Yohanna.
- Sujet N°7 -
Mais pourquoi refusent-ils tous de se faire appeler ''mon père'' ? Est-ce qu'elle refuse de faire appeler Baronne, elle ?
L'aconit Quel nom étrange pour un curé. Un sourire se dessine sur tes lèvres à la digression de ton esprit. Jolie petite fleur des montagnes qui peut faire mourir un cheval d'un simple coup de dents dans les racines. Tu préfères la mandragore pour perpétrer tes crimes. Plante de sorcière qui, bien dosée, peut apporter la paix, les visions et tant d'autres propriétés. Jouer avec le feu est toujours plus drôle qu'un acte radical et sans retour. D'ailleurs, si tu savais à côté de qui tu es réellement assise, pauvre Baronne Si ce nom avait été utilisé ailleurs Peut-être saurais-tu ?...
Oh, je ne sais si ça mérite le pardon de dieu. Mais ça n'coûte rien de demander
J'ai tué, mon p J'ai tué. Un crime odieux.
J'ai tué un rêve. J'ai tué un espoir. J'ai tué le peu d'attrait que j'avais réussi à difficilement maintenir
Et j'ai tué tout ceci en ratant le meurtre d'une Duchesse.
Cette attaque que tu avais pourtant minutieusement planifiée. Ce plan difficilement monté qui n'a pourtant pas marché. Ou qu'à moitié. Était-elle seulement blessée ? Avait-elle des séquelles, sinon la perte d'un fruit qui n'aurait pas été désiré ? Tu aurais aimé tout détruire et faire table rase de cette histoire. Mais y croyais-tu vraiment toi-même ? Au fond, peut-être es-tu en échec volontairement. Inconsciemment, tu savais que tu ne voulais pas réussir. C'eut été trop beau. Trop parfait. Tu n'aimes pas quand tout se passe si bien, quand tout est trop lisse. Il te faut des vagues, des aléas, des ratés.
Si Duchesse mourrait, qui te resterait-il comme ennemi ?
Je ne sais ce qui est le pire. Avoir tué tout ça sans rien voir mourir, ou louper ce grand coup d'éclat.
Je me fais vieille mon père. Mon frère. Heu non Enfin bref. J'ai cru que je savais encore tuer
Ce ton badin que tu emploies n'est pas à destination du père à la voix si douce. Tu as juste besoin de vider ton sac, finalement. Finalement, n'est-ce pas ça le secret de la confession ? Évacuer un poids si lourd qu'il empêche de respirer. Certains ont leur meilleure amie pour ça. D'autres le serveur au comptoir, quand la nuit est bien avancée. D'autres encore leur conjoint, qui peut tout entendre, ou qui s'en fout tant et si bien que l'on peut parler des heures, il ne retiendra rien. Ça fait du bien de parler. Ça soulage. L'avantage du prêtre, c'est qu'il ne répétera pas. Ici, tout est bien gardé. L'avantage du prêtre, c'est que pour toi il est là. Il attend même sa petite pièce. En échange, il fera semblant d'écouter, il prendra peut-être un ton sévère pour te rappeler que « c'est pas bien de pécher ! Repentez-vous et allez en paix ma fille. » Peut-être écoute-t-il. Peut-être a-t-il l'esprit ailleurs, sur son repas du soir ? Sur le vin de messe qui servira à égayer ses journées ? Il aura sa pièce quand même. Parce que tu es là pour parler.
Tes yeux se portent sur tes mains. Sales du sang de tant de personnes. Quelques innocents, mais peu. Les autres ont tous été jugés coupables. A une époque, tu n'allais pas voir les prêtres, il fallait soulager ta conscience quand même. Alors tu étais juge. Alors tu tranchais le problème. Aujourd'hui tu ne sais plus. Tu n'es même plus l'avocat du Diable.
Mais peut-être est-ce à cause de lui Il me hante. Les morts peuvent-ils revivre dans le corps d'un autre ? L'enfer lunaire, c'est un truc fermé, non ? On n'revient pas comme ça, dites ? Sinon j'suis sûre qu'il est là, à nouveau.
Plus beau encore. Plus monstrueux
L'histoire se répète. Comme la ritournelle de l'alouette au printemps, tu revis cette histoire avec quelques années de plus. Certains protagonistes n'ont pas changé. Certains décors ont légèrement évolué. Vas-tu encore perdre l'usage d'un membre dans l'affaire ? Cet amas que tu croyais gelé va-t-il cesser son tambourin assourdissant au milieu de ta poitrine ? Pourquoi trembles-tu ainsi ?
Ce n'est pas lui Ce n'est pas lui
Il Il Oh Ansoald...
Il a le même regard, parfois perdu, rarement doux. Si souvent furieux. Il a les mêmes démons au fond de son être, les mêmes peurs qui ternissent son visage. Tu retrouves le même velours au bout de ses doigts, avant que la violence de ses gestes ne te ramène à une autre époque. Tous les présents que tu lui as fait n'avaient pour seul but qu'il lui ressemble un peu plus Des vêtements savamment choisis. Des petits objets qu'il pourrait utiliser. Il lui ressemble jusque dans les armes qu'il utilise. Il est cet Autre.
Il te hait à présent. Ça y est, c'est lui tout à fait. Il a cherché à te tuer, bien sûr. Tout en voulant te garder. Tu as fait le vide autour de lui de ce qu'il tenait comme précieux. Tu t'es arrangée pour que tout disparaisse, petit à petit ou brutalement. Parce que tu donnerais ta vie pour rester auprès de lui, sans la moindre concurrence pour te faire de l'ombre. Toi la fière, toi la Grande H, toi qui pourrais enfin aboutir à tes rêves, encore une fois tu es prête à tout sacrifier, tout abandonner, contre la promesse de n'être plus que l'ombre de son visage qui paraît faiblement au coin de l'âtre. Pour n'être plus que la plume qu'il tient entre ses mains quand il écrit à ses myriades, pour n'être plus qu'une larme qui coule de ses joues quand, là, loqueteux d'avoir trop bu et trop fumé, encore une fois il ne croit plus en rien et n'ose plus se relever.
Comme ce dernier soir où il t'a frappé. Où tu es restée agrippée à sa chemise comme tu l'aurais été de ton salut. Combien de fois t'es tu raccrochée à l'Autre alors qu'il cherchait à te tuer. Comme cette fois où, par simple colère, il avait maintenu ton visage sous l'eau, jusqu'à ce que tes doigts ne se plantent plus dans sa chair
Combien de fois encore te laisseras-tu faire ? Combien de signe de violence sauras-tu encaisser ? Parce que tu n'as aucun cran pour être plutôt celle qui le relèvera. Tu n'as pas la force d'être un horizon qu'il a envie d'atteindre. Tu es si minable, plus encore que lui et ses frasques tonitruantes. Plus encore que ce sentiment que tu n'as pas su étouffer avant qu'il ne te dévore.
Tu n'es rien. Une larve. Et tout en lui te le rappelle, sans cesse, comme un cri permanent que pourtant tu peux continuer d'entendre. Pour ne pas oublier. Pour ne pas l'oublier
Pour ne pas laisser fuir l'image de celui qu'il a été. Ses cheveux dorés comme les blés, sa peau foncée laissant percer regard vif et dangereux. Cet homme qui t'as damnée à jamais, malgré tous les essais pour t'en débarrasser.
Ne pars pas Ne meurs pas deux fois
Dois-je encore confesser, mon p....utain de merde ?
_________________