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[RP] Les trois pêcheurs (pécheurs ?)

Gabrien
Comme tous les matins au chant du coq, Gabrien sauta à bas de son lit. S'il avait normalement de la peine à s'extirper de sa couche moelleuse et chaude pour s'adapter au froid extérieur, il fit preuve ce jour-là d'un entrain peu habituel. Il ouvrit d'un geste vif, presque brutal, les deux battants de ses volets, inspira l'air matitudinal à pleins poumons et s'accouda un instant à la fenêtre. Les teintes éclatantes des champs, des arbres et des fleurs avaient disparu depuis de longs jours déjà, cédant la place aux tons ocres et dorés de l'automne.

*Curieux comme l'été aime à se parer de couleurs froides quand la saison froide s'habille de nuances si chaudes... Tiens c'est pas mal ça comme réflexion. Je devrais peut-être songer à en faire des alexandrins !*


Continuant à méditer sur cette pensée aussi poétique que percutante, il s'habilla chaudement puis gagna la salle de la "Dent" où il avait donné rendez-vous à ses deux amis. Asti et Aubie ne tarderaient pas à le rejoindre (du moins l'espérait-il) pour un solide petit déjeuner avant que tous trois ne prennent la route du lac.

La partie de pêche avait été programmée -comme souvent- lors d'une soirée arrosée pendant laquelle chacun avait vanté les mérites de ses appâts de prédilection.


- Les vers attirent le poissons comme le miel les mouches !

- Je te dis que rien ne vaut le pain rassis dispersé sur une petite surface !

- Mais puisque je vous assure que j'ai fait mes meilleures prises en me servant de mouches !


L'un d'entre eux était-il seulement réellement pêcheur ? Qu'importe, le jeu du débat sans fin, le plaisir que l'on trouvait à taquiner l'autre juste comme ça, pour rire, l'avaient emporté sur le goût de la vérité scientifique et de la réalité des compétences.
Un sourire flottant sur ses lèvres, le Goupil avait la certitude de passer une bonne journée. C'est donc avec impatience qu'il attendait ses compères. Autant pour tromper l'ennui que pour leur manifester sa joie de les voir, il leur prépara le petit-déjeuner que l'ogre des contes enfantins n'aurait pas renié : pain, confitures, lait, tisane, châtaignes grillées, miel, fromages et même cochonnailles. C'est qu'il fallait nourrir trois gaillards comme ceux-là ! Et comme son père le lui répétait souvent : "Gabrien, vaut mieux te tuer que te nourrir" ou parfois "Gabouille, tu coûterais moins cher en portrait" ! On emporterait les restes pour la journée.


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Aubenard
Demain, de bon matin.

Non pas qu'il partit seul sans escorte mais, à l'heure où blanchit la campagne, Aubenard se leva, fringant comme tous les matins et avec bonne humeur. En s'endormant, il avait décidé que, cette journée, il ne la passerait pas à penser à Irina, à s'inquiéter pour elle et à être morose en songeant à son absence. Non. Aujourd'hui s'annonçait être une belle journée, baignée du renouveau et sous l'auspice de l'amitié. Rapidement, il procéda à sa toilette, qui se limitait à s'asperger de l'eau sur son visage et à s'habiller prestement de ses habits de la veille. L'homme était gai et un sourire ravi illuminait tout son visage lorsqu'il sortit de l'auberge où il avait pris une chambre. Si tôt, la ville était encore endormie et c'était bien l'heure qu'il préférait : nul commerçant ne criait, les rues étaient quasiment désertes, le silence engloutissait Honfleur et le pâle soleil de novembre illuminait timidement la ville encore noyée de brume. D'ordinaire, après sa balade matinale, le parisien marchait de son pas nonchalant vers l'université pour y étudier consciencieusement. Mais, aujourd'hui, jour du Seigneur, il dirigea ses pas vers la Dent de Goupil où le rendez-vous avait été donné.

Il n'avait jamais pêché de sa vie mais Gabrien avait tellement vanté les bienfaits de la Morelle et tous les poissons qu'on pouvait y trouver qu'Aubenard avait fini par être convaincu. L'alcool aidant, cela va sans dire. D'autant qu'il adorait manger et que, bien que la poiscaille n'était pas un mets noble, elle lui remplissait tout de même le ventre avec délectation. Comme toute la nourriture, en fait. La perspective d'avoir, le soir, un bon repas le mit encore plus en joie : il imaginait déjà comment accompagner les poissons qu'ils trouveraient. Avec des patates, des oignons et un champignon, ce sera exquis. Sera-ce du goujon, du cabillaud ou de la truite ? Aubenard n'y connaissait rien, ignorait que certains poissons ne se trouvaient qu'en mer ou dans les eaux fluviales, que d'autres étaient d'eaux profondes tandis qu'on pouvait en cueillir d'autres près des plages. Seul son estomac s'y connaissait ; et c'était bien ce qui lui important.

C'est donc avec des étoiles plein les yeux que le Canard ouvrit la porte de la Dent, devenu son nouveau foyer où il passait tout son temps. Il y trouva Gabrien - forcément ! - à côté duquel se trouvait une table fort bien garnie. La larme à l'oeil lui monta : lisait-il dans ses esprits, ce petit ? En plus de toutes ses qualités ? Aubenard l'aima encore davantage et lui fit un bisou pour le saluer.


- Salut, mon Gabichou ! Comment que ça va, aujourd'hui ? En forme pour mener à bien notre noble mission de pêche ? J'espère einh, pasque j'ai bien faim. Surtout que le fumet qui se dégageait de sa table ne l'aidait en rien. Il arrive bientôt, Bastiann ? Il est d'ordinaire toujours là quand j'arrive...

Déçu de ne pas pouvoir satisfaire son estomac qui commençait déjà à brailler, Aubenard s'assit lentement à la table. Tant de contrôle de soi était impressionnant ; tous ses gestes étaient mesurés et calculés afin que ses mains ne se précipitent pas sur la bouffe et que sa bouche n'engloutisse pas tout avant l'arrivée de Bastiann.
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Bastiann
Matinée, belle matinée! C'est certainement ce que pensait à l'heure qu'il était ses deux compères de la journée. Le blond lui était plus mesuré. En réalité son sentiment se situait plus proche du "Dieu seul sait pourquoi j'ai accepté de me lever si tôt" que du "chouette, je vais m'amuser avec mes amis". Animal nocturne de son état, Bastian se couchait tard, parfois fort tard même et de fait, le matin était à peu près l'instant de la journée qu'il détestait le plus. Toujours avait-il détesté le fait de devoir se lever avec le soleil, refusant de fait toute propositions de déplacement en groupe durant ses nombreux voyage, bien conscient qu'il n'était pas le premier levé aux aurores et qu'il n'était d'ailleurs franchement pas d'humeur gracieuse au réveil. Mais cette fois-ci, la bonne humeur et la joie de vivre de Gabrien avait fini par le convaincre de renoncer à ses habitudes, la nuit avait été fort courte et c'est un zombie qui sortait de sa couche ce matin-là. Se levant avec une lenteur rivalisant de mollesse, il se dirigeait le pas lourd comme s'il portait un poids insoutenable sur ses épaules jusqu'à son baquet pour tenter de donner un semblant de cohérence à son apparence. Une gerbe d'eau sur le visage et les cheveux plus tard, le résultat était à peu près convaincant et il n'arriverait de toute façon pas à mieux tant ses cernes étaient profonds. C'est avec la vivacité d'un âne mort qu'il entreprit de se vêtir de sa tenue habituelle n'ayant guère le luxe d'en avoir plusieurs, il se permettait simplement la coquetterie d'attacher ses longs cheveux en queue de cheval à l'aide d'un ruban de soie émeraude à sa nuque. Le voilà prêt, à défaut d'être frais.

L'air ensommeillé, il quittait sa chaumière en baîllant longuement, profitant du fait que personne ne serait là pour le voir ou lui faire remarquer qu'il était extrêmement impoli de le faire sans se masquer la bouche. Oui parce que, à part Gabrien, le Canardé et lui, personne n'était assez peu sain d'esprit pour se lever si tôt, les rues étaient désertes et même le marché semblait encore endormi. Une partie de pêche... certes, mais avait-elle besoin de démarrer si tôt? La perspective l'avait tout de même intrigué, le Flamand n'ayant guère eu l'occasion dans sa jeunesse de se prêter à de tels divertissements, tout ce qu'il savait de la survie dans la nature, c'était des rudiments dans l'art de la cueillette. Rien de fou donc ou de comparable à la chasse, aux gibiers ou aux poissons. Perdu dans ses considérations profondes sur l'importance de toujours démarrer une journée le plus tôt possible, il finit par arriver à la Dent du Goupil, lieu de rendez-vous établis par ses camarades d'infortune. Poussant avec son éternelle mollesse matinale la porte, il pénétrait avec bien peu de conviction les lieux.


- Bien le bonjour à vous deux... J'espère que vos nuits ont été bonnes. Ouais, la sienne ne l'avait pas été à son goût, pas assez longue en tout cas. Quel est le programme pour cette beeeeelle et loooongue journée qui s'annonce?

Finalement, Bastian eut une vision enchanteresse, comme la lumière au bout du tunnel, signe d'une fin de ses souffrances. Le petit déjeuner était prêt! Avec un léger regain de vigueur, il pressait le pas pour s'assoir à table son visage cédant même un léger sourire, c'est dire!
Gabrien
Alors qu'il posait le dernier bol sur la table :

Aubenard a écrit:
- Salut, mon Gabichou ! Comment que ça va, aujourd'hui ? En forme pour mener à bien notre noble mission de pêche ? J'espère einh, pasque j'ai bien faim. Surtout que le fumet qui se dégageait de sa table ne l'aidait en rien. Il arrive bientôt, Bastiann ? Il est d'ordinaire toujours là quand j'arrive...



Ah ! Le bonjour noble anatidé ! Figure-toi que tu es le premier à franchir mon huis. Il est vrai qu'habituellement, Asti est déjà là quand tu arrives, mais habituellement, c'est le soir. Et surtout, habituellement, on se retrouve plutôt pour boire le calva et avaler la terrine de poisson que pour aller la pêcher.. c'est un couche-tard le Bastiann !

Bastiann a écrit:
- Bien le bonjour à vous deux... J'espère que vos nuits ont été bonnes. Ouais, la sienne ne l'avait pas été à son goût, pas assez longue en tout cas. Quel est le programme pour cette beeeeelle et loooongue journée qui s'annonce?


Tout en donnant l'accolade à son ami, il lui lança :

Percevrais-je un zeste d'ironie dans ton propos mon frère ? Pour ce qui est du programme, on va aller taquiner le goujon... en espérant qu'il soit plus frais que toi ! On risquerait d'être malade sinon !



Un coup d'oeil complice à Aubie par-dessus l'épaule de Bastiann et un éclat de rire plus tard, le Goupil fila en cuisine chercher tisane et lait chauds pour en remplir les bols de chacun. Tout en tartinant généreusement une large tranche de pain de froment d'une épaisse couche de fromage blanc et de confiture (vieille coutume flamande héritée de sa mère), il s'enquit auprès des deux hommes :

Bon alors ? Tout le monde a prévu de quoi "opérer" ? Personnellement, j'ai chassé le ver de terre toute la soirée d'hier : il m'a suffit de suivre les poules pour savoir où chercher. J'ai tout enfermé dans une boutille de terre ayant contenu du calva... s'agira pas de se tromper quand on voudra étancher notre soif hein ! Alors, j'ai pris une canne, du fil, une pièce trouée, un bouchon, des hameçon, des vivres et bien sûr...

Il ne finit pas sa phrase, préférant tapoter du bout des doigts de manière explicite les flasques rangées religieusement sur la table : calva et bière claire.

Vous croyez qu'on devrait emmener "Mademoiselle" ?


Mademoiselle était le faucon de Gab avec lequel (laquelle en fait, car il s'agissait d'un lanier) il avait appris à chasser. Elle lui ramenait lapin et bécasse, alors pourquoi pas une truite ou un goujon hein ? Si le goujon montrait de la bonne volonté !

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Aubenard
Le moment tant attendu fut enfin parvenu quand Bastiann ouvrit la porte pour faire entrer un soleil éblouissant de par sa venue et les sentiments réjouis qu'Aubenard sentit naître en lui à l'approche de son ami. Ce moment tant attendu ne fut pas nécessairement la venue de son AstiCot mais aussi ce que ce symbole d'entrée signifiait pour lui et pour son estomac : la rencontre soudaine entre sonappétit matimal et le bonheur de pouvoir en savourer ce qu'il voyait sur la table devant lui et qui le narguait depuis au moins 107 ans. A peine Bastiann fût-il entré en tavarne que le Canardé se faisait déjà religieusement une tartine avec sa couche de beurre demi-sel (on n'était pas en pénuirie à cette époque-là) recouverte d'une généreuse couche de confiture. Trop tard il se rendit compte que, peut-être, il fallait saluer son amie. Mais ses amis passaient, depuis toujours, après son estomac. Ce fut donc la bouche pleine qu'Aubenard répondit à Bastiann :

- Bonjour ! La forme ? fit-il poliment avant de recroquer dans sa tartine. Non sans lui lancer le regard clinquant de celui qui est, malgré tout, heureux de le revoir.

Gabrien, tout à son habtue d'être gentil, serviable, prévenant et généreux ne tardit pas à aller chercher de quoi remplir des godets. C'est donc bientôt celui d'Aubenard qui fût rempli avec célérité et onctuosité. Rarement, ce dernier avait pu retrouver la saveur de sa jeunesse et tout ce que ce nectar divin avait su faire naître en lui. Sans nul doute cela venait d'une Canarde. Mais les Canards ont-ils des pis ? Bien sûr puisqu'il a ce lait de Canard devant lui. Et il n'y a que la perfection de ces êtres de lumière pour produire une telle boisson des Dieux. Ayant soif autant qu'il avait faim, le parisien n'avala pas entièrement sa bouchée qu'il buvait déjà une goulée pour faire passer le tout. Levant les yeux avec panique, il entendit les dernières phrases de Gabrien et lui lança, penaud :


- Mais... je n'ai jamais pêché moi ! Je ne savions même pas que c'était avec un ver... Puis, il rajouta, dans un muremure : d'ailleurs, j'aime pas franchement ça, patauger dans la mare (aux canards), avoir les pieds qui suintent et touchent des algues détrempées... Il frissonna et repensa à la chanson de Renaud.

Il n'avait rien contre l'idée d'aller pêcher, mais seulement s'il pouvait regarder de loin et sans qu'il y ait un risque d'être touché, d'une quelconque manière que ce fût par l'eau saline. Rien qu'être près de la mer et sentir les embruns lui donnaient la nausée. Aubenard, palliant le problème, avait prévu sa gourde de vin du Cotentin. Il sourit gentiment en se rappelant qu'elle s'était gentiment faufilée entre sa chainse et son pourpoint. Mais Gabrien, qui lisait certainement dans ses pensées, leur confia sans aucune ambiguité qu'il avait de quoi faire. Rien à craindre donc. Il s'imagina donc vautré dans les fougères près de la mer, regardant les deux compères galérer à choper un goujon tandis que lui se folâtrerait sur la plage abandonnée (coquillages et crustacés). Un sursaut le coupa de ses pensées et le ramena à la réalité


- Mademoiselle ? C'est ta conquête ?
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Bastiann
Son arrivée semblait avoir particulièrement ému le Canard. Mais cela ne surprenait guère le Flamand, depuis qu'il l'avait rencontré il avait eu l'occasion de remarquer à quel point ce noble animal plumé avait le coeur sensible, les émotions fortes. Si l'on disait que certains sont de glace, le Canardé lui était plutôt brasier incandescent qui toujours trouvait une raison de brûler, d'agacement quand il était question des 5 écus obligatoire à verser pour confesse, de bonheur quand il croisait l'un de ses amis au détour, d'emmerveillement quand il était question de palmipèdes et de littérale euphorie quand il était cette fois sujet de sa belle. Aujourd'hui, son palpitant se consumait-il à cause de la présence de Bastian en ces lieux -hypothèse la plus probable, le blond ayant remarqué à quel point son "ami" lui lançait des regards langoureux quand il le croisait à Honfleur- ou cela était-il simplement conséquence de son appétit grandissant? La deuxième semblait tout à fait envisageable lors qu'il s'attaquait à une grande tartine de confiture avec un appétit gargantuesque -au bas mot-.
Une fois les salutations expédiées avec tout le soin qu'elles méritaient, le Flamand pris place à table, le buste bien droit à son habitude et cherchant à masquer la joie que lui provoquait ce petit déjeuner qui était plus que le bienvenue, au vu de son état de forme matinal. Il entreprenait donc de se réaliser une tartine, la plus parfaite qui soit. La couche de beurre était homogène, sans aucun sommet disgracieux, l'épaisseur était elle aussi idéale. Suivant l'exemple de son compère plumé, c'est une couche de confiture généreuse sans être indécente qui rejoignait son compère le beurre. Une fois cette véritable oeuvre d'art réalisée et après l'avoir examiné sous toute ses coutures, pas peu fier de sa réalisation, il finissait par l'engloutir à petite bouchées, entrecoupant celles-ci par de bonnes gorgées de lait chaud.
Puis finalement, le drame. Les mots de Gabrien lui revenait en tête, l'inventaire de tout ce qu'il avait emporté pour être précis. Diable! Lui n'avait presque rien avec lui. Tout juste une canne avec un bout de fil qui pendait mollement en son bout. Rien d'autre, nada, niet. Passé ce moment de panique façon "Fichtre, que vais-je donc faire?", il déposait avec toute la dignité dont il était capable son reste de tartine sur la table avant de demander sur un ton neutre à ses camarades...


- Gabrien, mon très cher ami, aurais-tu du matériel en surplus à me prêter pour la journée? Je crains de n'avoir rien d'autre que canne et fil pour ma part, cela est-il suffisant pour pêcher? C'est qu'il avait jamais pratiquer cet art ancestral, il savait pas ce qu'il fallait ou non. Sinon, je pourrais vous jouer du luth pour passer le temps. Les poissons aiment peut-être les belles mélodies?
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Gabrien
Gabrien s'assit aux côtés de ses compagnons. Il les regardait déjeuner, les écoutait se moquer gentiment de lui aussi.

aubenard a écrit:
Mais... je n'ai jamais pêché moi ! Je ne savions même pas que c'était avec un ver... d'ailleurs, j'aime pas franchement ça, patauger dans la mare (aux canards), avoir les pieds qui suintent et touchent des algues détrempées...


aubenard a écrit:
Mademoiselle ? C'est ta conquête ?


Bastiann a écrit:
Gabrien, mon très cher ami, aurais-tu du matériel en surplus à me prêter pour la journée? Je crains de n'avoir rien d'autre que canne et fil pour ma part, cela est-il suffisant pour pêcher? Sinon, je pourrais vous jouer du luth pour passer le temps. Les poissons aiment peut-être les belles mélodies?


Le sourire de Gabrien se muait en une moue dubitative. S'il se rappelait bien la soirée de veille, ils avaient tous applaudi au projet d'aller pêcher. Pourtant, les réflexions qu'ils venaient d'entendre laissaient penser que ses acolytes ne débordaient pas d'enthousiasme à l'idée de taquiner le goujon... ou la sardine. Il n'avait pas rêvé les applaudissements quand il avait proposé cette activité quand même ! Un des deux n'avait-il pas salué l'initiative en montant sur la table en criant "vivat Gabrien !" ? Il ne l'inventait pas ça. Souhaitant rester prudent dans ce qu'il avançait, il interrogea prudemment :

Mais... lequel d'entre vous m'a raconté hier soir être plus habile à la pêche que le gracieux cormoran ? Lequel m'a raconté qu'il avait passé son enfance agrippé à une branche de sureau taillée avec laquelle il avait attrapé des poissons aussi énorme que lui ?

Il se gratta la tempe... il y a une seconde encore, tout cela était très clair. A présent, il n'était même plus sûr que LE sujet évoqué la veille était la pêche ou la cueillette des champignons ! Interrogeant sa propre envie, il dût bien admettre que la force qui l'avait tiré du lit le matin même venait du plaisir de retrouver bientôt un canard au caractère aigre-doux et un noble dont l'attitude pouvait paraître raide comme la justice mais qui s'amollissait à mesure que le pichet de calva se vidait. Il ne savait même plus s'ils avaient décidé de se rendre à la mer ou au lac, si on avait décidé de bivouaquer une nuit ou pas. Bref, tout-à-coup, l'organisation des prochaines heures lui semblait beaucoup plus floue.

*Et maintenant ? Qu'est-ce que je fais ? Je leur propose de pêcher dans l'étang de jardin histoire de ne pas les traîner comme des zombies tout le long du chemin ?*

Il en était à ce point de ses réflexions quand...

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Nicol
- Maître, je suis désolé, je pense avoir fait une boulette !

La porte qui s'ouvrit brusquement laissa apparaître Nicol.

Bien qu'il ne fût que le commis de Gabrien devenu depuis peu son fils adoptif et qu'aucun lien de sang de les liât, on pouvait noter certaines ressemblances entre eux. Les traits du visage des deux hommes semblaient avoir été dessinés par la même mains et leur caractère à tous deux était doux et rêveur. Le gamin renvoyait l'image d'un poulain malhabile perché sur ses jambes trop grandes. Ses yeux prasins brillaient d'une lueur malicieuse et farouche ; son nez, tavelé de taches de rousseur, renforçait encore l'impression de petit animal sauvage ; sa tignasse blonde qu'il ne parvenait jamais à discipliner, à l'instar du Goupil, tirait de plus en plus vers le roux, à la grande satisfaction de Gabrien qui prenait plaisir à l'appeler "le Goupillon", jeu de mots que quelques calvas rendaient toujours plus drôle qu'il ne l'était en vérité.

- Et bien Nicol-Ni-écharpe, que t'arrive-t-il ?, demanda Gabrien qui, décidément, excellait dans l'art du calembour et autre contrepèterie !


- Et bien Maître, j'ai voulu nourrir le chat ce matin comme tous les matins d'ailleurs...
j'ai pensé que le paquet que vous aviez posé sur la table renfermait les déchets de boucherie que vous aviez ramenés pour lui comme vous avez l'habitude de le faire. N'imaginant pas que ça pouvait être autre chose, j'ai tout vidé dans la gamelle sans plus y regarder. Ce n'est que quand je suis revenu d'avoir été tirer de l'eau au puits que je me suis bien dit que... ben que ça devait être autre chose. Les poules s'étaient échappées et avaient envahi la cuisine : je crois que j'ai voulu nourrir le chat avec les vers que vous aviez préparés pour votre pêche de ce matin.


Gabrien hésita entre le rire et le grognement. Parant au plus pressé, il posa la question évidente :

- Et maintenant ? Je suppose qu'il n'en reste plus un n'est-ce pas ?

- Ben, c'est-à-dire que... cette agitation inhabituelle à l'intérieur de la maison a quelque peu excité le chat qui s'est mis à courser les poules que je n'arrive plus à chasser dehors de la cuisine.
Montrant la porte d'où il venait : ça vole de partout là-dedans et j'ai peur que le chat ne s'occupe de son déjeuner lui-même ! Si vous vouliez bien me donner un coup de main.

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