L_aconit
"𝓘𝔩 𝔱𝔢 𝔣𝔞𝔲𝔱, 𝔭𝔬𝔲𝔯 𝔤𝔞𝔤𝔫𝔢𝔯 𝔱𝔬𝔫 𝔭𝔞𝔦𝔫 𝔡𝔢 𝔠𝔥𝔞𝔮𝔲𝔢 𝔰𝔬𝔦𝔯,
𝓒𝔬𝔪𝔪𝔢 𝔲𝔫 𝔢𝔫𝔣𝔞𝔫𝔱 𝔡𝔢 𝔠𝔥𝔲𝔯, 𝔧𝔬𝔲𝔢𝔯 𝔡𝔢 𝔩𝔢𝔫𝔠𝔢𝔫𝔰𝔬𝔦𝔯,
𝓒𝔥𝔞𝔫𝔱𝔢𝔯 𝔡𝔢𝔰 𝔗𝔢 𝔇𝔢𝔲𝔪 𝔞𝔲𝔵𝔮𝔲𝔢𝔩𝔰 𝔱𝔲 𝔫𝔢 𝔠𝔯𝔬𝔦𝔰 𝔤𝔲𝔢̀𝔯𝔢".
(𝓒𝔥𝔞𝔯𝔩𝔢𝔰 𝔅𝔞𝔲𝔡𝔢𝔩𝔞𝔦𝔯𝔢, 𝔏𝔞 𝔪𝔲𝔰𝔢 𝔳𝔢́𝔫𝔞𝔩𝔢)
On dit que les garçons de bonne famille doivent aussi expérimenter le couvent dans leur enfance, afin de renforcer leur piété et de préserver leur innocence.
Par chance, Nicolas n'était pas de bonne famille. Du moins, pas tant que ça, puisque de fils de Lemerco n'avait que le nom, un piètre héritage de bâtard qui ne lui permettait rien sinon d'être un écuyer. Élevé par les Montfort sans savoir qu'il était Montfort, telle une tragédie à la Jon Snow , l'enfant avait poussé sans réelles racines sinon celles, profondément ancrées, de la culture bretonne. En gros, du chouchenn qui faisait la voix de charretier, des rites druidiques en pleine nature et des noms de famille imprononçables que l'on se transmettait de génération en génération sans daigner le lier à d'autres.
Autant vous dire que l'église de Rome et ses préceptes ne lui disaient rien de rien, que la phase conservation de sa vertu, culture de sa chasteté, approfondissement de l'amour de Dieu et de ses parents avaient passé leur tour... Faisant de Nicolas un impie, voir pire, un hérétique. Car l'écuyer s'appuyait sur les sciences des étoiles, les pouvoirs des potions des druides, l'art divinatoire des runes... Précieuses runes de galets qu'il avait léguées à sa sur Dana la veille afin de s'assurer qu'aucun vilain curé ne les lui arrache en hurlant au sans nom et en l'aspergeant d'eau bénite.
Il avait été compliqué pour le jeune blond qui était entré dans les ordres comme on rentre en pénitence , d'imaginer le quotidien que lui réservaient les hauts murs des édifices religieux... Ce qu'il s'était figuré? Qu'on n'y lisait que psaumes et ouvrages saints. Que le nabot rose, Aka lévêque Lotx mangeait ses enfants de chur au petit déjeuner et que c'était pour cela qu'il en recherchait perpétuellement. Qu'une fois entré à son service, il ne reverrait jamais le jour en jeune homme libre et qu'il serait coupé de toute personne qui ne soit pas du clergé pendant des lustres.
D'ailleurs qui viendrait le visiter? Sa sur? Tempétueuse et intempérante, trainant sa fière allure au parloir des visiteurs? Voyez l'ironie. A l'époque, même les prisons n'en étaient pas encore dotées. Il eut fallu que ce soit dans les maisons de dieu, que la visite des prison... Haem. Des jeunes à dieu confiés... Soit orchestrée comme au confessionnal. Entre deux grilles. Et sous le regard froid d'une sur. Ha infamie! Il regrettait parfois sans oser l'avouer d'avoir pris cette décision, laissant s'envoler son amant inconsolable pour lui éviter les foudres de l'église.
D'ailleurs qui lui écrirait? Son ducaillon épris? Pour que ses lettres considérées comme une abomination - forcément, Lestat de Lioncourt faisait des curs sur les parchemins - lui soit confisquées et qu'on les lise à haute voix lors de son futur procès face à la sainte inquisition? Les drames de sa vie naissaient tous de malheureuses lettres, cachées, égarées ou subtilisées. Plus Jamais il ne se laisserait prendre à s'épancher en courrier. Il s'imagina que très vite, s'il n'y mettait pas du sien, sa profonde inculture religieuse serait vite démasquée et qu'on lui brulerait les burnes en dansant gaiement autour de ce grand feu de joie purificateur... Etait-il loin de la vérité? Pas si sûr.
En poussant les portes du palais épiscopapal, Nicolas avait embrassé une sorte d'irrépressible solitude intérieure, qui contrastait divinement avec l'agitation sans nom du lieu saint. Car oui, pour ainsi dire, la vie ecclésiastique de lévêché de Périgueux était en réalité ...
Toutes proportions gardées bien sûr. Par son rang inexistant, et sa fortune honteusement extorquée par Marzina de Montfort, Nicolas ne bénéficiait que d'une petite cellule qui donnait sur celle de son voisin, qu'il entendait se flageller tous les matins, ou réciter des prières enfiévrées pour la rémissions de péchés qui devraient être sacrément honteux. Soumis au catéchisme, le jeune homme passait des heures à lire des ouvrages d'un ennui profond, sautant une ligne sur deux, ou à s'essayer au cours d'enluminure sur mitre, la dernière tendance en matière de mode au palais...
Pire encore, il s'était vite rendu compte qu'il était le plus vieux des enfants de chur. Naturellement il avait fait à son arrivée la curiosité de tous, et avait rapidement été la cible des quolibets des plus jeunes pour sa taille bien plus imposante malgré qu'il soit d'une nature malingre. Certains l'avaient même piqués avec le bout de leur cierge pour vérifier qu'il soit bien réel, de chair et d'os.
Le soir lors du couvre feu, il finit rapidement par devenir la tête de réseau d'un mouvement de coalition-anti-nabot-rose, fomentant dans le plus grand des secrets quelques mauvais tours à jouer au gourou de la Maisonnée. Parfois, le passage d'un prélat qui trainait dans son sillage annonçait l'heure d'éteindre la chandelle de la résistance, troquant les mauvais plans contre les prières muettes de ne pas être l'élu du soir. C'est que tout ce que l'on racontait sur les "écarts" des religieux n'était pas totalement fortuit...
Ainsi furent ses premiers jours. Hésitants. Malheureux. Mais Nicolas apprendrait vite. De ses aptitudes naturelles à lire et à retenir, l'éducation dont il avait bénéficié lui garantissait d'apprendre quelques prières qui le sauveraient, et sa gueule d'enfant de chur lui laisserait encore le loisirs de faire semblant d'en être un, nonobstant le talent liturgique et la magnifique voix de fausset qu'il n'avait pas. Oui, même dans les églises, être bien fait de sa personne sauvait les miches plus souvent qu'on ne l'imaginait.
Ce matin de bonne heure, il était convoqué pour partager un moment en compagnie devant un repas trop frugal pour lui - qui n'avait pas le droit de s'empiffrer comme le faisaient les plus haut placés de l'église - ... Autrement dit: subir un interrogatoire sur ses connaissances religieuses.
Ambiance.
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𝓒𝔬𝔪𝔪𝔢 𝔲𝔫 𝔢𝔫𝔣𝔞𝔫𝔱 𝔡𝔢 𝔠𝔥𝔲𝔯, 𝔧𝔬𝔲𝔢𝔯 𝔡𝔢 𝔩𝔢𝔫𝔠𝔢𝔫𝔰𝔬𝔦𝔯,
𝓒𝔥𝔞𝔫𝔱𝔢𝔯 𝔡𝔢𝔰 𝔗𝔢 𝔇𝔢𝔲𝔪 𝔞𝔲𝔵𝔮𝔲𝔢𝔩𝔰 𝔱𝔲 𝔫𝔢 𝔠𝔯𝔬𝔦𝔰 𝔤𝔲𝔢̀𝔯𝔢".
(𝓒𝔥𝔞𝔯𝔩𝔢𝔰 𝔅𝔞𝔲𝔡𝔢𝔩𝔞𝔦𝔯𝔢, 𝔏𝔞 𝔪𝔲𝔰𝔢 𝔳𝔢́𝔫𝔞𝔩𝔢)
On dit que les garçons de bonne famille doivent aussi expérimenter le couvent dans leur enfance, afin de renforcer leur piété et de préserver leur innocence.
Par chance, Nicolas n'était pas de bonne famille. Du moins, pas tant que ça, puisque de fils de Lemerco n'avait que le nom, un piètre héritage de bâtard qui ne lui permettait rien sinon d'être un écuyer. Élevé par les Montfort sans savoir qu'il était Montfort, telle une tragédie à la Jon Snow , l'enfant avait poussé sans réelles racines sinon celles, profondément ancrées, de la culture bretonne. En gros, du chouchenn qui faisait la voix de charretier, des rites druidiques en pleine nature et des noms de famille imprononçables que l'on se transmettait de génération en génération sans daigner le lier à d'autres.
Autant vous dire que l'église de Rome et ses préceptes ne lui disaient rien de rien, que la phase conservation de sa vertu, culture de sa chasteté, approfondissement de l'amour de Dieu et de ses parents avaient passé leur tour... Faisant de Nicolas un impie, voir pire, un hérétique. Car l'écuyer s'appuyait sur les sciences des étoiles, les pouvoirs des potions des druides, l'art divinatoire des runes... Précieuses runes de galets qu'il avait léguées à sa sur Dana la veille afin de s'assurer qu'aucun vilain curé ne les lui arrache en hurlant au sans nom et en l'aspergeant d'eau bénite.
Il avait été compliqué pour le jeune blond qui était entré dans les ordres comme on rentre en pénitence , d'imaginer le quotidien que lui réservaient les hauts murs des édifices religieux... Ce qu'il s'était figuré? Qu'on n'y lisait que psaumes et ouvrages saints. Que le nabot rose, Aka lévêque Lotx mangeait ses enfants de chur au petit déjeuner et que c'était pour cela qu'il en recherchait perpétuellement. Qu'une fois entré à son service, il ne reverrait jamais le jour en jeune homme libre et qu'il serait coupé de toute personne qui ne soit pas du clergé pendant des lustres.
D'ailleurs qui viendrait le visiter? Sa sur? Tempétueuse et intempérante, trainant sa fière allure au parloir des visiteurs? Voyez l'ironie. A l'époque, même les prisons n'en étaient pas encore dotées. Il eut fallu que ce soit dans les maisons de dieu, que la visite des prison... Haem. Des jeunes à dieu confiés... Soit orchestrée comme au confessionnal. Entre deux grilles. Et sous le regard froid d'une sur. Ha infamie! Il regrettait parfois sans oser l'avouer d'avoir pris cette décision, laissant s'envoler son amant inconsolable pour lui éviter les foudres de l'église.
D'ailleurs qui lui écrirait? Son ducaillon épris? Pour que ses lettres considérées comme une abomination - forcément, Lestat de Lioncourt faisait des curs sur les parchemins - lui soit confisquées et qu'on les lise à haute voix lors de son futur procès face à la sainte inquisition? Les drames de sa vie naissaient tous de malheureuses lettres, cachées, égarées ou subtilisées. Plus Jamais il ne se laisserait prendre à s'épancher en courrier. Il s'imagina que très vite, s'il n'y mettait pas du sien, sa profonde inculture religieuse serait vite démasquée et qu'on lui brulerait les burnes en dansant gaiement autour de ce grand feu de joie purificateur... Etait-il loin de la vérité? Pas si sûr.
En poussant les portes du palais épiscopapal, Nicolas avait embrassé une sorte d'irrépressible solitude intérieure, qui contrastait divinement avec l'agitation sans nom du lieu saint. Car oui, pour ainsi dire, la vie ecclésiastique de lévêché de Périgueux était en réalité ...
Un joyeux bordel.
Toutes proportions gardées bien sûr. Par son rang inexistant, et sa fortune honteusement extorquée par Marzina de Montfort, Nicolas ne bénéficiait que d'une petite cellule qui donnait sur celle de son voisin, qu'il entendait se flageller tous les matins, ou réciter des prières enfiévrées pour la rémissions de péchés qui devraient être sacrément honteux. Soumis au catéchisme, le jeune homme passait des heures à lire des ouvrages d'un ennui profond, sautant une ligne sur deux, ou à s'essayer au cours d'enluminure sur mitre, la dernière tendance en matière de mode au palais...
Pire encore, il s'était vite rendu compte qu'il était le plus vieux des enfants de chur. Naturellement il avait fait à son arrivée la curiosité de tous, et avait rapidement été la cible des quolibets des plus jeunes pour sa taille bien plus imposante malgré qu'il soit d'une nature malingre. Certains l'avaient même piqués avec le bout de leur cierge pour vérifier qu'il soit bien réel, de chair et d'os.
Le soir lors du couvre feu, il finit rapidement par devenir la tête de réseau d'un mouvement de coalition-anti-nabot-rose, fomentant dans le plus grand des secrets quelques mauvais tours à jouer au gourou de la Maisonnée. Parfois, le passage d'un prélat qui trainait dans son sillage annonçait l'heure d'éteindre la chandelle de la résistance, troquant les mauvais plans contre les prières muettes de ne pas être l'élu du soir. C'est que tout ce que l'on racontait sur les "écarts" des religieux n'était pas totalement fortuit...
Ainsi furent ses premiers jours. Hésitants. Malheureux. Mais Nicolas apprendrait vite. De ses aptitudes naturelles à lire et à retenir, l'éducation dont il avait bénéficié lui garantissait d'apprendre quelques prières qui le sauveraient, et sa gueule d'enfant de chur lui laisserait encore le loisirs de faire semblant d'en être un, nonobstant le talent liturgique et la magnifique voix de fausset qu'il n'avait pas. Oui, même dans les églises, être bien fait de sa personne sauvait les miches plus souvent qu'on ne l'imaginait.
Ce matin de bonne heure, il était convoqué pour partager un moment en compagnie devant un repas trop frugal pour lui - qui n'avait pas le droit de s'empiffrer comme le faisaient les plus haut placés de l'église - ... Autrement dit: subir un interrogatoire sur ses connaissances religieuses.
Ambiance.
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- (En Bleu italique, les pensées Laconiques.) -Recueil