[En fin de journée, Caserne de Tarbes]
Un long soupir fît balancer sa mèche, la maintenant en l'air pendant un bref instant, avant qu'elle ne retombe pour se coller contre sa peau en sueur.
L'après-midi avait été très lucratif pour la jeune Ditzzy. Une bonne cinquantaine de soldats, du plus simple à l'officier, était venu déjeuner dans sa cantine. Les plats qu'elle avait préparé sous les conseils avisés de son vieil ami Jim - un cuistot hors pair qui correspondait avec elle par des pigeons voyageurs - n'y étaient pas pour rien dans cette affaire. C'était une excellente idée de proposer des services en salle pour la modique somme d'un écu par personne.
De cette manière, les soldats n'avaient qu'à s'assoir pour manger sans avoir à faire eux-même leur gamelle ou se déplacer. La cantine était donc, à sa grande surprise, devenue assez populaire dans les casernes environnante ; Et selon la période, elle était plus ou moins bondée, et pas nécessairement pour la nourriture.
Ainsi donc, grattant dru sur les casseroles et les plats que les soldats lui avaient laissé à laver lorsqu'ils s'en allèrent, repus ; La jeune femme termina son ouvrage qui lui avait couté une ou deux heures. Sa bourse bien remplie se substitua alors à ses yeux, comme une ultime récompense de ses efforts. Et lorsqu'elle eût fini, elle ferma les portes de la cantine et s'engagea dans les longs couloirs de sa caserne, la bourse en main, rêvassant sur ses futures emplettes.
Quelques minutes plus tard, elle entra dans la cour où elle remarqua l'une de ses amies, Edwar, qu'elle avait rencontré à son incorporation dans l'armée. Ditzzy était une bleu, avec ses camarades, lorsqu'elle l'avait rencontré par pur hasard, en pleine nuit, dans une section pratiquement abandonné de la caserne.
Il faut dire que les bleus s'étant paumé lors de leur première nuit, ils avaient été incapable de trouver les dortoirs. L'amie, elle, avait été attirée par les lumières dans la salle de repos où les nouveaux avaient trouvé refuge. Même si elle fût assez méfiante au début, l'équipe de choc qu'ils formaient eut tôt fait de la détendre.
Maintenant, elle était là, somnolant tranquillement sous la légère brise et le soleil couchant, celui-là même qui envoyait ses derniers rayons sur le Béarn et laissait une trace rougeâtre dans le ciel bleu. Le fait qu'un Garde vienne la chercher pour qu'elle se rende à l'écurie l'intrigua quelque peu, et, joueuse qu'elle était : Ditzzy suivit son amie en silence, sans qu'elle ne la voit, puis écouta la conversation qui eu lieu.
Bien que la jeune femme avait la terrible envie de sauter sur la Mitaine, son idole ; Elle comprit que quelque chose se tramait. La jeune femme partit alors rapidement, la promesse qu'elle avait faite à un homme s'imposant à elle. Le soldat Aknaïl, qui avait rejoint Abidos en tant que chef de la garde, lui avait demandé de le tenir au courant par des pigeons voyageurs, de tout problème suspect qui pouvait survenir en caserne.
Lui comme le cuistot Jim, malgré la distance, n'étaient pas prêt à laisser tomber leurs frères d'armes, et c'est ainsi qu'il comptaient tous les deux sur la jeune femme pour les tenir au courant, même des faits bénin.
Ditzzy se dépêcha donc d'atteindre la volière de la caserne pour envoyer son message. Le seul souci, c'est qu'à cet heure, elle n'avait pas le droit d'y accéder. Le garde devant refusa immédiatement de la laisser passer, et ni l'argent qu'elle proposa, ni ses minauderies le fît changer d'avis.
C'est donc avec amertume, mais affichant un sourire craquant, qu'elle abattit son genou dans les parties de celui qui lui barrait le chemin. Paralysé, et poussant de longues plaintes, l'homme s'effondra. La jeune l'emjamba, entra dans la volière, puis prépara de quoi envoyer un message. Derrière elle, l'homme, humilié, lança plusieurs jurons en lui promettant de la balancer au lieutenant Pyrrus, celui-là même sur lequel elle avait jeté son dévolu depuis bien longtemps, mais dont personne n'avait le moindre soupçon.
- Pffff ! Vous les hommes....Vous êtes tous des sensibles....Et vos gros bras alors ? Ils sont où ?
Elle étouffa un ricanement et s'appliqua sur le minuscule papier, mordant sa lèvre inférieure en espérant que personne vienne entrer maintenant pour l'empêcher d'accomplir son devoir. Au pire, elle demanderait à son commandant-idole de passer sur ce petit « incident ». Et elle se débrouillerait bien sûr pour ne pas se faire virer...il y avait toujours un moyen...Même les latrines, bien que ça la répugnait au plus haut point.
Se levant prestement du tabouret où elle venait de s'installer plus tôt, elle attacha le minuscule parchemin à la patte du premier pigeon voyageur, dont la cage indiquait « Correspondance Abidos ». Peut-être aurait-elle du avoir peur de ce qu'elle faisait, mais ce n'était pas le cas, soit parce qu'elle avait un excellent sang-froid, ou soit parce qu'elle était très débrouillarde pour retourner la situation à son avantage. Lorsqu'elle eût enfin terminée, elle lâcha l'oiseau qui s'envola vers le magnifique coucher de soleil qui rayonnait de plus en plus faiblement, sur ce superbe horizon de plaines et de forêts.
Tandis qu'un sourire illuminait son visage en se disant « Mission accomplie », la Ditzzy passa la porte où le garde lui fît face une seconde fois, plié en deux, et tenant à peine sur ses jambes.
- Tu aurais peut-être du rester couché mon joli....
Et boum ! Deuxième coups de la jeune femme, le garde retournant à terre.
- Un peu de glace et ça ira mieux.....Ah oui ! On est pas en hiver ! Malheureux, tu risques d'attendre longtemps ! Fît-elle d'une voix ironique.
La jeune femme se sauva alors, fonçant vers les baraquements des femmes pour se réfugier dans les bras d'une de ses deux amies préférée, la capo Dance ou Nim...