous laisse croire que j'ai des questions à vous poser Chevalier ? Mais... Dans le mesure où la réponse peut vous être donnée elle le sera.

- Vos yeux vous ont trahi Comtesse…lorsque je suis entré.

- Mes yeux ne trahissent pourtant plus grand chose mais je vous le concède

L’ibère raffermit son emprise sur sa proie, fut-elle chatte, fut-elle souris, blanche ou grise. Ses yeux ne quittaient pas la pulpe de ses lèvres à chaque syllabes qu’elle prononçait.

- Vous m’avez d’abord demander si vous étiez à la hauteur de mes attentes. Vous avez ensuite appuyé le désir d’avoir une réponse en ajoutant un point d’interrogation que vous avez tracé sur ce gilet de la pointe de votre doigt. Enfin maintenant vous savez que je connais votre titre et vous mourrez d’envie de savoir comment je l’ai su. Je me trompe? N’est-ce pas plusieurs questions auxquelles vous espérez réponse Comtesse? Ou Loreleï… Selon la distance que vous souhaitez garder entre nous. Demandez et je respecterai tous vos… désirs.

Leurs pas improvisés les avaient emmenés proche de la fenêtre ouverte par lequel s’engouffrait une brise portant encore avec elle la chaleur étouffante de la journée. Derrière elle, un premier éclair zébra le ciel suivi quelques instants après d’un coup de tonnerre qui résonna dans toute la ville. Il franchirent le pas de la fenêtre et ils continuèrent leurs danse débridée sur le balcon, à la lumière des chandelles et des étoiles.

- A votre première question, je répondrai que mon hôtesse surpasse toutes mes attentes.

Un deuxième éclair fit son apparition dans une autre partie du ciel parisien.

- A votre deuxième question…

Et le coup de tonnerre ne tarda pas. L’orage était sur eux. Le vent avait gagné en vigueur, soulevant les pans de sa robe noire comme s’il s’agissait d’un fétu de paille.

- C’est votre domestique qui vous a trahi. Volontairement ou pas, je ne saurais le dire. Elle est venue me dire que la Comtesse voulait savoir si j’avais des besoins particuliers. Je lui ai parlé de bain et de vêtements. J’ai péché par omission en ne lui mentionnant pas mes autres besoins particuliers.

Et une pluie d’été, chaude et faite de grosses gouttes, enveloppa toute la capitale dans des trombes d’eau et dans une symphonie assourdissante provoquée par l’écrasement des dites-gouttes contre le marbre du balcon, concert auquel l’ibère était insensible, ses yeux et son esprit n’étant dirigé que sur elle.

- A vous de répondre maintenant: pourquoi vous intéressez-vous à moi? Pourquoi avoir proposé de m’héberger et de m’aider alors que vous ne me connaissez encore que si peu?

Après la sueur, après le bain, il ne manquait plus que la pluie. Décidément, il semblait que ce jour était placé sous le signe de l’humidité.

Répliques en rouge foncé de la part de JD la Comtesse de Remscheid
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