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[RP] Les enfants de choeur se cachent pour pleurer.

L_aconit
[Je me roule
Cœur en boule
Ventre vide
Et vie dehors

Le vin coule
Entre mes doigts
Vous vous saoulez
D'or et d’excès
de richesse
Belle ivresse
que l'or coulant de vos doigts]*


Il en fallait du courage pour aimer dieu. L'aimer au point de le louer du matin au soir et de vivre chez lui, dans le secret des monastère.

Faust Nicolas de Montfort Toxandrie de son beau nom n'aimait pas dieu. Du moins pas encore. Sa vie au palais épiscopal de Périgueux était à proprement parler son enfer, et bien qu'il suive assidument les consignes de ses supérieurs ecclésiastiques, le grand enfant de choeur lorsqu'il ne se cachait pas pour pleurer bouillonnait de cent facéties qu'il mettait au profit de ses comparses, tous aussi enfants malgré eux, donnés en pâture à un dieu d'adultes. Entourés selon lui de vieux cons, ventripotents, ventriloques du coeur, les deux à la fois.

Lorsque l'heure de la soupe arrivait, le jeune homme organisait déjà de la contrebande de saucisson volé dans les réserves secrètes de l'évêque Lotx, pour continuer à nourrir son âme du torrent combattif qu'on lui connaissait. Il avait appris à observer parfaitement les habitudes de ce gras et mégalo prélat à la mitre aussi grosse que son égo. Ainsi chaque matin à prime, Monseigneur s'entretenait avec ses conseillers, brassant chouquettes fraîches et spéculant sur le cours du Lotx d'or. Sexte voyait le petit nabot aux grandes ambitions battre le saucisson, de préférence avec un jeune enfant de choeur aux joues roses et aux lèvres habiles pour lui pousser la chanson. Et lorsque Complies arrivaient, l'évêque dispensait ses cours, à grand renfort de vin, béni - bien entendu.

Chaque instant de la vie cléricale était ainsi réglé, de sorte que lentement mais sûrement, le palais épiscopapal périgourdin se transforme en gruyère; regorgeant de caches de nourriture et de boisson en tout genre jusque dans le confessionnal où le Grand Manitou pouvait manger ET s'absoudre du péché de gourmandise en même temps. Pratique.

Pourtant, l'Aconit malgré son masque de trublion finissait inexorablement chaque soir par se faner dans la froideur vide de sa cellule. Recroquevillé dans sa solitude, il ne priait pas comme il devrait le faire. Faisait tout au plus semblant d'agiter contre le mur le rosaire, pour laisser croire à son voisin mitoyen qu'il puisait en le Très haut d'inépuisables forces... Et lorsqu'il ne tombait pas de sommeil, il approchait la chandelle de l'écritoire et écrivait des lettres qu'il n'envoyait pas toutes. Les premières furent adressées aux deux seules femmes qui pouvaient quelque chose pour lui. L'accabler ou le soutenir. Au choix. Celle qui connaissait l'imposture de son frère se vit donc écrire ceci.



Citation:
Dana.

Me voilà au palais épiscopapal. Je suis un peu perdu. Devrais-je prier jusqu'à m'en user les genoux pour accepter la foi en moi? A force de ployer le genoux, Dieu entrera-t-il en moi? On m'a coupé les cheveux courts et enlevé mon anneau d'oreille. On m'a donné une robe blanche, je n'ai même pas moyen de voir si ça me va bien. Ils me font un peu peur dans ce palais... L'êveque est très autoritaire. J'ai peur qu'il ne sente que je suis un vrai breton et que je ne connais pas le crédo.

Dana. Vous me manquez.

Nicolas.


Celle qui pensait que Nicolas était entré dans les ordres par conviction religieuse, se vit rédiger cela.


Citation:

Isaure.

Me voilà au palais épiscopapal. Je suis un peu perdu. J'ai accepté d'embrasser dieu - (pas sur la bouche, hein ) - mais je me demande si j'ai fait le bon choix. C'est que je n'ai pas l'habitude de dormir seul, moi qui suis habituellement avec... Les chevaux. Et puis je ne connais pas toutes les prières... N'avez-vous pas quelque chose pour m'aider? Et si l'évêque me donne des ordres, dois-je faire tout ce qu'il désire ? Vous qui êtes si proche de dieu, éclairez ma lanterne...

Nicolas.


Oh oui, il en fallait du courage pour aimer dieu... Un courage dont n'avait pas hérité Nicolas.


[Et alors
Allez-y
Arrêtez-moi
Si j'ai tort
A vous de cogner plus fort
Même que ça fait même pas mal
On volera encore
Même pas morts même qu'on est
Tous des anges]*


*Zazie
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(En Bleu italique, les pensées Laconiques.) galerie d'avatar-Recueil
Don.
Se souciait-elle, en l'instant, de ce frère qu'elle aimait pourtant ?
Peu.
Peu car un autre venait jaillir d'un passé douloureux et trop ensanglanté pour être ici conté. Myrdinn était de retour. Fantôme difficilement dissimulable aux yeux de l'homme, qu'elle avait - devant Dieu - fait la promesse d'aimer. Tourment de larmes, torrent déversant une âme qui venue l'ébranler, était aussitôt repartie pour la Limousie.
Et toi, Nicolas ? Veux-tu faire mal, ou pourrais-tu être différent de la fratrie indigne dont j'ai été l'héritière ?

Le doute n'est pas permis.
Si aux autres branches d'un arbre malade Roykkness n'espérait plus s'accrocher, l'ultime bourgeon à protéger restait le frère Montfort trop longtemps ignoré.
Il aurait réponse, et semblant de réconfort.

Citation:
Nicolas,

Je suis certaine que vous êtes magnifique dans votre somptueuse robe blanche, et que votre crâne est mis à l'honneur sans votre amas de chevelure pour venir le cacher.
Que vous usiez vos genoux, ou votre séant, mon cher frère, sachez que vous n'en obtiendrez qu'un seul résultat : La douleur du corps. Des articulations, je suppose, pour le cas présent.
J'espère que Dieu n'entrera pas en vous plus que de raison, car j'aimerais encore pouvoir échanger avec votre personne sans vous voir pleurer des larmes composées d'eau bénite.

En attendant, vous avez bien fait de m'écrire. Apprenez donc notre crédo, et en breton s'il vous plaît. Le voici :

Krediñ a ran e Doue, an Uhel-Meurbet hollc’halloudek,
Krouer an Neñv hag an Douar,
An Ifernoù hag ar Baradoz,
Barner hon ene war hor marv,
Hag en Aristot, e brofed,
Mab Nikomak ha Faetis,
Kaset evit kelenn ar furnez
Ha lezennoù Doue an Hollved d’an dud dianket.
Krediñ a ran ivez e Kristos,
Ganet eus Maria ha Jiosep,
Gouestlet en deus e vuhez evit diskouez hent ar Baradoz deomp.
Goude en deus diwasket poanioù dindan Ponce,
Eo marvet er verzherinti evit salviñ ac’hanomp.
Aet eo da gavout an Heol el lec’h ma oa Aristot en tu dehou d’an Uhel-Meurbet o c’hortoz anezhañ.
Krediñ a ran e Ober an Doue ;
E Iliz aristotelek ha romanek ;
E komunion ar sent ;
E distaol ar pec’hedoù ;
Er vuhez peurbad.
Amen.


Je pense à vous, Nicolas.
Courage. Vous n'êtes pas seul.

Dôn.


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L_aconit

Ce jour était particulier.

On avait permis au jeune blonde de sonner les cloches toute la journée durant. Voilà le seul plaisir qu'il eut, couplé à celui bien maigre de lire les pleins et les déliés d'une âme mieux qu'amie, liée à lui par le sang. L'Ainée avait répondu. On avait déposé le vélin soigneusement roulé sur sa couche. Un fugace instant, infinitésimal, son coeur s'était emballé à la vue de ce courrier. Sans doute avait-il imaginé l'espace d'une seconde qu'il ne fut pas écrit de la main de Dôn. A dix huit ans, l'espoir est encore un oriflamme que l'on brandit dans la fièvre, à toute heure et en toute saison, corps puisse-t-il encore s'embraser , esprit puisse-t-il encore s'enflammer. Empressé, il avait ouvert la missive, qu'il avait immédiatement rejetée dans un geste emporté sur un coin de paillasse à la vue du sceau apposé. Colérique, l'Aconit ne restait jamais. Le noeud coulant qui s'était emparé de sa gorge avait fini par se desserrer. Si Dana avait répondu, il fallait s'en contenter.

Délicates, les mains blanches avaient puisé dans le petit coffret qu'il gardait comme unique richesse, déliant l'or de quelques souvenirs encore trop frais. Un diadème ducal qui valait bien plus que l'ensemble de tout le coffret étincela à la lueur de la chandelle, tandis qu'il le déposait aux coté du contenant de bois. Un stiletto perce-maille finement ouvragé offert par le prince de Retz suivit, vestiges de sa jeune adolescence. Taliesyn de Montfort avait toujours été généreux avec son écuyer. L'index du jeune homme vint caresser le fil de la lame avec prudence et rêverie. Il délogea une dague de la même facture, au manche serti d'une pierre bleue offerte par le Duc Lestat de Lioncourt qu'il déposa dans la continuité des deux autres objets. Etait-ce le noeud coulant qui revenait le tenailler à la glotte ou son besoin éternel de remuer l'arme dans sa plaie? Quoi qu'il en fut, les autres effets s'alignèrent les uns après les autres avec autant de fébrilité, Nicolas n'avait jamais aussi bien porté le sobriquet dont l'affublait son beau frère... Un bracelet de cuir tressé avec une mèche de cheveux rouille. La chevalière à l'émeraude. La chaine à la clef d'or, que les mains fines et douces délivrèrent de son emmêlement. Le roman de Renart.

Six objets pour toute possession, que les religieux du palais avaient accepté de lui laisser contre l'anneau ostentatoire à son lobe et ses cheveux de vagabonds. Et on lui disait qu'accepter dieu n'était pas sacrificiel... Il resta longtemps assis sur son lit à rêvasser au pouvoir de ses objets sur lui. Sur les battements de son coeur. Sur les images qu'ils projetaient. Sur les sensations qu'ils lui procuraient au corps. Quand certaines piquaient désagréablement d'autres au contraire éveillaient les instincts les plus prohibés. A dix huit ans, on ne refuse rien à ses pulsions. Ni le sanglot, ni l'irruption. Après cet instant de pure intimité, l'Aconit daigna enfin lire son courrier qui rejoignit le petit paquet de lettres dans les confins du coffret. Et le lendemain, à la première prière...


Je crois en Dieu, le Trés-Haut tout puissant,
Créateur du Ciel et de la Terre,
Des Enfers et du Paradis,
Juge de notre âme à l'heure de la mort.


- Priez plus fort, Montfort!

- ... Hag en Aristot, e brofed,
Mab Nikomak ha Faetis,
Kaset evit kelenn ar furnez ...


"Paf!"


Une beigne éclaboussa les cheveux polaires. Les bleus de l'Aconit s'assombrirent, pourtant il ne cilla pas, mains jointes et genoux au prie dieu. Le chemin pour accepter Dieu restait encore à faire.

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(En Bleu italique, les pensées Laconiques.) galerie d'avatar-Recueil
Isaure.beaumont
Oui, il en fallait du courage. Ou de la lâcheté. Beaucoup de lâcheté.

Si Isaure, au contraire de Nicolas, se réfugiait volontairement dans la religion, c’était pour fuir la vie et ses délices, pour fuir la vie et ses douleurs. Pour fuir la vie tout court plus que par vocation. Les jupes du Très-Haut, croyait-elle, pourrait la protéger des peines terrestres.

Fuir les tentations pour s’éviter de pécher, encore et toujours. Car depuis qu’elle avait fui le giron de son époux, l’actuelle veuve Von Frayner n’avait cessé d’enchaîner les faux pas. Alors elle s’était mis en tête d’aider les âmes les plus gangrénées, celles à côté desquelles la sienne lui paraîtrait presque vierge de tout péché.

Nicolas, lui, lui apparaissait comme une âme pure, qu’elle se devait de guider.


Citation:
Cher Nicolas,

Pardonnez ce long silence qui a suivi votre pli. Les derniers jours furent assez mouvementés et je n'ai eu le temps de songer sereinement à la réponse à vous apporter.


Laissez-moi vous dire que le doute est tout à fait normal. Il m'arrive également de douter de cette voie que je compte également embrasser, notamment quand tous mes proches se liguent contre moi dans l'intention de me faire renoncer au voile. Mais vous m'avez Nicolas, je ne vous demande pas d'y renoncer, bien au contraire, je vous encourage à l'embrasser pleinement, de toute votre âme. N'hésitez pas à m'écrire chaque fois que votre foi vacille.

La prière peut vous aider, Nicolas. Chaque fois que le trouble, que le doute, que la peur s'emparent de vous, récitez votre crédo, votre prière du pardon. Chaque fois qu'il vous semble vain de poursuivre, pensez donc à Sainte Raphaëlle qui a douté tant d'années alors que Dieu ne l'avait jamais quittée. Notre coeur souvent n'est pas assez pur, assez bon et assez ouvert pour sentir sa présence à nos côtés. Mais Il est là. N'en doutez jamais.

Quant à l'Evêque, je crains que vous ne soyez dans l'obligation de l'écouter. Il a bien plus d'expérience que vous, et à moins qu'il ne vous conduise vers des chemins peu vertueux, comme le brigandage, par exemple, vous lui devez obéissance aveugle.

Acceptez enfin ce petit présent, qui sans doute vous aura déjà été offert: un livre des vertus suffisamment petit pour tenir dans une poche. Limoges n'est pas Paris mais l'on y trouve parfois de jolies petites choses. Je suis tout de suite tombée sous le charme de son cuir, de son odeur et de ses enluminures. J'espère qu'il vous plaira et vous inspirera autant qu'à moi. Je vous ai mis des brins de lavande à chaque page évoquée dans cette lettre, pour que vous les trouviez facilement. J'espère qu'au contraire de votre sœur, vous n'y êtes pas hostile.

Que le Très-Haut vous garde, Nicolas, et sachez que vous pourrez compter sur moi si d'aventure le doute vous reprenait.

Votre amie, si vous le voulez,

Isaure


La lettre était accompagné d'un livre précieusement emballé dans un tissu. La couverture était sombre et rehaussée d'un titre aux lettres d'or: Livre des vertus. A l'intérieur, des enluminures de qualité venaient illustrer les différents chapitres saints. A l'intérieur, sur la couverture, elle avait ajouté d'une écriture appliquée: A Nicolas, que le Très-Haut vous préserve toujours des vices et vous garde sur le chemin de la vertu. I.

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L_aconit


𝔔𝔲'𝔞𝔯𝔯𝔦𝔳𝔢𝔯𝔞-𝔱-𝔦𝔩 𝔞𝔲𝔵 𝔢𝔫𝔣𝔞𝔫𝔱𝔰 𝔮𝔲𝔦 𝔫𝔢 𝔣𝔬𝔫𝔱 𝔭𝔞𝔰 𝔩𝔢𝔲𝔯𝔰 𝔭𝔯𝔦𝔢̀𝔯𝔢𝔰?
𝔔𝔲'𝔞𝔯𝔯𝔦𝔳𝔢𝔯𝔞-𝔱-𝔦𝔩 𝔞𝔲𝔵 𝔢𝔫𝔣𝔞𝔫𝔱𝔰 𝔮𝔲𝔦 𝔫'𝔞𝔭𝔭𝔯𝔢𝔫𝔫𝔢𝔫𝔱 𝔭𝔞𝔰 𝔩𝔢𝔲𝔯 𝔩𝔢ç𝔬𝔫𝔰?
𝓘𝔩𝔰 𝔦𝔯𝔬𝔫𝔱 𝔢𝔫 𝔢𝔫𝔣𝔢𝔯.
𝔇𝔢𝔰 𝔟𝔞𝔱𝔬𝔫𝔰 𝔢𝔱 𝔡𝔢𝔰 𝔭𝔦𝔢𝔯𝔯𝔢𝔰 𝔟𝔯𝔦𝔰𝔢𝔯𝔬𝔫𝔱 𝔩𝔢𝔲𝔯𝔰 𝔬𝔰
𝔐𝔬𝔦 𝔧𝔢 𝔰𝔢𝔯𝔞𝔦 𝔰𝔦𝔫𝔠𝔢̀𝔯𝔢, 𝔭𝔢𝔲𝔱 𝔢𝔱𝔯𝔢 𝔲𝔫 𝔭𝔢𝔲 𝔱𝔯𝔬𝔭.*






    Le chemin de la vertu.


Quel chemin de croix. Pavé de sagesse, celle que l'expérience avait donné à Nicolas bien avant l'âge requis. Aconit redessina de la pulpe de l'index les lettres d'or, débordant un peu sur le râpeux égrené de la couverture de cuir. Les pensées avaient largement entamé la parole qu'il avait déjà si mesurée, avant. On ne laissait pas le choix aux clercs que de parler avec leur âme à la seule personne qui les accompagnait dans l'anesthésie de l'Eglise. Dieu.

Non, personne n'avait encore offert à l'enfant qui recherchait un Décameron, un livre des vertus. Ainsi c'était cela? Toutes les vertus, toutes les prières, les fables religieuses concentrées en un si petit ouvrage... La foi de poche, mangée à grandes lettrines travaillées chaque matin et chaque soir pour qu'elle s'imprègne aux hommes?

Peu à peu, le breton avait observé telle une petite fourmi travailleuse les mécanismes de la vie ecclésiastique. L'Église régissait ici la vie de tous les hommes, de leur naissance à leur mort. Par le baptême, la messe du dimanche, la confession, la communion des jours de fêtes religieuses, qui étaient innombrables. Le temps se régulait par les offices dont l'appel résonnait aux cloches.

On lui donna d'abord la charge de la charité. Le jeune homme aidait les moines à aller donner l'aumône aux pauvres. Aux indigents. Aux condamnés. Nicolas parvenait encore à les envier, insectes libres de crever parmi leurs semblables. Les nécessiteux avaient au moins le déplaisir de manquer de quelque chose, et de le recevoir de sa main. Lui qui ne recevait plus rien que le pain du seigneur, son corps disaient-ils. Quel infâme sarcasme, à qui connaissait le corps des hommes. Les joies simples qu'il procure. Lui qui ne recevait en écho que sa propre solitude, celle que l'on disait propice au recueillement. Au désespoir.

Au fil du temps, il avait appris des autres religieux comme le chiot apprend de la portée. Lorsqu'il croisait au détour d'une salle de prière, le repentir de l'asile, celui des individus poursuivis par la justice qui venaient frapper aux portes de l'église, il les enviait de pouvoir trouver la miséricorde de leur dieu. Lui qui se savait être encore percé à jour dans son paganisme, bien que lentement démissionaire ne parvenait pas encore à éprouver une foi assez solide pour s'y réfugier.

Quand venait l'heure de porter aux moines le matériel, onéreux autant que lourd, nécessaire à la copie des manuscrits, il les enviait de pouvoir encore laisser vaquer sur les vélins vierges le baptême libre de leur plume. N'avaient ils jamais songé à détourner quelques lignes, et écrire à autre que Dieu? Comme lui, sans doute, des mots secrets et tendres, qu'il ne pourrait faire lire à personne d'autre qu'à ses prunelles bleues ciel. Le Très Haut n'avait qu'à fermer les yeux.

L'ordre établi tendait à aliéner son esprit libertaire au fil du temps, à force de s'y heurter. Dix huit ans... C'est l'âge où l'on cède bientôt sa malléabilité. C'est l'âge ou pourtant, elle subsiste encore un peu.

Le livre des vertus s'installa entre les mains douces et fines de l'androgyne, qui las de n'avoir plus rien d'autre que les murs blancs à la croix Aristotélicienne pour s'user les yeux, se plia à la découverte des prières, de leur tournures et de leur usage dans la vie du peuple. Dans l'exhalaison timide des grains de lavandes séchés, s'éparpillant un peu sur son torse couvert de blanc.

Des questions subsistaient pourtant. Où s'en allaient toutes ces prières, les muettes, les scandées, les psalmodiées? Allaient elles toucher le coeur d'un dieu que l'on admettait père de toutes vertus, ou s'évaporaient elles dans les rayons de lumières que filtraient les vitraux, pour donner aux hommes des ressources qu'ils parvenaient ainsi à puiser en eux...?

Faisait-il toujours aussi doux, dehors? Lové parmi les autres, les uns contre les autres, dans le ventre de la vie civile. Avait-on aussi faim lorsque l'on manquait du pain? Faim de vivre. Libre.

    Et si seigneur était le berger, qui étaient les moutons?


𝔑'𝔢́𝔠𝔬𝔲𝔱𝔢 𝔭𝔞𝔰 𝔠𝔢 𝔮𝔲𝔢 𝔩𝔢𝔰 𝔞𝔲𝔱𝔯𝔢𝔰 𝔡𝔦𝔰𝔢𝔫𝔱.
𝔗𝔬𝔲𝔱 𝔦𝔯𝔞 𝔟𝔦𝔢𝔫 𝔭𝔬𝔲𝔯 𝔱𝔬𝔦.
𝔏𝔢 𝔪𝔬𝔫𝔡𝔢 𝔰'𝔢́𝔠𝔯𝔬𝔲𝔩𝔢𝔯𝔞, 𝔪𝔞𝔦𝔰 𝔯𝔦𝔢𝔫 𝔫'𝔞𝔯𝔯𝔦𝔳𝔢𝔯𝔞 𝔞𝔲𝔵 𝔢𝔫𝔣𝔞𝔫𝔱𝔰.
𝔙𝔦𝔢𝔫𝔰.


Daniel Darc, Les enfants *

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(En Bleu italique, les pensées Laconiques.) galerie d'avatar-Recueil
L_aconit
𝔈𝔱𝔞𝔫𝔱 𝔡𝔢 𝔫𝔞𝔱𝔲𝔯𝔢 𝔯𝔢𝔟𝔢𝔩𝔩𝔢
𝔰𝔬𝔩𝔦𝔱𝔞𝔦𝔯𝔢 𝔢𝔱 𝔯𝔢𝔫𝔣𝔢𝔯𝔪𝔢́
𝔦𝔫𝔱𝔬𝔩𝔢́𝔯𝔞𝔫𝔱 𝔞̀ 𝔩𝔞 𝔠𝔥𝔞𝔭𝔢𝔩𝔩𝔢
𝔢𝔱 𝔞̀ 𝔩'𝔞𝔯𝔯𝔢̂𝔱 𝔞𝔤𝔢𝔫𝔬𝔲𝔦𝔩𝔩𝔢́
𝔮𝔲𝔢𝔩𝔩𝔢 𝔫𝔢 𝔣𝔲𝔱 𝔭𝔞𝔰 𝔪𝔞 𝔰𝔲𝔯𝔭𝔯𝔦𝔰𝔢
𝔩𝔢 𝔧𝔬𝔲𝔯 𝔬𝔲̀ 𝔠𝔢𝔰 𝔟𝔬𝔫𝔫𝔢𝔰 𝔰𝔬𝔢𝔲𝔯𝔰 𝔤𝔯𝔦𝔰𝔢𝔰
𝔡𝔢́𝔠𝔦𝔡𝔢̀𝔯𝔢𝔫𝔱 𝔱𝔬𝔲𝔱𝔢𝔰 𝔢𝔫 𝔠𝔥𝔬𝔢𝔲𝔯
𝔢𝔱 𝔰𝔞𝔫𝔰 𝔪𝔢 𝔠𝔬𝔫𝔰𝔲𝔩𝔱𝔢𝔯 𝔡𝔲 𝔯𝔢𝔰𝔱𝔢
𝔡𝔢 𝔪'𝔢́𝔩𝔢𝔳𝔢𝔯 𝔞𝔲 𝔯𝔞𝔫𝔤 𝔠𝔢́𝔩𝔢𝔰𝔱𝔢
𝔡𝔢 𝔩'𝔬𝔯𝔡𝔯𝔢 𝔡𝔢𝔰 𝔢𝔫𝔣𝔞𝔫𝔱𝔰 𝔡𝔢 𝔠𝔥𝔬𝔢𝔲𝔯



Il avait fait fuir le chat par l’entrebâillement de la porte, et écoutait attentivement les échos des conseillers diocésains occupés à se réunir. Nicolas avait encore cette âme profondément enfantine parfois, rempart à la morosité destructrice que l'âge adulte s'évertuait à distribuer dans les églises comme l'ostie fade et sèche.

Chaque jour était une nouvelle lutte. Chaque jour suffisait bien sa peine pour y trouver un peu de joie.

Il était arrivé par un beau matin d'hiver, effrayé et agressif dans son panier d'osier que sans doute, l'on s'était amusé à trop secouer pour en écouter la réponse crachotante. Peut-être comme lui, lorsqu'il avait franchi la première fois les portes du pénit.. Hum évêché.

"Un présent du duc de Trun", lui avait-on dit, sous l'oeil suspicieux des autres clercs et celui plus envieux des enfants de choeur. Recevoir des cadeaux, des attentions, était mal vu dans le milieu clérical. Signe de perversion de l'âme que de s'attacher aux biens terrestres, sorti de l'or qui vu la quantité que possédait l'évêque , devait sans doute être un bien divin... Il avait fallu défaire les liens qui retenaient l'étrange chose de sa prison de joncs secs pour enfin ouvrir le panier et ... Tomber sur les fesses pour éviter la furie sortie tout droit de l'enfer d'un long voyage.

Affamé et terrorisé, un chat au poil long et noble s'était éjecté toutes griffes dehors, faisant hurler les soeurs, crier les enfants et danser de surprise les frères. Il avait disparu en une fraction de seconde dans les couloirs du palais, faisant sur sa route crier encore quelques rencontres, ce qui provoqua l'hilarité générale des choristes. Il avait fallu à Nicolas trois jours pour réussir à attraper l'animal, et trois semaines pour l'apprivoiser. Et comme lui, le bestiau mal à l'aise avait fini par trouver ses marques parmi les bures pressées et les allées froides, pour devenir un matou aguerri à l'art de déloger les souris...

Dieu rompait tout les êtres de sa maison à l'exercice de la foi ...

Tous?

Pas vraiment.

L'irréductible jeune breton luttait encore, parmi les fervents, à l'accueillir en son sein... Bien sûr, il avait eu le temps d'apprendre les prières. De connaitre par coeur, les déroulés des offices. Bien sûr, l'Aconit était une fleur du jardin qui n'éclaboussait jamais l'ordre établi. Du moins, en apparence.

Car derrière chaque vin de messe remplacé par de l'eau bénite, chaque prie dieu saboté, chaque mitre frottée à l'ortie... Un jeune chef des enfants de choeur demeurait. Nicolas de Montfort Toxandrie, malgré toute son application à refuser sagement l'église, recevait d'icelle avec générosité de nouvelles responsabilités et de nouvelles tâches...

En attestait la dernière missive écrite à Isaure.


Citation:

    Isaure.

    J'ai bien reçu votre livre. Il m'a été bien utile pour savoir quoi dire à la messe... Le temps ici semble s'écouler lentement. Si lentement.

    L'évêque m'a donné la charge des confessions. Je dois trois fois par semaine recevoir les confidences les plus folles et inattendue des ouailles de Monseigneur... Je n'oserai vous raconter ce que subissent les petits pains que l'on nous apporte parfois, tout droits sortis du fournil, pour l'office du dimanche... Ni comment les soeurs se souviennent encore qu'elles ont été des femmes libres, avant de se vouer à dieu...

    J'ai gardé votre lavande, je l'ai faite sécher dans un missel. Parfois lorsque je l'ouvre, il me rappelle à vous.

    Je suis désormais à la tête d'une armée d'enfant de choeur, dont on m'a promu connétable. Et j'enseigne quelques matières de l'église. Je sais presque parfaitement parler le latin et le grec, et l'on m'apprend l'arabe.

    Vraiment. A t-on idée de donner la messe en arabe, alors qu'on me la refuse en breton.

    A ce propos, comment se porte ma soeur? Lui manquerais-je un peu...? Sachez que je n'écris qu'à vous. Dana est fort occupée avec son époux et le duc.. Oh le duc. Je ne saurai me résoudre à lui écrire tant que je n'aurai pas quelque chose de gai à dire.

    Prenez soin de vous...

    Nicolas.



L'oreille collée à la porte, il attendit avec une gourmandise pas même dissimulée que les premiers éternuements se fassent entendre, rompant sans délicatesse le discours d'un ecclésiastique . Bientôt, ils devinrent une suite tempétueuse. Tant et si bien qu'il posa ses mains androgynes sur ses lèvres pour en étouffer l'amusement gloussant. Ce n'est que lorsqu'il entendit crier un " 𝔈𝔫𝔠𝔬𝔯𝔢 𝔠𝔢 𝔪𝔞𝔲𝔡𝔦𝔱 𝔠𝔥𝔞𝔱! 𝔄𝔱𝔱𝔯𝔞𝔭𝔢𝔷 𝔩𝔢! " qu'il s'enfuit à toutes jambes, dans le vrombissement significatif d'autres enjambées à ses cotés.

L'allergie aux poils de chats avait au moins cela d'amusant, il n'y avait que l'Evêque qui en était la farouche victime, pour le plus grand plaisir des enfants du palais et de leur figure de proue.

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L_aconit
" Je vous souhaite des rêves à n'en plus finir,
et l'envie furieuse d'en réaliser quelques-uns."

- Jacques Brel -



    Janvier.

    De blanc, et de papier. Premier janvier froissé, au matin.


Les yeux s'ouvrent à peine, difficilement. Il fait encore nuit à l'heure de la première prière. Le jour n'a pas encore pointé. Le corps engourdi s'étire doucement. Conscience reprend contenance; un peu. Rechignant à quitter le berceau secret des vagabonderies nocturnes. Rêves taciturnes.

Dans la cellule, la chandelle est toujours là, vaillante et vacillante, elle a lutté jusqu'au réveil de l'Aconit. Les doigts frottent les yeux de leur pulpe aux ongles ras. La nuque flirte avec l'édredon mou. Seule touche de douceur dans la vie de Céruse et de liturgies. Brave petit soldat, Nicolas. Brave soldat de dieu.

    Ce matin après les prières, il ira au jardin. Voici venir son tour d'air frais. Moment attendu où il sentira le vent ébouriffer ses cheveux, gonfler ses poumons. Où il glissera ses doigts dans la terre froide pour couper les légumes d'hiver qui garniront la potée. Il triera les simples, dans un silence mortuaire. Les douces mains s'égareront parfois à faire de quelques feuilles le dessin simple d'une étoile. D'un bateau à voile. Dernier refuge de la rêverie sanctuaire.

    Sans doute, Nicolas poussera l'évasion jusqu'à l'intimité des confessions. Lorsque le premier pénitent s’assiéra contre la paroi de bois qui les séparera, et viendra lui raconter la vie dont il s'était coupé. Amenant à son imaginaire fertile la fraîcheur du ruisseau, nécessaire à abreuver sa jeunesse.


Le corps se délie, restant immobile courbé sur la couche. Moment intermédiaire. Le jeune homme regarde autour de lui, cherchant de l'infiniment bleu la tenue de rigueur. La silhouette gracieuse s'habille, dans le feutré comateux de l'aube bientôt éclos. Le Montfort tâtonne sur l'écritoire, rencontrant l'étole recherchée, laissant tomber sans y prêter attention quelques feuillets qui s'entassent pèle-mêle au sol.


Citation:


    Je sais que je ne rencontrerai plus jamais rien, ni personne qui m'inspirera de la passion.
    Tu sais combien pour se mettre à aimer quelqu'un c'est une entreprise. Tu sais qu'il faut une énergie, une générosité et un aveuglement... Tu te souviens? Qu'il y a même un moment, au début, tout au début, où il faut sauter par dessus un précipice, si on réfléchit on ne le fait pas. Lioncourt... Danses-tu encore au bal des hypocrites? Leur offres-tu ce sourire que j'aimais tant, et dont tu sais si bien te parer pour masquer la peine? J'ai peur que tu sois lâche. Aussi lâche que moi. Lioncourt, t'ais-je blessé? Moi qui t'ai laissé aller te marier. Car tu le feras, n'est-ce pas? Tu vas prendre la Ozta, et faire semblant. Ou te persuader, c'est ça?

    Ici j'ai rencontré dieu. Le dieu des hommes, tu sais, celui qui n'est pas pour nous. Parfois lorsque je plie mes genoux pour prier, je me souviens pourquoi je les pliais avant. Je crois que j'ai du regret. Je crois que j'aurais préféré voir ta tête sur une pique, plutôt que de me l'arracher. C'est ironique... Je n'ai toujours pas attrapé la foi, mais j'ai attrapé froid.

    Même s'il m'a fallu lâcher ta main, sans pouvoir dire à demain, rien ne défera jamais nos liens. même s'il me faut demeurer plus loin, couper des ponts changer de matins, je crois que mon amour est plus fort que le chagrin. Il fait encore battre mon cœur, je crains qu'il ne soit encore là pour sublimer cette douleur. Me murmurant que même si tu pars à la dérive, l'état de grâce, les forces vives, reviendront plus vite que tu ne crois. Même si je ne suis plus là pour voir cela... Même si je me suis donné à dieu. Même si j'ai compris que je ne sauterai plus jamais, depuis que je t'ai dit Adieu.


    Nicolas




Des feuillets par dizaine, que personne d'autre que lui ne lira jamais.

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