Marie-Gertrude, incarné par Gysele
...Ponthieu !
La crise de la quarantaine. Douloureuse. Même pour une catin qui devrait s'estimer heureuse de les avoir atteints. L'heure est aux remords, elle fait le point sur sa vie et réalise peut-être un peu les manques par sa faute. Mais Marie-Gertrude est pétrie d'orgueil, incapable d'avouer avoir merdé, elle préfère se lancer dans un nouveau projet. La Ponthieu est une belle femme, une belle femme flétrie par le temps et les années, usée par les maladies et les drogues, harassée par son travail et ses dettes qui n'en finissent plus de l'enterrer. Elle sait que ce bordel sera sa tombe. Ses clients ne sont plus aussi nombreux qu'à sa prime jeunesse, préférant se servir chez les nouvelles arrivées, les plus fraîches, plus tendres, plus fermes. L'expérience ne fait pas toujours le poids quand il s'agit de tirer son coup. Un trou est un trou, comme dirait l'autre. La vieille tire parfois son épingle du jeu, chez certains habitués qui aiment à la retrouver. La réputation d'antan s'en est allée, ainsi vont les choses dans le monde des masques et des illusions. Désillusion. La Marie-Gertrude se sent plus seule, maintenant qu'elle flirte plus régulièrement avec la Mort. Celle-ci sera sa dernière amante et elle redoute le jour où elle finira par baiser ses lèvres et lui voler son dernier souffle.
Mère. Mot trop simple et complexe à la fois. Véritable obstacle à la vie d'une puterelle et challenge à la vie d'une femme, qu'elle soit greluche ou bien noble. Elle le hait car elle n'a jamais su le comprendre et l'endosser. Génitrice de quatre enfants, elle ne connaît d'eux que leurs noms. Et elle ne va pas se mentir en disant qu'elle regrette de les avoir lâchés, non. Elle a passé du bon temps, elle a profité de ses amants et de son argent en le dépensant dans ses drogues, alcool ou robes à une époque où elle ne manquait pas de clients. La vérité est là : elle n'a jamais voulu ce rôle et n'a jamais pris la peine de s'en imprégner. Mais le temps a raison de tout et même des têtes dures comme elle. Et c'est surtout la petite dernière qui lui a foutu une claque. Élise. A peine née des cuisses de son aînée, elle l'avait serrée dans ses bras et s'était sentie pour la première fois attachée à ce nourrisson. Là, dans ce bordel sordide, sa fille agonisant à côté, ce n'est pas d'elle qu'elle se préoccupait, mais bien de cette petite chose fragile qui braillait au creux de ses bras. Grand-mère donc, là quelque chose s'était passé. Elle se découvrait un attachement spécial pour cet enfant et avait insulté sa fille de tous les noms lorsqu'elle avait choisi de l'abandonner à son tour, répétant le même schéma qu'elle. Ses enfants sont des monstres. De viles créatures dont elle ignore qui est le père et qu'elle regrette chaque jour de ne pas avoir réussi à les faire passer. Ces vermines trop bien accrochées à son giron ne seront des bons à rien, elle le savait et si parfois leurs minois avaient pu l'attendrir, ce n'était rien à côté du dégoût profond qu'elle leur vouait.
Alanguie sur une paillasse crasseuse, les draps souillés par quelques traces dont on ne doute plus de l'origine, la mère Ponthieu dicte à son client le premier courrier d'une série de quatre qu'elle a prévu d'envoyer. Elle a un plan en tête, elle veut les revoir tous et peut-être réussir une journée, à être celle qui leur faudrait. Cet homme là vient à peine de quitter sa couche, car elle lui a promis un extra si il écrivait pour elle. Il ne s'applique pas le gredin, brouillon, crasseux, l'encre forme quelques agglomérats sombres sur le vélin froissé. Et lorsqu'elle confiera au coursier le courrier fini, le client sera déjà occupé à la besogner sans grande considération. Ainsi est faite la vie de Marie-Gertrude.
La crise de la quarantaine. Douloureuse. Même pour une catin qui devrait s'estimer heureuse de les avoir atteints. L'heure est aux remords, elle fait le point sur sa vie et réalise peut-être un peu les manques par sa faute. Mais Marie-Gertrude est pétrie d'orgueil, incapable d'avouer avoir merdé, elle préfère se lancer dans un nouveau projet. La Ponthieu est une belle femme, une belle femme flétrie par le temps et les années, usée par les maladies et les drogues, harassée par son travail et ses dettes qui n'en finissent plus de l'enterrer. Elle sait que ce bordel sera sa tombe. Ses clients ne sont plus aussi nombreux qu'à sa prime jeunesse, préférant se servir chez les nouvelles arrivées, les plus fraîches, plus tendres, plus fermes. L'expérience ne fait pas toujours le poids quand il s'agit de tirer son coup. Un trou est un trou, comme dirait l'autre. La vieille tire parfois son épingle du jeu, chez certains habitués qui aiment à la retrouver. La réputation d'antan s'en est allée, ainsi vont les choses dans le monde des masques et des illusions. Désillusion. La Marie-Gertrude se sent plus seule, maintenant qu'elle flirte plus régulièrement avec la Mort. Celle-ci sera sa dernière amante et elle redoute le jour où elle finira par baiser ses lèvres et lui voler son dernier souffle.
Mère. Mot trop simple et complexe à la fois. Véritable obstacle à la vie d'une puterelle et challenge à la vie d'une femme, qu'elle soit greluche ou bien noble. Elle le hait car elle n'a jamais su le comprendre et l'endosser. Génitrice de quatre enfants, elle ne connaît d'eux que leurs noms. Et elle ne va pas se mentir en disant qu'elle regrette de les avoir lâchés, non. Elle a passé du bon temps, elle a profité de ses amants et de son argent en le dépensant dans ses drogues, alcool ou robes à une époque où elle ne manquait pas de clients. La vérité est là : elle n'a jamais voulu ce rôle et n'a jamais pris la peine de s'en imprégner. Mais le temps a raison de tout et même des têtes dures comme elle. Et c'est surtout la petite dernière qui lui a foutu une claque. Élise. A peine née des cuisses de son aînée, elle l'avait serrée dans ses bras et s'était sentie pour la première fois attachée à ce nourrisson. Là, dans ce bordel sordide, sa fille agonisant à côté, ce n'est pas d'elle qu'elle se préoccupait, mais bien de cette petite chose fragile qui braillait au creux de ses bras. Grand-mère donc, là quelque chose s'était passé. Elle se découvrait un attachement spécial pour cet enfant et avait insulté sa fille de tous les noms lorsqu'elle avait choisi de l'abandonner à son tour, répétant le même schéma qu'elle. Ses enfants sont des monstres. De viles créatures dont elle ignore qui est le père et qu'elle regrette chaque jour de ne pas avoir réussi à les faire passer. Ces vermines trop bien accrochées à son giron ne seront des bons à rien, elle le savait et si parfois leurs minois avaient pu l'attendrir, ce n'était rien à côté du dégoût profond qu'elle leur vouait.
Alanguie sur une paillasse crasseuse, les draps souillés par quelques traces dont on ne doute plus de l'origine, la mère Ponthieu dicte à son client le premier courrier d'une série de quatre qu'elle a prévu d'envoyer. Elle a un plan en tête, elle veut les revoir tous et peut-être réussir une journée, à être celle qui leur faudrait. Cet homme là vient à peine de quitter sa couche, car elle lui a promis un extra si il écrivait pour elle. Il ne s'applique pas le gredin, brouillon, crasseux, l'encre forme quelques agglomérats sombres sur le vélin froissé. Et lorsqu'elle confiera au coursier le courrier fini, le client sera déjà occupé à la besogner sans grande considération. Ainsi est faite la vie de Marie-Gertrude.
Citation:
Elise, ma mignonne,
J'tais tellement content' d'te serrer dans mes bras lorsqu't'es nez, qu'j'e voudrais encor' t'revoir.
Ma p'tite, j'suis malade, j'sens qu'le Très-Haut m'tend les bras, pour qu'j'aille l'consoler lui aussi.
Puis j'aim'rais t'donner un peu d'sous pour continuer ta vie t'vois ? J'ai quelques économies.
Viens quand t'peux à Paris, d'préférence le 2 octobre, c'est un lundi, j'travaille pas le lundi.
A bientôt ma p'tite caille,
Mamie Marie-Gertrude
J'tais tellement content' d'te serrer dans mes bras lorsqu't'es nez, qu'j'e voudrais encor' t'revoir.
Ma p'tite, j'suis malade, j'sens qu'le Très-Haut m'tend les bras, pour qu'j'aille l'consoler lui aussi.
Puis j'aim'rais t'donner un peu d'sous pour continuer ta vie t'vois ? J'ai quelques économies.
Viens quand t'peux à Paris, d'préférence le 2 octobre, c'est un lundi, j'travaille pas le lundi.
A bientôt ma p'tite caille,
Mamie Marie-Gertrude