Eliette.masurier
- Eliette est tout, tout sauf rassurée tandis quelle savance entre ce qui devait être autrefois des tours. Le crépuscule dépose un éclat presque orangé sur les deux ou trois mèches rousses qui séchappent de sa capuche alors quelle marche la tête baissée, sa cape resserrée autour de son petit corps, rasant les murs. Régulièrement, alors que ses yeux surveillent ce quil se passe à sa droite, à sa gauche et face à elle, elle aperçoit une main se glisser près dune bourse accrochée à une ceinture, et quelques secondes plus tard, le voleur disparaît dans la foule sans que sa victime nait rien remarqué. Elle fait de son mieux pour ne pas presser le pas plus que nécessaire, même si à lheure actuelle, courir lui semblerait presque vital, mais de toute manière, même si elle sprintait, nimporte qui pourrait la rattraper en à peine quelques pas. Alors, elle reste silencieuse, la tête baissée, sefforce de ne pas se retourner pour vérifier derrière elle, et croise les doigts pour ne pas se perdre. Il ny a rien de mieux pour se faire surprendre que davoir lair de sattendre à être attaquée, et même si elle nest absolument pas du genre à se balader dans des lieux autant malfamés, elle connait tout de même certaines règles de base, quelle respecte à la lettre. Fort heureusement, sa petite taille semble pour une fois être une bonne chose puisque les divers criminels à la recherche dune victime regardent généralement juste au-dessus delle, en son fort intérieur elle en sourirait presque, dêtre à ce point invisible.
Pour loccasion, la jeune femme ne sest pas apprêtée plus que dhabitude, il faut dire quelle a à peine quelques sous en poche, et avait simplement enfilé une chemise blanche et noué un foulard noir autour de sa taille, vêtue ainsi, nimporte qui pourrait croire quelle portait une robe. Être petite offrait parfois loccasion de faire quelques économies, même si elle était obligée dutiliser des chemises masculines car les vêtements féminins étaient la plupart du temps trop étroit pour son corps plantureux.
Son corps. Voilà bien la raison de sa venue inopinée en ces lieux qui la faisaient tant frissonner. Eliette nest pas bien grande, du haut de ses un mètre vingt-huit, mais elle reste bien en chair, avec ses quarante-six kilogrammes. Depuis toute petite, enfin, manière de parler, depuis son enfance dirons-nous plutôt, elle rêvait de perdre du poids, car même si son corps était extrêmement bien proportionné, elle avait tout de même quelques kilos en trop, et ses diverses récentes rencontres avec des malfrats avaient finit par la convaincre quelle devait réagir. Et quoi de mieux, pour se protéger et perdre du poids, quapprendre le maniement des armes ? Car cela impliquait de lentraînement, et Eliette espérait de tout cur quainsi elle se découvrirait un nouveau corps. Ce nétait pas gagné, vu limage totalement biaisée et fausse quelle avait delle-même.
Après sêtre perdue trois ou quatre fois, elle finit par apercevoir, grâce à léclat de la lune montante, le bâtiment quelle cherchait. Le Comptoir. Elle grimaça en arrivant devant la porte. Ce nallait pas être une partie de plaisir. En effet, elle passa plusieurs minutes devant la porte, à tenter de louvrir, et malgré son manque de force, elle finit avec soulagement par y parvenir. Levant les yeux, elle vit que plusieurs personnes attendaient devant un comptoir, et elle savança discrètement. Ils semblaient tous tant occupé, il y avait peu de chance que quiconque lait remarquée, et elle soupira, en espérant de tout cur quelle naurait pas à sauter sur place en agitant les bras pour attirer lattention, ce qui sétait déjà produit, et cest suffisamment honteux pour quelle nait aucune envie de réitérer lexpérience. Dune main, elle abaissa sa capuche, révélant son visage, ses yeux vert deau et ses longues mèches rousses nouées en une natte qui pendouillait sur son épaule, et prit le temps dobserver un peu plus les personnes en présence.
Elle ne sattarda guère sur ceux qui étaient certainement les clients, mais son petit cur rata un battement lorsquelle découvrit les deux hommes qui se tenaient derrière le comptoir. Elle avait rarement eu loccasion de rencontrer deux êtres si beau ? Elle secoua la tête pour se remettre de lordre dans les idées. Si semblables, semblables, pas beaux, que dis-tu là Eliette ? Elle ignorait totalement ce sentiment quelle éprouvait soudainement, mais elle nappréciait guère, ses joues devenaient déjà rouges et elle sentait quelle respirait plus vite. Pense au Très Haut, allez, le Très Haut Cette litanie quelle se répétait était la seule qui parvenait à la calmer, et elle se dit, une fois de plus, quelle devait absolument discuter de toutes ces choses nouvelles quelle ressentait avec son confesseur, car une petite voix lui murmurait quil ny avait rien de bien dans ces sentiments. Fort heureusement, dès quelle parvint à détourner le regard de ce qui était, à son avis, deux splendeurs, elle aperçu celle quelle était venue rencontrer.
Dans ce contexte si différent de leur première rencontre, elle se demanda un instant si la femme devant elle était la même que dans la ruelle. Celle quelle avait prit pour un fantôme ou une morte-vivante semblait, pour lheure, très en vie, et sa tenue était bien plus Était-ce réellement la même femme ? Eliette fronça les sourcils et se retira un peu en arrière, attendant que les clientes présentes terminent ce pour quoi elles étaient venues car elle naimait pas attirer lattention.
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