Eudoxie_
"La peur, cest lenfant en nous qui panique." (Tahar Ben Jelloun)
Cage ? Dorée ? Houx Rouges...
Voir la sortie et savoir pertinemment qu'elle ne pourrait pas la prendre, s'interroger tout en arpentant les allées de ce jardin entretenu de main de maître. Etait-ce de cela dont parlait Niels dans ses missives en disant que tout serait prêt dans deux semaines ?
Et... était-ce lui dont elle sentait le regard posé sur elle depuis le balcon, comme la morsure d'un prédateur sur sa nuque, tentant de l'apercevoir un court instant sans jamais porter onyx en direct vers lui.
Dextre effleurant une marguerite alors qu'elle avait pris place sur un des bancs de pierre, le cur de la petite brune se serra avec force, paupières se fermant sur une pensée qui lui était insupportable... et sil ne pouvait pas lui pardonner d'avoir caché ses missives...
Si... elle avait tout perdu quand ce matin-là il lui avait dit "il faut que nous allions aux Houx Rouges" et qu'elle n'avait pas su comment lui parler de la première lettre et de celle qui avait suivi... sachant qu'elle l'avouerait tôt ou tard.
Lentement une saline vint se perdre sur l'arrondi de sa joue, dextre délaissant ce symbole pour venir se poser sur le fruit qui grandissait en son sein, pétale d'une fleur séchée qui dormait dans une boite en bois accompagné d'un caillou et de quelques rubans.
Une inspiration hôquetée à cette image, à tous ces petits riens contenus dans une boite toute simple, et une salve de sanglots pris possession de la détermination dEudoxie à ne rien laisser paraître profitant de la solitude, qu'elle savait relative des jardins de cet endroit maudit.
Maudit oui... par ce qui s'y passerait sans doute, quoi qu'il arrive, sil décidait de l'abandonner à son mensonge, à son sort, nul doute que le Castral-Roc s'en donnerait à cur joie, passant sa frustration sur ce qu'il aurait sous la main, à savoir elle et... son bébé, même si Eudoxie voulait croire qu'ils étaient plus forts que ça.
Et sil venait la chercher comme elle lespérait autant qu'elle le redoutait, la confrontation que la petite brune désirait éviter aurait lieu et dans des conditions qui n'auraient rien de favorable à la réconciliation, et pourtant...
Toute acquise à ses pensées, à ses interrogations, à ses doutes et ses craintes, Eudoxie n'entendit que trop tardivement les cailloux foulés par de larges bottes danoises, essuyant aussi discrètement que possible les trainées humides sur sa peau, surtout garder la face.
Relevant le regard légèrement rougi, une sorte de soulagement, fugace, lorsqu'elle aperçut l'homme en livrée qui 'avait accueilli et qui l'invitait à rejoindre la demeure en lui apportant son châle.
Si Madame veut bien me suivre, nous n'aimerions pas vous voir prendre froid et un repas vous a été préparé.
Il vous sera servi à votre convenance en salon ou en chambre, le maître ne pouvant pas diner avec vous en cette soirée
Les chausses de la béarnaise emboitaient déjà le pas du laquais, accédant à son invitation, à quoi bon se montrer rétive, autant faire en sorte que tout se passe au mieux et que rien ne vienne aggraver la situation dans laquelle elle s'était sottement fourrée sur un coup de tête sans prendre les précautions nécessaires.
Lorsque l'allée menant au portail des Houx Rouges, un moment d'arrêt fut marqué et le regard de l'orthézienne fixa la rue et ses passants... Soren où es-tu donc... Tête basse et soupir long, Eudoxie entra dans la maison indiquant qu'elle souhaitait qu'on la mène à sa chambre et qu'elle y prendrait son diner.
Une servante, jeune, blonde elle aussi, pris alors le relais pour la guider vers ce qui serait l'endroit où elle devait passer la nuit, une seconde arrivant peu de temps après pour déposer sur la table trônant dans la pièce un plateau garni de tout un menu digne de plus belle cour de Paris.
Rapidement Eud remercia les jeunes femmes, seule, elle voulait être seule, sans personne, sans regard se posant sur elle, sans rien qui vienne la perturber, les raccompagnant même jusqu'à la sortie de la chambre comme si elles ne savaient pas où elle se trouvait.
Les soubrettes parties, le dos de l'inénarrable vint se caler contre le bois de la porte, mains se posant sur sa bouche pour étouffer la sonorité d'un corps qui cède sous la pression dans des pleurs incontrôlables secouant la brune plus qu'elle ne l'aurait souhaité.
Pourquoi n'était-il pas venu la chercher ? Pourquoi Niels la faisait-il attendre ? Pourquoi tout le Danemark semblait réuni ici ? Pourquoi les amis d'enfance de Soren étaient-ils ici ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?
Tout se bousculait dans sa tête, lui embrouillait l'esprit autant que les sens, l'appétit vient en mangeant, et bien c'est faux... à cet instant, rien ne faisait envie à Eudoxie malgré ce qui se trouvait sur le plateau, la faim ne la tiraillait même pas malgré un jeun depuis le matin mais un petit être logé sous son nombril lui rappelait avec force de conviction que oui elle devait se nourrir.
De mauvaise grâce et sans profiter des mets raffinés qui lui avaient été offerts, la future mère s'était nourrie avant d'aller s'étendre sur le lit cossu, son regard obsidien inspectant la pièce sous toute ses coutures, impersonnelle, dénuée de toute touche humanisant l'endroit.
Seule l'odeur de lavande lui apporta un peu de chaleur humaine en lui faisant penser à ses amis, à la Provence, à sa poussière d'étoile, à son anniversaire, au mas, à cette journée... à lui....
Le mas, le moulin, la plage d'Arles, lentement son pied droit vint caresser la tresse de rubans à sa cheville gauche, d'un pivotement le corps eudoxien se plaça face à la porte, main gauche se calant sous l'oreiller où reposait sa tête, dextre caressant comme en automatisme son ventre et son habitant.
Regard rivé sur l'entrée, la petite brune réalisa que ce serait la première fois... la première fois depuis son enlèvement à Marseille, la première fois depuis qu'elle portait ces rubans, la première fois depuis qu'ils avaient décidés de devenir parents malgré eux, la première fois depuis qu'il lui avait dit vouloir faire d'elle son épouse...
Pour la première fois depuis des mois, il ne serait pas à ses côtés cette nuit, il ne l'envelopperait pas de sa masse danoise, il ne la rassurerait pas de sa voix à l'accent scandinave, il ne lui souhaiterait pas une nuit bercée par de doux rêves et elle ne sentirait pas la caresse de son souffle niché au creux de sa nuque.
Non... ce soir Eudoxie était seule, plus seule qu'elle ne l'avait sans doute jamais été, malgré tout ce petit monde qui fourmillait dans la bâtisse.
Ce soir, la petite brune verrait ses paupières se fermer malgré elle, malgré tout ce qui la hantait, sombrant dans un sommeil perturbé d'un manque et d'une peur viscérale
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Cage ? Dorée ? Houx Rouges...
"Hotel Particulier des Houx Rouges"
(ici)
(ici)
Voir la sortie et savoir pertinemment qu'elle ne pourrait pas la prendre, s'interroger tout en arpentant les allées de ce jardin entretenu de main de maître. Etait-ce de cela dont parlait Niels dans ses missives en disant que tout serait prêt dans deux semaines ?
Et... était-ce lui dont elle sentait le regard posé sur elle depuis le balcon, comme la morsure d'un prédateur sur sa nuque, tentant de l'apercevoir un court instant sans jamais porter onyx en direct vers lui.
Dextre effleurant une marguerite alors qu'elle avait pris place sur un des bancs de pierre, le cur de la petite brune se serra avec force, paupières se fermant sur une pensée qui lui était insupportable... et sil ne pouvait pas lui pardonner d'avoir caché ses missives...
Si... elle avait tout perdu quand ce matin-là il lui avait dit "il faut que nous allions aux Houx Rouges" et qu'elle n'avait pas su comment lui parler de la première lettre et de celle qui avait suivi... sachant qu'elle l'avouerait tôt ou tard.
Lentement une saline vint se perdre sur l'arrondi de sa joue, dextre délaissant ce symbole pour venir se poser sur le fruit qui grandissait en son sein, pétale d'une fleur séchée qui dormait dans une boite en bois accompagné d'un caillou et de quelques rubans.
Une inspiration hôquetée à cette image, à tous ces petits riens contenus dans une boite toute simple, et une salve de sanglots pris possession de la détermination dEudoxie à ne rien laisser paraître profitant de la solitude, qu'elle savait relative des jardins de cet endroit maudit.
Maudit oui... par ce qui s'y passerait sans doute, quoi qu'il arrive, sil décidait de l'abandonner à son mensonge, à son sort, nul doute que le Castral-Roc s'en donnerait à cur joie, passant sa frustration sur ce qu'il aurait sous la main, à savoir elle et... son bébé, même si Eudoxie voulait croire qu'ils étaient plus forts que ça.
Et sil venait la chercher comme elle lespérait autant qu'elle le redoutait, la confrontation que la petite brune désirait éviter aurait lieu et dans des conditions qui n'auraient rien de favorable à la réconciliation, et pourtant...
Toute acquise à ses pensées, à ses interrogations, à ses doutes et ses craintes, Eudoxie n'entendit que trop tardivement les cailloux foulés par de larges bottes danoises, essuyant aussi discrètement que possible les trainées humides sur sa peau, surtout garder la face.
Relevant le regard légèrement rougi, une sorte de soulagement, fugace, lorsqu'elle aperçut l'homme en livrée qui 'avait accueilli et qui l'invitait à rejoindre la demeure en lui apportant son châle.
Si Madame veut bien me suivre, nous n'aimerions pas vous voir prendre froid et un repas vous a été préparé.
Il vous sera servi à votre convenance en salon ou en chambre, le maître ne pouvant pas diner avec vous en cette soirée
Les chausses de la béarnaise emboitaient déjà le pas du laquais, accédant à son invitation, à quoi bon se montrer rétive, autant faire en sorte que tout se passe au mieux et que rien ne vienne aggraver la situation dans laquelle elle s'était sottement fourrée sur un coup de tête sans prendre les précautions nécessaires.
Lorsque l'allée menant au portail des Houx Rouges, un moment d'arrêt fut marqué et le regard de l'orthézienne fixa la rue et ses passants... Soren où es-tu donc... Tête basse et soupir long, Eudoxie entra dans la maison indiquant qu'elle souhaitait qu'on la mène à sa chambre et qu'elle y prendrait son diner.
Une servante, jeune, blonde elle aussi, pris alors le relais pour la guider vers ce qui serait l'endroit où elle devait passer la nuit, une seconde arrivant peu de temps après pour déposer sur la table trônant dans la pièce un plateau garni de tout un menu digne de plus belle cour de Paris.
Rapidement Eud remercia les jeunes femmes, seule, elle voulait être seule, sans personne, sans regard se posant sur elle, sans rien qui vienne la perturber, les raccompagnant même jusqu'à la sortie de la chambre comme si elles ne savaient pas où elle se trouvait.
Les soubrettes parties, le dos de l'inénarrable vint se caler contre le bois de la porte, mains se posant sur sa bouche pour étouffer la sonorité d'un corps qui cède sous la pression dans des pleurs incontrôlables secouant la brune plus qu'elle ne l'aurait souhaité.
Pourquoi n'était-il pas venu la chercher ? Pourquoi Niels la faisait-il attendre ? Pourquoi tout le Danemark semblait réuni ici ? Pourquoi les amis d'enfance de Soren étaient-ils ici ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?
Tout se bousculait dans sa tête, lui embrouillait l'esprit autant que les sens, l'appétit vient en mangeant, et bien c'est faux... à cet instant, rien ne faisait envie à Eudoxie malgré ce qui se trouvait sur le plateau, la faim ne la tiraillait même pas malgré un jeun depuis le matin mais un petit être logé sous son nombril lui rappelait avec force de conviction que oui elle devait se nourrir.
De mauvaise grâce et sans profiter des mets raffinés qui lui avaient été offerts, la future mère s'était nourrie avant d'aller s'étendre sur le lit cossu, son regard obsidien inspectant la pièce sous toute ses coutures, impersonnelle, dénuée de toute touche humanisant l'endroit.
Seule l'odeur de lavande lui apporta un peu de chaleur humaine en lui faisant penser à ses amis, à la Provence, à sa poussière d'étoile, à son anniversaire, au mas, à cette journée... à lui....
Le mas, le moulin, la plage d'Arles, lentement son pied droit vint caresser la tresse de rubans à sa cheville gauche, d'un pivotement le corps eudoxien se plaça face à la porte, main gauche se calant sous l'oreiller où reposait sa tête, dextre caressant comme en automatisme son ventre et son habitant.
Regard rivé sur l'entrée, la petite brune réalisa que ce serait la première fois... la première fois depuis son enlèvement à Marseille, la première fois depuis qu'elle portait ces rubans, la première fois depuis qu'ils avaient décidés de devenir parents malgré eux, la première fois depuis qu'il lui avait dit vouloir faire d'elle son épouse...
Pour la première fois depuis des mois, il ne serait pas à ses côtés cette nuit, il ne l'envelopperait pas de sa masse danoise, il ne la rassurerait pas de sa voix à l'accent scandinave, il ne lui souhaiterait pas une nuit bercée par de doux rêves et elle ne sentirait pas la caresse de son souffle niché au creux de sa nuque.
Non... ce soir Eudoxie était seule, plus seule qu'elle ne l'avait sans doute jamais été, malgré tout ce petit monde qui fourmillait dans la bâtisse.
Ce soir, la petite brune verrait ses paupières se fermer malgré elle, malgré tout ce qui la hantait, sombrant dans un sommeil perturbé d'un manque et d'une peur viscérale
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