Loin des fracas de l'Empire le jeune couple profitait d'un calme relatif pour gouter aux joies d'une vie simple. Cela faisait maintenant près de deux mois qu'ils avaient quitté Nancy et le temps s'écoulait tranquillement au rythme des villes et duchés qu'ils traversaient, appréciant les rencontres qui s'étaient, pour l'heure, révélées plaisantes pour la plupart.
Depuis qu'ils avaient déchiré leur accord liant l'Ordre à l'Empire, ils respiraient plus librement,libérés d'un joug qui, pour être prestigieux, n'en était pas moins difficiles à supporter au fil des années. Avec Elias, ils avaient cru à plus de reconnaissance mais la jalousie de l'AI était terrible et Elias s'était révélé un diplomate bien peu à même de décider. Peu à peu il s'était laissé dicter sa conduite et n'avait rien fait malgré ses promesses, décevant une amitié d'une vie. Et si le chevalier pouvait pardonner sa tiédeur de toujours à son ami, il ne pouvait pardonner sa faiblesse à l'Empereur. Le Chapitre avait décidé : L'Ordre des Lames reprenait sa liberté.
Libres !
Mais si cela voulait dire qu'ils pouvaient désormais s'engager dans les combats qui leurs sembleraient juste, cela voulait aussi dire quitter la Lorraine où il n'y avait pas d'avenir pour eux bien que le duché ne dispose d'aucune force vive. Ainsi en avaient décidé une poignée de nobles accrochés à leur dérisoire pouvoir comme morpions à des poils de cul.
Rester à végéter sur un territoire grand comme un mouchoir de poche ne les tentaient guère car il faut bien le dire, jamais l'Empire n'avait été soudé sinon par un nom ronflant : Sacrum Romanorum Imperium Nationis German. Mais dans les faits, trois entités s'affrontaient et se jalousaient : la partie italienne, la partie germaine et la partie francophone constituée de trois duchés : Savoie, Lorraine et Franche Comté. Trois états dans l'Etat, chacun parlant sa propre langue. Et à côté de ses grands frères, des pauvres orphelins oubliés comme la Hollande ou les Balkans. Énorme territoire donc, mais divisé et dont la langue officielle était... l'angloys !
Ils décidèrent donc de faire route à l'Ouest afin de trouver un endroit où vivre où ils se sentiraient bien.
Ainsi donc traversèrent-ils l'Auvergne où beaucoup se plurent mais qui présentait quelques points qui semblèrent défavorables à une étude approfondie, et notamment l'absence de port, sinon à Moulins. Ils décidèrent donc de faire route plus avant et c'est ainsi qu'ils parvinrent en Bourgogne où les deux lances firent jonction.
Nevers leur plut.
Cosne ? Ils découvraient.
Ils choisirent une auberge sise près du port. Au gré du voyage, leur groupe se renforçait de nouveaux postulants épris d'aventures et d'amitié et que la bonne humeur qu'ils infusaient, attirait. Ainsi d'un jeune garçon de Polignac qu'ils avaient dû hélas abandonner pour un temps dans un monastère de Bourbon, puis Oscar, un jeune breton échoué à Moulins, un autre encore qui devait arriver dans quelques jours de Mortagne en Alençon. Une jeune femme aussi devait les rencontrer sans s'être encore vraiment déterminée.
La vie s'écoulait donc, paisible, et même si quelquefois les contrariétés les rattrapaient, ils profitaient des grandeurs du Royaume et donc en ce jour, de ce vieux et beau duché qu'était la Bourgogne.
Féru d'Histoire, le Sénéchal aimait la Bourgogne qui avait donné naissance à de grands noms et il se plaisait à raconter à son fils comment, un jour, le Roy Levan s'était perdu en Bourgogne, ou lui parlait de la toute première taverne du Royaume qui avait vu le jour dans ce duché.
A l'auberge, la veille au soir, l'attention du Chevalier avait été attirée par un bout de papier abandonné sur un coin du comptoir.
Élisabeth dite Lison, jeune fille de bonne famille *paraît que c'est rassurant*,
offre ses services contre bon soin *oui, parfait ça sonne bien comme il faut !*.
Sait lire et écrire, discrétion garantie. Personne malveillante s'abstenir.
Si intérêt, demandez Lison à la taverne municipale. Il tendit le papier à Elektra. L'écriture soignée et l'orthographe parfaite témoignaient d'une bonne éducation, sans doute dans un couvent plutôt qu'à la cour d'un noble puisque la jeune fille se cherchait une destinée.
- Regardez mon ange. Qu'en pensez-vous ? Nous pourrions peut-être la rencontrer si elle est toujours ici...
Puis plus haut :
- Tavernier ? Connaissez-vous cette Lison ? Où pourrions-nous la rencontrer ?-
J'l'avions pas r'vue depuis qu'elle a posé son papier mais j'me suis laissé dire qu'elle trainait encore dans l'coin. Brune, les cheveux longs, grande... comme ça... Essayez donc voir à la mairie, au bureau des embauches. Le Sénéchal s'inclina vers Alexander :
- Voilà une mission pour un preux chevalier ! Que dirais-tu de rechercher une gente damoiselle du nom de Lison ?