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[RP] Ne jamais sous-estimer le pouvoir des paillettes

Raymond_de_petrus
Après avoir raccroché sa mâchoire, Raymond eut un léger rire.

En te promenant ainsi, tu mettrais le feu à Périgueux, je crois.

Raymond abandonna ses pinceaux, qui se retrouvèrent dans un bac rempli d'eau. Le nettoyage serait pour plus tard, et il s'essuya les mains, avant de s'approcher de la couturière, qui se vantait de l'avoir reçu à temps, pour en "profiter". Il lui dit, d'un ton faussement navré, avec un sourire en coin affiché :

Malheureusement, je peux t'assurer que tu ne porteras pas grand chose de plus durant les prochains jours, ma chère...

Voire moins, ce qui serait encore mieux. Il attrapa le ruban vert, et tira assez dessus pour dévoiler un peu la gorge de Sorianne

Sorianne, tu es...

Les mots lui manquèrent brièvement, chose rare. Il avait toujours un compliment à dégainer à une jolie dame, mais à cet instant, il eut une absence, bien trop troublé par la situation. L'évidence s'imposa, et il n'avait pas que le désir à accuser pour cela. Finalement, une médiocre inspiration lui vint, loin des élans lyriques qu'il pouvait avoir.

Une femme splendide.

Il décida de ne plus réfléchir, et la saisit par la taille pour l'embrasser. La mesure fit place à la passion, alors que le sablier arrivait à sa fin.

***

Avançons donc un peu dans le temps, jusqu'au 5 septembre.

Sorianne porta-t-elle longtemps sa robe de nuit ? Difficile à dire, mais rien n'était moins sur...

Les trois jours suivants furent à l'aune du prélude. Ils ne se quittèrent guère, sauf pour se rendre au conseil comtal, ou s'occuper des contingences quotidiennes. La couture de Sorianne n'avança guère, tout comme le tableau de Raymond. Le couple profita des dernières heures dont ils disposaient, tel un bouquet final de feu d'artifice.

Et ce fut la fin.

Après être passé au conseil comtal de bonne heure pour ses rapports financiers, Raymond s'était vautré sur le lit, tandis que Sorianne venait de terminer de s'habiller. Elle l'avait rejoint, tête posée sur sa poitrine et il caressait distraitement ses cheveux. La messe de sexte fut annoncée au clocher de la cathédrale de Périgueux et déjà il trouvait que le temps lui manquait.


Sorianne...

Il n'ajouta rien, mais ils savaient tout les deux que le moment était venu.
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Sorianne
Se balançant doucement de gauche à droite, le tissu de sa tunique dans les mains, Sorianne regarda approcher Raymond, non sans sourire et rosir à ce qu'il lui dit. Ce serait mentir que de nier tout plaisir à recevoir de beaux compliments. Elle n'avait rien d'autre que la tenue et le petit bijou offert, même les bracelets de cuir qu'elle portait habituellement ont été délaissé et laissé sur la table de chevet dans son appartement. Elle n'a rien à cacher au peintre. Alors la mine se fait pensive et un sourire chafouin nait alors qu'elle pose un doigt sur son menton.

Mettre le feu à Périgueux, hmmmm... Peut-être qu'il y a des coins qu'on pourrait aller voir alors! ou une autre ville. J'ai le droit de choisir?

Plaisanteries, peut-être même pas amusantes, mais la So se marre doucement. La lèvre est remordue alors qu'il arrive devant elle en lui promettant qu'elle ne portera rien de plus. Peu importe, elle l'a amené pour cela. Le ruban est tiré, et la petite noiraude penche la tête, le regard rivé sur son ami. Encore quelques jours à en profiter. Quelques jours pleins à vivre en sa compagnie. Quelques jours... Et s'il trouve ses mots médiocres, il a touché Sorianne au plus profond, elle qui se considère comme un rien.

Quelques jours.
La retenue n'est pas de mise.
Si elle ne dit mot sur ce qu'elle peut ressentir, elle s'applique au moins à le démontrer que ce soit en gestes tendres, en baisers.

Les maigres séparations de ces derniers jours lui paraissent durer une éternité, que de temps perdus alors que la fin de ce monde est si proche...
Chaque fois les retrouvailles se font plus câlines, plus désireuses de réparer le mal causé par l'éloignement, et So s'accroche de plus en plus fort au blond, dans le vain espoir que tout ceci ne soit pas vraiment qu'une illusion finalement, peut-être qu'en s’agrippant suffisamment fort, elle ne quittera pas ce rêve dans lequel elle s'est pleinement immergée durant ces derniers mois, qu'elle refermera sa petite bulle de bonheur pour de bon.

Et ce midi...
Elle a les yeux clos, appréciant la chaleur de Raymond, écoutant le cœur battre sous son oreille.
Elle est paisible, elle ne pense à rien d'autre qu'à ce bien être qui l'habite.

Mais son prénom...
Elle ne veut pas l'entendre.
Non, elle ne l'a entendu.
Non, non.
Elle reste là, ne bouge pas, fait fi de la voix, mais la boule dans sa gorge enfle méchamment.
Rester dans le déni est le mieux à faire malgré le léger tremblement dans sa voix, ou ses doigts qui se sont accrochés plus fort à la chemise du peintre.


J'ai encore une commande pour un mariage à la fin du mois.
Il faut croire que c'est la période.
...
Tous se marient en ce moment.
Ça doit être pour se tenir chaud l'hiver...
Et éviter d'avoir à dormir avec un âne!


Le rire qui suit est sans joie, mais la pensée est pour Cmyrille. Et le sourire qu'elle a voulu afficher meurt avant même d'avoir vu le jour tandis qu'elle caresse le buste du blond du bout de son nez. Inconsciemment elle s'est un peu rapprochée, juste un peu plus qu'elle ne l'était déjà.

Non, pas déjà...

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Raymond_de_petrus
En réponse, Sorianne se lova encore plus contre lui, parlant de tout et rien, si ce n'était de mariage. Un thème fort à propos, et il ne sut pas quoi répondre de plaisant. Lui faire remarquer qu'elle aurait assez de travail pour oublier son chagrin ? Quelle idée...

Il entremêla ses doigts à ceux de la couturière et il finit par la renverser sur le lit, la surplombant, maintenant toujours ses mains dans les siennes. Elle paraissait ainsi lui être offerte, son corps contre le sien et il la regarda avec une certaine tendresse.


J'aurais aimé... que tout soit différent. Mais on sait toi et moi que si cela avait été le cas, nos destins ne se seraient sans doute jamais entremêlés ainsi.

Il frotta son nez contre celui de la couturière. Il espérait qu'elle ne lui compliquerait pas la tâche, cela était déjà bien assez difficile comme ça pour lui, alors qu'il devait énoncer à haute voix l'inéluctable.

Mais je ne regrette rien.
Même si... cela sera surement difficile à mon retour de te voir, sans pouvoir... être plus qu'un ami pour toi. Sans pouvoir t'embrasser, ou t'emmener sous un porche.


Il sourit en coin à cette idée, à ces souvenirs de soirées mouvementées qui avaient jalonné leur liaison. Il déposa un baiser léger sur les lèvres de Sorianne, et il s'astreignit à ne pas prolonger celui-ci.

Raymond enfouit son visage dans le cou de la couturière et réprima difficilement un élan de désir pour elle, estimant que ce n'était vraiment pas le moment pour cela. A voix basse, comme un secret qu'il confessait, il lui murmura quelques mots à l'oreille, bien incapable de la regarder dans les yeux pour cela.


Je suis tombé amoureux de toi, Sorianne...
Je suis tombé amoureux, et j'en crève de devoir renoncer à toi.


C'était là la seule consolation qu'il pouvait lui offrir. Une maigre consolation. Quelques secondes s'écoulèrent et il reprit toujours ainsi.

Mais tu dois t'en aller maintenant.

Il ne voulait pas formuler les évidences dont ils avaient tous les deux conscience. Que c'était inévitable, qu'il n'y avait plus de place pour leur liaison dans la future vie du peintre.

Je suis désolé.

Il finit par lâcher les mains de la couturière, la libérant de cette étreinte, et il se dégagea, n'osant plus vraiment la regarder. Il se rassit sur le lit, une main soutenant nonchalamment sa posture et il se maudit intérieurement.
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Sorianne
Le déni, c'est bien.
Gagner du temps lui est indispensable si elle ne veut pas se sentir mourir une nouvelle fois. Tout son petit monde s'écroule, sa chimère se décompose à vue d’œil, le petit monde illusoire qu'elle s'est fabriquée de toute pièce s'efface petit à petit, comme un château de sable doucement balayé par le vent.

C'est la fin.
Elle se demande bien comment elle a pu parler tant sa gorge lui est douloureuse maintenant, à force de retenir ce cri de détresse qui ne demande qu'à jaillir. Si elle ne se tord pas de douleurs, c'est qu'elle se retient, essayant de conserver un peu de dignité malgré l'histoire achevée et l'adultère commis là.

Sorianne ne bouge pas.
Non, elle préfère parler de tout, de rien, de choses superficielles ou qui n'existent même pas.
Les penser aussi. Parce que cela occupe l'esprit et perturbe ces idées qui lui viennent et qui n'apporteraient que malheur.

Toutefois, lorsque Raymond se met en mouvement et se place au dessus d'elle, elle ne bronche pas, et se laisse faire, les yeux rougis d'un trop plein de larmes qu'elle refuse de laisser couler. La tendresse qu'elle lit dans le regard du peintre la saisit, gonflant un peu plus la boule dans sa poitrine. Elle voudrait être sourde. Ou morte. Ne pas entendre ce qu'il va énoncer, juste lui rendre ce regard et tous ces sentiments qui débordent.

Mais elle se contente d'écouter, bien en peine de répondre quoi que ce soit sans éclater en sanglots, ce qu'elle ne souhaite pas. Il lui faut se montrer forte et fière, parce qu'ils savaient tous deux que cela se finirait ainsi, ils savaient que ce serait dur, ils savaient qu'il n'y aurait pas de futur et qu'il faudrait en finir tout ou tard.
Elle n'avait pas prévu une seconde, de développer le moindre sentiment à l'égard du blond ami, et la noiraude n'avait nullement prévu de voir sa vie aussi radicalement changée que depuis qu'elle a rencontré Raymond.
Il l'a sorti de si profond... Il lui a permis de retrouver la surface, de vivre, de rire, d'apprécier les choses, de reprendre goût au monde et à la joie de vivre. Il est son ami, son ami cher, il est son amant et elle l'aime plus qu'elle ne le devrait sans qu'elle ne veuille se l'avouer. Et il lui faut renoncer à tout cela, renoncer à ce qui la rend joyeuse, à ce qui la fait vivre vraiment... Renoncer à lui, parce qu'il en est ainsi, parce qu'un mariage a été contracté et qu'elle est venue tout chambouler, se mettre en travers.

Les paroles que Raymond lui chuchote sont douloureuses mais elle y adhère. Les doigts de So s'aggrippent à ceux du peintre, elle ne veut plus le lâcher, elle a peur de se perdre si elle le fait. Et nul son ne franchit ses lèvres closes, elle se contente de hocher doucement la tête. Que cela va être dur... Si près mais pourtant si loin... La respiration de la brune est saccadée alors qu'elle force pour essayer en vain de ne rien laisser paraitre.

Un baiser.
Si court.
Si léger...
Les yeux se ferme tant c'est atroce.
Pourquoi est-il si doux alors que la situation voudrait qu'ils se déchirent...?
Ce serait tellement plus simple...
Oui! Crier, hurler, se dire des choses qu'on ne pense pas, s'énerver et la colère vainc le chagrin avant de doucement s'estomper.
Mais So n'arrive pas à se mettre en colère. Elle n'arrive qu'à réguler le flot de larmes qui ne demande qu'à se transformer en torrent bien malgré elle.

Ray dans son cou, et la position dans laquelle ils se trouvent, elle sent tout le désir qu'il a pour elle.
Oh pourquoi ne pas se laisser aller une dernière fois, lui faire comprendre à quel point il va lui manquer, lui montrer à quel point elle peut tenir à lui...

Mais les mots qu'elle entend l'empêche de retenir plus longtemps son chagrin. Si elle se mord violemment la lèvre pour ne pas émettre de sons, les sanglots s'étouffent dans sa gorge alors qu'elle colle sa tête contre celle de son ami.
C'est si cruel de le lui dire, c'est si cruel!
Et elle n'y répondra pas, elle ne le peut pas, privée de cela par ce mariage qui va revivre devant son nez.

Elle doit y aller maintenant...
Elle le doit, il vient de le lui demander, avant de s'excuser et de lui tourner le dos.
Et elle qui regarde le plafond, au désespoir, les mains plaquées sur la bouche dans l'espoir de ne pas se voir hurler de douleur en réponse à ce qu'il lui a dit.

So se reprend un peu, juste un peu, ça ne peut pas finir sur un dos tourné.
Est-ce que cela peut seulement finir...?

Doucement, la noiraude s'arrache du lit sur lequel elle est couchée, pour venir sur les genoux jusqu'à Raymond. Des deux mains, elle attrape son visage avec douceur, et pose son front contre le sien une fois qu'il est enfin tourné vers elle tandis que les mains se crispent dans l'épaisse chevelure blonde tout en voulant se montrer caressantes, mais les gestes sont saccadés, la douleur est là, et s'entend dans la voix éraillée.


Partons, partons loin.
Tristan et Iseult vivront une belle vie, heureux, dans leur monde.
Je t'en prie Raymond, partons et on continuera leur histoire.
Ils seront libres de tout.


Un sanglot lui éteint la voix, elle laisse passer quelques instants sans bouger de sa position. Elle imagine déjà les chimères rêvées un soir à parler de tout et de rien, qu'ils seraient heureux sur le lopin de terre, à vivre au jour le jour, à rire, et à vivre pleinement.
Elle en grimace tant la douleur de ce qui ne sera pas lui tord le ventre, mais les sanglots ne sont plus tus, cela devient bien trop dur.


Je n'ai pas le droit de te dire à quel point je tiens à toi Raymond, je n'ai pas le droit, je suis désolée, le Très haut sait à quel point j'aimerai, oh, pourquoi est-ce que c'est si injuste?

Une de ses mains quitte les cheveux soyeux pour venir chercher la main libre du peintre, qu'elle porte à ses lèvres pour l'embrasser. Elle a bien compris qu'il n'était plus temps des effusions passionnées, même si elle en crève d'envie, au moins pour lui montrer une dernière fois à quel point elle... L'aime.
So trouve à poser sa joue mouillée dans le creux de la main de Raymond, dernière caresse dont elle aimerait tant conserver le souvenir.


Je veux rester encore un peu... Juste un peu. Pour ne pas oublier, pour ne pas croire que ce n'était qu'un rêve. S'il te plait Raymond, pour ne pas oublier le Printemps et l'Eté. Pour ne pas revenir dans l'Hiver, juste un peu.

De la main elle se détache, et Sorianne embrasse le blond, avec tout le désespoir du monde, toute l'envie qu'elle a de lui, tout l'amour qu'elle peut éprouver pour celui qui l'a tant aidé quand elle perdait tout espoir. Parce qu'elle ne se résout pas à mettre un terme à cette relation de la sorte. Parce qu'elle veut conserver le goût de ses lèvres et sa chaleur. Parce qu'elle ne veut aucun autre regret que celui de ne pas avoir réussi à le faire fuir au loin en sa compagnie. Oh Raymond, le Très Haut est si cruel...

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Raymond_de_petrus
Il attendait, tentant de s'accrocher à ses résolutions, ne la regardant pas pour éviter de voir son visage rougi par les larmes. Elle vint finalement sur ses genoux, et il posa son front contre le sien, ému par cette demande qu'elle lui formulait à nouveau.
Et à nouveau, il refusa.


Je peux pas...
Je peux pas faire cela.

Pourtant, il y avait pensé, l'espace d'un moment. Il avait évalué les endroits ou ils pourraient aller, acheter une seigneurie, cultiver la vigne et élever des moutons pour leur laine, sans que personne ne les connaisse. Ils seraient libres, oui, mais à quel prix ? Il faudrait tout quitter, identité, famille, amis, contacts, clients et autres gens croisés au cours de leurs vies respectives. Vivre dans la crainte qu'un visage connu soit croisé, et voir ainsi leur secret éventé.

Par le Très Haut, rien n'était simple et la voix de Raymond perdit de son assurance, émoussée par les émotions qui menaçaient de le submerger. Elle sanglotait désormais, et pourtant ses mots blessèrent le peintre, alors qu'elle refusait de lui dire ce qu'il désirait tant entendre. C'était un désir égoïste, de savoir si elle l'aimait aussi, il en mourrait d'envie, alors qu'il s'était déjà heurté plusieurs fois au mutisme de Sorianne dans ce domaine. Chaque fois il s'était promis de ne plus rien dire, et chaque fois il avait pourtant révélé une part de ses sentiments, espérant qu'elle le conforterait, le rassurerait. Il se mordit violemment la lèvre inférieure, pour ne pas penser à la douleur qu'elle provoquait chez lui, et il se raccrocha à celle physique, pour ne pas se laisser submerger, ne pas lui réclamer ce qu'elle lui refusait.

Elle vint cueillir sa main, pour y poser sa joue humide. Du pouce, il caressa celle-ci, alors qu'elle le suppliait de rester encore un peu avec lui, pour ne pas oublier, pour conserver quelques instants encore l'impression de l'Eté.

Sorianne...

Quoi répondre à cela ?
Mais il n'eut pas le temps de plus réflechir, alors qu'elle happait ses lèvres pour un baiser. Et quel baiser...
Il aurait voulu avoir le courage de la repousser, mais il en fut incapable, alors que tout s'embrasait en lui. Il la voulait désespérement, rien que pour lui, et déjà il commençait à tirer sans ménagement sur les lacets de la cotte de Sorianne, tirant sur le tissu pour dénuder sa peau. La raison avait été oblitéré par cette envie de possession furieuse et quelques coutures craquèrent sous son empressement à la déshabiller. La violence des sentiments qui l'agitaient se manifesta dans ses baisers mordants, et il fut un amant tyrannique cet après-midi là.

***

Ils avaient partagé de nombreuses étreintes, durant ces quelques mois, mais aucune n'avait ce goût doux-amer que celle-ci possédait à son achèvement. Du bout des doigts, il caressait la gorge de Sorianne, silencieux et épuisé, yeux mi-clos. Il se trouvait faible, peut-être même un peu honteux alors qu'ils se remettaient tous deux de ces instants. Il espéra, à nouveau, quelques mots qui le réconforteraient un peu, avant qu'elle ne parte.

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Sorianne
Les larmes n'ont cessé de couler.
Qu'il est déchirant de vivre tout cela, de mettre fin à tout ce qu'ils vivent depuis quelques mois, de se dire que plus rien ne sera comme avant, que la complicité va devoir faire place à une amitié bien plus froide et distante.
Qu'il est affreux de se dire que cette étreinte sera la dernière... So l'avait imaginé plus douce, mais l'urgence, le désespoir a été compris, et elle a su se montrer à la hauteur de ce que Raymond montrait là.

Si les sanglots se sont tus, les pleurs ne sont pas taris, non.
Et la jeune femme passe le plus clairs de son temps à essuyer ses joues maintenant que les élans du cœur son calmés. Mais à sentir les doigts de Raymond effleurer sa peau, les spasmes ne demandent qu'à revenir en force. Il lui faut se faire une raison, c'est la dernière fois. C'est la dernière fois qu'elle profite de ses bras, de sa chaleur, c'est la dernière fois qu'elle aura eu l'occasion de passer une main dans son épaisse tignasse.

La dernière fois.

Le souffle retrouvé, les battements de son cœur ayant repris un rythme plus régulier, So dépose de doux baisers sur la peau du blond, qui se trouve à sa portée. Doux et légers, presque imperceptibles, et doucement elle se dégage de son giron pour récupérer ses vêtements, sans un mot, les lèvres serrées et la gorge prise dans un étau.

A gestes lents, elle repasse sa chemise et cache au regard du peintre, toutes les marques qui la recouvrent, non sans étouffer les sanglots qui s'en reviennent. Que le moment est douloureux... Mais elle va sortir d'elle même, il lui est impensable de se faire mettre à la porte. La cotte désormais abimée est replacée, les coutures arrachées ne faisant même pas apparaitre un sourire, ou pousser un soupir quelconque et elle ne compte pas la réparer. La ceinture est renouée à ses hanches, et Sorianne prend un instant pour tenter en vain de se calmer un peu.

A nouveau ses mains essuient ses joues trempées de larmes et la noiraude se retourne enfin, pour regarder le peintre avec un regard des plus tendres. Du bout des doigts elle caresse son visage avant de reposer le front sur le sien et de lui offrir un baiser délicat malgré sa lèvre tremblante.


Raymond, je...

La grimace est douloureuse. Savoir ce qu'il ressent pour elle est atroce, vu les circonstances. Est-ce que lui répondre en lui disant ce qu'elle ressent pour lui atténuerait la peine ressentie? Rien n'est moins sûre... Le dilemme est de taille, entre raison et déraison, Sorianne ne sait que faire. Parce qu'il lui faut s'y faire. Il a su lui faire oublier ce qui la rendait malheureuse. Il a su lui faire oublier son désespoir et être présent. Le peintre a su lui faire oublier son amour pour un souvenir qui ne reviendra jamais... Elle le cherche à longueur de temps quand il n'est pas à ses côtés, elle n'attend que de le voir, rire avec, profiter de lui comme si chaque jour était le dernier. Si elle met de côté la culpabilité vis à vis d'Achim, fiancé disparu depuis des années... Elle l'aime... Elle aime ce peintre rencontré au hasard d'une commande à l'atelier... Jamais elle n'a dit ces mots, à personne... Elle est ainsi.

Je... Oh comme la boule enfle quand elle se rend compte que le dire n'est pas une bonne idée, que pour mieux le préserver mieux vaut le taire. Comme elle lui en veut de le lui avoir dit ce qu'il ressentait... Quittant le visage, les mains fines de la noiraude se saisissent de l'une de Raymond pour venir la poser sur son cœur. Si elle ne peut pas le dire de vive voix, elle espère qu'il pourrait comprendre les gestes. Je serai... toujours là pour toi Raymond. Toujours... C'est promis, je te le jure....

Les yeux clos, elle s'arrache à regrets de l'homme qui l'a sortit de son long hiver, et va d'un pas rapide jusqu'à la porte avant de marquer un temps d'arrêt quand elle attrape la clanche. L'envie de lui dire est forte, mais la douleur de l'instant la plie presque en deux. Le Destin est si cruel avec elle... A l'idée qu'il retrouve sa femme et qu'elle retrouve sa solitude, son ventre se tord. A l'idée de le perdre, c'est pire encore, et elle ne peut plus le regarder, mieux vaut pour elle poser la tête contre le panneau de la porte alors qu'elle pèse encore le pour et le contre.

Il n'est pas parti avec mon cœur en fait... Prends en grand soin... Il est à toi Raymond.

La lèvre est mordue un peu trop vivement et elle s'enfuit. La porte est rapidement ouverte et elle s'engouffre dans l'ouverture avant de la claquer derrière elle, préférant courir pour s'éloigner le plus vite possible, fuir les sentiments qui la rattrapent, et ne pas céder à revenir pour ne pas le quitter. Il était convenu que cela finirait de la sorte à peu de choses près. Il le faut, qu'il ne soit pas dans l'embarras... Mais à peine au dehors, sa course cesse et elle s'accroupit, adossée au mur, laissant libre court à son chagrin, cachée dans un coin. Il lui faudra un instant pour se calmer et aller finir ses pleurs chez elle.
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Raymond_de_petrus
Sorianne finit par se lever et se rhabiller. Il ne voyait que son dos, les cicatrices et marques qui ornaient sa peau, avant qu'elle finisse par tout couvrir. Il manqua dire qu'il lui rachèterait un cotte, mais il ne le pouvait pas. Elle entama des phrases, qu'elle ne finit pas et il finit par sentir sous sa main le battement du coeur de la couturière, la chaleur de sa peau, alors qu'elle lui promettait d'être là pour lui. Il savait qu'il ne devait pas y accorder trop d'importance, la vie était ainsi faite qu'un jour elle s'éloignerait de lui, après avoir rencontré un autre homme, ou simplement le fuir, lui et les souvenirs de leur liaison.

Ne me promets rien...

Il la regarda se lever, et il lutta contre l'envie de la rejoindre. Elle lui fit un dernier aveu, celui qu'il attendait. Il avait pensé que savoir le soulagerait. La vérité fut que ce n'était absolument pas le cas, alors qu'elle franchissait la porte pour fuir. Il abattit un oreiller sur sa tête, et hurla dedans, avant de se laisser aller à quelques sanglots de pur désespoir. Cela lui prit quelques minutes, qu'il s'accorda volontiers pour vider son chagrin, et il finit par revenir à lui, éreinté physiquement et mentalement.

Il finit par se lever, se rhabiller, et nota que le soleil avait tourné dans le ciel. Si peu de temps, et tant à faire. Il se fit violence, et se remit en mouvement. Il arracha les draps du lit, et si il avait pensé payer une lavandière dans un premier temps, l'idée de dormir dans ces draps, même propres, lui fut insoutenable. Il ne resta plus que des lambeaux de tissus, après qu'il se fut vengé dessus, et il refit le lit, avec des draps propres et vierges du crime commis.

Il effaça les traces de la présence de Sorianne, pratiquant une politique de la terre brûlée à l'encontre des souvenirs qu'il pouvait avoir conservé, les petits mots qu'elle lui laissait parfois, des missives qu'ils avaient échangés. Il ne pouvait rien garder et tout brûla dans une bassine, répandant une odeur âcre qui finit par s'échapper par les fenêtres ouvertes.

Le sac de cuir bouilli qui l'accompagnait depuis des années fut rempli prestement, il n'avait pas besoin de grand chose, et l'habitude d'être sur les routes lui avait appris à choisir ce qui était nécessaire. La tête lui tourna, et il dut se contenter d'un bout de pain qui avait échappé au nettoyage pour lutter contre l'étourdissement.

Le soleil approchait de son crépuscule, alors qu'il refermait la porte de l'appartement derrière lui, la verrouillant. Il attrapa de justesse le coche qui partait en direction du sud-est, montant dans la voiture après avoir versé son obole au conducteur, et confirmé sa présence. Il s'assit, se sentant vidé, épuisé, comme si une lavandière l'avait pris pour un drap et lavé à grandes eaux.

Ils avaient à peine franchi les portes de la capitale que le peintre dormait déjà, en route pour Montpellier.

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Raymond_de_petrus
    [Plusieurs jours plus tard]


Le peintre avait veillé à ce qu'Hermance ait tout le confort possible pendant le trajet. Il fallait bien que l'argent des Encapuchonnés serve à quelque chose... Ce fut un soulagement certain que d'arriver à Périgueux, et par chance, le voyage s'était passé sans encombres.

Mais la jeune femme n'était plus habituée à ce genre de rythme, après des jours de voyage, un nouvel environnement, en plus des craintes qu'elle pouvait avoir sur cette nouvelle vie. Elle se plaignit rapidement de la fatigue, d'un mal de tête lancinant, et Raymond fit au mieux pour qu'elle se sente à son aise. Elle passa ainsi quelques temps dans leur chambre, les volets occultant la lumière de septembre.

Ayant pris ses habitudes à vivre seul, Raymond s'arrangea pour décharger son épouse des tâches quotidiennes, en attendant qu'elle se sente mieux, et qu'elle décide peut-être de participer à la vie du foyer. Mais il ne voulait pas exiger quoi que ce soit, l'estimant en convalescence. Il lui parlait un peu du conseil comtal, des gens de Périgueux, commençant à évoquer les noms des gens qu'elle rencontrerait. Mais il n'était pas sur qu'elle y accorde beaucoup d'attentions, alors qu'elle se perdait souvent dans ses pensées. Il eut le sentiment que tout était à reconstruire, et il ne savait pas encore, pour l'instant comment s'y prendre.

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Sorianne
La petite noiraude raccompagne Raymond chez lui, bras dessus bras dessous. Rôles inversés, le preux et pas très grand chevalier se montrant galant pour éviter que la pseudo-donzelle ne se fasse attaquer par de vilains bougres. L'inconvénient étant que la seule arme à disposition de la connétable, reste sa voix portante! Le peintre est suffisamment amoché, il ne faudrait pas tomber à nouveau sur un Mike prêt à en découdre! Enfin, c'est ce qu'elle imagine, d'ailleurs, le chemin s'est fait dans une bonne humeur relative malgré les silences qui ponctuent bien souvent les phases dans lesquels ils essayent d'y mettre du leur.

Et le silence est de mise lorsqu'ils arrivent sous les fenêtres redoutés. La brune a la tête levée vers l'étage, la mine un peu sombre, et une boule dans la gorge. Que le temps passe vite lorsque l'on est bien... Le chemin depuis la taverne lui a paru si court... Elle voudrait tellement revenir un peu en arrière... Et se détacher du blond lui parait inconcevable, c'est au prix d'un intense effort qu'elle y parvient, souriant pour la forme.


Vous êtes chez vous... Il faut que... Je rentre chez moi.

Mais si elle s'est décrochée, ses pas peinent à la conduire, et les mouvements sont inexistants. Le nez bas, elle préfère contempler ses mains qui jouent distraitement entre elles, plutôt que de dire au revoir à Raymond. Consciente qu'ils jouent avec le feu, il lui faut s'arracher de là, essayer de mettre un peu de distance avec la tentation, mais cela lui est impossible. Alors avec un nouveau sourire, Sorianne relève le regard sur son ami.

Passe une bonne nuit... Et si tu as mal aux cheveux demain...
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Raymond_de_petrus
Le trajet avait été court, oui, mais il fallait avouer que Raymond n'habitait guère loin de la taverne des Poneys. Sorianne finit par lâcher son bras, et opter pour une distance raisonnable entre eux.

Oui... Merci de m'avoir raccompagné, je suis certain qu'une armée m'attendait sûrement au détour d'une ruelle prête à me sauter dessus, et qu'ils ont fui effrayés par votre seule présence, dame connétable !

Le peintre avait l'impression d'être un perpétuel équilibriste, s'accrochant à l'idée de la présence de son épouse, de sa guérison future, des projets de couple qu'ils pourraient bâtir après cela -un enfant peut-être-, comme un mantra tournant en boucle dans sa tête, et étant désespérément attiré par la présence de Sorianne, cherchant sa compagnie, hanté par les souvenirs des jours heureux, dont Périgueux était hélas chargé.

Quand chuterait-il ?


Passe une bonne nuit aussi. Et ne t'en fais pas pour ma tête, je devrais réussir à m'en remettre ! Nous n'avons pas dépensé 80 écus de tournées ce soir.

Par amusement, il aurait volontiers proposé de la raccompagner chez elle, mais il y avait des choses avec lesquelles il ne fallait pas jouer. Déjà la proximité se faisait parfois trop forte, tout comme la tentation. Il se pencha vers Sorianne, et déposa un long baiser sur son front. Il lui sourit et se redressa.

Rentre bien, petite sirène.

Il eut un regard vers les fenêtres de son appartement, eut un air songeur, et après avoir accordé un dernier sourire à la couturière, s'en fut.
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Sorianne
Son contact la fait frémir. Elle brûle de le sentir contre elle, de sentir ses baisers, de l'embrasser, de l'enlacer, tant de choses! Et nul doutes qu'elle aurait fauté s'il avait déposé les lèvres sur l'une de ses joues. Les paupières sont closes alors qu'il se penche sur son front, c'est tout juste si elle respire, trop absorbée par les sensations. Qu'il est dur de se retenir, et c'est pour le moins visible.

Il a une femme, il est marié, sa femme est maintenant auprès de lui, il aime sa femme... Il l'aime. Il l'aime, oui! Oui. Elle, elle n'est rien, seulement une parenthèse de qui il s'est entiché, ça va passer. Mais elle en tremble. Le baiser s'est prolongé, mais pas encore suffisamment au goût de la So qui voit Raymond s'éloigner, à regrets.

Elle lui sourit en retour, et le suit des yeux alors qu'il pénètre la maison, une main s'étant saisie du pendentif qu'il lui a offert, machinalement. Combien de temps a-t-elle fixé la porte, dépitée, malheureuse comme les pierres, et couverte de frissons? Quand la cloche de l'église retentit, la noiraude réagit enfin après un léger sursaut, couve la fenêtre de l'appartement d'un regard tendre et tourne les talons. Seule, la mort dans l'âme...

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Raymond_de_petrus
Les jours s'étaient écoulés, et si Raymond se révelait d'un tempérament peu appréciable au conseil comtal, il n'en était pas de même chez lui, en compagnie de son épouse. La situation était dure à vivre pour Raymond, qui était confronté à une situation sentimentale paradoxale, mais il affichait face à Hermance un optimisme indécrottable auquel il l'avait habitué par le passé, s'enquérant souvent de ses souhaits, de son confort, pour qu'elle se sente au mieux ici.

Il veillait à ne pas la brusquer et se montra totalement - un comble pour lui - pas entreprenant.

Il lui parlait souvent de ceux qui faisaient son quotidien, de l'AAP ou il écrivait, des tableaux qu'il avait peint ces dernières années. Puis un jour, il aborda un autre sujet.


Hermance, les gens dont je te parle, ils voudraient faire une petite fête, pour ton arrivée à Périgueux. Qu'en dis-tu ?
Tu pourrais faire leur connaissance, peut-être même te faire de nouvelles amies ?


L'idée de cette fête l'inquiétait, mais cela était nécessaire pour qu'Hermance se sente bien ici. Et puis on lui posait bien assez de questions sur cette épouse inconnue pour qu'il décide de passer outre ses réserves.
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--Hermance_de_petrus
L'arrivée à Périgueux avait été un retour à un semblant de liberté... Moins surveillée qu'à l'ordinaire, Hermance se permettait de relâcher son attention de temps en temps, partant dans quelques songes personnels... Mais dès qu'une présence se faisait sentir, elle reprenait une attitude qui semblait des plus normales. Ses efforts étaient surtout quand Raymond se trouvait dans la maison car il était d'une humeur franchement engageante. Elle écoutait le résumé de ses journées, s'appliquant à commenter telles ou telles choses dont elle avait souvenir, ce qui lui demandait une attention conséquente... De fait, le soir, elle était presque épuisée et ne tardait guère...

Ceci dit, cela ne l'empêchait point d'avoir des nuits entrecoupées, ce qui lui avait permis un soir précédent d’apercevoir la silhouette aimée rentrer aux côtés d'une donzelle brune. Rien de trépidant somme toute mais... Elle se demandait toutefois qui était l'amie qui l'avait raccompagné... cela s'était alors perdu dans ses errances... Et un jour...


Hermance, les gens dont je te parle, ils voudraient faire une petite fête, pour ton arrivée à Périgueux. Qu'en dis-tu ?
Tu pourrais faire leur connaissance, peut-être même te faire de nouvelles amies ?


Passée la surprise, elle avait acquiescé...il lui faisait donc une vraie place dans sa vie...

Oui... et ce serait l'occasion de mettre des visages sur des noms... Très bonne idée!

La panique s'insinua lentement, cela allait demander de la concentration... Je m'appelle Hermance de Pétrus, nous sommes aujourd'hui samedi, je suis malade mais en voie de guérison...peut être...
Raymond_de_petrus
Raymond put voir la surprise sur le visage de son épouse, et craignit alors qu'il lui prenait la main, qu'elle s'affole et panique. Il entrelaça ses doigts à ceux d'Hermance, comme pour tenter de la rassurer tacitement. Son visage s'éclaira alors qu'elle manifestait un enthousiasme certain, un peu inattendu, à cette idée.

Tout ira bien, je serai là de toute façon. Et tu verras, ils sont tous très gentils.

Il ne précisa pas qu'ils étaient bien tous un peu bizarres parfois, ne voulant pas l'effrayer. Mais il imagina qu'ils sauraient se tenir pour ne pas effrayer Hermance, ou en tout cas la mettre un peu en veilleuse.
Enfin... il fallait l'espérer.

Il déposa un baiser sur la main d'Hermance, avant de conserver brièvement celle-ci contre sa joue, en une caresse soyeuse. Au fil du temps, son angoisse s'estompait, ayant craint de façon presque permanente les premiers jours de nouvelles crises. Mais la normalité du comportement de son épouse, bien que plus calme que par le passé, commençait peu à peu à rassurer le peintre. Il conclut, revenant à son humeur primesautière :


Il te faudra de nouvelles toilettes dans l'avenir d'ailleurs, mais nous aurons bien le temps d'y penser !

Et quelques jours plus tard, Eliance et Sorianne organiseraient la fameuse fête.
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Raymond_de_petrus
    3 petits jours à Angoulême et puis s'en revient...


Malgré le haut taux d'alcoolémie dont il avait été victime, Raymond avait pu emprunter la voiture pour Périgueux. Le voyage en coche lui avait surtout servi à dormir et à décuver, même si en arrivant à la capitale, il restait fourbu, vanné, tant physiquement que mentalement. Le sac de cuir bouilli qui le suivait depuis leur départ du Pomerol, sept ans auparavant, s'échoua lamentablement sur le sol, et la veste lansquenet manqua faire pareil, mais il l'aimait trop pour cela et l'accrocha à la patère. Hermance était là, bien entendu, assise à rêver peut-être, ou brodant.

Le reste tint presque du réflexe, de la routine oubliée depuis des années, alors qu'il s'asseyait au sol, aux pieds de son épouse, et qu'il posait la tête contre les genoux d'Hermance, comme il le faisait fréquemment quand ils vivaient encore à Bordeaux et qu'il rentrait le soir fourbu de sa journée.


Je suis enfin rentré.

C'était toujours la phrase rituelle qui avait accompagné ces gestes. Il ferma les yeux, laissant libre court à sa fatigue. Le sommeil paraissait un refuge enviable en ces instants, même si la présence d'Hermance, qui semblait guérir, l'invitait à passer du temps en sa compagnie.

Je n'ai pas cessé de penser à toi.

Et c'était la plus stricte vérité, même si cela avait parfois pris la forme de l'inquiétude, ou de la culpabilité. Un silence et il annonça le fruit de sa réflexion.

Quand le mandat comtal sera fini, mes amis partiront ailleurs, pour voyager. Je me suis dit que je pourrais vendre cet appartement, et nous acheter une petite maison, dans les coteaux, près de nos familles. Nous serions heureux, là-bas...

Les enfants prodigues reviendraient après sept ans, au grand bonheur de leurs familles et de leurs amis. Il n'y aurait plus d'égarement, de tentations. Il n'y aurait qu'une vie dont ils avaient rêvé au début de leur mariage. Raymond travaillerait la vigne, oubliant la peinture, et Hermance reprendrait la broderie. Ils auraient enfin les enfants qu'ils désiraient, et tout se terminerait bien, comme dans les contes pour enfants. Et n'était-ce pas d'ailleurs ce que Gontran lui avait proposé, quelques semaines plus tôt ?
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