Gabriele. « Quand tes douces illusions se prennent un pain dans la gueule, ça fait mal, putain. »
Qui a dit que les contes de fée des « vilains » finissent bien ? Celui-ci a pourtant débuté sur les chapeaux de vie. La volonté de vouloir créer quelque chose de nouveau, de fort, pour redonner au nom des Corleone son prestige d'antan, ou du moins s'en rapprocher. Lier les gens entre eux, pour faire naître ce qui a tant manqué auparavant.
Faire vivre est épuisant, et quand j'aurais compris que c'est impossible...Il y aura du progrès. Pour l'instant, j'y crois encore. Malgré ceux qui sont restés en arrière, les disparus, les fantômes, j'y crois encore. Plus loin que les échecs. Celui de la nuit dernière y compris. Nous aurons tenté notre chance, impliquant par le fait de perdre peut-être. Nous avons perdu : C'est le jeu.
Dans l'immédiat, ce n'est pas tant ce qui m'inquiète. Depuis la décision de séparer les groupes, je n'ai cessé de me ronger les sangs pour la mère de mes enfants. Enceinte, parfois si fragile dans son cur, la Noire m'a fait parvenir un écrit qui, loin de me rassurer, a accentué mes craintes : elle va mal.
La distance ne nous réussit pas. A croire qu'à chaque fois que nous sommes séparés, l'équilibre est rompu, et le funambule se casse la gueule sans filet de sécurité. Le souvenir d'une certaine nuit à Bordeaux en tête, je prends la plume pour tenter d'apaiser les angoisses de la mère présente et à venir. Citation:Regina mia, Les ténèbres sont ce qu'elles sont. Souviens-toi toutefois qu'il n'y a pas d'ombre sans lumière. Souviens-toi les contes et les récits qui ont peuplé nos nuits. Qui parle de faire du mal à des enfants ? Ces gens, ces hommes et ces femmes avec qui nous faisons alliance sont effectivement des personnes avec bien moins de scrupules que nous pouvons en avoir, mais souviens-toi : même si je n'ai pas vraiment confiance, ils m'ont donné leur parole que rien ne serait fait aux nôtres.
Mais explique-moi, si cela te paraît si insurmontable aujourd'hui, pourquoi ne pas m'avoir stoppé dans ma lancée lorsque je t'ai confié mes doutes sur le projet ? Tes mots sentent le regret. Pourtant, il n'est pas trop tard. Lorsque nous en aurons fini avec ces plans-ci, nous pourrions partir en montagne, et y rester jusqu'à la naissance de notre enfant, si c'est ton souh...
Interrompu par l'arrivée d'un coursier tremblotant. La Pique a encore dû le traumatiser. De toute façon, il n'y a aucun mystère au changement journalier de la personne qui ramène le courrier. Le regard se plise à la lecture des premières lignes, avant que les sourcils ne se froncent tout à fait.
Trahis. On nous a balancé en pâture aux armées qui nous entourent. Pas « on », mais « T. ». L'esprit fait le lien, le terrible lien que j'aurais préféré ne jamais avoir à faire. Et si...
Si c'était Tigist qui avait fait ça ? Improbable supposition, qui collerait pourtant si bien avec le courrier reçu. Le doute qui étreint l'esprit, c'est vraiment le pire poison qui soit.
Il faut le lever immédiatement.
Citation:Je viens de recevoir un courrier. Nous avons été trahis. Quelqu'un nous a vendu, et nous expose à être interceptés par des armées, en plus de subir les représailles de nos alliés d'aujourd'hui, qui pourraient bien devenir nos ennemis de demain. Tigist... Cette personne, son prénom commencerait par un « T ». Je n'ose croire que ce soit toi qui ai pu trahir les tiens. Mais je te prie de lever cette inconnue, dis-moi que ce n'est pas toi. Dis-moi la vérité.
Ton époux. La lettre transmise, me voilà à cogiter, à l'écart du monde. La fleur de mon fils dans le creux de la main, je songe à une façon de tirer les miens de ce pétrin, le cur partagé par les sentiments paradoxaux qui s'opposent de la façon la plus brutale qui soit.
Ca y est, la migraine est là._________________
Pour toute réclamation, merci de vous adresser à LJD Tigist
Gabriele. « Usé par l'ironie
Qui tua ma jeunesse
Usé par la comédie
Usé par les promesses » - Damien Saez
La pièce est sans dessus-dessous, comme l'esprit qui est responsable du carnage. Prostré dans un coin, les larmes et la rage plein l'âme, l'animal a pris le dessus sur l'homme. Ange déchu mon cul, tout ça n'est que foutaises. La vie comme vaste fumisterie. On vous a parlé de l'équilibriste, et du fil ? Le voici tranché net au-dessus du vide, et le pauvre funambule qui s'écrase au fond du gouffre.
La chute est horriblement longue, affreusement agonisante. Si l'ange avait encore eu ses ailes, peut-être aurait-il pu s'élever au-dessus de ce vide tellement attrayant. Mais il y plonge, tête la première, pour s'abîmer dans cet océan de noir sans sourire, sans la moindre parcelle de lumière.
Las. Je suis là. Au milieu d'une tempête digne des plus violents ouragans, et tout ce qui faisait mes certitudes vient de voler en éclats. Plus de repères, plus d'espoirs, avec la simple conviction que ce monde n'a plus aucun sens pour m'habiller le cur.
Le regard fou, incrédule, je continue de parcourir encore et encore les pauvres lignes envoyées pour daigner m'informer. Tu as vendu nos vies pour les tiennes. Ta famille pour ton sang. Ta propre fille si souvent clamée comme tienne. Le seul homme à qui tu confies ta vie.
Dire que j'aurais donné la mienne, pour la tienne. C'est peut-être bien ce qui adviendra, finalement. Tu as craché sur tout ce qui nous représente, notre passé, notre présent, et notre avenir. Et si tout brûle...Il ne restera plus rien. Rien que les débris calcinés d'un amour jeté au brasier. Toutes les promesses que tu as pu faire, tous les serments que tu as prononcé, chacune de tes paroles ne sont plus qu'acides à mon âme.
Entre mes mains tâchées de sang, les fumées de nos liens qui s'évaporent. Tu nous as abandonné. Tu nous as vendu. Tu es partie et tu m'as pris mes enfants, toi qui critiquais si vertement Daeneryss pour cela...Voilà que tu t'abaisses à pire encore.
Une nouvelle fois, un meuble vole dans la pièce. Je me redresse, abasourdi par la rage. La violence transpire d'avoir été malmené. Je me réfugie dans la haine, et lui dédie ce qui reste de ce corps hagard. Les mots sont écrits avec toute la hargne qui m'anime. Tu m'as tout pris une fois de trop, et je suis bien incapable de transcrire avec les mots ce que mon cur voudrait te hurler, combien j'aimerais t'étrangler pour ce que tu viens de faire, et combien je t'aime, putain, comme je te hais de me laisser seul dans ce monde bien trop grand quand tu n'es pas là pour le canaliser dans l'ambre de ton regard. Citation:T. Je ne pardonne pas. Tu as trahi tout ce que nous avons construit. Tu as détruit nos vies. Et voilà que je passe pour un traître. Tu craches sur mon nom et humilies ma famille dont je pensais que tu faisais partie. La vérité, la voici : Tu préfères ton sang à ton mari et ses bâtards. Je ne suis pas une mère, je ne peux pas comprendre, mais il y avait d'autres solutions. Tu as fait ton choix en nous condamnant. Je n'aurais jamais trahi ma famille.
J'ai donné ma parole. Je la respecterai.
Adieu,
Corleone.
Le courrier est plié, prêt à être envoyé. Un autre est rédigé à la va-vite.
Citation:Désidératum, Je n'ai pas d'excuse. Je n'ai d'autre chose à te dire que celle-ci : Je ne savais pas.
C'est ma femme qui a donné les informations, préférant vendre les siens pour sauver sa peau et celle de mon fils. Je ne sais pas exactement ce qu'elle a dit, je ne sais pas à qui elle l'a dit, mais je sais que ça a été dit. Elle est partie, je ne sais où.
Je comprendrais si tu décides de ne pas poursuivre la collaboration. Si ça peut servir de dédommagement, je te laisse nos parts pour les deux prises passées. Quant à Tigist...J'en fais mon affaire. Et puisque tu me dois encore un service, c'est celui-ci : Ne lance pas tes hommes à ses trousses.
Gabriele C.
Gabriele.c
La folie a ceci de destructrice qu'elle dure, dure, et dure encore. Elle n'a de fin que dans le sang et la mort. A voir ce qui allait l'emporter dans le cas présent. Ma rage a été longuement tournée vers les autres, les meurtres ont été nombreux et sanglants, nuit après nuit, dans l'intimité d'une ruelle sombre, ou dans un bouge sordide. Chaque jour un autre endroit, chaque jour d'autres morts, des personnes que personne n'allait regretter.
La seule mission qui a réussi à me garder hors d'une torpeur complète : sortir mes enfants de cette merde. Mettre Leone et Maria a l'abri de ce raz-de-marée provoqué par l'épouse traîtresse. Les sortir de ce péril à tout prix, pour me jeter à corps perdu dans la foule d'émotions et de sentiments paradoxaux qui me submergent. Une fois à Limoges...Tout serait différent. Je les confierai à nos amis, et...Je ne sais pas. Il faudra faire quelque chose. Je ne sais pas quoi, mais autre chose.
Trouver un sens nouveau à ce qui n'en a plus, ou en finir avec ce simulacre de vie. Elle connaît pourtant mon penchant pour la mort. Si elle le sait, si elle a fait ce choix de m'abandonner, c'est bien qu'elle se doute de ce que le futur me réserve. Elle ne peut pas être si inconsciente, elle ne peut pas penser que tout ira bien. Elle a voulu se débarasser de moi, et les derniers jours me l'ont prouvé plus d'une fois. Mes courriers ne lui parviendront plus.
La drogue dans mes veines m'a donné l'énergie nécessaire à répondre à un courrier laissé trop longtemps en suspend. Et s'il est une chose que je n'ai pas perdu, c'est la haine des promesses non-tenues. Il est donc grand temps de réparer ce non-dit qui risque par trop de laisser croire que les Corleone ne sont que des lâches.
Citation:Desideratum, Tu craches sur les traîtres, mais de tous, tu es la pire. Tu m'as dit ne pas envoyer les Piques aux trousses de ma femme enceinte et de mon fils, et tu fais exactement le contraire, allant même jusqu'à mettre leurs têtes à prix. Pour ton information, mes enfants ne sont pas des bâtards. Pour ton information, qui touchera à un seul de leur cheveux, un seul, entends-moi bien, Desideratum : Celui-là regrettera le jour de sa naissance.
Tu sais à quel point je sais guérir. Dis-toi que je peux faire bien plus pour faire souffrir. Je deviendrais le démon, et tes sbires regretteront les Enfers lorsque j'en aurais fini avec eux. Crois-moi. Car mes promesses à moi ne sont pas du vent, contrairement aux tiennes.
Tu as « épargné » ma vie. Sache que je n'épargnerais aucune vie des Piques que je croiserais, je les tuerais tous, jusqu'au dernier, si vous touchez à Tigist ou Menelik. Ta lèpre te semblera un doux souvenir, je te le garantis.
Maintenant, nous n'avons plus rien à nous dire, tu sais tout ce que tu dois savoir.
Gabriele C. Voilà. Les mots sont venus noircir le support, pour être envoyés à qui de droit. Si le chantage a été dans les murs des derniers jours, aucun remord ne vient m'étreindre à prévenir la Pique. Si quelqu'un doit venger et punir la traîtrise, c'est moi. Et ce ne sont certainement pas mes enfants qui ont quelque chose à voir dans tout ça.
Soudain, une nouvelle bouffée de violence vient m'étreindre, et je reprends le chemin de l'extérieur, de la nuit, pour satisfaire cette nouvelle pulsion. Pour sûr, le confesseur en aurait, des choses à entendre...Encore faudrait-il que j'entre dans une église, autrement que pour y foutre le feu. ____________