Isaure.beaumont
Ma petite, ma si petite, ma toute petite. A lheure où les honnêtes gens auront gagné les bras de Morphée, je viendrai. Je viendrai tarracher à ce berceau funeste, à ce tombeau glacé que toffre la terre angevine qui ta dissimulée tant dannées. Et de mes bras et de mon cur, je tenterai vainement de te réchauffer.
Une étrange silhouette guettait depuis langle de la rue lhôtel St Florent, cet hôtel qui avait été presque dix années plus tôt le théâtre dun drame familial, étouffé et dissimulé par lorgueil dun époux impitoyable.
A létage, de cette chambre qui avait enfermé le lourd secret dune naissance honteuse et dun odieux échange, séchappait une faible lueur : Lhôtel était de nouveau habité. Elles devraient redoubler de prudence. Et soudainement, alors même quon avait soufflé les bougies, lobscurité toute entière les enveloppa, accentuant la tension déjà palpable.
Fragile enfant, trahie par ton sang, ignorée des tiens. Me pardonneras-tu ce si grand retard ? Je viens dix années trop tard. Je te bercerai contre mon cur, je te chanterai une berceuse pour taire tes angoisses, et les miennes avec. Je viens te dire adieu mon enfant, et toffrir ce repos éternel qui ta jusque-là été refusé.
Une main dans celle de Dana, lautre portant la pelle préalablement empruntée à linsu de son propriétaire, Isaure expira douloureusement lair quelle contenait depuis trop longtemps déjà. Il faisait nuit noire, et froid. Si froid.
- Dana Jai peur.
La voix était étranglée et tout son être tendu. Il était lheure, lheure de marcher vers cette tombe ignorée, vers ce linceul de glaise et de feuilles. Elles devaient la retrouver, quimporte le prix, quimporte dêtre prise en flagrant délit. Aussitôt lauraient-elles découverte, elles iraient la porter en terre consacrée, pour lui permettre de connaître enfin le repos éternel. La précédente entreprise, menée en concert avec langlais, avait été un lamentable échec, anéantissant espoirs et avenir. Mais cela narriverait pas.
Douce enfant, il ny a pas un jour sans que je ne pense à toi. Si tu savais comme jai honte de navoir pas su reconnaître mon propre sang, si tu savais comme je men veux de lavoir aimé lui, ce fils de rien, ce fils d'un autre, quand tu gisais ici, sans mes prières pour taccompagner, sans mon amour pour te protéger.
Dans la nuit silencieuse, les silhouettes siamoises entreprirent de sintroduire dans les jardins de lhôtel. Lopération fut délicate. Le muret qui ceignait la propriété nétait pas si haut, mais représentait un obstacle considérable lorsque lon portait des jupes ou que lon était manchote. Et bien plus encore lorsquil fallait passer en silence de lourdes pelles et cela, dans la nuit la plus parfaite.
- Je ne vois rien !
Rien. Noire. Et la panique qui commençait à la paralyser. Respire, Isaure, respire. Pense à lenfant, pense à ton objectif. Elle repensa alors à cette leçon nocturne que lui avait dispensée Archibald. Ne pas regarder le ciel, ne pas chercher la ronde et réconfortante amie du regard, sans doute dissimulée derrière dépais nuages. Alors, ses yeux shabituèrent à lobscurité et bientôt, elle put entraîner la sur de cur dun pas plus assuré.
- Rosalinde mavait dit lavoir enterrée au pied de la glycine. Cest là que nous avions creusé, en juin dernier.
Elle désigna une glycine dénudée qui courait le long de la façade, jeune et frêle.
-Je ne comprenais pas pourquoi Je ne comprenais pas pourquoi nous ne lavions pas trouvée, mais je me suis souvenue, il y a peu, quil y dix ans, la glycine sélevait ici. Elle a dû être déplacée, ou remplacée. Nous creuserons donc là.
Et le premier coup de pelle fut donné à lendroit approximatif où quelques années plus tôt sépanouissait encore une glycine luxuriante, entamant à peine le carcan de terre congelée.
Me voilà, mon sang. Me voilà, ma vie. Je suis tout près, Maman est là.
[Titre by JD Judas
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Une étrange silhouette guettait depuis langle de la rue lhôtel St Florent, cet hôtel qui avait été presque dix années plus tôt le théâtre dun drame familial, étouffé et dissimulé par lorgueil dun époux impitoyable.
A létage, de cette chambre qui avait enfermé le lourd secret dune naissance honteuse et dun odieux échange, séchappait une faible lueur : Lhôtel était de nouveau habité. Elles devraient redoubler de prudence. Et soudainement, alors même quon avait soufflé les bougies, lobscurité toute entière les enveloppa, accentuant la tension déjà palpable.
Fragile enfant, trahie par ton sang, ignorée des tiens. Me pardonneras-tu ce si grand retard ? Je viens dix années trop tard. Je te bercerai contre mon cur, je te chanterai une berceuse pour taire tes angoisses, et les miennes avec. Je viens te dire adieu mon enfant, et toffrir ce repos éternel qui ta jusque-là été refusé.
Une main dans celle de Dana, lautre portant la pelle préalablement empruntée à linsu de son propriétaire, Isaure expira douloureusement lair quelle contenait depuis trop longtemps déjà. Il faisait nuit noire, et froid. Si froid.
- Dana Jai peur.
La voix était étranglée et tout son être tendu. Il était lheure, lheure de marcher vers cette tombe ignorée, vers ce linceul de glaise et de feuilles. Elles devaient la retrouver, quimporte le prix, quimporte dêtre prise en flagrant délit. Aussitôt lauraient-elles découverte, elles iraient la porter en terre consacrée, pour lui permettre de connaître enfin le repos éternel. La précédente entreprise, menée en concert avec langlais, avait été un lamentable échec, anéantissant espoirs et avenir. Mais cela narriverait pas.
Douce enfant, il ny a pas un jour sans que je ne pense à toi. Si tu savais comme jai honte de navoir pas su reconnaître mon propre sang, si tu savais comme je men veux de lavoir aimé lui, ce fils de rien, ce fils d'un autre, quand tu gisais ici, sans mes prières pour taccompagner, sans mon amour pour te protéger.
Dans la nuit silencieuse, les silhouettes siamoises entreprirent de sintroduire dans les jardins de lhôtel. Lopération fut délicate. Le muret qui ceignait la propriété nétait pas si haut, mais représentait un obstacle considérable lorsque lon portait des jupes ou que lon était manchote. Et bien plus encore lorsquil fallait passer en silence de lourdes pelles et cela, dans la nuit la plus parfaite.
- Je ne vois rien !
Rien. Noire. Et la panique qui commençait à la paralyser. Respire, Isaure, respire. Pense à lenfant, pense à ton objectif. Elle repensa alors à cette leçon nocturne que lui avait dispensée Archibald. Ne pas regarder le ciel, ne pas chercher la ronde et réconfortante amie du regard, sans doute dissimulée derrière dépais nuages. Alors, ses yeux shabituèrent à lobscurité et bientôt, elle put entraîner la sur de cur dun pas plus assuré.
- Rosalinde mavait dit lavoir enterrée au pied de la glycine. Cest là que nous avions creusé, en juin dernier.
Elle désigna une glycine dénudée qui courait le long de la façade, jeune et frêle.
-Je ne comprenais pas pourquoi Je ne comprenais pas pourquoi nous ne lavions pas trouvée, mais je me suis souvenue, il y a peu, quil y dix ans, la glycine sélevait ici. Elle a dû être déplacée, ou remplacée. Nous creuserons donc là.
Et le premier coup de pelle fut donné à lendroit approximatif où quelques années plus tôt sépanouissait encore une glycine luxuriante, entamant à peine le carcan de terre congelée.
Me voilà, mon sang. Me voilà, ma vie. Je suis tout près, Maman est là.
[Titre by JD Judas
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