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[RP] Il n'est bon avocat qui ne mente en plaidant

Comtesse_de_remscheid

Paris, Mi Novembre 1465,

    Noir cavalier aux portes du temple dévoyé
    Cheval rhénan n'en venant pas pourtant
    Pli remis par messager pour secret gardé



    Paris, le quatorzième jour de novembre de l'an 1465

    De nous, Comtesse de Remscheid,
    A vous, Direction de l'Aphrodite,

    Il a été porté à mon attention qu'une personne que je recherche, répondant au nom de Maître Lucas Dentraigues, se pouvait être en vos murs. J'eusse apprécié que vous puissiez me confirmer ou m'infirmer cette information.

    Il se trouve que Vater(*) Dentraigues représentait certains intérêts de mon défunt époux, le comte de Remscheid, et que depuis sa disparition il m'a été impossible de trouver celui qui fût son homme de loi pour le royaume de France. Je vous sais gré de me faire parvenir retour par messager à mon hôtel particulier parisien où je me trouve actuellement si il y a eu méprise.

    Dans le cas contraire, merci à vous d'informer Master(*) Dentraigues que je suis à sa recherche et souhaiterait m'entretenir avec lui où bon lui semblera.

    Que le Très-haut vous apporte prospérité.




    Vater > Sire
    Master > Maitre


Paris, Mi Janvier 1466,

    Deux mois sans retour d'aucune sorte de la part de l'établissement, sa missive avait-elle été réceptionné, de son cavalier elle n'avait pas de doute sur la fidélité. La patience n'était pas des grandes qualités de la comtesse mais quelques affaires parisiennes et rhénanes ayant nécessité toute son attention, la recherche du serviteur de son défunt époux sur le territoire français était passée au second plan.
    Temps lui étant rendu, un de ses employés fut envoyé en surveillance de l'établissement pour avoir réponse à ses interrogations, rapport enfin clair indiquant que l'homme de loi Dentraigues était bien résident à l'Aphrodite, cercle privé d'un genre nouveau où l'on ne rentrait pas sans montrer patte blanche, qu'il en soit ainsi, elle n'y entrerait donc pas.

    Fiacre mandé, la noble rhénane laissa l'étoffe d'une robe sombre glisser sur le marche pied, si Dentraigues ne venait pas à elle, la comtesse irait jusqu'à lui, mais de cet affront assurément il devrait s'expliquer, l'ébène n'était pas connu pour sa mansuétude et ne pas donner réponse à sa missive était un manque de respect total à son égard.
    Il lui avait pourtant semblé que cet homme avait le sens des convenances lors de ses rares visites au comte pour traiter de leurs affaires, où bien entendu, elle n'avait lieu de citer à moins de devoir jouer les interprètes lorsque les deux hommes peinaient à se comprendre.
    Parloir du cocher tiré, la voix de la rhénane indiqua alors son intention et l'endroit où il devait se rendre.

      L'aphrodite schnell (*)


    Chaos des pavés parisiens passant d'un endroit à l'autre, des appartements parisiens de la comtesse de Remscheid à la cour Jussienne, cette fois, elle s'assurerait que l'avocat reçoive le courrier en main propre, sans passer par la direction. Possibilité d'une non transmission lui effleura l'esprit, pourquoi restait un mystère, mais sans connaître l'établissement comment en juger.
    Rendu devant le cercle privé, carrosse stoppa en face de la porte introductive de l'édifice, pli fut remis au cocher, il était impensable d'aller porter le message elle-même mais assurément le celui-ci saurait retenir l'attention de l'homme de loi, chacun avait ses travers, ses points faibles et il en était un sur lequel elle pouvait sans doute jouer.

      Veuillez remettre cette missive à Vater(*) Lucas Dentraigues, pas au portier, ni à la direction du lieu, uniquement à cet homme, en main propre, vous en avez eu une description par ma seconde.
      Faites donc, j'attends ici.


    D'un geste de la main, le cocher fut remercié et invité à faire ce qu'il lui était demandé, la rhénane s'installant dans le moelleux du siège, décalant légèrement le rideau pour tenter d'apercevoir discrètement ce qui se déroulait de l'autre coté de la rue.


    Vater > Sire
    Schnell > Vite

_________________
--Le_cocher
Les ordres de la nobliote étaient limpides, un pli, un homme, une description, il n'y avait pas de quoi fouetter un chat, mais la dame avait pas la réputation d'être commode quand elle était pas servie comme elle l'entendait mais qu'à coté de ça elle payait bien donc...
Heurtoir soulevé et rabaissé, il n'y avait plus qu'à attendre que le colosse de la maison des plaisirs ouvre, oui le cocher savait lui ce qui se tramait ici, il avait entendu quand il trimballait les belles dames et beaux messieurs, mais comme pour beaucoup le secret se devait d'être gardé alors...
Et sésame ouvre toi, l'entrée s'entre-bailla devant le cocher.

Bonjour,
J'ai un pli pour le seigneur Dentraigues que je dois lui remettre en main propre.


--Justine_aphro
Elle s’appelait Justine et elle servait à l’Aphrodite. Oh, elle n’était pas galante, encore moins membre de la direction. Elle avait la responsabilité de servir les chambres des galantes et galants, d’apporter le petit-déjeuner, faire les lits, le lavage, le ménage. Il fallait bien admettre que dans le cadre de ses fonctions, la petite servante tombait parfois sur quelques surprises. Ce jour-là pourtant, ce ne fut ni bas sous un lit, ni pièce de passementerie chiffonnée, ni foulard suspendu à une poutre qui retint son attention mais un petit bonhomme rondouillard, en livrée, aux joues picotées par la roséole, et aux jambes arquées par le surplus de cochonnailles dévorés jour après jour.

- Vous désirez? Un pli pour le Maître? À remettre en mains propres?

La situation la surprit. De un Lucas Dentraigues ne s’intéressait que peu aux hommes. Si d’autres comme Montparnasse en faisaient leur affaire, le Maitre lui ne s’en occupait guère. Et en règle générale, les dames qui requerraient ses services savaient qu’il préférait recevoir de leurs nouvelles d’une messagère et non d’un messager. De deux, la petite servante se demandait si ses mains auraient pu être assez propres pour qu’elle remette ce pli au Dentraigues mais la mine déterminée du cocher lui laissa supposer que l’homme n’était guère ouvert à la plaisanterie.

- Bien! Veuillez me suivre. Je vais vous mener à sa chambre et s’il a les cheveux liés, je vous introduirai auprès de lui.

La petite Justine était secrètement amoureuse du beau blond de l’Aphrodite. A chaque fois qu’elle le pouvait, elle s’assurait d’être affectée à son service. Elle ne se faisait cependant aucune illusion et se doutait bien qu’un homme tel que lui ne tournerait jamais son regard vers une petite soubrette comme elle. Qu’à celui ne tienne chaque occasion était bonne pour se trouver dans les parages du galant. Après tout, l’espoir n’avait encore jamais tué quelqu’un n’est-ce pas?

Le petite rousse précéda le cocher dans l’escalier qui menait à l’étage de la bâtisse. Aussi discrètement que peut l’être une souris, elle toqua à la porte de Lucas et fit signe au cocher de patienter. Elle disparut et referma la porte derrière elle, porte qui se rouvrit sur le cocher quelques minutes plus tard. La soubrette revint dans le couloir, referma brièvement la porte derrière elle, réajusta sa coiffure et répliqua au cocher.


- Le Maître est disposé à vous recevoir. Si vous voulez bien me suivre…
--Le_cocher
Pas bien causant le colosse, en même temps il était pas là pour ça si on y réfléchissait, le petit bout de donzelle qui arriva en entendant le mot Dentraigues semblait bien plus joviale, une p'tite rouquine pas piquée des hannetons, plutôt mignonnette, pas bien vieille en plus. Si toutes elles étaient comme ça ici, il tenterait peut-être d'y avoir des accès ici le cocher. Mais vu sa mise, sans compter qu'elle parlait d'un maitre, plus une souillon qu'une entraineuse à priori, n'empêche que le fessier qui se dandinait sous son regard quand ils montèrent voir si le sieur était ouvert à réception, le regard du bonhomme l'avait pas quitté d'un iota.

Et l'étage fut rejoint, les mirettes du cocher en prenant un peu plein la trogne, apercevant des belles demoiselles en tenue pas bien... ou très... fin qui ravissait l'oeil d'un honnête homme fallait pas se mentir. Il aimait pas trop faire le messager mais là en attendant voir que la soubrette revienne de dedans la porte où elle s'était engouffrée, ça le gênait moins étrangement.

La jeune rousse se repointa avec le cheveu de traviole, l'esprit du cocher s'imaginant bien ce que le sire qu'il devait voir avait bien pu lui demander ou lui faire, et en plus y se tapait le personnel, it's good to be the king ici. Belles dames à foison et droit de cuissage sur le petit personnel, il aurait du faire ça tiens Maitre, mais là tout de suite il était juste cocher au service d'une comtesse en goguette sur Paris avec un message à donner en mains propres.

La porte passée, il découvrit un homme bien mis de sa personne, tu m'étonnes que la gamine se mettait à genoux sans rechigner, limite elle devait en redemander, bon fallait pas y penser là et revenir à la raison de sa présence. Pourpoint ouvert et pli au saut de cire intact sorti et tendu vers le maitre des lieux.

J'ai ce pli pour vous Messire, je ne voulais point vous déranger mais il m'a été expressément indiqué de vous le remettre en mains propres et pas autrement, voici donc.

Lui il avait fait ce qu'on lui avait demandé, maintenant il allait pas se barrer comme un voleur et attendait que le blondinet le remercie ou lui redonne un message ou... la petite rousse? Rêver n'avait jamais fait de mal, et quand on poireautait des heures assis au froid sur le siège d'un fiacre, on avait tout le temps pour ça.

Lucas.


Il s’appelait Lucas Dentraigues. Il avait les cheveux blonds comme les épis de blés d’été. Il était galant à l’Aphrodite, l’établissement le plus huppé du Tout-Paris, connu pour ses délices en matière de goût. Ici, tout le monde l’appelait le « Maître ». Croyez-le où non, pour quelqu’un qui donnait de son corps pour servir les envies les plus secrètes des plus belles et plus riches dames du royaume, ce pseudonyme n’avait rien à voir avec son métier actuel. Avec son caractère peut-être? Lucas aimait à se complaire dans l’ambiguïté. Il était de cette race d’hommes qui aimait maîtriser, diriger, imposer. Mais encore une fois, là n’était pas non plus la principale raison de ce surnom. Avant d’être galant à l’Aphrodite, Lucas Dentraigues avait été avocat au barreau de Paris. Il y avait brillé, un peu trop sans doute. Ses façons de procéder lui avait valu beaucoup de succès…et beaucoup d’ennemis aussi. Certains « gentlemen » comme disent les angloys n’aimaient pas perdre d’une manière qu’ils considéraient comme déloyale. Lucas Dentraigues faisait fi du chemin employé pour peu qu’il menât au succès. Dure fut la chute du Dentraigues, aussi dure qu’agréable fut sa reconversion en tant que galant à l’Aphrodite.

Lorsque le cocher entra, le parisien (il n’avait jamais quitté sa ville natale, ni pour affaires, ni par plaisir personnel. Même les blés d’été se pliant sous une brise chaude, à qui il empruntait la couleur de ses cheveux, n’étaient qu’une vue de l’esprit pour notre galant.) se trouvait tourné vers sa fenêtre, le regard dardé sur une rue de la cour de Jussienne..Il réajustait le ruban de velours noir qui nouait ses cheveux en catogan. Il ne vit pas le cocher entrer, sentit tout d’abord sa présence, avant d’entendre le son déplaisant de sa voix. Justine avait omis de lui mentionner ce détail. Il aurait sans doute demandé à la petite soubrette de prendre le pli pour lui s’il avait su… Ou pas car depuis quelque temps, il se méfiait de Justine. La servante se faisait trop insistante à son gout. Elle s’arrangeait pour le servir lui, quitte à négocier avec les autres employées de l’Aphrodite. Lucas devait parfois se montrer un peu trop insistant à son gout pour qu’elle quitte sa chambre et notre galant avait la désagréable impression de se sentir épié jusque dans ses appartements et pas seulement dans le cadre de ses activités professionnelles.


- Donnez, je vous prie.

Il n’adressa ni un salut ni un regard à celui qui venait d’entrer dans sa chambre.Justine avait raison sur ce point: Lucas Dentraigues ne s’intéressait que fort peu aux hommes. Il préférait la compagnie féminine et ce d’autant plus quand il se faisait importuner par un vulgaire cocher. Le regard toujours porté vers la rue, il tendit la main sur le côté pour prendre connaissance de ce pli qu’il devait expressément recevoir en personne.

- Vous pouvez avoir confiance, mes mains sont propres.

Devant l’hésitation manifeste du cocher, la galant tourna le buste d’un tiers de tour, dévoilant ainsi son visage à l’homme qui se tenait derrière lui. Celui-ci n’exprimait aucune gratification, aucune marque de bonne humeur ou d’animosité. C’était un regard froid que le cocher découvrit, agrémenté de traits de visage marquant la détermination. Visiblement, ce geste impressionna le cocher, à moins que ce ne fut tout simplement la clé attendue qui déclencha la livraison. Toujours est-il que la poigne de l’ex-avocat put enfin se refermer sur le parchemin. Il ne jeta même pas un regard de plus en direction de l’homme qui se tenait debout devant lui. Pendant qu’il décachetait la missive, il ajouta pour sa gouverne.

- Elle se nomme Justine. Ne m’en demandez pas plus, elle n’a jamais chauffé mon lit autrement qu’en y mettant des braises.

C’était typiquement le genre de phrase ambigüe que Lucas Dentraigues aimait à user de temps à autre mais son interlocuteur était-il au moins capable de percevoir cette subtilité? Le parisien ne le savait pas et en réalité il s’en contrefichait. Les premiers mots de la lettre accaparèrent totalement son esprit.



Paris, le dixième jour de janvier de l'an 1466

De nous, Comtesse de Remscheid,

A vous, Master Dentraigues,


Il y a maintenant près de deux mois, j'ai fait porter par cavalier un courrier à la direction de l'Aphrodite afin de savoir si vous vous trouviez présent ici comme on me l'avait laissé entendre étant à votre recherche.

Il s'avère qu'à ce jour je n'ai eu retour ni de la direction, ni de votre part alors que j'ai pu avoir confirmation depuis que votre personne demeure bien à l'Aphrodite.

Vous n'êtes sans doute pas sans savoir le décès par trop rapide de mon époux dont vous gériez certains intérêts, si je ne vous ai pas vu en Rhénanie, je ne doute pas que l'absence du paiement de vos gages vous ait poussé à vous renseigner, vu que mon très cher mari vous payait toujours rubis sur l'ongle, en temps et en heure.

Il vous faudra pour cela passer par moi désormais, mais vous trouver n'est pas chose aisée, Master Dentraigues, et lorsqu'on y parvient retenir votre attention semble tout aussi complexe.

Je vous laisse le bénéfice du doute quand à la transmission de ma première missive à votre attention, pour celle-ci en revanche... la remise en vos mains ne laissera aucun doute.

Sachez que si je n'ai l'honneur de vous voir rejoindre le fiacre où je me trouve afin de vous rencontrer immédiatement ou de fixer un rendez-vous dans le cas de votre indisponibilité, vous ne toucherez pas un écu des milliers que le comte vous devait.


Que le Très-haut vous apporte prospérité.







Remscheid. Ce nom ne lui était pas étranger. Comment l’aurait-il été d’ailleurs? Le pli disait vrai. Dans sa vie passée, Lucas Dentraigues avait servi le comte de Remscheid et cela n’avait pas toujours été facile d’ailleurs. La maîtrise du françoys était loin d’être satisfaisante chez le comte. Quand à l’allemand, il était encore en acquisition chez l’avocat. Lucas s’exprimait suffisamment bien dans cette langue pour se faire comprendre dans la vie de tous les jours mais la gestion des affaires nécessitait un niveau de d’habiletés qu’il n’avait pas encore atteint. L’homme était marié à une femme, jolie au demeurant mais pour Lucas celle-ci resta toujours une énigme. C’est elle qui comblait que le fossé linguistique entre son mari et le parisien lorsque Remscheid se déplaçait à Paris. Il y avait en elle quelque chose de mystérieux, peut-être même de mystique. Cet aspect, complété par un joli minois et un corps qui paraissait prometteur, avait attiré Lucas vers la comtesse. A un moment, il avait même cru qu’elle finirait dans son lit. Il n’en fut rien pourtant. Le parisien avait pourtant ouvert quelques portes qui ne furent jamais poussées par la Rhénane.

A la lecture de certaines phrases, ses yeux se plissèrent : « Il y a maintenant près de deux mois, j'ai fait porter par cavalier un courrier à la direction de l'Aphrodite afin de savoir si vous vous trouviez présent ici » … « Il s'avère qu'à ce jour je n'ai eu retour ni de la direction »… « Je vous laisse le bénéfice du doute quand à la transmission de ma première missive à votre attention ». Cette lettre venait renforcer les suspicions nées ces dernières semaines: il se jouait à l’Aphrodite un jeu de pouvoir dans lequel les galants n’étaient sans doute que des pions que l’on avance au gré des besoins de certains. Qui? Flav? Était-il le maître de ce jeu ou lui aussi n’était-il qu’un pion manipulé par une instance supérieure?

A n’en point douter, la comtesse de Remscheid se remémorait suffisamment de Lucas Dentraigues pour savoir comment attirer son attention: l’attrait de l’argent combiné au fait que cela lui donnait l’occasion de revoir une jolie dame, il y avait manifestement de quoi convaincre le galant de se laisser aller à une entrevue « immédiate » même si le ton impérieux ne lui plaisait guère.


- Un instant voulez-vous?

Il se rendit jusqu’à la table de travail qui lui servait de bureau, prit la plume et rédigea une brève missive. Brève mais ô combien importante. Si Lucas Dentraigues aimait le risque, il préférait cependant avoir les atouts dans sa main plutôt que de les voir étalés sur la table du côté de ses partenaires de jeu.

Citation:


    A Angèle
    De Lucas Dentraigues


    Bonjour Angèle,

    Je n’ai malheureusement que peu de temps pour rédiger cette missive. Passez ce soir dans ma chambre. J’aimerais vous entretenir d’une petite mission que je voudrais que vous exécutiez pour mon compte. Je souhaiterais que vous vous enquerrez d’une certaine Lorelei de Remscheid. Dites-moi ce que l’on en dit à Paris.

    Nous discuterons ce soir de vos émoluments. Entre personnes raisonnables, je ne doute point que nous puissions nous entendre.


    Bien à vous,





- Je vous suis, menez-moi à la Comtesse.

Dans le couloir qui donnait sur les chambres des galants, Lucas croisa Justine affairée à il ne savait quoi. L’ex-avocat lui transmit le pli à remettre à Angèle et dévala le grand escalier en compagnie du cocher. Quelques instants plus tard, non loin de l’entrée de l’Aphrodite, la porte d’un carrosse s’ouvrit. Un galant s’engouffra dans le véhicule et une main fut prise pour offrir un baise-main en bonne et due forme. Le galant prit place en face de celle qui l’avait fait mandé pressément.

- Comtesse, mes hommages. Heureux de vous revoir.


_________________
Comtesse_de_remscheid
    Les doigts avaient rendus liberté au rideau du carrosse quand la silhouette du cocher avait disparu dans le bâtiment, l'étoffe se balançant lourdement en reprenant sa place. Le soupir qui passa la barrière des lèvres rhénanes n'était qu'impatience à l'idée de devoir attendre ainsi le bon vouloir d'un homme qui était un des dévoués de son époux.
    Son époux... Regretté comte... Défunt mari... Noble sans envergure dont le nom de Remscheid sorti de l'ombre n'était que l'oeuvre de celle qu'il avait mis dans son sillage. Libertin préférant les cuisses de gamine pubère à celles d'une femme affirmée, ce qui convenait très bien à Loreleï dont les noces n'étaient pour elle qu'un contrat habilement mené et dont le terme arriva prématurément.
    La comtesse gérait déjà en sous-main les affaires de son mari, elle avait donc logiquement repris de manière officielle à la mort de son époux et devait donc rectifier certaines petites choses laissées en suspens par le comte de Remscheid.

    Dextre déposée sur le rebord de la fenêtre ouverte, l'index tapotait le bois d'un ongle ourlé d'un métal précieux finement ciselé, elle avait refusé à sa suivante de l'accompagner, nul besoin d'Ama pour rencontrer l'avocat, si tant est que ce titre lui soit encore attribué.
    Tout se savait vite sur Paris, et la mauvaise fortune du sire Dentraigues tout autant, ce qu'il faisait en ce lieu lui importait peu, et si l'envie de le savoir se faisait sienne, elle irait chercher l'information à la source, tout comme en cet instant.

    La dextre privée de son appui vint rejoindre senestre posée sur ses cuisses quand la porte du fiacre s'ouvrit sur la silhouette du galant, fiacre vacillant légèrement à la montée du dandy blond, un simple signe de tête indiqua au cocher de refermer le carrosse. L'homme n'avait semble t-il que peu changé de celui qu'elle gardait en mémoire lorsqu'il lui prodigua le rituel baise main dévolu à son rang, avec usage verbal approprié.

      Guten Tag Meister(*) Dentraigues


    Avec lenteur, les doigts furent retirés de la main masculine pour rejoindre les cuisses de la comtesse, le corps nimbé de noir reprenant une posture plus hautaine en toisant son invité de son regard si singulier.

      Heureux de me revoir...
      Dois-je en déduire que la missive envoyée aux dirigeants de cet endroit où vous résidez ne vous est donc jamais parvenue ?


    Entrer dans le vif du sujet, la comtesse ne faisait que rarement dans les mondanités quand cela n'était d'aucune utilité, déjà alors qu'elle se devait d'être effacée derrière son époux. D'un geste de main levée entre elle et l'homme de loi de son époux, Loreleï interrompit Dentraigues dans la réponse qu'il avait commencé à lui faire, ton et façon posée de s'exprimer attestant, s'il le fallait, qu'elle ne saurait souffrir un mot de plus de sa part .

      Tsss !!!! Stille... (*)
      Vous êtes ici maintenant, la réponse ne m'est d'aucune utilité. Sachez cependant que je ne suis de celle qu'on fait attendre Vater (*) Dentraigues, intégrez le rapidement.
      Bien...
      Avez-vous du temps à m'accorder présentement ou devons-nous convenir d'une entrevue ultérieure ?


    Droit au but, et recadrer, au passage, à qui le dandy blond avait à faire, elle n'était plus l'épouse du comte de Remscheid, l'aimable traductrice docile, mais LA Comtesse de Remscheid, la femme de l'ombre était désormais dans la lumière, et déterminée à s'assurer que ce qui était sien le reste, et pour cela Maitre Lucas Dentraigues devait pouvoir lui porter assistance.

    (*)Guten Tag Meister = Bon jour maitre
    Stille = chut/silence
    Vater = Sire

_________________
Lucas.

Dans son souvenir, Loreleï de Remscheid n’était pas une de ces femmes à l’excentricité exacerbée. Elle avait l’élégance discrète, préférait le noir aux couleurs vives, apanage de certaines dames de belle noblesse désireuses de mettre en valeur leur beauté naturelle. Ce fut encore le cas ce jour là dans ce carrosse stationné dans une rue de la cour de la Jussienne. Pas de fard excessif, pas de pierre précieuse et pesant à chaque doigt ou autour du cou pour mettre habilement en valeur un décolleté audacieux, juste une bague de métal. Ses cheveux se perdaient sous l’étoffe de sa capuche, la partie supérieure de son visage appréciait l’anonymat qu’offrait un coin d’ombre. Les mirettes du Dentraigues suivirent le chemin de la dextre qui vinrent vint rejoindre sa jumelle sur la jambe de son hôte. La parisien esquissa un léger sourire lorsqu’il constata que là aussi, la Remscheid avait fait preuve de sobriété.

Lucas s’installa confortablement dans la banquette de velours carmin du carrosse. Le visage ne bougea guère lorsque l’oeil roula dans l’orbite pour permettre au galant de saluer son interlocutrice comme il le devait, d’un regard exploratoire qui prit naissance au creux des mains de la rhénane et qui le mena dans un premier temps jusqu’à la pointe de ses bottines de cuir finement lacées. S’il fallait en croire ces dernières, la comtesse de Remscheid ne devait pas arpenter souvent les rues boueuses et enneigées de Paris. Tant la droite que la gauche était dans un état où il aurait été agréable de les garder aux pieds une fois que l’étoffe de la robe eut baissé pavillon dans une chambre de l’Aphrodite et se soit retrouvée sur les chevilles féminines. De la chaussure, le regard masculin remonta le long de l’autre jambe, poursuivit son chemin sur un abdomen et un buste discrètement mis en valeur, plongea dans une gorge qui se dévoilait trop peu au gout de l’homme qu’il était. L’arrondi élégant de ses épaules reçut également sa visite avant les plis des lippes. A son grand regret la coiffure féminine resta pour lui un mystère. L’escapade se termina dans l’ombre d’un regard en partie masqué, tout cela d’un simple mouvement oculaire et peut-être d’un frémissement appréciateur au coin des lèvres.

Les reproches à peine voilés de la comtesse sortirent le galant de sa visite corporelle. Visiblement, l’attente avait le don de l’agacer. La patience, au moins dans certaines situations, ne faisait pas partie des qualités de Loreleï. Enfin…Pouvait-on encore appeler cela de la patience lorsque le délai de réponse dépassait les deux mois?


- L’on m’a effectivement remis votre missive il y a…

 « …Peu. ». Il n’eut pas le temps de terminer sa phrase que déjà elle reprenait la parole. Après le corps, ce fut l’esprit que l’ex-avocat aurait aimé étudier. Lors de la collaboration avec feu son époux, Lucas avait pu constaté que la femme en était une de caractère. Il était d’ailleurs convaincu qu’elle était au fait des incartades libertines de son époux. Il est des sujets que les hommes aiment à partager ensemble et le comte de Remscheid n’était pas avare de détails quand il avait beaucoup apprécié. Certaines phrases, certains mots lorsque choisis de la part d’une épouse sont souvent à comprendre au deuxième degré. Lucas, qui faisait fi du statut marital des dames qu’il appréciait, en savait quelque chose.

- Il sera fait comme vous le souhaitez.

Ici n’était pas son territoire. Le lieu portait la marque de son hôte, son odeur. En cet instant, le Maître se savait dans l’antre d’un autre dominant et les codes implicites de cette société supposaient de respecter certaines prérogatives. Elle souhaitait clore le débat du délai de réponse? Il devait en être ainsi.

- Mes occupations Comtesse me prennent plus de temps la nuit que le jour. Il faut croire que les dames de qualité expriment plus aisément leurs envies lorsque le soleil est couché. A moins que ça ne soit pour des raisons de discrétion face à un époux trop…

Perdre le regard dans ces ténèbres, là où ses prunelles devaient se trouver. Les fixer sans même les voir et appuyer sur les syllabes suivantes.

… Jaloux! Du temps donc dites-vous? Oui, j’en ai pour vous.

Sans même tourner la tête, la galant toqua contre la paroi derrière lui. Puis il tira sur les rideaux, ouvrit la fenêtre et sortit la tête par celle-ci. Au cocher qui se penchait vers lui, celui-là même qui vint porter le pli jusque dans sa chambre, il dit:

- La comtesse souhaite ne point être vue trop longtemps ici. Faites un tour dans les rues de Paris et ramenez-nous ici même dans une heure.

Il revint alors prendre place dans le carrosse et referma la fenêtre. Alors que ce dernier s’ébrouait, il tira sur les rideaux, évitant ainsi tout regard indiscret à l’intérieur de l’habitacle.

- J’adore le bruit des roues d’un carrosse sur le pavé parisien. Pas vous? Il y a quelque chose de sensuel dans ce son. Et puis, cela nous évitera également les oreilles indiscrètes. Il est mieux que certaines… »choses »… restent entre nous.

_________________
Comtesse_de_remscheid
    Le regard opalescent balayait les mouvements de l'homme de loi dans le fiacre tout en écoutant avec attention, il n'avait rien perdu de sa prestance et déjà il prenait ses aises comme si l'endroit lui appartenait.
    L'index droit se mit alors à tapoter lentement la cuisse sur le tissu finement brodé de sa robe, l'agacement de le sentir si présomptueux qu'il s'offrait l'outrecuidance d'ordonner à son cocher de repartir hors qu'elle n'en avait en aucune façon émis l'intention ou le souhait.
    Le chahutage du carrosse sur les pavés et le bruit que cela provoquait n'était en rien pour accommoder la comtesse dans cette entrevue qui ne lui était en aucun point agréable, Loreleï de Remscheid ce serait fort bien passé de devoir s'entretenir avec le sieur Dentraigues.

      Alberne Dunkelheit...(*)


    D'un marmonnement à la brusque secousse du départ du fiacre, la rhénane insulta communément l'avocat autant que le conducteur, la capuche glissant sur la sombre chevelure pour révéler le visage diaphane de l'instigatrice de cette entrevue qui porta son regard glacé sur le galant.

      Master.. (*)
      Votre condition, votre profession, votre passion... quel que soit vos "occupations", ce n'est en aucune façon ce qui me mène ici à votre rencontre.
      J'ose croire que vous êtes suffisamment intelligent pour l'avoir compris.
      Ce sont vos services ou plutôt ceux offerts à mon époux que je viens requérir, l'homme de loi et non vos... nouvelles "fonctions" pour femmes en manque de sensation


    Le ton utilisé associé à l'accent germanique ne laissait aucun doute sur la considération que pouvait bien porter Loreleï à la reconversion de Lucas qui ne provoquait ni chaud ni froid, l'homme n'ayant en d'autres temps déjà pas réussi à obtenir d'elle ce qu'il aurait sans doute escompter découvrir.
    Les frasques de l'avocat n'était un secret pour personne, que ce soit en France ou en Rhénanie, et il était à croire que plus la dame était mariée, plus l'attrait était grand pour l'homme arrivant assez aisément à ce qu'il souhaitait.

      Messer Dentraigues...
      Je n'ai pour habitude de tourner autour du pot, mon époux a laissé des indésirables dans son sillage, je sais que vous traitiez de ses écarts maritaux, délestage, garconnière, prestations pécuniaires, qu'en sais-je encore, et sachez bien que je m'en contrefiche.
      Mais...
      Je veux la liste de ses Bastardkinder (*).


    Droit au but, la requête était claire, elle savait qu'il avait connaissance de tout ceci et l'homme suffisamment cupide et tortueux pour avoir conservé toutes ses informations, "au cas où", se penchant vers lui en plongeant ses opales glacées dans le regard brumeux de l'avocat une phrase presque murmurée filtra des lèvres de la comtesse.

      Ne reste qu'à savoir comment vous allez négocier ce que je vous demande pour en obtenir le meilleur parti pour vous.
      Je n'ai point oublié votre façon d'opérer lorsque je traduisais pour vous.
      Je vous écoute donc mein Lieber(*) Dentraigues



    (*)alberne Dunkelheit = Sombre idiot
    Meister = maitre
    Bastardkinder = enfants bâtards
    mein Lieber = mon cher

_________________
Lucas.
Il l’avait remarqué. Quoi donc? Ce petit doigt qui martelait l’étoffe de sa robe. C’était à la fois discret et évident pour celui qui vouait une véritable adoration aux jambes féminines. Cela lui extirpa un sourire discret alors que son regard se portait sur les rues de Paris qui défilaient devant la fenêtre du carrosse. Loreleï de Remscheid: elle était l’épouse de son client et lorsqu’elle l’accompagnait à Paris, elle participait aux réunions entre son lui et le Dentraigues. Une dame mariée, bien faite de sa personne ne pouvait qu’attirer l’attention de Lucas. Comme vous pouvez vous en doutez, celui-ci avait laissé certaines « portes » entr’ouvertes mais jamais la comtesse n’avait franchi le pas du « boudoir » où elles menaient. Il s’était même proposé de l’y accompagner. Elle déclina. Avec Lucas, Peu de femmes passent outre une telle occasion. Loreleï de Remscheid fut de celles-ci et le Maître n’insista pas: lorsque les barrières sont dressées, il faut savoir prendre son mal en patience. Quand la capuche céda sous un pavé un peu trop arrogant pour le passage de la voiture, le Maître eut la confirmation qu’elle était toujours aussi attirante.

Que son visage soit aussi froid que la glace n’avait pas comme effet de repousser le galant: les contrastes amenaient souvent des résultats intéressants. La froideur était rarement de mise avec Lucas lorsqu’il se trouvait en présence d’une dame qu’il trouvait désirable. Les sarcasmes qui arrivèrent à ses oreilles sonnaient indubitablement comme un « j’ai envie de vous ». Était-ce seulement l’homme de loi qu’elle venait quérir? Vraiment? Pouvait-elle faire abstraction d’une partie de l’homme qu’était Lucas Dentraigues pour ne faire appel qu’à l’autre partie?


- Femme en manque de sensations… Vouliez-vous ajouter « fortes » après « sensations » ? Ainsi donc vous admettez que je puis éveiller chez mon auditoire féminin des sensations …fortes?

N’était-ce pas ce que toute femme s’attend d’un galant lorsqu’elle est prête à débourser une véritable fortune pour passer quelques heures avec lui? De manière plus générale, n’était-ce pas ce que toute maitresse s’attendait de son amant? Ce que toute amoureuse escomptait de l’homme qui ne voulait pas céder sans toutefois fermer définitivement la porte? Était-ce là une caractéristique des galants ou celle d’un homme séduisant tout simplement?

- Dois-je comprendre que vous n’êtes pas femme à aimer les sensations fortes? Ou que vous vous les procurez...par vous-même?

Il étirait volontairement ses phrases pour leur donner plus d’impact. Lucas était comme un chat: donnez-lui une balle de laine, il allait jouer avec jusqu’à dérouler la entièrement. Le provoquer signifiait d’accepter la réciproque, entrer dans le jeu qu’il n’allait pas manquer d’ouvrir, donner des coups et en recevoir….Enfin des coups ou autres pouvant se décliner avec les lèvres, avec les mains…ou autres encore. Enfin elle arriva à l’objet de sa visite. Ainsi donc la comtesse n’avait cure que son mari l’ait trompé. Ce qui l’intéressait c’était ceux qui pouvait contester l’héritage, prétendre à un part du gâteau. Il fallait croire que la comtesse cherchait dans les bras de son époux autre chose que des marques d’affections et d’amour. Les mirettes du Dentraigues fouillèrent le visage de la Comtesse. Elle était belle femme oui. Cette manie de couvrir son visage était tout à fait navrante, tant pour elle que pour ses interlocuteurs. Masquer son minois derrière une étoffe, aussi précieuse soit-elle était une véritable hérésie.

- Ainsi donc la liste de ses nombreuses maitresses ne vous intéresse pas? Seule sa progéniture potentielle attise votre convoitise?

Cette information, à n’en point douter, était aisément estimable. Prenez la fortune du défunt et divisez par le nombre de bâtards. Faites sortir un pseudo testament stipulant un partage équitable de la fortune du paternel et vous vous retrouverez avec une comtesse déplumée devant trouver un moyen de subsistance pour assurer son train de vie actuelle. Trouver un prix équitable pour l’un comme pour l’autre. Dentraigues ne croyait pas un instant que la femme qu’il avait en face de lui pouvait être bernée aussi aisément que certains niais qui avaient voulu faire affaire avec lui.

- Vous êtes manifestement une dame qui aime le luxe Comtesse. Vos gouts doivent vous couter une fortune et celui-là ne déroge pas à la règle. Vous voulez cette liste? Je puis vous la fournir. Je puis même vous fournir les détails sur la façon dont votre époux les a conçu ses bâtards. C’est qu’il aimait parler de sa vie privée. Pourquoi l’en aurais-je empêché n’est-ce pas?

Quand son françois approximatif ne suffisait pas, le bougre se complaisait à mimer, ce qui bien évidemment intéressait Lucas Dentraigues. Après chaque entrevue, il notait précisément chaque détail, chaque nom, chaque information qui pouvait avoir de la valeur dans le futur. Oui. Il avait ce que la comtesse voulait. A n’en point douter.

- Je veux être annobli. Donnez-moi des terres, faites-moi de moi un baron.

Ce qui dans l’esprit du galant voulait dire: ouvrez-moi la porte de la noblesse. Je m’occuperai ensuite de gravir l’échelle à ma façon.

- Mais les titres ne suffisent pas.

Les yeux se plissèrent. Les brumeux se posèrent sur cet intrigant regard au gout reporté. Oui « reporté ». Lucas n’aimait guère utiliser le mot « défaite » en paroles ou en pensées..

- Je vous veux vous.

Les quelques difficultés? les obstacles? La faisabilité de sa part du contrat? Il aurait bien le temps d’y penser plus tard. Pour l’instant, seul comptait la négociation de sa compensation. .
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Comtesse_de_remscheid
    Vanité...
    Mère de tous les vices et l'homme de loi en était pourri, l'orgueil transpirant et dégoulinant de chacun de ses pores avec une assurance sans faille qui laissait la comtesse impassible. L'arrogance se payait d'ailleurs souvent chèrement en sa présence, mais en cet endroit et à cet instant, Von Remscheid avait besoin de Lucas Dentraigues.

      Qualifiez-les de fortes si cela vous enorgueillit Messer(*) Dentraigues...


    Léger accroc dans l'effet probablement escompté, le second suivant de près son jumeau.

      Master.. (*)
      Vos considérations des sensations "fortes" sont bien loin de celles qui provoquent mon intérêt, soyez en certain. Si vous parlez de vos performances charnelles alors la qualification de forte est... fallacieuse mein Lieber.(*)


    Coup de grâce à la prétention de l'avocat, peut-être procurait-il ce que d'aucun nommait de manière erronée sensations fortes à la noblesse française ou à toute autre engeance bien née, mais si le sexe était une façon agréable de se "détendre", ce n'était en rien ce qui faisait frémir Loreleï avec véhémence.
    Enfin le sujet des performances acrobatiques du grand blond aux chaussures noires furent laissées de coté pour entrer dans le vif du sujet qui l'avait mené ici, les bâtards de son défunt époux. Lignée à retrouver et saluer à sa façon, savoir que les envolée de jambes et autres perversions du comte étaient connues de l'avocat ne fit ni chaud ni froid à l'ébène qui se contenta d'inspirer et d'expirer longuement en attendant que l'homme ait fini de parader de ces informations insignifiantes.

      Messer Dentraigues...
      Pensez-vous sincèrement que j'ignorais les petites "manies" du comte, son vice pour les très jeunes demoiselles, pour leur virginité, pour le fait que si la pucelle résistait c'était encore plus jouissif ?
      Je ne vous pense pas si stupide pour le supposer...


    Droit au but, mais cette fois-ci l'assaut ne vint pas de la rhénane mais bien du françoys, un infime tressaillement de sourcils marquant sa réaction à l'aplomb du galant qui avait au final les dents possiblement plus longues qu'elle ne l'aurait imaginer. Le buste se redressa alors lentement pour reprendre une position normale.

      Freiherr (*)Dentraigues... rien que ça...
      C'est du domaine de l'envisageable, je dois pouvoir vous allouer un fief, mais cette noblesse sera rhénane Lieber(*) Lucas.
      Vous avez l'audace de vos ambitions...


    Le regard rhénan se plissa en partie, atténuant l'opalescence singulière des yeux de la comtesse lorsque la phrase suivante rebondit dans l'habitacle du fiacre, cela ne suffisait pas, comment cela aurait-il pu suffire ? L'homme de loi connaissait le patrimoine en partie et savait qu'il pouvait obtenir bien plus qu'un titre.
    La requête suivante eut pour effet de déclencher un rire hautain, dédaigneux et moqueur l'espace d'un court instant, main droite de Loreleï venant se poser à la jointure de sa gorge et de la naissance de sa poitrine.

      Armselig...(*)


    L'arrêt de l'éclat de voix fut net, opales glacées se posant sur l'impudent qui osait telle requête.

      Mir (*)??? Et sous quelle forme entendez-vous me"vouloir" ?
      Je suppose qu'on ne parle pas là de convoler en noces mein Lieber(*), vous souhaitez juste obtenir ce qui vous a échappé n'est-ce pas ? Ce que je vous ai refusé... Claquant ces portes vulgaires que vous vouliez me voir franchir par le passé.
      Aurez-vous l'outrecuidance de penser que je vais accéder à telle requête sans autre forme de contrat ?


    S'il eu été expressif, probable que Lucas eut été foudroyé sur place par la clarté du regard de la comtesse, car si la demande était d'une impudence inconcevable pour la rhénane, elle ne doutait nullement qu'elle était réelle et plus que sérieuse pour l'homme de loi qui ne devait pas aimer d'échouer auprès d'une femme, ce qui fut auprès d'elle le cas.


    (*)Freiherr = Baron
    Master = maitre
    mein Lieber = mon cher
    Lieber = cher
    armselig = pathétique
    mir = moi

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Lucas.
La conversation prenait la tournure d’un duel entre deux dominants. Chacun cherchait à planter ses griffes dans l’autre, à le maîtriser, à l’amener là où il le désirait. Visiblement, alors qu’il servait feu l’époux de son interlocutrice, le galant n’avait pas aperçu toutes les facettes de la comtesse, et cela ne se limitait pas simplement à ce qui se cachait sous les différentes couches d’étoffe. La rhénane avait de la répartie, n’aimait pas qu’on lui résiste. Elle avait dû détester l’ordre donné à son insu au cocher de mettre le carrosse en branle. Arriveraient-ils à un compromis? Un accord? Quand deux fortes personnalités s’affrontent, il fallait s’attendre à ce qu’il y ait quelques coincements d’engrenages. Toute la question était de savoir lequel ici, accepterait d’y verser quelques gouttes d’huile salvatrice.

Alors qu’il servait le comte, Lucas s’était toujours demandé si son épouse connaissait les relations extra-conjugales de son époux. Il faut dire que l’homme n’était pas de la plus grande discrétion, ni celles qui subissaient ses assauts répétés d’ailleurs. Qu’ils soient de plaisir, de douleur ou de crainte, leur résonance au travers des couloirs du château n’avaient pu qu’aboutir aux oreilles de la comtesse. L’origine de tels cris, ni ceux qui avaient l’outrecuidance de les provoquer ne faisaient aucun doute. Certes, le comte prenait au moins la peine d’entamer ses parties de jambes en l’air lorsque la comtesse s’absentait mais à sa place, le Maïtre aurait pris plus de précautions…sauf si bien sur ce message était directement destiné à son épouse.

Un fief en Rhénanie plutôt qu’en France? Que lui importait du moment où il pouvait user de la particule en toute légalité. Lucas n’avait jamais quitté le royaume de France, ni même sa capitale. C’était un parisien, un homme qui aimait sa ville et qui ne voyait aucun d’intérêt ailleurs. Paris lui apportait tout ce dont il avait besoin dans sa vie personnelle et professionnelle. Paris était le phare de l’occident, la référence en matière de bon gout, le lieu où rien ne manquait. Baron en Rhénanie, il déléguerait les pouvoirs de gestion de ses terres à un tiers de confiance qu’il choisirait avec une attention particulière. Il vivrait de ses rentes, investirait à bon escient pour augmenter son pécule. Il aurait les plus jolies femmes de la Capitale dans son lit, le soir comme le matin et il intriguerait pour faire fructifier son titre de baron. Alors en Rhénanie ou ailleurs, cela n’avait strictement aucune importance pour commencer.

La carrosse de la Comtesse était confortable, les sièges suffisamment rembourrés pour absorber une partie du choc des roues en bois ferrées sur le pavé parisien. Un coude appuyé sur sa cuisse, la paume des doigts tâtant la douceur du velours des rideaux, la posture de l’ex-avocat dénotait de sa décontraction et de son ouverture d’esprit. Il était en position de force et il le savait. La comtesse avait un besoin impératif de cette liste. Pour quoi faire? Différentes pistes de réponse avaient été forgées par l’esprit retors du Dentraigues, des pistes plus ou moins légales, plus ou moins morales, deux aspects que le Maître façonnait souvent à son image, à ses besoins.

Les réactions de la Comtesse étaient un pur bonheur pour le galant. Gourmand? Il l’était. C’eut été une véritable insulte pour elle si ses demandes avaient été trop peu couteuses. Le bon sens paysan prétend que l’on n’attrapait pas les mouches avec du vinaigre, celui de Lucas prétendait qu’on attrapait le Dentraigues avec des femmes, des écus et l’attrait du pouvoir. Un harmonieux mélange des trois en même temps était encore plus efficace. Celui-ci avait pour une fois gardé le silence. Ses lèvres ne se dessoudèrent pas. A peine marquaient-elles une approbation de circonstance lorsque ses brumeux se posèrent sur le décolleté de la Comtesse. L’huile dans l’engrenage ne viendrait sans doute pas de la deuxième partie de son salaire. Pas plus que quelques adaptations mineures. Lorsque Lucas Dentraigues avait jeté son dévolu sur quelque chose ou quelqu’un, il était difficile de lui faire changer d’avis.


- Convoler en noces? Avec une veuve? Seuls les chiens fous se jettent ainsi dans la gueule de la louve Comtesse. Me considérez-vous aussi niais? Je désire vivre encore longtemps. Oui, vous avez raison: je vous veux vous. Votre corps. Dans un écrin de tulle et de taffetas, un écrin que je ferais tomber à ma guise. Du plaisir. Voilà mon prix. Mon offre est équitable Comtesse: plus vous payez de votre personne, plus vous obtenez. C’est aussi simple que cela.

Les traits de son visage exprimaient sa satisfaction. Elle l’avait frustré de ses envies pendant toutes ces années. Aujourd’hui, il disposait des cartes pour effacer ce rare échec auprès de la gente féminine. Son regard se releva pour effleurer les lèvres comtales. Le sourcil gauche du galant s’arqua de satisfaction, les lèvres du Dentraigues s’étirèrent juste ce qu’il fallait pour savourer pleinement l’instant présent. Le choix était entre ses mains cependant : céder et obtenir satisfaction ou rester sur sa faim.

- Un contrat? Ma parole ne vous suffit donc pas? Quel type de contrat voulez-vous que je vous offre? Deux trois lignes griffonnées sur un vélin ou le détails des pratiques et autres caresses auxquelles il faudra vous plier?
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Comtesse_de_remscheid
    Impudente arrogance...
    Avec une lenteur exacerbée par le chaos de la route qui lui était déplaisant, le dos rhénan retrouva le confort du moelleux des banquettes du fiacre, sans un mot, sans une réaction à la tirade de l'avocat.
    L'opalescence du regard comtal jaugea faussement le blond vaniteux dans toute sa splendeur, assuré de sa supériorité, mais il était des éléments manquants à l'homme de loi qui pourrait fortement lui porter préjudice tôt ou... tard.

      Votre parole...


    Visage changeant d'expression, rictus étrange faisant son apparition sur les traits rhénans de la comtesse.

      Mein Lieber.(*)... J'y accorde une pointe infime d'intérêt parce que vous faites preuve d'une perfidie divertissante pour arriver à vos fins.


    Il ne le prendrait surement pas comme tel mais ce qui venait de sortir des lèvres de Loreleï était autant une pique acerbe qu'un compliment, si ténu soit-il, chose relativement rare chez elle.

      Master(*) Dentraigues...
      Si vous voulez mon corps dans votre couche, deux trois lignes griffonnées ne suffiront pas...
      Mettez y les formes


    Droit au but, l'idée la répugnait sur le principe de devoir céder à la concupiscence du Dentraignes, à ses désirs de "grandeur", mais en pratique se faire trousser par un courtisan ne lui couterait que quelques minutes de son temps, tout au plus quelques heures si le Dentraigue était aussi bon amant qu'il voulait le prétendre.
    Offrir son corps pour obtenir ce qu'elle souhaitait ne serait pas une première, il était à souhaiter pour le galant qu'il ne lui arriverait pas le même sort funeste qu'aux autres.

      Lieber(*) Lucas.
      Sachez que me faire "plier" à un prix fort couteux que je ne vous souhaite nullement de devoir payer... Réfléchissez donc bien en rédigeant avec soin le contrat que vous me proposerez.


    Lentement la dextre ornée d'un artefact singulier s'éleva dans les airs pour s'offrir devant l'avocat, galant quoi qu'il soit.

      Avons-nous le début d'un accord Mein Lieber(*) ?



    (*)
    Master = maitre
    mein Lieber = mon cher
    Lieber = cher

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Lucas.

Elle était lucide. Elle le connaissait de part les visites et les services qu’il avait rendus à feu son mari ou alors elle s’était renseignée sur lui. Elle savait à quoi s’en tenir et c’était mieux ainsi. La relation ne serait que plus saine. Plus sincère? Peut-être pas non. Même s’ils ne se dévoraient pas entr’eux, les loups ne partageaient pas leur territoire de chasse avec une autre meute.


- Vous avez raison: ma parole n’est pas un gage de confiance. Ceux qui s’y sont accrochés croupissent en enfer, dans une geôle ou dans la fange de notre société. Par contre, vous pouvez avoir confiance dans sa capacité à vous faire atteindre l’extase comtesse.

Oui. Même elle il pensait être capable de la mener jusque là. « Mettez-y les formes ». L’utilisation de l’impératif irrita quelque peu le galant. Plutôt que de lui donner un conseil ou de lui faire une requête, elle lui donnait un ordre, une injonction. Le duel de dominants se poursuivait et Lucas se demandait ce que cela donnerait quand il l’aurait dans sa couche… ou ailleurs. Quand aux formes, ce mot attirait toujours son regard vers les arrondis de son interlocutrice. Arrondis…péchait-elle par excès ou par défaut? L’esthète qu’il était nécessitait que le sujet se plie à différentes investigations permettant d’évaluer correctement les moultes critères requis avant de se prononcer. Ce qu’il voyait en face de lui en cet instant l’invitait à poursuivre son examen.

- Soit. Contrat vous aurez et en guise de ma bonne foi, vous aurez un échantillon des données que je possède et je vous laisserai le loisir de vérifier la qualité du service que je vous rends. Vous aurez le temps qu’il faudra pour vous en assurer. En revanche…

Bah quoi? Pensiez-vous vraiment que Lucas Dentraigues allait faire une fleur à son interlocuteur? Aussi séduisante soit-elle? L’homme ne donnait jamais rien contre rien, y compris aux femmes.

- Je requiers de votre part le même genre de garanties quand à votre engagement, autant celui qui concerne le titre que vous me devez que celui qui est de nature plus charnelle.

Ses menaces? Son mari la faisait-elle « plier » lui aussi? Lucas se demanda un instant si c’était plutôt vers l’avant ou vers l’arrière et il fit disparaître presque aussitôt cette goujaterie dont le divertissement n’était qu’éphémère et indigne de lui. Ainsi donc la Remscheid serait une amante religieuse? De celle qui prend après s’être donnée? Peut-être lui faudrait-il prendre des précautions élémentaires et entraver ses poignets et ses chevilles? Hum…Peut-être oui. L’ex-avocat passa la main par la fenêtre du fiacre et claqua des doigts. Le bruit des sabots et des roues sur le pavé parisien avait sans doute couvert le son de sa requête. Aussi, toqua t-il sur la paroi derrière lui et précisa t-il au travers de l’ouverture de la porte:

- Je suis arrivé. Déposez-moi ici.

Lorsque le fiacre fut arrêté, il se pencha vers la comtesse, posa senestre sur son genou et de la dextre, il s’empara de sa main pour lui délivrer un baise-main d’au-revoir. Puis, silencieusement, il ouvrit la porte et alors qu’il se trouvait encore sur le marchepied, il se tourna vers son hôte et lui dit:

- Le début d’un accord nous avons Comtesse. Donnons-nous rendez-vous dans une semaine pour l’échange des gages et la signature du contrat. Je vous laisse le choix dans la date… et dans le lieux du rendez-vous. Étonnez-moi!

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Comtesse_de_remscheid
    Etonnez moi...
    S'il n'avait été question de son besoin de ce pédant personnage, probable que la surprise qui aurait fait taire la vanité de l'homme de loi eut-été du domaine d'un regard brumeux éteint de sa lueur vitale, mais...

      Il sera fait Mein Lieber...


    Pour rappel à l'ordre de la perte du sens des convenances du futur noble rhénan, la comtesse leva le bras pour frapper deux coups secs sur le bois du fiacre, l'ébauche d'un rictus se dessinant sur l'ourlet de ses lèvres à entendre le bruit sourd d'un avocat chutant du marche pied au démarrage de l'attelage.
    Qu'il eut été plaisant de voir la superbe de Lucas Dentraigues finissant le nez dans la neige boueuse des rues parisiennes, rien ne pouvait l'attester, mais pour Loreleï il en fut ainsi, le galant trop sur de lui n'était plus qu'un petit avocat sans foi ni loi, aux guenilles salies de l'avoir provoquée et lui avoir tenu tête.


Paris, Fin Janvier 1466,




    Paris, le 29e jour de janvier de l'an 1466

    De nous, Comtesse de Remscheid,
    A vous, Master Lucas Dentraigues,

    Mes affaires en Rhénanie réclament mon attention, je dois quitter prestement la ville de Paris.
    N'ayez crainte je suis femme de parole, notre entrevue pour sceller les termes de notre accord ne s'en trouve que remis.
    Je profiterais de mon voyage pour m'occuper de votre futur fief rhénan.

    Vous serez tenu informée de mon retour en royaume de France dès que celui-ci sera programmé.
    J'attends dès lors votre proposition de contrat au domaine de Remscheid afin de l'étudier comme il se doit avant de vous revoir.

    Que le Très-haut vous apporte prospérité.




Paris, Fin Septembre 1466,

    L'hotel particulier parisien situé non loin de l'auberge du chat noir avait vu les volets de bois et les fenêtres ouverts ces derniers jours, pour qui avait l'oeil et savait qui vivait là, cela ne pouvait signifier qu'une chose : sous peu la comtesse serait de retour
.



Mille excuses pour le délai de réponse, d'où ce post de recadrage temporel, histoire de recoller un peu à maintenant.

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Lucas.

~~ Paris, Antre d’Aphrodite, début Février 1466 ~~


A Paris tout augmentait: le prix du pain, celui du lait, du poisson, des charpentiers, des huissiers, des maisons de plaisir, de l’Aphrodite. Lucas Dentraigues était de ce genre d’homme pour qui l’élégance était un art de vivre. Il aimait à porter des étoffes luxueuses, de la dentelle réputée. Comme pour ses parfums, il s’approvisionnait toujours chez les fournisseurs les plus réputés. Comble de malheur pour lui, il préférait la chaleur des couleurs claires à la rigueur des tons sombres. Une partie de sa fortune passait de sa bourse aux mains des blanchisseuses. S’il acceptait de payer le prix fort, les résultats devaient, en revanche, être impeccables. Cela faisait déjà deux fois qu’il avait renvoyé ce mantel écru, deux fois qu’il restait des cernes sombres sur les pans de ce dernier. Cela serait porté sur la facture de l’impudente à n’en point douter, aussi jolie soit-elle. Oui, à Paris, tout augmentait, même le prix des blanchisseries.

Alors qu’il sonnait Justine, la porte de sa chambre s’ouvrit, laissant le passage à la chambrière qui avança tête basse dans la pièce. Lorsque Lucas Dentraigues était insatisfait, sa mauvaise humeur pouvait se répandre à n’importe quoi, n’importe qui. N’ayant pas l’intention de devenir une servante écarlate, elle se contenta de tendre la main vers la galant, tenant missive entre ses doigts.


- Déjà? J’aime le service rapide mais il y a une différence entre vitesse et précipitation Justine. Étiez-vous encore entrain d’écouter à ma porte? Hum?

Le regard dirigé vers le sol, la jeune fille répondit par la négative d’un simple hochement de tête. Lucas toisa la jolie rousse qui se tenait au centre de la pièce: un corps bien fait qui chaque jour s’affinait et prenait de jolies formes, un visage qui peu à peu perdait ses traits enfantins pour converger vers ceux d’une séduisante jeune femme. Ce fut seulement après cette brève inspection que le galant découvrit la main tendue et le message qui manifestement lui était adressé. L’homme haussa un sourcil, n’attendant pas spécialement de correspondance, ses dernières envolées épistolaires ayant convaincu sa correspondante de venir le visiter en personne à l’Aphrodite. Lucas se leva, quitta son bureau de travail et s’approcha de la servante pour prendre possession de la lettre qu’elle lui tendait. Justine garda alors le regard baissé, évitant sans doute possible les brumeux du Dentraigues.

- Vous êtes bien silencieuse ce jour Justine. Êtes-vous malade? Ou le duc vous a t-il fait mandé à son service de chambre? Il parait que ces derniers temps, ses nuits sont plus….animées. Est-ce vrai?

La rousse rougit des insinuations de l’ex-avocat mais ne broncha pas. Sans doute ne voulait-elle pas se mettre son maître à dos, ni déplaire au Maître. Dans certains cas, le silence est d’or il parait. Lucas nota la non-réponse de la servante et déroula le message, prenant connaissance de nouvelles qu’il n’attendait plus. Enfin, disons qu’il les avait espéré plus rapides.

- Tiens, tiens, tiens! La Comtesse de Remscheid! J’étais sur le point de penser qu’elle m’avait oublié.

Ce qui, pour l’orgueilleux et le pédant qu’il était, était assimilé à un crime de lèse-majesté.

- Oh! Et avant que je ne l’oublie: Vous direz à la blanchisseuse que cela fait déjà deux fois que je lui renvoie ce mantel, que si je reçois encore une fois un vêtement soit-disant nettoyé dans un tel état, ce sera elle que je renverrais. Est-ce clair?

Justine hocha une nouvelle fois silencieusement la tête et alla décrocher le mantel désigné par Mon sieur Lucas Dentraigues pour le renvoyer une énième fois au nettoyage. Elle se demandait si la blanchisseuse trouvait le Maître aussi insupportable qu’elle ou si elle était la seule ici à avoir certaines difficultés de compréhension avec lui. Elle n’était cependant pas en position de force face à Lucas et elle le savait.

Alors que le Maître prenait connaissances de la missive de la comtesse de Remscheid, son visage s’éclaira d’une satisfaction non feinte. Les nouvelles étaient bonnes, très bonnes même. Sa part du marché serait vite réalisée et le contrat qui le lierait à la comtesse serait ficelé comme il le fallait. Après, peu lui importait en définitive de ce qu’elle ferait des noms qu’il lui donnerait. Après tout, Lucas Dentraigues n’était pas l’ange protecteur de tout le royaume.


- Justine? Ces caisses que je vous ai demandées de dépoussiérer, vous en êtes vous occupée?

- Eh bien, c’est justement ce dont je voulais vous parler mon sieur. dit une chambrière sur un ton penaud, de pénitence. Lucas fronça et les sourcils et darda son regard suspicieux sur une Justine mal à l’aise.

C’est que…Comment vous dire… Eh bien…Je…
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