Appréhender le monde qui m'entoure.
Etape 1 : De l'art d'être propre.a) Les bains publics.
-...Mais c'est quoi m'dame, des bains pue bique ? On y va pasqu'on pue la bique ? La voix féminine qui répond est légèrement excédée, et écurée :
-Heu...Non. Tu peux y aller, et voir par toi même. Ça vaudra plus que mes explications. N'oublie pas de prendre ta bourse avec toi. Et comporte toi bien.
-Ah? Bon d'accord. Ouais j'vais faire ça. J'dis que j'viens de ta part m'dame?-NON ! Heu...Hum non, non. Tu n'y gagneras rien. Allez va-t'en. Par pitié mon Dieu faites la partir..-M'dame, pourquoi tu vomis?[...]
Voilà comment l'aventure de la Gueuse aux bains publics commença. Une conversation, moult questions, une suggestion. Elle n'eut pas trop de mal à trouver son chemin, les personnes qu'elles rencontraient étant étrangement prolixes à son contact. Peut-être était-ce parce qu'elle améliorait sa tenue en société -ou qu'elle puait à en faire fondre les yeux-, allez savoir. Donc, la Gamine arriva aux bains, paya son dû, soit un bain dans la salle commune, et 3 savons de chaque parfum. La salle était relativement calme, seule une donzelle se trouvait là, se prélassant dans un baquet duquel des effluves parfumées s'échappaient. Améthyne resta à l'entrée de la pièce un moment, à l'observer, à apprendre. Voici ce qu'elle nota à ce moment là :
Quand on s'lave y faut : -Avoir la bouche en cul de poule.
-Rouler des hanches.
-Se frotter doucement avec le savon en poussant des soupirs satisfaits.
-Secouer ses cheveux de gauche à droite.
-Glousser bêtement en faisant tomber son savon.
-Papillonner des cils.
-Mettre beaucoup d'essence parfumée derrière les oreilles, les avants bras, et le nombril.
-Se coiffer pendant au moins dix minutes.
-Le tout au ralenti.
Ça n'avait pas l'air trop compliqué. Suffisait de se lancer.
Elle s'approcha donc du baquet vide, juste à côté de la donzelle qui lui servait inconsciemment de modèle, et qui, si vous ne l'aviez pas compris, était une prostituée qui décrassait le bout de viande. Cette dernière la salua d'un sourire, qui s'effaça bien vite quand son nez délicat sentit les remugles marécageux que la Gueuse dégageait. Elle lui rendit son sourire, le soulignant d'un hochement de tête, yeux fermés. Enfin elle ôta sa tunique, en roulant ses hanches pour le moment inexistantes, et entra dans le baquet. Évidemment, elle n'oublia pas la bouche en cul de poule.
Objectif numéro un et deux, fait.-Toi aussi t'es là pasque tu pues la bi(t)que ?Oui, elle aimait faire la conversation, parler de tout, de rien, comme tout le monde le fait. Aucune réponse de la part de sa voisine de baquet, si ce n'est un regard contrit. La Gueuse était habituée à ce genre de silence, elle haussa les épaules et entreprit de se laver avec ses trois savons. Ses petites mains avaient bien du mal à les contenir, mais pour le moment, elle s'en sortait pas mal. Elle frottait sur son corps comme elle l'avait vu faire, doucement, en poussant des couinements grotesques. L'un des savons décida de se faire la malle, en prenant le soin d'atterrir bruyamment sur le haut du crâne de la voisine de baquet, qui roupillait yeux fermés dans sa soupe.* Shplock !*
-Oooh...Aaaah....Oh c'fait du bien p'tain. Oups pardon m'dame. * glousse bêtement *Objectif numéro trois et cinq, fait.La femme lui lança à nouveau un regard, qui s'il avait pu tuer la gueuse sur place, l'aurait fait. Néanmoins, parce qu'elle était là aussi pour se reposer et profiter de la quiétude du lieu, elle lui demanda de faire un peu plus attention, de parler moins fort, et d'arrêter son char. Améthyne acquiesça non s'en s'excuser à nouveau, puis secoua les cheveux aussi fort qu'elle le pu. Sa voisine de baquet s'en retrouva arrosée d'une immonde patte collante, mêlée à des morceaux de feuilles séchées, de restants de nourriture divers et variés, et bien sûr, de poux. C'en fût trop. Elle se leva, s'habilla sans même se sécher ni reprendre ses biens, et sortit en hurlant qu'elle ne viendrait plus jamais ici.
-Oh pardon Ginette !!* papillonne des cils *...Mauricette !!...Machine !! Reviens, j'te dis ! J'pas fais exprès !! J'apprends à être une feeemme !! Pff, les gens sont malpolis d'nos jours.Objectif quatre et six, fait.Et voilà, elle était seule à nouveau, sans personne pour lui apprendre quoi que ce soit. Tant pis, de toute façon, il ne lui restait plus beaucoup d'objectifs à accomplir, pour être enfin un chantre de la propreté, et de la féminité, bien sûr.
La catin était partie sans prendre son nécessaire de coiffure, sans compter qu'elle avait, par chance, laissé ses flacons d'essences parfumées à la violette et la lavande. Quelle aubaine. Ni une ni deux, la gueuse se pencha pour attraper les deux flacons. Elle ouvrit d'abord celui à la violette, le renifla, et s'en glissa quelques gouttes derrière les oreilles, sur les avant-bras puis...
-Ouais mais en fait ça m'saoule.Les deux flacons furent ouverts, et tout le contenu versé qui sur la tête, qui sur tout le reste du corps squelettique de la gueuse. Elle songea ne pas tout mettre, puis changea d'avis. Valait mieux trop que pas assez. A présent, elle dégageait une odeur effroyable, de marée senteur « Lavette » mi lavande, mi molet..Violette. Ne restait plus qu'à se coiffer. Elle attrapa la jolie brosse ouvragée, et le peigne. Elle les observa quelques instants, en grimaçant, comme si elle se fut trouvée devant quelque objet destiné à la torture. Ce qui était le cas, en un sens. La brosse rencontra tout d'abord une tignasse jamais coiffée en quatorze ans de vie. Ils s'aimèrent si fort qu'ils ne voulurent pas se quitter.
-P'tain mais tu vas t'enlever ouais ? Raaaah !!Quelle solution pour y remédier ? Peut-être prendre le peigne, sur un malentendu...Mais le peigne et la tignasse s'étreignirent, à ne point vouloir se séparer, eux aussi. La gueuse se tenait donc nue dans son baquet, poings serrés, sa chevelure sauvage toute ébouriffée désormais ornée d'une fort jolie brosse, et d'un fort jolie peigne. Ils pendouillaient mollement, et faisaient du bruit quand elle secouait la tête, ce qui eut le don de l'énerver d'avantage. De rage elle sortit de l'eau, et se rhabilla. On l'entendit sûrement pester dans tout l'édifice, avant qu'elle ne sorte rejoindre une taverne. Elle, son odeur infâme, sa brosse, et son peigne.
-J'abandonne, j'en ai marre ! C'trop dur d'être propre, et c'est trop dur d'être une femme !!Objectif 7 et 8, fait.