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[RP] Par flots et parchemins

Arystote
Trente septième jour de voyage

Arystote avait ouvert les yeux depuis près d'une heure quand il se leva enfin. Il était resté couché mais éveillé sans pouvoir sortir de son couchage l'esprit déjà trop occupé, dès les premières seconde, à réfléchir sur les évènements de la veille. Il était convaincu d'être mort sans toutefois s'en souvenir. On ne sort pas indemne d'une chute de plusieurs pieds... Pour autant il ne pouvait nier être en vie. Enfin il lui semblait... Était-il vivant ou mort ? La mort expliquerait qu'il se sente si apaisé. Peut-on être soucieux dans la mort ? Pourtant il sentait aussi une douleur lancinante se propageait dans chacun de ses muscles. Peut-on souffrir dans la mort ? Il lui semblait que non. Il en conclue donc qu'il était en vie.


- Je souffre donc je suis !, se dit-il avant d'être de nouveau assailli d'un doute.

S'il était en vie alors d'où venait cette apaisement ? Car Arystote se sentait heureux. Il connaissait la réponse bien entendu et elle avait un doux visage. Son premier sourire de la journée s'imposa avec le souvenir d'Eavan contre lui. Et son coeur se mit à battre un peu plus vite dans sa poitrine tel un jeune tambour avant la bataille.

Il finit par se lever lorsque ses pensées furent chasser par les gémissements de Platon qui n'aspirait qu'à sortir de la tente. Aussi, le Comte vint détacher les noeuds de l'entrée et, accompagnant son chien, il vint profiter de l'air chaud qui les entourait. Sa promenade matinale fut accompagner de plusieurs grimaces de douleurs, il avait vraiment mal dans tout son corps.

Il mangea peu et dormit beaucoup ce jour-là. Il avait évalué qu'il leur faudrait encore une journée pour se remettre et repartir mais en croisant Guilhem qui visiblement avait choisi ce jour pour sauter du promontoire, il comprit qu'il leur en faudrait trois. Il partit se coucher assez tôt ce soir-là ne croisant Eavan que peu Eavan qui semblait décider à reprendre ses échanges épistolaire. Il faudrait qu'il écrive lui aussi. Depuis qu'il avait quitté Provence seul Michel et le Maître d'Armes avaient reçu une missive de lui et seulement parce que ça lui permettait de s'éloigner encore plus des affaires de la Provence.


Trente huitième jour de voyage

Dès qu'il s'était levé, il avait senti que les mouvements de son corps étaient moins douloureux. Il ressentait la douleur de celui qui a fait trop d'efforts physique mais rien qui ne ressemblait aux douleurs que l'on doit éprouver lorsqu'on a échappé à la mort. Contrairement à Eavan, il n'y vit pas la grâce du Très Haut mais une résistance de lui-même. Son voyage lui avait permis de s'éloigner du péché de colère mais il lui restait encore des efforts à faire du côté de l'orgueil.

Il vint rejoindre Guilhem dans sa tente une partie de la journée. Celui devait être dans le même état que lui la veille et Arystote lui proposa une partie d'échec pour faire passer le temps. Il gagna une partie, Guilhem deux. Le Comte de Cassis demanda à prendre sa revanche plus tard durant leur voyage.

Le soir venu, il retrouva Eavan au feu de camp. Ils discutèrent longuement tous les deux ce qui permit de rassurer le Champlecy qui avait craint que le changement dans la nature de leur relation n'impacte ce qu'il avait le plus chérit dans leur amitié : cette façon qu'ils avaient de pouvoir discuter pendant des heures de tout et de rien sans jamais s'ennuyer.

Il apprit en passant que son chien n'était pas fou contrairement à ce qu'il commençait à croire. Ainsi donc Platon en avait après un chat tout juste nommé Guizè.


Trente neuvième jour de voyage

Ils semblaient tous rétablis de leurs sauts respectifs et Arystote informa le guide de leur départ imminent. Il en profita aussi pour écrire au capitaine du Tamerlan resté à quai pour lui indiquer leur date approximative d’embarquement.

Ayant cherché Eavan sans la trouver il vint s'asseoir près du Comte de Lantosque et tous deux évoquèrent le baptême à venir de Camille, la fille de Franciszek. Arystote devant devenir son parrain ils souhaitaient profiter de la cérémonie pour signer un traité d'alliance entre le Comté de Lantosque et celui de Cassis. Arystote ne souhaitait pas signer pour Carpentras car il avait toujours la ferme intention de se débarrasser de son vicomté qu'il n'arrivait pas à gérer.

Certes sa suzeraine ayant qualifié sa demande d'échange de "convenance personnelle" et ayant exigé qu'il soumette sa demande à l'ADN il lui fallait trouver autre chose. Il était hors de question qu'il se soumette à des conditions que ses pairs n'avaient pas eu lors de leurs propres demandes. Cela serait jouer le jeu de l'iniquité de la Marquise de Provence et il ne pouvait soutenir cette injustice.

Il avait bien une idée mais... qu'exigerait Hersende qui semblait le traiter différemment et bien plus injustement que ses autres vassaux ? Il avait bien le temps d'y réfléchir encore.

L'heure du départ arrivait et tous se réunissaient. Eavan était visiblement retournée au sommet du Sanctuaire voir le paysage une dernière fois. Il regretta de ne pas en avoir fait autant mais bénissait le ciel de ne pas avoir su qu'elle était là-haut. Sans quoi il aurait été persuadé qu'elle avait voulu sauter de nouveau et se serait précipité vers elle. Il sourit en s'imaginant arriver face à elle, pour rien, essoufflé et paniqué ; avant de se concentrer sur le dromadaire sur lequel il devait se hisser.

La tentative se solda par une réussite et, fier de lui, il toisa son cousin qui semblait avoir plus de peine et maugréait entre ses dents. Ce n'est qu'après que tous soient sur leurs montures et que les moqueries cessèrent qu'ils reprirent la route vers Alexandrie.

Le Champlecy regarda derrière lui une dernière fois. C'est ici que toute sa vie avait changé, il en était convaincu. Il ressenti un pincement dans son cœur. Certes il allait mieux, il allait même bien et pourtant il ne se sentait toujours pas près à retourner en Provence. C'était le premier jour de leur voyage retour et au fond de lui, il priait pour que celui-ci s'éternise.

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Eavan
Quarante-cinquième jour de voyage...

Après le rêve de la veille, Eavan fut anormalement sur ses gardes jusqu'à ce qu'à la mi journée, les portes d'Alexandrie apparaissent.
Et à nouveau, il fallut un petit instant pour absorber toute la beauté du lieu. Les épaules se relâchèrent et les rêves étranges s'estompèrent de l'esprit de la Gaelig.

Il fallait profiter de ces moments enchanteurs jusqu'au bout.

Fourbus de leur traversée du désert, au sens propre, ils rejoignirent l'auberge qu'ils connaissaient près de cette place du souk multicolore. Les dromadaires furent déchargés et cela les occupa un moment. Puis, soucieuse de tenir une promesse, Eavan s'éclipsa dans les ruelles alexandrines pour retrouver Mounia. Sa guide des premiers jours. La vicomtesse flâna un peu, ce qui n'était pas vraiment dans son caractère mais les splendeurs orientales avaient su adoucir sa rigueur. Le sable du désert, la polir quelque peu.

Elle retrouva avec une certaine émotion Mounia et échangea avec elle un peu. Elle lui offrit même un présent ramené du Sanctuaire pour la remercier de sa gentillesse. La vicomtesse eut aimé lui offrir quelque chose de chez elle, de Provence, mais finalement, elle voyageait léger. Enfin, elle était partie relativement légère. Elles restèrent à discuter un moment avant que la Gaelig ne lui demande un ultime service. Elle devait trouver quelque chose de très précis pour Diane. De la poudre de nacre. Mounia resta songeuse un instant avant de la guider au travers du dédale alexandrin jusqu'à une partie de la ville qu'Eavan était certaine de n'avoir pas encore parcourue. Le sentiment était au faste et la vicomtesse su bien vite reconnaitre que Mounia, elle même, n'était pas des plus à l'aise dans cet environnement.
Là, dans une petite boutique, elle déboursa une somme certaine et empocha un flacon de verre de ce qu'elle cherchait, habilement protégé et dissimulé par un étui de cuir. Les deux femmes regagnèrent ensuite le quartier de Mounia avec un certain soulagement.

La séparation fut pleine d'émotion.
Il était parfois étrange de constater à quel point il était facile de s'attacher à des gens que l'on ne connaissait que peu.

Il était pourtant temps de retourner à l'auberge. L'embarquement se fera aux premières lueurs du jour.
Une fois dans sur la terrasse donnant sur la ville, Eavan s'offrit quelques moments songeurs avant d'attraper son parchemin et sa plume... Il lui fallut relire le dernier courrier qu'elle avait reçu de la marseillaise mais sitôt fait, elle se plongea dans l'écriture.


Eavan a écrit:
Chère Kyra,

C'est à mon tour de mettre du temps à vous écrire. Je me pose quelques heures avant de reprendre la mer. Nous avons fait un aller retour jusqu'au sanctuaire taurin, plus au nord est. Le chemin, bien qu'enchanteur, fut éprouvant. Tantôt à devoir négocier notre route dans le désert et tantôt à devoir le faire dans les méandres d'un fleuve... Comme je le supposais, la vie est tout à fait abondante ici. Et tous les animaux ne sont pas paisibles et inoffensifs. Nous avons bien faillit perdre une monture dans les mâchoires d'un crocodile.

Malgré tout, cela valait la peine. C'est vraiment autre chose ici. Et c'était pour moi tout à fait nécessaire de me souvenir qu'il existe des choses hors de Provence et que, plus simplement, je peux exister hors de Provence.

Concernant vos lignes, Kyra... Je le sens votre regret mais ne doutez pas qu'un jour vous foulerez de votre propre pied ces lieux exotiques. Vous aussi un jour, vous verrez ces splendeurs. Vous êtes encore jeune. Je sais que parfois la vie donne le sentiment de n'être que portes fermées mais ayez confiance en moi lorsque je vous dis que ce n'est pas le cas.

Concernant votre confiance qui aurait été abusée, je n'insisterai pas par courrier pour que vous me le racontiez puisque vous me dites que vous le ferez de vive voix... Mais vous n'y couperez pas. Et surtout, si vous voulez vous confier Kyra, sachez que je suis capable d'écouter.
Il parait même que parfois je donne des conseils qui sont loin d'être idiots.

J'espère que vous allez bien.
Demain, nous devrions mettre à nouveau les voiles, en espérant avoir un retour aussi paisible que l'aller.

Je vous retourne vos souhaits. Prenez soin de vous, sachez que je pense à vous moi aussi.

Amitiés,

Eavan Gaelig


Il y avait une tendresse certaine dans la façon dont elle s'adressait à Kyra. La jeune fille l'intriguait. Mais le voyage était long et parfois quelques mois faisaient beaucoup pour éloigner les gens. Elle espérait pouvoir la retrouver à son retour. Echanger avec elle et l'entrainer, comme elle l'avait promis, aux armes.
Le regard balaya une dernière fois les lueurs de la ville avant que la vicomtesse n'aille s'étendre pour profiter d'une dernière nuit dans un lit avant de retrouver son hamac.

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Eavan
Quarante-sixième jour de voyage...

Le moment d'embarquer était venu. Le matin avait été comme assourdi pour Eavan. Le départ. Quitter Alexandrie. Refermer cette page. Rentrer chez elle. Repartir en mer. Se tourner vers d'autres projets... Ce voyage à Alexandrie avait tant envahit son esprit, son imaginaire et ses rêves... Elle ne se sentait pas vide mais était dans une sorte d'état abasourdi. C'était fait.
Fait.

Elle eut une pensée pour cette chaleur qu'elle ressentait dans sa poitrine. Des projets ? L'avenir ? Elle y était prête. Elle croyait au meilleur. C'était encore possible après tout. Oui, cette matinée fut bien étrange.
Il fallut compter aussi, empaqueter, s'assurer que tout soit en ordre, ne rien oublier.

L'embarquement fut long.
La vicomtesse reprit possession de sa cabine, veillant à nouveau à enfermer Gizeh -dont elle avait apprit à prononcer correctement le nom après discussion d'avec Mounia- afin de ne pas troubler outre mesure Platon. Les affaires furent ordonnées, le hamac suspendu... Et malgré l'épuisement, Eavan retourna sur le pont pour continuer à se remplir les yeux des lueurs d'Alexandrie.


Quarante-septième jour de voyage...

Le réveil fut un peu difficile. Il fallait se réhabituer au tangage, au hamac. Mais pourtant un point la chiffonna rapidement et ses doutes se confirmèrent lorsqu'elle arriva sur le pont après ses ablutions : ils n'avaient pas quitté le quai. La vicomtesse haussa les épaules. Le capitaine était loin d'être causant et sans doute n'était ce là qu'un délai dû à l'administration portuaire ou autre raison tout à fait sensée.

Préférant l'activité à l'humeur contrariée, Eavan prit le parti de s'entrainer un peu au cimeterre, prenant en main l'arme et apprenant sa dynamique. Dans l'après midi, elle opta pour une activité bien plus posée... la lecture de courriers.


Suzanne a écrit:

Eavan,

Tant de temps s"écoule et s'effiloche au fil des pas que l'on fait, qu'un soir on s'arrête un instant, on prend le temps de regarder autour de soi, et juste une seconde derrière... cette seconde qui nous fait réaliser qu'on a un peu oublié d'écrire aux gens de qualité. C'est précisément ce qui m'arrive ce soir, alors je vous transmets quelques lignes.
Allez-vous bien ? êtes vous rentrée ? encore en mer ?
J'ai quitté Marseille il y a presque trois semaines maintenant. Je l'ai quittée en pleine conscience et ne disant rien à quiconque. malgré la présence de son eau et de son vent balayant tout, j'accumulais un isolement et une souffrance insupportable.
Je vais aller retrouver mon premier né, le présenter à son frère, renouer avec mon beau frère, et voir ce que la vie me propose.

Voilà les nouvelles, écrites sur un coin de table, dans une taverne de Bergerac.

Portez vous bien, Eavan

Amitiés.
Suzanne


La capitaine était vagabonde.
Il faudrait qu'elle lui réponde.
Bergerac donc, bien loin de Provence, en effet.
Mais concernant la distance, qui était elle pour juger ?
Franchement.

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Arystote
Quarantième jour de voyage

Les quelques jours passés à se remettre de leurs chutes avaient eu deux effets : le premier étant de ne laisser aucun souvenir de sa mort au point qu'il commençait parfois à douter de toute résurrection ; le second avait été, au contraire, de raviver ses souvenirs de l'instant passé avec Eavan. Au début il avait surtout gardé le souvenir impérissable d'elle contre lui et du coucher de soleil mais peu à peu, c'était surtout ce frisson qui avait parcouru son échine lorsqu'elle avait murmuré quelques mots à son oreille. Le souvenir de son souffle chaud contre sa peau lui revenait à chaque instant tandis qu'ils avançaient dans le désert pour rejoindre Alexandrie.

Il avait l'impression que chacune de ses expressions traduisait cette pensée et pourtant nul ne semblait s'en rendre compte, en particulier Guilhem et Franciszek qui semblaient tous deux vivre une autre aventure que la leur. si le dépaysement était le même, il était fort probable que chacun le vive à sa manière.

Le soir venu, éreintés par la journée de voyage, ils rejoignirent leurs tentes. Arystote s'endormit avec le souvenir qu'il s'était remémoré toute la journée

Quarante-et-unième jour de voyage

On dit parfois que les jours se suivent et se ressemblent. Pour le Comte, c'était encore plus vrai lors d'une traversée du désert. Le sable s'étendant à perte de vue était le même et dessinait inexorablement des vagues dorée sur le sol. Parfois une volute s'échappait soulevée par un coup de vent avant de se disperser devant les yeux, les forçant à grogner et à cligner des yeux jusqu'à les inonder de larmes pour que chaque grain s'échappe.

Le vent était plus fort certes mais le Champlecy n'avait pas vu arriver la tempête pour autant et s'il n'avait eu de guide, il n'était pas certain qu'il aurait eu lui-même le réflexe d'établir un campement plus tôt qu'à l'accoutumée. Seul dans sa tente il percevait les rafales du vent à l'extérieur.

Arystote n'avait rien à faire, son jeu d'échec étant enfermé dans la malle restée dehors. Il n'avait écrit à personne encore. Il était conscient qu'il lui fallait prendre des nouvelles de Diane en particulier et il souhaitait en avoir mais il craignait aussi d'avoir des nouvelles de la Provence. Il ne s'en sentait toujours pas la force.

Il ne fit donc rien d'autre qu'attendre que la tempête se calme, avec Platon pour seule compagnie.

Quarante cinquième jour de voyage

Dès le lendemain de la tempête, ils avaient repris la route. Le sable avait quitté les airs et repris sa place sur le sol tant et si bien qu'il donnait l'impression de ne s'être jamais élevé. Et il resta le seul horizon plus d'une journée encore avant de percevoir de nouveau le fruit de l'irrigation des terres par le Nil.

Arystote semblait voir à mesure qu'ils se rapprochaient d'Alexandrie une certaine lueur de plaisir dans le regard de ses compagnons de voyage. Il s'imaginait que chacun d'eux, ravi de ce dépaysement affectionnait à présent de revoir la Provence. L’Égypte leur avait réservé de nombreux mystères mais il y en avait un qu'il n'arrivait pas à résoudre : Pourquoi Eavan semblait-elle sur ses gardes depuis un moment déjà ?

Il avait remarqué qu'elle scrutait plus souvent les alentours, que sa main n'était jamais trop loin de son arme et que son corps était plus sous tension que ses dernières semaines. Il avait alors, à son tour, observé autour d'eux le moindre signe de menace mais en vain. Ils avaient été seuls le reste du trajet ne croisant pas même la moindre caravane marchande. Il faudrait qu'il lui demande.

Ils arrivèrent aux portes d'Alexandrie alors que le soleil était à son zénith et s'empressèrent de décharger leurs montures pour rejoindre une auberge où ils pourraient se désaltérer.

Il n'eut pas le courage d'Eavan pour sortir dans les rues et préféra enchaîner quelques verres encore avant l'embarquement, conscient par expérience qu'alcool et navigation ne faisaient pas bon ménage chez lui. Il savait aussi qu'une fois à bord il lui faudrait penser à l'avenir et il voulait encore goûter ce présent insouciant que ce voyage lui offrait. Ils étaient parti au premier jour d'octobre, avaient foulés les terres égyptiennes les premières semaines de novembre, ils arriveraient sans doute à la mi-décembre... Ce qui lui laissait une vingtaine de jours pour prendre de nombreuses décisions.

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Eavan

Quarante-huitième jour de voyage...

Eavan s'éveilla et n'eut cette fois pas besoin de monter sur le pont pour le sentir : toujours à quai. Que se passait il donc ? Léger haussement d'épaules. L'accostage avait prit du temps, la manoeuvre inverse aussi ? Qui sait ? Et pourquoi pas ? Sans davantage ruminer sur la question, la vicomtesse se rafraîchit un peu et entreprit de rassembler ses notes et parchemins noircis pendant l'aller-retour au Sanctuaire.

Ici des tentatives de cartographie, là des cartes célestes, plus loin de longues descriptions accompagnées parfois de plus encore tentatives de croquis. Ca et là un dessin était meilleur que les autres, c'était souvent soit leur guide, soit un Alexandrin qui en était l'auteur. Quelques annotations concernant l'arabe, également. Quelques plantes qu'elle tentait de conserver. Le tout était à la fois un joyeux bordel et dans un ordre certain. La Gaelig n'était pas scientifique certes, mais curieuse oui. Emerveillée aussi. Tous ces parchemins le traduisait plutôt bien.
Le regard se posa sur son épée, dans son fourreau, posée sur un coffre et sur le cimeterre enroulé dans la soie qui trônait à ses côtés. Soudain lui vint l'idée de coucher quelques réflexions à propos de ces armes. Elle avait tout le retour pour les mettre à l'épreuve et se forger un avis des qualités et défauts de chacune. "De la différence entre l'épée classique dite batârde et le cimeterre oriental". Cela ferait le titre d'un intéressant ouvrage.

Un évènement vint assombrir un peu son humeur, en fin d'après midi.
Le regard posé sur la ville, rêveur, alla se diriger vers le large et le visage se lissa. Ce n'était pas une mais bien trois voiles qu'elle voyait. Se pourrait il que des pirates les attendent à la sortie du port ?



Quarante-neuvième jour de voyage...

Les voiles étaient toujours là.
Mieux !
Elles étaient quatre.
Bon sang !

La Gaelig resta accoudée au bastingage, songeuse et un peu inquiète de l'absence totale d'intervention de leur capitaine. C'est ainsi d'ailleurs que vint la trouver une mouette portant un pli qui sut attirer le regard et l'attention d'Eavan. Cela faisait un moment qu'elle n'avait plus eu droit à ce sceau là : Hersende de Brotel, Marquise de Provence.
Avignon brûlait il ?


Hersende a écrit:
Bonjour Eavan,

J'aurais besoin de votre avis sur une question qui nous oppose, la Comtesse d'une part et Mielle et moi d'autre part.
Elle est mariée et nous demande si son époux peut devenir Comte Illustre consort de Provence et porter les armes de Provence.

Personnellement, et Mielle aussi, je pense que non parce que ce titre n'est pas un titre personnel, mais simplement lié à une fonction qu'elle est seule à assurer.
Qu'en pensez-vous?

Cordialement
Hersende


Tiens donc.
Intéressant.
Surprenant.
Un brin divertissant.
Tous les anciens Maîtres d'armes de Provence avaient ils eu une copie ?

Eavan secoua la tête pour chasser le mauvais esprit et les sentiments apparentés. On la consultait. Elle était vassale, elle se devait de conseiller. Au moins sa suzeraine lui donnait elle encore quelque bénéfice ? Pourquoi pas. La Gaelig se pensait femme d'honneur et peu importait que sa suzeraine n'ait pas un seul instant cru à son verbe lorsqu'elle dénonçait des abus contre elle, elle lui devait le conseil et allait le lui donner.
Et puis... cela lui changerait les idées et serait plus productif que de regarder les bateaux s'accumuler à l'horizon...

Ecritoire, coffre, parchemin et en avant !


Eavan a écrit:
Votre Majesté,

Je suis honorée de savoir que mon avis importe à vous même ainsi qu'à notre Maitre d'Armes.
Je suis triste d'apprendre que cette dernière n'inspire pas suffisamment confiance à notre nouvelle Illustre en matière nobiliaire et héraldique. Héraut ou pas, les nobles doivent savoir respecter l'expertise de l'AHP et du Maitre d'Armes.

En l'occurence, c'est effectivement une fonction.
Je serais d'avis qu'il ne puisse arboré si le nom ni le blason du Comté de Provence en tant que consort. C'est à mon sens, la même question que les alleus vidamiques et d'ordres de chevalerie. Le fief est confié à titre personnel dans le cadre d'un rôle précis, déterminé. De la même manière, le titre n'est pas transmissible par héritage.

J'espère avoir répondu à votre interrogation.

Respectueusement,

Eavan Gaelig


Là, la vicomtesse marqua une pause.
Elle se relut.
Un peu piquant mais point trop acide : parfait.

Puis elle repensa à cette probabilité d'être encerclée par des pirates.
Combattre n'était pas ce qui l'inquiétait, mais mourir là eut été facheux, d'autant plus qu'elle savait son testament en cours de rédaction au fond de son coffre. Ne pas avoir ses affaires en ordre était dommage. Et serait dommageable... Un grognement et voilà qu'elle reprenait sa plume, avalant un peu de sa fierté pour admettre ses craintes.


Eavan a écrit:
PS: de vous à moi, Votre Majesté, si je faisais parvenir mon testament dans un prochain courrier à notre Maitre d'armes, pensez vous possible qu'il soit applicable sans délai ? Je sais que je demande là une exception qui est réservée aux départs en guerre ou en croisade, mais voyez vous, nous sommes au port d'Alexandrie et je vois déjà depuis 2 jours des voiles à l'horizon. Si j'étais pessimiste, je songerai à une meute de loups guettant leur proie et si jamais nous devions être coulés, j'aimerai savoir mes affaires en ordre.


Sobre ?
Efficace ?
Elle l'espérait.
Alea jacta est. Enfin... Aves jacta est. Parce que ce qui fut jeté fut la mouette porteuse du message retour. Le sort lui ? Aucune idée de comment le jeter.

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Arystote
Quarante sixième jour de voyage

Il avait attendu jusqu'à dernier moment de la journée pour finalement embarqué. Il n'y avait pas de locaux auxquels il se soit attaché et pourtant il sentait un véritablement pincement au cœur à l'idée d'entamer le voyage du retour.

Alors qu'il était sur le pont du bateau, sûr et certain de voir le phare pour la dernière fois, Arystote se promit de venir mourir ici s'il en avait la possibilité. On ne peut malheureusement choisir le lieu et le moment de sa mort que dans de rares cas. Il serait bien temps d'y repenser un jour mais pour le moment, il lui fallait surtout penser à vivre.

Et justement il avait faim et une vie bien menée commençait par une panse bien remplie selon le Champlecy. Aussi se rendit-il au mess. Il n'avait guère ni le temps ni l'envie de se préparer à manger lui-même en faisant cuire un poisson sur une broche.

Il y retrouva Guilhem qui, au détour de leur conversation, se dit surpris de ne pas avoir reçu d'invitation du capitaine du Tamerlan à rejoindre l'équipage.


- Cheu vous invite à lui écrire, répondit le Comte sans pour autant cessez de manger.

La nuit était tombée depuis un moment déjà lorsqu'il revint sur le pont. Ils n'avaient pas encore quitté quai et les étoiles accompagnaient autant la lune que le phare qui illuminait le port d'Alexandrie.

Alors sans vraiment s'expliquer pourquoi Arystote eut envie de prier. Non qu'il ne le fasse jamais mais en dehors des lieux saints il s'en passait aisément. Il connaissait le crédo par cœur mais avait beaucoup plus de mal à se souvenir du confiteor. Malgré son jeune âge, le Champlecy était de la vieille école. Il avait commencé à fréquenter les église du temps où le Crédo était la seule prière prononcée durant les messes. Et un beau jour, celui-ci s'était retrouvé précédé par le confiteor. Il n'avait jamais réussi à s'y faire et on ne comptait le nombre de fois où il s'était mis à entonner le Crédo quand tous récitaient religieusement le confiteor*.

Pourtant, en cet instant, il repensait à sa confession et aux paroles de Portalis : "Pardonnez-vous, pardonnez-leur". Il chercha de longs instants à se souvenir de la prière mais seules des bribes lui revinrent en mémoire.


- Je confesse au Très Haut et à vous aussi mes amis parce que... non, je confesse à tous les saints... rha non... rho et puis zut, finit-il par lâcher abandonnant l'idée que la prière lui revienne en mémoire. Et puisqu'il ne se souvenait pas des prières il parlerait comme ça lui venait.

- Bonsera Très Haut, je sais, je sais, je ne vous parle pas souvent. Il faut dire vous avez sans doute mieux à faire... alors que moi c'est tout le contraire, je n'ai rien de mieux à faire que de vous parler. Je crois que je suis mort mais je n'arrive pas très bien à m'en souvenir mais je crois qu'Eavan et moi sommes morts ensemble...

Et... enfin je me disais, si nous sommes morts ensemble ne pourrait-on pas vivre ensemble ? Je sais ça parait soudain mais en réalité n'est-ce pas même tardif ? Pourquoi n'y ai-je pas pensé plus tôt ? Bon d'un autre côté je ne suis pas sûr que ce soit un cadeau pour elle... Enfin je me connais, elle est droite, cherche sans arrêt à se rapprocher au maximum du chemin de la vertu alors que moi... Parait qu'on ne peut rien vous cacher alors vous êtes déjà au courant, je peux éprouver du plaisir à nuire à ceux que je n'aime pas, gratuitement jusque parce qu'il ou elle m'énerve et que je décide de taper juste où ça fait mal pour les punir...

Dans le fond on pourrait croire que je me prends pour vous à rendre un verdict tout en exécutant la sentance et en ayant eu le culot de déposer la plainte auprès de moi-même... Vous avez compris la métaphore j'imagine.

Du coup je n'avais rien de spécial à vous demander, j'avais juste besoin de dire tout ça à quelqu'un et c'est tombé sur vous. Les autres dorment déjà...
Et ce n'est pas parce que vous êtes mon plan B qu'il faut me punir hein, j'ai déjà donné je crois. Vous m'avez puni avant même que je n'ai l'âge de pécher je vous rappelle. Je crois en vous et je respecte votre travail, j'ai plus de mal avec ceux qui parlent en votre nom mais pas avec vous...

Ah si, finalement il y a peut-être une chose que j'aimerai vous demander. Si c'est possible, prenez soin de ma famille, de mes amis et d'Eavan. Moi je me débrouillerai promis ! Allez bonne soirée.


Satisfait bien que toujours pas éclairé quant à la décision à prendre, il reprit possession de son hamac, n'appréciant d'ailleurs que peu.


CONFITEOR
Je confesse à Dieu Tout-Puissant, à tous les saints et à vous aussi mes amis,
Parce que j'ai beaucoup péché en pensée, en parole et en action,
Je supplie tous les saints, et vous aussi, mes amis, de prier le Créateur pour moi
Que le Très Haut nous accorde le pardon, l'absolution et la rémission de tous nos péchés.

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Eavan

Cinquantième jour de voyage...

Toujours des voiles.
Toujours un quai.
Rien de neuf sous le soleil d'Alexandrie donc.

Eavan, après s'être préparée, alla sur le pont et tenta de se concentrer un peu sur son entrainement mais d'avoir toujours ces quelques voiles étrangères dans son champ de vision diminuait de beaucoup sa concentration. Le plaisir n'était pas au rendez vous. Aussi, elle acheva ses exercices plus tôt qu'elle ne l'aurait voulu et regagna sa cabine pour s'occuper un peu de Gizeh. Sans nul doute, passer et repasser ses doigts dans la féline fourrure accompagnée de ronronnements saurait détendre un peu ses nerfs.
Gagné !

Plus tard, en quête d'air frais, elle remonta sur le pont et là, un marin lui tendit quelques missives qu'elle avait reçue.
Un regard aux cachets, craignant un instant d'avoir encore à donner quelque avis concernant la noblesse ou bien pire : l'Etat Major. Mais non, ce fut un sourire qui fendit son visage. Candyce. Cela faisait un petit moment...
Installée au dehors, quelque part sur le pont mais point en son centre, histoire de ne gêner personne, la vicomtesse se plongea dans la lecture de ces lignes manuscrites qu'elle avait apprit à déguster.


Candyce a écrit:
Eavan,

Ce doit être très joli oui. Nouvelles couleurs, nouvelles personnes, nouvelle façon de vivre j'imagine bien.
Allez-vous revenir avec la belle tenue légère ?? J'adorerais en avoir une moi en tout cas ! Je ferais tomber le monde à mes pieds subtils et élégants !
En haut du phare, on doit être la reine du monde.


Léger sourire.
Qu'avaient ils donc tous avec cette tenue ?
Que de fantasmes.


Candyce a écrit:
Oh je me verrais bien empalée en haut du phare tiens ! Ouais... Mes démons de chair ont refait surface !


Rosir.
Non. Rougir.
Candyce n'y allait pas par quatre chemins et Eavan ne put pas retenir un regard vers ledit phare, souverain de ce port. Il était tout à fait raisonnable de penser que la vue était superbe et il semblait tout aussi raisonnable de croire que cela pouvait être un endroit intéressant pour...
Non !
Gaelig non, retourne à ta lettre.
Les yeux. Plus bas.
Plus bas.
La lettre Gaelig. La lettre.
Pas le phare.

Et de déglutir, les yeux désormais vissés à la lettre. Mais toujours pivoine.


Candyce a écrit:
Finalement, ce sera dur d'y résister, plus dur que ce que j'avais cru. Après... Tant que je ne m'en sens pas sale, tout va bien dirons-nous ! Nous verrons si je succombe ou non. Mais bon, j'étais en retraite. Cela n'a pas fait bon ménage vous savez. Enfermée à lire des vieux livres et à réfléchir sur mon existence moribonde.
Quel ennui ! Et ces femmes qui me regardent comme une folle. Y en avait une jeune qui me souriait toujours, j'aurai pu en faire ce que je voulais j'en suis certaine ! Mais je n'ai rien fait.


Le Très Haut et tout les Saints soient loués.
Il n'aurait plus manqué que ça.
Détourner une bonne soeur.

Cette fois, la tête d'Eavan était redevenue un peu plus froide. Pour peu qu'elle ne regarde pas le phare, évidemment. Les propos étaient sérieux.


Candyce a écrit:
Elle aurait quitté sa vie pieuse sinon. La pauvre, condamnée à se faire chier éternellement dans ce cloak aristotélicien !
J'en suis sortie et bien contente ! Ouais.
Savez-vous que je me suis mise au maniement de la lance ? J'aime beaucoup. J'ai fait des progrès et j'arrive à bien m'amuser avec. Je la fais tourner sans la faire tomber maintenant et tout ! J'apprends vite je dois dire...

Je suis plus à l'aise avec l'armure aussi. C'est une bonne chose. Nous pourrons aller guerroyer ensemble vous et moi ! Je porterai votre étendard et je l'enfoncerai dans la gorge du chef ennemi pour le faire tenir en l'air après l'avoir crucifié !
Ce serait joli ! Non ? Si. Je vous le dis.


Le changement de sujet fut aussi vif qu'apprécié.
La lance donc.
Candyce était d'humeur graphique.
Et massacrante aussi. La retraite ne devait vraiment pas lui avoir fait le moindre bien. Quand à son sens artistique, la vicomtesse préféra ne pas se prononcer. Elle choisit de retenir plutôt l'idée d'avoir une soeur d'armes à ses côtés et cela lui plaisait.


Candyce a écrit:
J'adore le miel ! Vous m'donnez des idées "luxurieuses" avec vos histoires de miel. Il est encore meilleur mélangé à certains fluides je trouve !


Le changement de sujet fut aussi vif que pivoine.
Mais au delà de ça, et d'un bref regard qui n'aida en rien vers le phare, Eavan perçut définitivement une frustration dans les lignes de celle qu'elle considérait comme une amie. Et plutôt proche de surcroît. Mais n'était ce finalement pas bon signe que cette frustration passe par cette lettre ? Après tout, elle l'écrivait elle même, elle n'avait pour l'instant pas cédé à la tentation...


Candyce a écrit:
Finalement je serais peut-être restée vivre là-bas si j'y étais allée. Et j'aurais sauté de la falaise à la fin pour terminer mon voyage dans cette vie !


Un léger froncement de sourcils. En finir ? Des idées suicidaires ?
Voilà qui inquiétait un peu la Gaelig.


Candyce a écrit:
J'en conclue que vous n'avez pas sauté. Tant mieux, je dois dire !
Vous avez ramené un chat alors. Appelez-le donc Mystère. Cela ira bien.

J'aime bien mon moulin en effet. J'ai abandonné toutes mes anciennes affaires mais j'en ai de nouvelles. Ce n'est pas grave, la vie d'avant, c'est la vie d'avant.
Quant au fouet... Cela en deviendrait vite sexuel avec moi hein. Et en général, c'est moi qui subit les coups de fouet avec plaisir.


L'amitié était le partage.
Le partage n'était pas forcément toujours des choses qu'on aurait voulu savoir ou connaitre de l'autre.
Mais cela restait du partage.
Cela restait de l'amitié.

Prendre du plaisir sous un fouet ?
Voilà quelque chose qu'Eavan se figurait difficilement.
Et un grognement.
Gaelig, il va vraiment falloir que tu apprenne à ne pas essayer.


Candyce a écrit:
Avec Adrian.... Attendre le mariage pour forniquer gaiement ! Que de tradition ! Je me demande bien comment vous avez pu faire. C'est sûrement pour cela qu'il vous a laissé en plus de l'éloignement !
Vous êtes trop stricte avec les convenances et cette Église de malheur ! Je n'ai aucune ou peu de convenances, même encore maintenant. Surtout après avoir passé des semaines dans ce couvent malfaisant.


Et soudain Asmodée prit congé et Leviathan vint frapper à la porte.
Eavan avait un peu palit, les doigts serraient un peu trop le parchemin.
Pourquoi Candyce sous entendait elle qu'Adrian l'avait laissé pour une histoire de respect du dogme ? C'était consenti aux dernières nouvelles. Le grognement qui s'échappa des lèvres de la vicomtesse fut bien plus menaçant que le précédent.


Candyce a écrit:
Pour le duel, il a finalement eu lieu. Wal a vaincu mais l'autre Castor aux dents cassées a dit qu'il était encore bourré de la veille et qu'il n'avait pas combattu sérieusement. Alors cela a foutu un drôle de coup au moral à votre nièce. Et apparemment les gens se fichent d'elle en taverne. Enfin, c'est ce qu'elle m'a dit.
Qu'on lui parle pas et qu'on la laisse dans son coin, alors elle voulait s'enfermer et ne plus sortir. Ne se consacrer qu'à ses études.

J'espère que ça va mieux, l'eau a dû couler depuis.
Et puis ils doivent avoir peur de votre réaction, voilà pourquoi je suis la seule à l'avoir dit.


Quoi !

L'exclamation était sortie toute seule.
Et un regard à la ronde un peu penaud se fit avant qu'elle ne relise ce passage.

Sa nièce avait provoqué un noble en duel.
Avait gagné.
Et Adrian s'était fichu d'elle ?
Mais...
Quelle brochettes d'imbéciles ! faillit elle s'exclamer plus fort encore.

La Gaelig secoua la tête, fataliste. Walriara avait un sale caractère à sa manière. Et Adrian, le benêt. Fallait il bien qu'il traite la nièce comme il traitait la tante, oubliant qu'avec la tante il avait des années de complicité en stock ?

Brochette.
D'imbéciles.

Et sa nièce allait l'entendre.
Enfin la lire.
Enfin les deux, l'un attendrait juste son retour.


Candyce a écrit:
J'ai besoin de m'amuser un peu et de rigoler, de profiter de ce qui me reste de vie.
Le tout est de le faire sans pour autant oublier une certaine droiture pour certaines choses de la vie ni certaines valeurs, mais... les deux sont compatibles dans une certaine mesure. Je n'ai pas envie de me retrouver non plus avec une vie ennuyeuse où je finirai par me laisser mourir par dépit de trop me faire chier. Cet enfermement m'a beaucoup appris. L'on peut parfaitement être noble tout en jouissant des plaisirs de la vie ma chère. Le tout est de trouver le juste milieu de tout cela.

Nous avons tous nos cicatrices de l'âme. Il nous faut faire avec. Mais elles ne doivent pas nous pourrir la vie.
Quant à la Noblesse, nous sommes deux utopiques sur le sujet mais rien ne me fera changer d'avis là-dessus. Mes ancêtres étaient de bons nobles pour ce qui est de ma branche stricte et je serai comme eux.

Je pense aussi, comme vous, que nous pouvons main dans la main nous aider à accomplir ce que nous voulons devenir. Je suis toujours en recherche de quelque chose... Je me demande bien si je vais pouvoir me fixer un beau jour sur ce que je désire être en réalité. Je sais déjà le fondement de ma voie d'aujourd'hui, ma nouvelle vie : le bon côté et l'aide à ceux qui le méritent. Je ne sais pas encore trop dans quelle voie précise ce sera fait mais voilà, j'ai déjà fait le plus gros du cheminement. C'est encourageant.

Ah la religion... L'Église ! Je préfère la laisser où elle est moi. Je vous aurais bien vu inquisitrice. Je me rappelle votre regard à mon endroit lorsque je déversais tout mon fiel sur l'Église et le Dogme aristotélicien. Vous étiez inquisitrice, prête à bondir ! J'ai adoré je dois avouer ! Vous êtes une lionne comme votre blason. Assise posément et prête à bondir quand il le faut et soudainement sans crier gare, tout en sachant vous contrôler quand il faut aussi.

Mais l'Église reste dans son coin à s'occuper de ses petits papiers. Elle n'intéresse personne et c'est amusant. C'est une belle entreprise d'hypocrisie. Tout le monde se fait baptiser uniquement pour se marier deux semaines avant d'annuler le mariage et autre ineptie... Rien n'a de valeur, tout le monde s'en fou. Je me demande d'ailleurs pourquoi les gens se marient... C'est juste par convention, pour dire qu'on est marié, car sans cela, l'amour n'est pas valide dans la tête des Hommes... Ridicule. Tous qu'un tas d'hypocrites. Les trois quarts des aristotéliciens n'en ont rien à foutre de tout cela. C'est ça le problème de l'Église.


Eavan lisait avec attention.
La sincérité et la franchise des mots de Candyce étaient un vrai luxe. Un trésor qu'elle savait apprécier. Et cela même quand ça la gênait. Cela même quand ça la contrariait. Cela même quand elle n'était point d'accord.

Les derniers mots sur l'Eglise la mirent mal à l'aise. Il y avait du vrai, malheureusement. Mais la Gaelig, elle, avait foy. Foy en Dieu certes. Mais aussi foy en une partie des gens d'Eglise pour représenter justement les valeurs aristotéliciennes et transmettre avec justesse le Dogme. Tous n'étaient pas de bons apôtres mais il y en avait.


Candyce a écrit:
Vous devez être sur le retour. J'espère que tout va bien et que vous attrapez de gros poissons.

Prenez soin de vous également Vicomtesse.

Amitiés,

C.


Eavan inspira longuement.
Quelle lettre !
Comme toujours.

La seconde missive attendit encore quelques minutes puis, finalement, elle la descella. Selena.



Sélena d'Alaric a écrit:
Bonjour mon amie

J'ai été ravie d'apprendre vers quel dépaysement vous étiez partie!

Effectivement cela doit vous changer de la Provence!
Pour notre part le changement est moindre et je dois avouer que la ville d'Hasting n'est guère vivante
Heureusement que j'ai pu contacter mon acheteur dès notre arrivée ...Nos transactions sont en bonne voie,j'espère que mon contact finira par trouver les fonds qui lui manquent encore pour clore notre affaire

J'ai fait une enquête au sujet du whisky
Donc...Après recherches il y en aurait à un prix raisonnable à Arden caple en Ecosse
Comme mon époux avait de toutes façons dans l'idée d'aller là haut....

Je viens d'écrire au maire afin de prévoir une commande
Il faudrait me dire si je dois vous en prendre

Voila...Ces transactions restent entre nous bien sûr!
Je vais aussi faire un mot à Quecus qui m'avait demander de le tenir au courant de mes trouvailles

J'espère que vous allez toujours aussi bien et toujours aussi émerveillée par vos découvertes

J'attends votre réponse pour la suite

Très amicalement
Selena d'Alaric


Malgré l'enthousiasme de savoir qu'elle pourrait commander du bon whisky, Eavan préféra reporter sa réponse au lendemain. Il lui fallait méditer un peu les écrits de Candyce.

_________________
Eavan

Cinquante-et-unième jour de voyage...

Eavan ouvrit les yeux. Un peu hagarde. Un peu essouflée aussi. Un peu moite de transpiration.
Que se passait il donc ?
Elle se redressa un peu et sentit aussitôt une chaleur dans son bas ventre et elle n'eut pas besoin de regarder pour savoir que Gizeh n'en était pas le responsable. Elle n'était pas souffrante non plus.
Non.

Fermant les yeux, elle revit le phare.
Et rouvrit les yeux aussi sec.
Un rêve de ce genre là ?
Là ? Maintenant ?
Un grognement et elle se laissa retomber dans son hamac.
Le grognement avec un parfum de frustration.

Elle fut tentée de se reposer encore un peu. Mais à chaque fois qu'elle fermait les yeux, une image du phare s'imposait. Aussi, bondit elle sur ses pieds et opta-t-elle pour la recherche d'un bon seau d'eau froide dans lequel elle pourrait mettre sa tête quelques instants. Histoire de...

Les premiers pas furent frottements qu'elle fit tout pour ne pas considérer comme agréable ou soulagement, et la discipline reprit le dessus. La quête du seau d'eau fut achevée par un triomphe à nul autre pareil et la Gaelig tâcha au mieux de s'occuper dans sa cabine, dans les cales, dans le mess : partout sauf en vue du phare.

Dans l'après midi, on vint frapper à sa porte et à nouveau on lui remit un parchemin arrivé par les airs. Eavan remercia le marin et entreprit de lire le courrier.


Sélena d'Alaric a écrit:
Bonsoir Eavan

J'ai déniché des distilleries correctes!!
On va devoir filer vers le nord jusqu'en Ecosse mais cela ravi mon époux...Donc!!!

Les deux contacts qui m'ont répondu ont un peu de réserves et la plus intéressante vend à 95 écus le tonnelet de whisky
Elle en a pas mal et nous attendra

Nous quitterons Hastings dimanche je pense ,mon acheteur d'huile devrait avoir terminé ses achats d'ici là

Voila ...Dites moi combien vous en voulez et je lui ferai garder une réserve

J'espère que tout va bien de votre côté

Très amicalement
Selena d'Alaric



La nouvelle était bonne et avec un sourire, la Gaelig ne perdit pas de temps.


Eavan a écrit:
Bonsoir,

Je réponds rapidement, une lettre plus construite suivra dans les prochains jours.
Pour le whisky, parfait. Prenez en 15 de ma part. Avez vous entendu parlé de whiskey aussi ?

Amitiés,

Eavan Gaelig


Scellé, envoyé.
Le regard suivit le volatile des yeux et tomba sur le phare. Un léger soupir s'échappa des lèvres de la Gaelig. Sérieusement, de tous les édifices ou lieux, pourquoi fallait il que Candyce ait spécifiquement parlé de celui qui ne pouvait être ignoré ? Pourquoi le subconscient de la Gaelig avait il si bien mordu à l'hameçon ?
Pourquoi ?

Secouer un peu la tête et retourner dans sa cabine.
Essayer de ne pas se laisser envahir par des relents de rêves.
Prier pour tenter d'y parvenir.
Echouer.

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Arystote
Quarante huitième jour de voyage

Voilà près de deux jours déjà qu'ils étaient à bord sans que le Tamerlan n'ait quitté le port d'Alexandrie. Apercevant quelques navires au loin, Arystote songea qu'Herrick préférait ne pas sortir du port au risque que l'un d'eux soit un navire pirate.

A quai il se disait que les risques devaient être réduits de subir une attaque et bien que ni connaissant rien en navigation, il se contenta de cette interprétation. Il faut dire que le Comte de Cassis, ne vivait pas trop mal cette absence de mouvement. Non qu'il craignait le mal de mer mais plutôt parce que cela retardait encore un peu leur retour en Provence.

Il ne reçut aucun courrier.
Il n'envoya aucune missive.
Certains jours se ressemblent quand même.

Les après-midi étant plus doux à bord du navire que sur terre, il put profiter du pont quelques heures, une chope de bière dans les mains. S'il n'avait la force d'écrire à quelqu'un ne pouvait-il pas écrire tout court ? Et c'est ce qu'il fit.


Citation:
Le phare

Il est là devant nous comme une évidence et il faut que nous soyons étrangers pour le regarder avec cette admiration sans nul autre pareil. Admirer l'ouvrage des centaines voire des milliers d'hommes qui ont contribué à le bâtir. Admirer sa blancheur dans laquelle les reflets du soleil miroitent. Admirer sa lueur au cœur de la nuit, qui vous guide dans l'obscurité.

Les égyptiens savourent-ils encore cette magie où l'ont-ils oubliés ? Le phare est-il pour eux ce qui est, a toujours été et qui fait tellement partie du paysage qu'on en oublie la magie ? Ont-ils parfois leurs yeux qui se posent sur les pierres et relancent dans leur âme toute la poésie de ce monstre rassurant qui les toise de toutes ses lumières ?


C'était court mais à la lecture de ce qu'il avait écrit, il ne put réprimer un sourire. Pourquoi fallait-il qu'il voit là un double sens ?

Quarante neuvième jour de voyage

Toujours plus de navires menaçants autour d'eux et rien de nouveau sous le soleil aurait pu résumer cette nouvelle journée à bord d'un navire toujours à quai.

Pour autant Arystote commençait à s'ennuyer ferme. Penser ne comblait pas une journée entière, faire les cent pas sur le pont non plus. D'autant que plus il pensait plus il était assailli de doutes. Alors il les coucha sur le papier un soir au mess car il fallait éclaircir ses idées et prendre des décisions une fois de retour en Provence.


Citation:
Certitudes :
- J'aime

Doutes :
- Est-ce que je la mérite vraiment ?
- Qu'est-ce que je vais faire de ma vie maintenant que l'idée de rejoindre la scène politique m'insupporte ?
- Est-ce que j'arriverai à pardonner ?
- Arriverai-je à me pardonner ?
- Dois-je prendre une femelle pour Platon ?


Il prit soin de faire une relecture. Il se trouvait stupide. Il froissa le parchemin avant de le jeter par-dessus son épaule.

Cinquantième jour de voyage

Pourquoi donc Guilhem et Francuski se montraient-ils si peu présent depuis qu'ils avaient embarqués de nouveau ? Outre ses doutes et son cœur qui battait la chamade chaque fois qu'il entreprenait une réflexion, outre ses raisonnements justement dénués de raison qui l'empêchaient de trouver une conclusion satisfaisante ; il sentait un besoin physiologique de croiser des êtes humains qui justement n'avaient aucun impact sur sa physiologie.

Parce que du souvenir d'un souffle à son oreille, son esprit avait voyagé jusqu'aux méandres de pensées qu'il ne se serait jamais autorisés jusque là et son manque d'expérience en la matière provoquait parfois un profond sentiment de panique quant à la question du corps, des corps même et des pratiques associées. Un sentiment de panique mais sans aucun désir de fuite bien au contraire.

Certes il avait déjà eu ce genre de pensées auparavant à la vue de la courbe des reins de telle ou telle mais chaque fois elles étaient ponctuelles et éphémères. Pas cette fois-ci. Et il était persuadé de ne pas être doué pour que cela ne se voit pas aussi les rares instants où il croisait la Gaelig sur le pont, il bénissait de la voir avec une plume dans les mains concentrée sur ses échanges épistolaires.

Le soir couché dans son hamac et alors qu'il peinait à retrouver le sommeil, allez savoir pourquoi, il finit par jurer entre ses dents.


- Bon sang, je le sais que j'aurai dû écrire moi aussi depuis notre départ, j'aurai de quoi me changer les idées.

Il se releva donc, prit une plume et un parchemin.

Citation:
De nous, Yueel-Arystote de Champlecy, Comte de Cassis,

Bonsera Michel,

Rassure-toi je suis encore en mer, si je puis dire ainsi, et tu as encore au moins une vingtaine de jours devant toi pour profiter de ton propre voyage.

Ce n'est pas non plus pour discuter affaire courantes que je t'envoie cette missive. En réalité, il se trouve que tout était merveilleux durant ce voyage mais je dois admettre être quelque peu frileux à l'idée d'un retour en Provence. Pour le moment j'ai de la chance, le capitaine reste à quai, sans qu'on ne sache trop pourquoi d'ailleurs mais bon... Enfin de la chance, de la chance, je pourrai dire ça si je profitais vraiment de ce temps pour prolonger le doux plaisir d'être là loin de tout. Au lieu de ça je n'arrête pas de penser à mon retour et je ne savoure plus le présent.

Parce que tout va bien, je crains que tout n'aille plus.

C'est fou ce que l'écrire remet les idées en place. Je me mets à ta place, celle de celui qui reçoit les mots et je me trouve idiot. A ta place je me dirai un truc du genre : "Ben profite alors !"

Je me sens déjà mieux. Merci à toi pour ton aide vraiment.
N'hésite pas à me répondre pour donner des nouvelles.

Ary


Il ne fallut pas très longtemps au Comte pour s'endormir avec la promesse de recommencer à vivre au présent.
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Eavan

Cinquante-deuxième jour de voyage...

Le réveil fut plus serein que celui de la veille. Mais un regard par l'écoutille suffit à mettre la Gaelig de mauvais poil. Toujours Alexandrie. Pas de mouvement. Pas de nouvelle. Pas d'information. Après ses rituels matinaux, la vicomtesse prit le temps de prendre connaissance de l'énorme rapport que lui faisait parvenir Felipe chaque semaine. Elle avait un peu de retard puisque lesdits rapports ne l'avaient pas suivis dans le désert et ainsi il lui fallait récupérer trois bonnes semaines d'un coup. Cela lui prit une bonne partie de la journée, mine de rien. Entre les informations sur ses fiefs, leur tenue, les évènements qu'il lui fallait connaitre et le reste...

Au milieu des nouvelles diverses et variées, une vint lui donner du rouge au joue.
Rouge colère.
Eavan, déjà de mauvaise humeur, n'eut pas la sagesse d'attendre pour prendre sa plume et le grattement fut sec.


Eavan a écrit:
A l'Assemblée des Nobles de Provence,

Je prends la plume sur cette question soulevée pour la simple raison que j'ai horreur de devoir me répéter.

Notre Illustre n'a pas obtenue la réponse qu'elle voulait de la part de l'entité en charge de la gestion de la noblesse et de ses us et coutumes, la Hérauderie, et donc a insisté jusqu'à ce qu'une consultation de l'ADN soit effectuée.
N'ayant eu ce qu'elle souhaitait par la voie normale, elle essaie désormais la voie de la popularité.

En toute honnêteté, j'y vois là un grossier caprice, et rien de plus. Et je ne préfère même pas commenter le fait que notre Illustre rejette le fonctionnement provençal et souhaite l'adoption de règles françoyses qui ne sont pas les nôtres sous prétexte qu'elles l'arrangent.

Je vais reprendre quelques points très simples qui démontreront que la réponse négative formulée par le Maitre d'Armes et Sa Majesté se base bien sur le droit nobiliaire provençal.

Point 1 : le droit nobiliaire est coutumier en Provence, c'est à dire qu'en l'absence de texte, c'est la coutume, l'usage et la jurisprudence qui font loy.
Point 2 : le fief Provence n'est pas un fief traité de la même manière que les fiefs vassaux et j'en veux pour preuve qu'on porte les armes de Provence en préséance à toutes autres, comme les marquisales, et qu'on ne les mélange à rien d'autre. Ce ne sont donc pas des armes personnelles mais bien de fonction.
Point 3 : nous avons déjà eu en Provence des Illustres mariés et aucun conjoint n'a jamais porté les couleurs de Provence car cela ne se fait pas en Provence

Conclusion : par coutume nobiliaire faisant loy, le conjoint n'est pas susceptible de porter les armes de Provence qui ne sont portées que par l'Illustre élu qui supporte seul les droits et devoirs inhérents à sa fonction.

De facto, la demande de notre Illustre actuelle n'est pas une application des règles provençales mais bien une exigence de changement de nos règles nobiliaires pour convenir à son désir.

Si la question soulevée est intéressante, elle mérite d'être autre chose qu'une lubie et autre chose qu'un simple outil de caprice comme actuellement. L'Illustre n'est pas tout puissant en Provence, les nobles de Provence qui sont vassaux de l'Illustre ne lui doivent que conseil, aide et fidélité : pas manipulation des loys pour lui plaire.
Si on commence à changer des loys par pur envie personnelle, où va-t-on ?

Je suggère à ma suzeraine l'Illustre de ne pas se prendre pour un soleil et de respecter les règles établies avant elle en Provence. Je déplore sa méconnaissance totale du fonctionnement provençal et de l'histoire de Provence, sans laquelle elle n'aurait jamais proposé tout naturellement qu'on abandonne notre tradition nobiliaire pour se plier à celle des français.
Et si elle souhaite faire de Provence une extension française, il faudra me passer sur le corps d'abord.

Qu'elle commence par porter les armes et arrête de faire pression sur les institutions marquisales pour qu'elles se plient à ses désirs personnels. Diriger Provence demande déjà suffisamment d'énergie pour ne pas la perdre bêtement ainsi.

Si elle souhaitait ne pas se faire "lapider" il aurait sans doute fallut qu'elle accepte les règles déjà en place et n'exige pas qu'on les lui change pour elle.

Depuis le port d'Alexandrie

Eavan Gaelig




Une fois la Mouette Pygmée repartie en direction de l'Assemblée des Nobles de Provence, la Gaelig opta pour un petit entrainement sur le pont, histoire de se changer les idées. A cette occasion, elle nota des regards parfois curieux parfois désaprobateurs de gens passant sur le port. Elle nota aussi que quelques marins avaient tendance à prendre leur pause exactement au moment où elle sortait de sa cabine, épée à la main. Certains devaient apprécier le spectacle, sans doute aucun. Tant qu'il n'y en avait pas un pour croire qu'il pouvait se permettre la moindre remarque ou le moindre geste, cela ne gênait pas outre mesure la vicomtesse.

Le soleil baissant la convainquit de s'arrêter après ce qu'elle estima être quelques heures. Physiquement bien drainée, la Gaelig profita du coucher de l'astre solaire qui parvenait à rester enchanteur malgré sa contrariété et elle alla se coucher, espérant voir autre chose que les mêmes pontons le lendemain matin.

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Eavan
Cinquante-troisième jour de voyage...

Qu'est ce qui marron et qui devient lassant ?
Un ponton auquel on reste amarré plus que de raison.

Qu'est ce qui est barbu et a une belle cabine mais qu'on ne voit jamais ?
Un capitaine.

Qu'est ce qui picote au bout des doigts ?
L'envie de balancer le capitaine par dessus bord.

La Gaelig finit par rédiger un petit mot qu'elle se résigna à glisser sous la porte du capitaine, avec une pointe d'exaspération. Etait ce si compliqué de communiquer ? Tâchant une nouvelle fois d'évacuer sa mauvaise humeur, Eavan alla se caler sur le pont. Là, un sourire doux se fraya un chemin sur son visage. Ses yeux se posèrent sur Arystote qui jouait aux échecs avec son cousin. Elle préféra le regarder ainsi, un peu à la dérobée, son air concentré, cette étincelle rieuse lorsqu'il trouvait un moyen de contourner la stratégie de Guilhem... Etre enfermée sur un bateau loin de tout n'avait pas que des désavantages. Cela lui offrait l'opportunité d'une proximité d'avec le comte sans que cela ne soit suspect ou inconvenable.
L'humeur s'apaisa et elle resta ainsi un long moment, profitant qu'il soit absorbé dans le jeu.

Finalement, être enfermée était une chance. En quelque sorte.

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Eavan
Cinquante-quatrième jour de voyage...

Que fait une vicomtesse à bord d'un navire pour s'endormir ?
Elle compte les pontons.

Eavan commençait à ressentir la même chose que lorsqu'elle était chef de l'Ab ira leonis et cantonnée à l'extérieur des murs arlésiens... Elle avait l'infime sentiment que si cela durait encore, elle finirait par compter le nombre de planches de chaque ponton. Et si cela durait plus, elle leur donnerait des noms. Comme aux pierres de la muraille arlésienne.

L'évènement de ce jour, bien peu riche en évènements, fut une lettre inattendue du comte de Fontvieille, son régent. Que pouvait donc lui vouloir le vi... vénérable Oursaring de Lorso ? Y avait il un problème sur l'un de ses fiefs ? La lecture de la missive tira un sourire satisfait à la vicomtesse. C'était bien pour ce genre de choses qu'elle savait qu'elle avait bien choisit son régent.


Oursaring de Lorso a écrit:
Votre Vigrandeur,

J'ai reçu un courrier concernant l'allégeance envers l'Illustre actuel. Souhaitez vous que j'y ailles en votre nom, ou souhaitez vous ne pas la renouveller?

Bien à vous,

Oursaring de Lorso


Sobre et efficace.
Il fallait dire qu'elle n'y avait pas été avec le dos de la cuillère avec l'Illustre. Il fallait dire aussi que jusque là ladite Illustre lui avait renvoyé une bien mauvaise image.

La Gaelig eut un petit rire et se promit de lui répondre rapidement, retournant à son jour calme fait de repos et de contemplation.
A défaut d'être fait de navigation.

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Eavan
Cinquante-cinquième jour de voyage...

Jour noble et noble jour.
Eavan s'éveilla en ce 27 novembre pour découvrir... un doux ballotement.
La joie la submergea : ils étaient enfin détachés des pontons ! Loués soit le Très Haut et tout les Saints !

En plus de cette joie naturelle, puissante et enfantine, il y avait une autre raison de réjouissance pour la vicomtesse.

Ce n'était pas un jour ordinaire pour la Gaelig. Et quelque part, ça l'était encore moins cette année.
C'était son anniversaire.
Elle avait trente ans.
Trente ans.
Trente.
Le temps passait vite.

Et ce n'est pas à cause de son anniversaire que le jour fut noble mais bien parce qu'elle prit sur elle d'avancer un peu concernant les affaires nobiliaires. Elle n'avait eu aucune réponse d'Hersende concernant son testament, aussi ne fut il pas sa priorité. A quoi bon, après tout.

Par contre elle prit sa plume pour destiner un autre courrier à l'Assemblée des Nobles et une réponse à son régent. Le vi... vénérable le méritait bien.


Eavan a écrit:
Votre Grandeur,

Pardonnez la lenteur de ma réponse.

Je vous remercie de vous inquiéter de ma position à ce sujet. Vous pouvez renouveler en mon nom, si cela ne vous est pas trop désagréable.
Si vous parvenez à glisser subtilement de ma part que je respecterai mon allégeance tant qu'elle respectera celle que notre Illustre fera à Sa Majesté et qu'elle saura respecter l'Histoire et l'essence de Provence.

Je ne voudrai pas qu'il lui prenne l'envie de nous imposer des loys françoyses. Sait on jamais, elle semble bien accointée à l'étranger. Et je ne sais ce que vous en pensez, mais je n'aime guère ses manières.

S'il vous plait, si vous en avez envie, n'hésitez pas à me donner votre avis concernant mes interventions épistolaires à l'ADN. J'ai parfois la plume un peu vive et l'attente à quai à Alexandrie tendait à m'exacerber les nerfs.

Respectueusement,

Eavan Gaelig


La vicomtesse se relut et satisfaite scella. Si Oursaring souhaitait lui donner son avis, cela lui était précieux. Bien sur la Gaelig savait avoir écrit avec colère à l'attention de l'Illustre et parfois, ses formulations étaient un peu plus acerbes qu'elle ne l'aurait souhaité. Il était d'ailleurs temps de remettre ça, Felipe lui ayant communiqué que l'Illustre avait réagit.

Eavan a écrit:
A l'Assemblée des Nobles de Provence,

Je n'ai reçu aucune réponse à ma lettre et n'aie pu saisir les bribes d'échanges que grâce aux oreilles affûtées de mon intendant salonais. Je vais donc simplement dire que je suis un peu déçue que l'Illustre ait préféré faire sa réponse à ma personne à la cantonade plutôt qu'à moi. Soit.

J'ai eu des mots durs, j'en conviens. C'est d'ordinaire ce qu'il se passe quand on agite le fait que Provence devrait se mettre au pas français. Cela m'irrite.

Par ailleurs, j'avais cru comprendre que l'Illustre s'était déjà vu adresser un refus par la Hérauderie avant de venir plaider sa cause ici, dans l'espoir de passer outre l'autorité héraldique. J'ai pensé ainsi car justement on m'avait déjà consulté à ce sujet et l'avis du Maitre d'Armes était mentionné dès ce moment là.
Les façons de faire semblent bien étranges donc.

Enfin, je préciserai deux points, puisqu'il semble que tout le travail de la Hérauderie soit tout à fait mauvais aux yeux du seigneur de Martigues, et de notre Illustre aussi d'ailleurs.

A l'argument qu'aucun Illustre n'en avait fait la demande : vrai. Mais : si le rôle et titre de consort avait eu cours en Provence, il y aurait eu application systématique : les titres et blasons ne sont pas des possibilités ce sont des obligations. Donc, oui, le fait qu'aucun Illustre n'ait eu un conjoint portant le blason n'était pas dû à une simple paresse ou envie. C'était parce qu'il n'y a pas de statut impliquant le port des armes de Provence par un autre que l'Illustre. Autrement, cela aurait été fait systématiquement.

Vous voulez changer les règles ? Grand bien vous fasse. Proposez donc un texte encadrant ce rôle et ses implications. L'ADN pourra en débattre, et la Hérauderie aussi. Vous savez, cette entité dont c'est le travail ? Voilà la bonne manière de faire : certainement pas prendre ses vassaux à parti.
J'encourage par ailleurs le Seigneur de Martigues a rejoindre la Hérauderie. A entendre ce qu'il en pense : il sait mieux que personne comment appliquer et penser le droit nobiliaire. Il est dommage de priver les pauvres ignorants que nous sommes d'une telle lumière.

Autre point... Vous brandissez le coutumier comme s'il s'agissait du Livre des Vertus or, par pure définition, la Coutume est l'idée selon laquelle l'usage prime. C'est à dire que si ce n'est pas écrit encre sur parchemin, c'est l'usage qui prime. Arrêtez donc de prétendre que parce que ce n'est pas écrit, ce que l'on dit est faux.
Il est tout à fait ridicule de confondre Coutume et coutumier.
La Hérauderie est garante de la Coutume, c'est l'autorité a consulter concernant les usages. Le coutumier est un texte écrit, disponible sous forme de statuts et d'un codex en cours de travaux. Il serait d'ailleurs judicieux de la part de la Hérauderie de poursuivre ces travaux.

Là encore, si vous voulez imposer une nouvelle tradition, étant donné que cela implique pas mal de changement, il faudra un texte. Ce n'est pas l'usage donc il faut un texte pour que cela soit la règle.


Je maintiens enfin, que même si j'ai eu des mots durs, une Illustre qui réclame qu'on abandonne nos traditions pour adopter les moeurs nobiliaires françaises montre une méconnaissance de la noblesse provençale et de l'Histoire même de Provence.
Ou alors c'était calculé et pure provocation.


Enfin à flots,

Eavan Gaelig


Ca y était.
Le début du retour.
Dans une quinzaine, vingtaine de jours ils seraient en Provence.
Et de nouveau cette excitation d'être en mer.
O joie !

C'est heureuse et comblée que la Gaelig rejoignit son hamac.

_________________
Eavan
Cinquante-sixième jour de voyage...

Le rythme des manœuvres reprit. C'était plaisant.
Eavan, du haut de ses trente ans nouvellement acquis, avait la forme. Elle qui avait souffert durant l'aller de blessures qu'il lui fallait laisser se refermer, elle profitait désormais de toutes ses capacités. Monter au gréement ne lui faisait pas peur. Manipuler des bouts des heures durant, à s'en abîmer les mains non plus. La Gaelig était définitivement une femme d'action et là où si peu pouvaient la juger pour cela, elle laissait libre court à son caractère.

Cela faisait aussi plusieurs nuits qu'elle n'avait plus eu de rêves impliquant un phare ou un certain comte et c'était reposant. En soi ce n'était pas profondément désagréable, loin de là, mais elle savait que c'était là pécher en pensées. Aussi priait elle beaucoup pour tenter de compenser et de retrouver la sérénité.

En fin de journée, la vicomtesse récupéra deux missives qui étaient arrivées à son intention. Ces Mouettes Pygmées faisaient des miracles.
Diane et Oursaring.
Des deux, Eavan choisit le devoir en premier. Elle pourrait ainsi ensuite profiter des lignes de Diane sans avoir l'esprit focalisé sur autre chose.


Oursaring a écrit:
Votre Vigrandeur,

J'essairais de faire passer le message en tout diplomatie, pour ne pas être accusé de saboter la cérémonie d'allégeance.

Je comprends totalement vos lettres, et je serais bien malaisé de vous les reprocher. Surtout que je suis moi même en... "discussion" avec certains membres du Conseil qui considèrent la Constitution comme du torche-cul et le Marquisat comme une coquille vide et inutile.

Et toute considération politique mis à part, quand le seul argument contre la Marquise est "elle a fait son temps, place aux jeunes", cela a tendance à m'agacer. N'y a t'il pas assez d'argument politique a lui opposer?

Bref, je m'occupe de votre allégeance.

Bien sur vous,

Oursaring de Lorso



La Gaelig eut un petit soupir soulagé. C'était parfois utile d'avoir un retour sincère et honnête. Fontvieille était connu pour ne pas mâcher ses mots lorsqu'il était en désaccord ou désapprouvait quelque chose. Cela faisait parti des raisons pour lesquelles, Eavan l'aimait bien. Même si jamais elle ne le lui dirait ainsi.
L'homme avait aussi du courage de rester Sage de la Noblesse depuis tant de temps. La vicomtesse n'en aurait jamais eu la patience.

Ce fut le tour du courrier de Diane.
Cela faisait un petit moment qu'elle attendait des nouvelles de sa part. Elle espérait que rien de fâcheux ne soit arrivé à la marseillaise.



Diane a écrit:
Ma chère Eavan,

Que de temps depuis ta dernière missive, me voilà fort mal de ce temps de réponse. Mais au moins, j'ai matière à écrire missive assez riche.

Je suis allée sur Arles pour deux jours, durant la patrouille, de cela je te sais informée vu que Felipe te tient aux nouvelles pour l'EM. J'y ai rencontré Wal, jeune femme un peu à fleur de peau et un brin susceptible mais avec un grand coeur et un excellent médecin en devenir. Je lui ai d'ailleurs proposé une association de pratique sur mes opérations les plus sinistres et importantes.
L'amour qu'elle te porte est grand, tu as de la chance d'être aimée ainsi.


Un petit sourire étira les lèvres d'Eavan. Il y avait de la douceur et une pointe de tristesse. Elle savait les sentiments de sa nièce à son égard mais savait aussi plus que tout autre à quel point cela affectait Walriara. Lorsque la Gaelig tante avait été au plus mal, c'était la Gaelig nièce qui en avait le plus souffert. Et tout cela c'était sans compter l'inquiétude que la nièce nourrissait à chaque campagne militaire d'Eavan.
Ah... si seulement elle ne l'aimait pas tant, justement. Elle le vivrait bien mieux.
Mais Eavan savait avoir de la chance. Beaucoup de chance.


Diane a écrit:
J'ai aussi rencontré Hooke, un homme rafraîchissant et plein d'humour et de dérision. J'aime certaines de ses perceptions et son approche des choses et de la vie.
Un homme simple et pourtant complexe.


Le résumé était court mais plutôt juste. Et cela amusa un peu Eavan.

Diane a écrit:
La patrouille s'est bien déroulée dans l'ensemble, malgré les départs loupés par certains. Le principal est qu'il ne se soit rien passé de fâcheux.
Je ne parlerai guère de ce qui doit rester à l'EM, hormis une chose plus générale... Hersende.
Hersende et sa manie de protéger à excès un certain chef d'armée incontrôlable juste parce qu'il est le cousin d'une autre protégée de cette dernière...
Elle se rend bien compte qu'elle surprotège des gens qui n'ont guère les capacités des devoirs qu'on leur a confié, mais la grande question est "elle qui aime tant Provence, comment peut-elle faire cela alors qu'elle sait que ça peut nuire à Provence?"
Bref je m'arrêterai là car j'avoue que je ne la comprends guère...


Certaines choses ne changeaient pas.
Et ne changeraient certainement pas.
Léger haussement d'épaules pour accompagner ce paragraphe et de poursuivre sa lecture.


Diane a écrit:
Ton poème était sublime Eavan, j'avoue que si j'ai tant tardé, c'est parce que je m'évertue depuis des jours et des jours à en écrire un qui vaille la peine d'être envoyé, mais je ne sais pour qu'elle raison, moi qui écris si facilement habituellement, cette fois les mots ne viennent guère s'imposer à moi et j'en suis fortement déçue...
Je te laisserai donc sans poème cette fois, sans grand intérêt finalement.
Peut-être parce que je n'ai guère vu de spectacle aussi exceptionnel que toi là bas... Je ne sais...
Il n'aurait guère pu être à la hauteur de toute manière, rien ne rivalisant avec ce que tu as dû voir à Alexandrie.


Un sourire amusé et joueur apparut sur les lèvres de la vicomtesse. Elle avait réussi son coup. Finalement, elle n'avait peut être pas tant perdue la main, enfin, la plume que ça...

Diane a écrit:
Sinon, j'ai une grande nouvelle... J'ai encore du mal à réaliser... Bart est vivant!


Grognement cette fois.
Et de redouter un peu la suite.


Diane a écrit:
Moi qui écrivais de temps en temps pour espérer des nouvelles des petits et me rassurer, cela faisait presque une année que je n'avais aucun retour, encore moins lorsque Kachi m'avait annoncé leur disparition suite au naufrage entre Normandie et Bretagne....
Je m'employais à avoir l'imagination nécessaire pour leur construire une belle vie quelque part, sur une île peut-être...
Mais au fond de moi, je les pensais morts....
Chaque dimanche, j'allumais un cierge pour eux, pour supplier le Très Haut de les voir en vie. Mes prières vont être exaucées.

Il nous réclame, Cassie et moi, il regrette ce qu'il a fait et me dit qu'il a besoin de nous voir... Je sens le désarroi en ses écrits, ce qui me laisse une sombre angoisse et des questions auxquelles je n'ai guère d'explications...
Mais il reste le père de Cassandre et il fut le premier à m'aimer, le premier à qui j'ai tout donné de moi. Il reste l'homme qui a fait de moi une femme...
Quelque part, je me suis accomplie grasce à lui, malgré nos divergences et nos débats houleux...
Attention, je ne dis point que je veux retomber dans ses bras, mais juste avoir plaisir à le revoir et pour cela il faut savoir accorder le pardon.


Bon.
Ce n'était pas si catastrophique. Elle ne semblait pas prête à retomber dedans à pieds joints. Et bien sur, le Pardon était une chose importante et nécessaire. Sans lui, impossible d'avancer dans son existence. Ne pas pardonner revenait à s'attacher soi même d'une lourde chaine à un rocher du chemin.


Diane a écrit:
Bref, j'entame mon voyage aux côtés d'Ivoire, cet ami que j'estime tant. Je fuis Provence pour la première fois... Je ressens ce que tu as pu ressentir en partant.
J'ai un goût de liberté que je ne connaissais point, c'est agréable de se dire que plus rien n'est une obligation.
Nous partons vers le Poitou tranquillement, là où se trouve Bart, afin de les revoir.
Je t'avoue que je n'ai aucune idée de ce que je ferai ensuite... Ni où j'irai, ni quand je reviendrai.
Je me dis juste que je reviendrai quand je serai prête, quand j'en aurais envie. Quand je me sentirai assez forte à nouveau pour affronter les vipères et les bassesses, les avides de pouvoir et les gens qui se croient tout permis.


Pas demain la veille donc.
Et ce n'était pas plus mal.
Eavan avait essayé de tenir trop longtemps, de retarder les départs, avait renoncé à s'éloigner et cela avait faillit causer sa perte.


Diane a écrit:
J'ai quitté Folie aussi... Ce n'est plus ma folie d'antan que j'avais aimé construire à vos côtés à tous... Et Folie sans Ary et toi, ce n'est plus vraiment folie.
Je me suis expliquée avec Verowill, les choses se sont apparemment apaisées entre nous, elle a vu plus clair dans le jeu de certains, elle a aussi vu surement que ce dont on m'accusait était faux.
Je me sens libérée de lui avoir dit tout ce que j'avais à dire. Je ne sais si elle en aura pris acte, mais en tout cas moi, cela m'a libéré.


Folie n'était plus Folie depuis longtemps. Mais Eavan fut soulagée que finalement Diane en prenne conscience.


Diane a écrit:
Voilà plusieurs jours que je suis sur cette lettre et nous sommes le 27 Novembre, alors je te souhaite un bon anniversaire!
Je suis juste attristée de ne guère être de toi pour le festoyer à tes côtés, alors je vais me contenter de t'envoyer mes pensées et quelques bises.


Eavan eut un petit rire.
Ainsi donc quelqu'un y avait pensé.
Une seule personne.
Le petit rire resta quelques instants puis se dissipa et seul resta un fin sourire. Cela faisait toujours plaisir.


Diane a écrit:
J'ai Céleste qui me sert de "Felipe" durant mon absence... j'ai eu ce jour des nouvelles de l'ADN et j'ai été un peu choquée de la demande d'Adel. Mais bon... je crois que je vais lui écrire...
Bref, je ne regrette aucunement d'être partie.


Moi non plus, lâcha la vicomtesse à voix basse.

Diane a écrit:
Et sinon, me voilà tutrice... Une drôle d'histoire bien singulière. Sur Alais, j'ai fait la rencontre d'un homme de presque 18 ans...
Il s'appelle Ascalion et il est drôle et intéressant. Assez mature je dirais. Il s'avère qu'il n'a guère été très sérieux par le passé et après un long séjour dans un monastère, il s'est vu affublé d'un tuteur. Mais comme cela ne lui plaisait guère, alors il lui a mené la vie dure et le tuteur est parti.
Le nouveau devait arriver le lendemain de nostre départ, sauf qu'il n'avait aucune envie de l'attendre et comme je suis de noble famille etc etc il m'a demandé de lui sauver la vie en devenant sa tutrice et peut-être est-ce folie, mais j'ai accepté.
Il est vraiment sympathique et l'aider m'a fait plaisir.


Léger haussement de sourcils.
Tiens donc.
Voilà autre chose.
La Gaelig releva quelques termes qui lui firent se demander ce que tout cela cachait, si tant est que cela cachait quelque chose...

Diane a écrit:
Nous serons sur Aurillac demain, les villes que nous traversons sont mortes ou vraiment tristounes, c'est navrant et je me rends compte comme nous avons de la chance en Provence.
Même Brignoles est plus vivante.

Encore six jours de voyage avant d'arriver à nostre première destination. Ensuite nous irons sur La Rochelle afin de rejoindre Kachina et les autres pour le déménagement d'Alan.
Cela me fait plaisir qu'elle retrouve le sourire grasce à lui.

Enfin voilà, je crois que j'ai fait le tour et donc il ne me reste qu'à t'envoyer de tendres pensées et t'embrasser fort pour ton anniversaire.

Diane...


Eavan replia soigneusement la lettre et, le soleil étant couché depuis un moment, elle alla regagner son hamac, avec Gizeh qui, comme chaque soir, vint lui sauter sur l'estomac pour s'en servir de coussin. Pas bête l'animal.

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Arystote
Cinquante-quatrième jour de voyage

Arystote s'était senti beaucoup mieux depuis son éveil au matin du cinquante-et-unième jour. Il retrouvait cette envie de profiter de chaque instant et acceptait de réfléchir à l'avenir sans le voir forcément en noir.

Arrivé sur le pont, il s'aperçut que les voiles inquiétantes des jours précédents avaient disparues. Il en profita pour rendre visite au capitaine.

Ces derniers jours il avait été dépositaire de plusieurs remarques de ses compagnons de voyage. Guilhem avait écrit au capitaine du Tamerlan sur les conseils d'Arystote afin de lui demander pourquoi il n'était pas membre de l'équipage. Franciszek aussi avait fait montre de son inquiétude également. Il souhaitait être avec ses enfants pour la Saint-Noël. Et Eavan n'avait pas besoin de dire quoique ce soit, il lisait sur son visage l'exaspération lorsqu'elle regardait le ponton sur lequel le Tamerlan était amarré.


- Lou bonjorn capitaine, lui dit-il en abaissant le chapeau qu'il portait pour se protéger du soleil. Mes compagnons et moi-même nous demandions pour quelle raison nous étions encore à quai depuis plusieurs jours.

Son interlocuteur lui répondit, visiblement surpris de la question du Champlecy, qu'il avait cru comprendre que tous les voyageurs partis au Sanctuaire n'avaient pas encore embarqués. Eavan, Franciszek, Guilhem, Platon, Gizeh et Arystote étant à bord, le Comte de Cassis se demandait comment le capitaine en était arrivé à une telle conclusion.

Une fois le quiproquos écarté et alors qu'il retournait vers sa cabine, il entendit le capitaine donner des ordres à l'équipage.

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