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[RP] A une Madone

Gabriel.louis

Je veux être plus âgé, je veux être plus fort. Je ne veux pas tomber cette fois.
Je veux être plus rapide, je veux me rapprocher, ne veux pas sentir où est le passé.
Parce que je suis assez rapide me fourrer dans les ennuis, mais pas suffisamment pour les fuir
Je suis assez vieux pour savoir que je finirai de mourir, et pas assez jeune pour oublier.
                                      Fickle game – Amber Run


J’avais passé le reste de la nuit à contempler le vide, m’imprégnant des sensations de son corps reposant contre le mien. Pourtant, j’étais tout, sauf serein. Je pense que je n’arrivais pas à réaliser, ni ce qui venait de se passer, ni ce qui avait vraiment conduit à cela. J’avais seulement cette boule au creux du ventre n’ayant de cesse de me rappeler que je n’étais jamais qu’un funambule évoluant sur un fil par-dessus le gouffre béant des Enfers qui m’attendaient. Il fallait que je me libère de ce nœud et que je le dissèque afin de séparer chaque problème pour mieux l’appréhender.

Premier problème, comment se distinguer de son passé, faire qu’elle s’en souvienne ?

Avant que les premières lueurs de l’aube ne pointent à l’horizon, je me glissais discrètement hors de la couche. C’est après avoir soulevé le berceau pour le ramener auprès du lit où sommeillait l’Italienne que me vint finalement l’idée de ratisser soigneusement la pièce pour faire disparaître l’ensemble des dessous féminins qui s’y trouvaient. Méfait cruel mais si alléchant. Cela devrait l’aider à ne pas oublier, d’autant plus que cela serait loin de me déplaire.

Deuxième problème, faire en sorte qu’elle se sente bien malgré les conditions de son arrivée.

Le placard était suffisamment fourni de vêtements… Peut-être qu’un repas à son réveil aiderait. Un petit mot pour l’attention, et quelques écus pour lui permettre de sortir prendre un verre si elle le souhaitait.

C’est là qu’apparaissait le troisième problème, et celui-là, de taille : Et si elle s’évadait ?

J’avais conscience qu’au plus je la tiendrais prisonnière, au plus elle nourrirait l’envie de me fuir. A court terme, je ne pouvais que lui assigner un garde en prétextant sa protection. Au moins, si elle filait, j’en serais informé, et là, j’aviserais au moment venu. Il me fallait me concentrer sur le long terme. Sauf que là, aucune solution ne me vint.

Je récupérais le rapport de garde auprès d’Eugène, et me rendis au castel en compagnie d’Apollo. Alors que la veille je m’étais complu à poser le Duc sur la liste des suspects, ce jour-là, je décidais d’y mettre mon nom, ainsi que celui de mon Oncle en charge de la prévôté. Au milieu de ses éclats de rire, il crut bon de me rétorquer qu’effectivement, les Znieski étaient connus pour être très dangereux, étant beaux et « sexy ». Je n’étais définitivement pas à l’aise, pris par l’étrange impression d’être découvert comme, la veille, Alaynna m’avait dit que j’étais dangereux, juste avant que nos êtres ne succombent.

Le bruissement des feuilles et le parfum de la forêt ne m’étourdissaient en rien ce jour, tandis que courant en compagnie du danois pour ma promenade quotidienne, je ressassais cette idée en boucle. Cette gueule d’ange qui me rendait si attractif, comme me l’avait si souvent fait entendre Kachina, et qui m’avait déjà valu tant de déboires, tant de souillures pour un seul être que jamais je ne saurais complètement m’en décrasser ; si c’était juste cela, je n’avais finalement pas plus de valeur que cela aux yeux de l’Italienne ?

Marquant un arrêt au cœur d’une clairière, mon attention finit par être attirée par de minuscules piaillements répétitifs et groupés. Ceux-là attisèrent l’attrait du doux rêveur qui sommeillait encore en moi. De toujours, lorsque mon corps ou mon esprit étaient torturés, j’avais pris l’habitude de me laisser emporter par des songes, des images, des paysages, quelle que soit la forme qu’ils puissent revêtir tant qu’ils me soulageaient ne serait-ce que quelques instants. Et me voilà bientôt, escaladant les arbres, nourrissant mes mains de leur écorce comme du velouté de leur feuillage effleurant mes doigts, jusqu’à finalement découvrir le nid tant convoité. Avec lui, peut-être avais-je trouvé un moyen de travailler sur un autre problème, lui faire entendre qu’avant la mort, il y a la vie, et qu’il faut s’y accrocher.

M’en revenant, mes pas ralentirent jusqu’à s’arrêter devant la boutique d’un joaillier. Et si…

Je secouais la tête et reprenais la route, mais à peine quelques mètres plus tard, je faisais volte-face et entrais. Des verts les plus tendres jusqu’aux teintes profondes du lierre, des bleus à donner au ciel un aspect terne, des jaunes et orangés aussi sucrés à l’œil que le miel à la bouche. Je m’arrêtais au rouge comme parmi ces mille pierreries, l’une avait tout particulièrement retenu mon attention. Elle avait, au premier regard, la couleur du sang. C’est lorsque je la fis rouler entre mes doigts qu’elle révéla toute sa splendeur, d’un rougeoyant évoquant le cœur même des flammes s’élevant des plus beaux brasiers. Sans plus de réflexion, je passais commande. Peut-être bien que celle-ci ne me servirait à rien. Sans doute n’étais-je qu’un idiot utopiste. Assurément, je courrais droit vers une chute lamentable de laquelle je ne me relèverais possiblement pas.

Mais pourquoi me devais-je toujours de me porter guide et conseiller pour les autres, quand moi, je restais définitivement seul à cumuler mes ennuis ? Pour sûr, j’étais véritablement habile pour m’enfoncer dans les situations les pires comme les plus improbables. Pour m’en sortir, c’était une toute autre paire de manches.

Peut-être que tout ceci était vain, oui. Assurément, elle ne serait plus là à mon retour.

Pourtant, quelque-chose en moi susurrait : Et si…

_________________
En cours de reconstruction.
Alaynna
[I never let you go] - Mosimann -


Jamais te laisser partir.
Toute ma foi, tout mon amour, en tas, l'embraser.
Les choses que je brûlerais, pour te maintenir au chaud.
Et dans la tempête, jamais je ne te laisserai t'en aller.
Je ne te laisserai jamais partir.

Barreaux de culpabilité, pour l'innocence.
Dernier souffle pour un dernier baiser.
Pour ne pas perdre l'amour que nous avons créé.
Quand la pluie tombe, sur les rêves que nous peignons.
Et que chaque goutte de joie est balayée au loin.

Je ne te laisserai jamais partir.


...Et pourtant. Je les avais laissé partir. Roman. Niallan.

Loras aussi, même si lui est parti autrement.

Depuis le Serbe, je culpabilise. Je m'en veux de n'avoir pas été là, auprès de lui. Peut-être aurai je pu le sauver, tout du moins l'aider et qu'au lieu qu'il soit mort, il n'aurait été que blessé.
Bien sûr, je garde ma théorie bien au chaud dans un coin de ma caboche, sans n'en souffler mot à qui que ce soit.

Alors Gabriel...
C'est foutu. Il a transgressé mes nouvelles règles depuis la mort de Loras. J'avais pris la décision que Loras serait le dernier. Et Gabriel venait d'ébranler sérieusement mes résolutions. Il les avait carrément mises à mal.

Il y a encore quelques heures, Il m'avait réveillée d'une drôle de manière d'ailleurs Gabriel, n'ayant rien trouvé de mieux que de soulever le drap, pour jouer au mateur discrètement, croyait-il, un bol de lait dans une main. Et le beau mateur s'était trouvé comme une souris prise au piège alors qu'un orteil italien s'en était venu chatouiller le mollet polonais, et que les azurées fixaient alors les aciers d'un air interrogateur.
Et alors que je n'avais pas réussi à remettre la main sur mes dessous, dans la chambre dévastée, j'avais fini par enfiler un jupon et une tunique de dentelle, sous les yeux d'un Polonais plus en forme que jamais et pressé de m'emmener en promenade, mais qui n'avait pas perdu une seule miette du spectacle.

De mauvaise grâce, j'avais fini par le suivre, confiant Anna-Gabriella aux bons soins d'Eugène. Le seul allié que j'avais dans cet endroit. Du moins le croyais-je, puisque il avait accepté la chasse aux spectres que je lui avais imposée. Mais ceci est une autre histoire, à laquelle je repenserai plus longuement plus tard.

Dans l'immédiat, alors que j'ai attrappé de nouveau une saloperie de maladie qui me fiche l'estomac en l'air et les jambes en vrac, il a fallu que j'obtempère aux ordres de Gabriel. Qui dans sa grande mansuétude, a tout de même eu la géniale idée de faire apprêter une carriole pour nous rendre à l'endroit, où il a décidé de m'emmener. Et durant le trajet, je ne sais pas comment je dois prendre ça, mais il s'excuse de ne pas s'excuser de mon enlèvement, qu'il est content de l'avoir fait, qu'il le referait, parce qu'il tient à moi et qu'il ne veut pas que je me tue. Parce que si je meurs, il pense qu'Anna sera élevée dans un défilé de belle-mère, complètement perdue de tout repères à part celui de son père, qu'elle souffrira comme Percy, pire encore parce que Percy a encore sa mère et qu'elle ne l'aurait plus elle, et qu'Apollo se laisserait mourir de faim, puisque le Danois n'aurait plus sa maîtresse.

Fait chier. Il m'a fait flipper grave là pour le coup Gabriel. Surtout avec l'image du défilé de belle-mère. Ah mais noooo, il va vraiment falloir me tuer pour que je permette que ça arrive une telle chose.


" - Gabriel, dis toi bien que si l'envie me prend de me tuer, je le ferai à n'importe quel endroit où je puisse être. Et si, je suis en colère parce que tu m'as arrachée de mon chez moi. Qui va s'occuper de mes chevaux, de mes camarguais sauvages maintenant ? T'es tu seulement demandé si je n'avais pas mes habitudes avec Anna, comme par exemple le matin on allait à la mer toutes les deux, sur la plage, avec Apollo. Qui va s'occuper d'entretenir la tombe de Loras ? Et peut-être que toi tu n'aimes pas Diego mais moi je l'aime bien, et sans doute que si je suis encore en vie l'italien n'y est pas étranger. Parce qu'il faisait partie de mes repères et maintenant ce repère là je ne l'ai plus. Et pour ce que tu m'as écrit, si, ça m'a fait terriblement mal.
Je t'en veux, et je ne t'en veux pas à la fois. C'est compliqué dans ma tête. J'ai à la fois envie de prendre mes jambes à mon cou quand je pense à ce que tu as fait,, et envie de rester avec toi toujours.
On meurt tous un jour Gabriel. Demain je peux mourir de maladie, ou d'un accident, ou de vieillesse. Et toi aussi. Et Anna-Gabriella ne grandira pas dans un défilé de belle-mères. Tu dis que tu as eu mal et que tu as eu peur parce que tu tiens à nous ? Alors maintenant tu comprends de quelle manière je me suis inquiétée quand tu as disparu plusieurs semaines à Marseille."


Et je ne sais pas vraiment comment, je me suis retrouvée avec lui au beau milieu d'une forêt, et sous un arbre immense, qu'il m'a demandé d'escalader, en me faisant écouter les pépiements qui s'en dégageaient.


" - Je suis malade putain de bordel de m.ierda et toi, espèce de couillon, tu veux me faire grimper aux arbres ! "


C'est ce que ma caboche a alors hurlé silencieusement, alors que je fixais Gabriel et que ma voix elle, enchainait sur un allègre " - Je te préviens, j'ai passé mon enfance à escalader les montagnes, alors les branches d'un arbre, ça ne m'impressionne pas."

C'est quand il a tenu à ce que je passe devant lui, que j'ai commencé à comprendre le coup tordu qu'il semblait vouloir me réserver. Et j'avais beau être malade, j'avais encore toute ma conscience. Gabriel qui si je me souviens bien, était le premier à râler parce qu'en Anjou, avec Kachina, nous avions grimpé, sans dessous, au balcon de la mairie, aujourd'hui, voilà que le Polonais, pensait pouvoir mater sans vergogne.

Ah ouai. Gabriel nous avait fait sa Sainte Nitouche en Anjou, mais en fait, le bougre, il cachait bien son jeu !

Alors j'ai retroussé mes jupons jusqu'au dessus de mes genoux, j'y ai fait un noeud pour ne pas être gênée et je me suis mise en oeuvre d'escalader les branches.

Et voilà que le Polonais entame le second round avec le nid et les oisillons. J'ai compris ce qu'il tente de faire, je ne suis pas idiote. Et le voilà en train de me parler de la vie, de me dire que ces oisillons là, sont la vie. Qu'ils luttent pour vivre, peu importe que leur vie soit de courte durée ou pas. Que chaque jour gagné en vaut la peine. Et c'est là qu'il a remis au goût du jour le fait qu'il ne pourrait jamais avoir d'enfants.
Je l'ai regardé, fusillé du regard même que si mes yeux avaient des armes, il serait mort sur place, foudroyé. Surtout quand il a rajouté qu'il se demandait comment Anna-Gabriella allait vivre le fait de grandir sans être entourée de frères et soeurs et il a enfoncé le clou en me demandant comment je pouvais vivre la seule idée de ne plus pouvoir porter la vie. Bien que ce fut pratiquement une certitude, j'avais un doute depuis que l'Italien, le Corleone, m'avait balancé qu'il refusait de m'ouvrir et que seul le temps pourrait répondre à cette question de savoir si j'étais encore capable de porter la vie.

" - Je le vis mal. Très mal. Et cela me fait culpabiliser, bien plus encore qu'avant, d'avoir perdu mes bébés avant elle. Je n'aurai jamais de fils en vie. Le plus terrible c'est que je commençais vraiment à m'attacher à Percy. Et Niallan a tout détruit. L'une des raisons pour lesquelles j'ai voulu me t...partir, c'était pour rejoindre Andrea et Raffaelle et m'occuper d'eux. Je me disais qu'Anna-Gabriella aurait toujours son père et ses parrains avec elle. Eux ils n'ont personne. Enfin si, le jour où tu m'as sauvé du feu, je les ai vu. Julian était avec eux et il m'a dit qu'il allait veiller sur eux maintenant. Mais je ne sais pas vraiment si c'est le cas. Alors je voulais aller m'en assurer."

Saleté. Il a réussi à me faire cracher le morceau. Et je ne m'aperçois pas que chacun de mes mots, sont un coup de couteau pour lui. Et j'ai fait pire encore. Je lui ai parlé de ce cadeau de mariage qu'on avait alors pensé à lui faire, à lui et à la Russe, avec Niallan. Bon finalement c'était tombé à l'eau, Niallan n'avait pas pu obtenir le "cadeau".
Certes. Ce n'est pas courant de vouloir offrir un bébé en cadeau de mariage. Et le pire, c'est que pour Gabriel, j'aurait été capable de bien pire encore, juste pour que la Russe et lui, l'aient cet enfant.
La vie. Cette putain de vie, en avait décidé autrement. Mais je voyais Gabriel, sous le choc de ma révélation.

Et puis il m'a dit de redescendre de l'arbre et de m'asseoir. En me disant qu'il ne fonctionnait pas comme Niallan, qu'il ne sait pas passer d'une femme à l'autre, qu'avoir des maitresses ne l'a jamais intéressé. Je n'ai pas vraiment compris quand Gabriel m'a dit avoir tant d'autres défauts qu'il pouvait se permettre de ne pas avoir celui d'être infidèle. Qu'il savait ce qu'il attendait de demain. Qu'il n'est pas mon frère, ni mon presque-frère. Pas non plus un ami ou une connaissance. Et qu'il vient de trouver sa place.

C'est là que je l'ai vu porter un genou à terre devant moi, fouiller sa poche et en sortir un écrin qu'il a ouvert sous mes yeux, révélant un grenat serti sur un anneau d'argent. C'est là qu'il m'a parlé d'une vraie union, devant un curé avec un baptême auparavant. Mais le pire que j'ai entendu, est arrivé juste après ça.

Je ne joue pas avec toi, Alaynna. Je ne l'ai jamais fait et je ne le ferai jamais. Je veux vraiment que tu restes auprès de moi. Alors, est-ce que tu veux m'épouser ?

Oh putana. Il veut m'épouser pour que je restes auprès de lui. Juste pour ça. Simplement pour cette raison là.

Je me suis passée les mains sur le visage. Je revoyais Niallan me certifier qu'il voulait m'épouser parce qu'il m'aimait et m'avouer ensuite, quelques mois plus tard, qu'il ne m'avait épousé que pour qu'Anna-Gabriella ne soit pas une bâtarde. Mais même ce mariage là était uniquement de façade et c'est pour ça que j'y avais mis fin. Pour préserver Anna qui méritait mieux qu'un mariage basé sur des mensonges.
Elle méritait d'avoir une vraie famille. Genre je brise ce mariage pour mieux te ré-épouser ensuite et qu'on rende à Anna-Gabriella ce à quoi elle est en droit d'attendre. Comme tout enfant d'ailleurs.

Mais voilà. Dans l'immédiat, Niallan était avec sa baleine blanche, dont il se lasserait un jour selon Diego, et, toujours selon lui, Niallan reviendrait alors auprès d'Anna et moi.
Cela, c'était la vision de Diego. Dans l'absolu, avant la mort de Loras, ça aurait aussi pu être la mienne.
Mais le décès du Serbe m'avait changé à jamais.

Alors j'ai regardé Gabriel, persuadé qu'il était que je voulais lui faire payer à lui pour les erreurs de Niallan. Peut-être il n'a pas tort. Peut-être il se trompe.

Le Polonais va payer pour les autres. Oh si. Il va payer. Et chèrement.

Ah tu m'as faite enlevée. Tu m'as voulu, tu m'as eu. Alors maintenant que tu m'as, je peux t'assurer que tu n'es pas prêt de te débarrasser de moi comme les autres l'ont fait. Ni de moi. Ni d'Anna-Gabriella non plus. Parce que si tu prends l'une, tu prends l'autre, par la force des choses. De parrain, tu vas te retrouver beau-père puisque c'est ce que tu as décidé en me glissant cette bague au doigt.

Et j'ai accepté ta demande. Sans te dire que j'aimerai Niallan pour l'éternité et l'au-delà. Et que tu devras faire avec, que cela te plaise ou pas.
Bien sûr, ta proposition inattendue est venue conforter mes dernières décisions. Parce que la mort de Loras a changé ma vie du tout au tout.

Ce que j'acceptais avant, désormais, je ne l'accepte plus. Ce que Niallan a eu de moi, il ne l'aura jamais plus. Je lui ai déjà refusé une dernière nuit alors que Loras était encore en vie, désormais, c'est Gabriel qui les aura toutes.
Mais ça va se payer.

Et c'est quand il m'a rappellé qu'il était noble et ce que cela impliquait que j'ai manqué prendre mes jambes à mon cou.
Depuis que mon frère m'avait été enlevé pour être élevé chez nos cousines nobles, je détestais les nobles. Tous autant qu'ils soient.
J'avais juste fait une exception pour Gabriel. Mais il était bien le seul. Et voilà que non seulement il lui parlait de baptême mais également d'annoblissement.
Autant dire que la nouvelle avait du mal à être encaissé. Et c'est en silence que je le laisse me glisser l'anneau de feu au doigt.

Complètement sidérée mais j'étais au moins certaine de deux choses.

J'allais lui mener une vie d'enfer au Polonais. Histoire de lui rendre la pareille de ce qu'il faisait endurer à mon pauvre coeur.

Mais en attendant, c'est lui qui m'a rappellé que j'avais toujours mes jupons noués au-dessus de mes genoux. Je me suis empressé de les dénouer pour les remettre d'aplomb et j'ai pris la poudre d'escampette en direction de la carriole, marmonnant que je voulais passer du temps avec ma fille.

Et je ne l'ai pas vu, marcher derrière moi à pas lents, les mains jointes dans le dos, un air serein qui s'était subitement plaqué sur son visage.

Le Polonais n'a pas idée dans quoi il s'engage. Une part de moi est morte avec le Serbe.

Laissant place à une nouvelle ère.

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Gabriel.louis

Tout ceci est un jeu, évitant l’échec, quand les vraies couleurs saigneront
Tout ceci au nom de la mauvaise conduite et des choses dont nous n’avons pas besoin
Je convoite cet après, aucune catastrophe ne pourra plus nous atteindre
Et plus que jamais, j’espère ne jamais tomber là où Assez n’est plus le même qu’avant.
Viens nourrir la pluie car j’ai soif de ton amour, dansant sous ces ciels de désir.
Oui, nourris la pluie car sans ton amour, ma vie n’est rien d’autre que ce carnaval de rouille.
                                      Carnival of Rust - Poets of the Fall.


Elle m’a dit qu’elle m’aimait, et dans mon for intérieur, j’ai paniqué. Lentement, je me fais plus ou moins à cette idée …
Au début, je réprimais mon désir d’elle. Je craignais, en recommençant, de la salir, de ne pas lui témoigner le respect qu’elle était en droit d’attendre. Finalement, impérieuse, elle m’a fait céder. Depuis, chaque soir comme chaque matin, je lui fais l’amour.

L’Amour, est-ce que ce serait ça ?

Quand je domine, elle se fait douce, fragile. Moi, je reste sur la retenue, alors elle griffe et mord pour m’appeler à plus. Je lui cède volontiers, et pourtant, je me contiens encore. J’en voudrais toujours plus, je n’en ai jamais assez. Elle est péché et je gourmandise, j’use, et j’abuse. Malgré tout, j’étouffe souvent mes fantaisies, toutes ces images qu’elle m’inspire et que je m’interdis. Peur de la perdre. Petit, ridicule, minable, alors qu’elle ploie et que j’aimerais qu’elle plie plus encore, je m’évertue tant bien que mal à rejeter l’idée. Quand elle dort et que je l’observe, je lui rêve des liens, je nourris des violences éprouvant les corps, incendiant les âmes, détruisant la raison, et dans des soupirs, je m’efforce de les éteindre.

L’Amour, est-ce que ce serait ça ?

Tu es un ami. D’accord. Tu es mon amie aussi. Tu es un Presque Frère. D’accord. Tu es ma Presque Sœur aussi. Je t’aime. D’accord. Je t’aime aussi. Mais est-ce que c’est vraiment ça ? Je ne sais pas, ça me convient, tant que je suis quelqu’un. Quelque part au fond de moi, je sais que oui. Pourtant, quand on s’est si souvent trompé dans la nature de ses relations à l’autre, on a toujours une part de crainte de faire fausse route. Et puis, si c’est ça, c’est carrément flippant. Je n’ai pas envie d’aimer, parce que c’est trop risqué. Juste la voir heureuse, la voir sourire, l’entendre rire. Entrevoir l’avenir ; le vouloir, surtout ; avec elle, j’aimerais… non, je veux. Je l’exige, même. Parfois, je me demande de quoi je serais capable, quelles pourraient être les limites de ma folie juste pour y parvenir. Des limites, je ne suis pas même certain que j’en aurais.

L’Amour, est-ce que ce serait ça ?

Je crois que je n’ai pas vraiment envie de savoir, même si je le sais déjà. Je le lui dis, à elle, et je m’aveugle, moi. C’est bien, ça nous convient. Elle est vaillante et me tient tête, souvent, exigeant des banalités tout comme des impossibles. Je finis presque toujours par concéder, mais non sans tenter de sauver les apparences, fierté oblige. Oui, même les impossibles, je les rends possibles par des moyens détournés. Et pendant tout ce temps, à chaque fois, une part de moi nous observe, comme hors de mon corps, et se demande ce qu’elle cherche en m’affrontant de la sorte. Je crois qu’elle cherche à se rassurer elle-même sur son aptitude à le faire, pour ne plus jamais avoir à revivre dans l’acceptation. C’est pour cela que j’abdique aussi souvent, pour lui faire entendre que les temps de cette souffrance sont révolus. Mais c’est aussi une part de culpabilité qui m’y pousse, parce que je sais que même lorsque je m’efforce de faire le bien, je blesse. Je la ferai souffrir, autrement, mais je le sais. J’aimerais que ça n’arrive jamais, mais c’est inévitable.

Ses réactions sont parfois si tordues et si inattendues, comme sa façon de penser, qu’il n’est pas rare qu’elle me déstabilise. C’est terriblement agaçant, et en même temps, j’adore ça. Elle est complexe, et la déchiffrer est un jeu passionnant. Je passe mon temps en équilibre avec l’impression que tout peut exploser d’un moment sur l’autre, au moindre mot ou au moindre geste, aussi anodin puisse-t-il être. C’est effrayant, mais ça me grise et me tient en éveil constant. Je reste sur mes gardes, et un jour après l’autre, je l’apprivoise et la guide vers mes rives. Grain de sable après grain de sable, je laisse se dévoiler la perle que j’ai remarquée il y a bien longtemps de cela, quand d’autres ne l’ont jamais perçue. Clandestinement et patiemment, je fais en sorte de l’aider à reprendre confiance en l’autre, mais surtout en elle, laissant la fleur s’épanouir sagement.

Ainsi avons-nous vogué jusqu’en Franche-Comté, pour nous en revenir quelques jours plus tard. Je tais les migraines qui m’accablent encore depuis ma pitoyable chute aux abords du Crêt Pourri Jurassien. Et finalement, il y eut cette soirée déplorable. Entendre Alaynna s’étaler sur la part la plus sombre de son vécu avec Niallan auprès de la demoiselle de compagnie de la Duchesse Consort m’avait ravagé. Depuis la ceinture de chasteté jusqu’à son émoi face à sa maîtresse ; ou l’art qu’a l’Italienne de ne pas mesurer les conséquences de ses propos. Et à cela, s’ajouta ma sœur qui ne sut s’empêcher de remettre en question l’idée d’être bien née. Comme si tout cela ne suffisait pas, expliquant plus tard à l’une les conséquences que pourraient avoir ses propos sur les regards qui seraient portés sur elle, et à l’autre, celles qui vont à l’encontre du bien de notre nom, l’Italienne n’a pas trouvé mieux que de prendre tout le lot pour elle.

Nouvelle incompréhension, nouvelle dispute. J’ai eu beau l’avoir prévenue de ne pas perdre de vue ma noblesse, je pense qu’elle est loin d’en avoir saisi toutes les implications. Comment lui faire comprendre que pour me faire tomber, moi, c’est elle que l’on attaquera ? Comment leur faire entendre, à tous, qu’avec mon vécu, plus aucune insulte, plus aucune humiliation ne saurait m’atteindre, et que je n’aspire qu’à les protéger des répercussions que peuvent avoir leurs mots et leurs actes ?

Douleur acide.

Elle m’a craché au visage que je pouvais tout aussi bien me trouver une petite nobliaude à marier, m’a accusé de vouloir cacher Anna-Gabriella. Et de l’entendre me dire que le premier noble qui aura quelque chose à lui reprocher, elle lui collera son poing dans la tronche… Pardieu, elle n’a absolument conscience de rien. La Bourgogne, ce n’est pas comme la Franche-Comté, la Provence, l’Anjou, ou n’importe quel autre de ces duchés où l’on peut s’en prendre à la noblesse sans y risquer sa peau. Plus tard, la conversation à propos de ma sœur nous conduisit sur les chemins de notre père, de Niallan, et de l’infidélité. Je finis par lui dire qu’elle pouvait bien partir, plutôt que de songer à s’évader, si elle ne parvenait à avoir confiance en moi. Comment a-t-on pu en arriver jusque-là ? Cet échange était si décousu qu’il en a fini vide de sens pour se faire empli de reproches et d’amertume. Depuis, je réalise qu’à chacune des attaques qui lui serait portée, c’est une tempête qui s’abattrait sur moi et me mettrait à genoux.

Douleur acide.

Tandis que je déambulais sous la voûte nocturne, je n’avais de cesse de ressasser en boucle ce qui venait de se passer. Je la revoyais, comme je tentais d’apaiser les tensions avec Ayane, fixer la bague à son doigt, engouffrée dans ce profond silence lourd de tourments. De même, l’expression de son visage, le timbre de sa voix, lorsqu’elle s’en alla retrouver la petite. Et de me sentir puissant à rien, d’en arriver à me demander s’il ne valait pas mieux que je cède ma place à la tête de cette famille dont la gestion m’épuisait bien plus souvent qu’il ne l’aurait fallu. Je songeais de même à renoncer à mes terres. Mais m’en défaire signifiait avant tout me retrouver à la merci de mon passé, mettre aux déchets ma seule assurance, la seule chose qui me permette de ne plus avoir à regarder derrière-moi à chaque pas comme je ne serais plus jamais que le fugitif, défait de toute protection et de tout garde. Et puis, n’aurait-ce été l’exposer à des dangers bien plus grands encore ? L’idée de leurs mains posées sur elle m’arracha un frisson de rejet. Ainsi, j’en arrivais à me dire qu’elle serait sans doute bien mieux sans moi.

Douleur acide.

Elle sans moi ; moi sans elle. Je balayais sitôt l’idée. Bon sang, je le savais ; je savais que je n’aurais jamais dû, que je ne voulais pas, que c’était risqué et bien trop douloureux. Distance et raison auraient dû être et rester mes maîtres mots. Un engagement sans attachement, je me l’étais pourtant promis. Mais depuis, cette soirée ne me quitte pas, tant bien même je la passe sous silence. Incapable de sourire, même pour le seul paraître, et incapable de me concentrer pleinement sur autre chose, je m’efforce de chercher une solution qui ne vient pas.

_________________
En cours de reconstruction.
Niallan
[Yesterday we were brothers, oh now we're enemies !*
Hier nous étions frères, oh maintenant nous sommes ennemis !]


Plus d'un mois qu'il les a enlevées. Plus d'un mois que j'ai l'impression de lentement crever. Au début, je les ai cherchées jour et nuit, hurlant leur prénom dans le vent à m'écorcher la voix. J'en suis tombé malade, pas le temps d'aller voir un médecin que je disais. Un jour, je me suis effondré en pleine forêt, et c'est le rital qui m'a porté au lit, m'obligeant à y rester. J'étais vidé, épuisé, et pourtant impossible de dormir. Je cogitais à tous les scénarios possibles, revoyais tous les indices que j'avais pu manquer, triais les possibilités.
Un de mes créanciers fâché ? Roman ? Un autre membre de sa famille de détraqué ? Maryah ? Un mari cocufié ? Ma sœur ? La tienne ?

Chaque jour qui passait, je perdais autant de poids que d'envie de vivre.
Chaque jour qui passait me renvoyait deux ans en arrière. Lexi. La poursuite de son ravisseur avait duré un mois au cours duquel il avait eu tout le loisir de la battre, de l'affamer et de détruire son innocence. Les dents aussi serrées que les poings, j'imaginais mes deux trésors le visage tuméfié dans des conditions aussi exécrables. Je devenais dingue. Puis j'ai su. Diego m'a tout dit.

Au début, j'y croyais pas, pensant à une mauvaise blague. On parle de ma petite chouette autiste préférée, parrain d'Anna Gabriella, presque frère d'Alaynna et poto de moi. Mais devant les courbes de l'écriture italienne que je connaissais bien, j'ai été obligé de me rendre à l'évidence. J'ai viré barge, envoyant valser tout ce qui se trouvait autour de moi -avec une préférence pour les objets qui font du bruit en se cassant-. J'ai gueulé.
Je vais le tuer ! Je te jure que je vais buter cet enfoiré. Je vais lui refaire le portrait à coups de pavé, puis quand il sera au sol, j'le...
Diego avait essayé de me calmer, sans y parvenir. Il m'avait dit qu'on allait la retrouver, que je l'aurais ma vengeance. Mais pas maintenant, pas tout de suite.

En attendant le « pas maintenant pas tout de suite », je m'étais entraîné. Beaucoup, longtemps. D'abord, j'avais cogné sur des arbres, me détruisant les phalanges. Sauf qu'ils rendaient pas assez les coups à mon goût alors je suis passé aux gens. Ils prenaient au moins autant qu'ils rendaient, souvent plus. Je revenais vers le campement la gueule cassée, sans rien expliquer, seul le rital savait et comprenait. Et chaque jour la même rengaine :
C'est quand qu'on y va ?
Et chaque jour la même réponse « attends encore un peu ». Je multipliais les entraînements devant l'attente interminable, jusqu'au jour où j'ai craqué. Aujourd'hui.

Les bagages sont faits mais on bouge pas. Je comprends pas.
Si ça continue, je me casse tout seul. Commencent à me faire chier, tous...
Marmonnant à qui mieux mieux, j'ai fini par trouver un moyen de rendre l'attente moins insupportable. Ignorant les conseils amicaux, j'ai sorti de quoi écrire, me suis remonté les manches et ai entamé cette rédaction :

Citation:
Crevure d'ordure,

Je sais tout.

J'aurais pu passer outre les parties de jambes en l'air qui s'apparentent pourtant à un premier coup de couteau dans le dos. D'ailleurs, soit dit en passant, si j'ai à nouveau l'occasion de coucher avec la russe, tu peux être sûr que je ne m'en priverais pas par respect pour toi et lui montrerais ce qu'un homme en possession de tous ses attributs virils peut lui faire.

Mais ce que je ne peux pas pardonner c'est ce que tu leur as fait, ce que tu nous as fait. Tu me les as arrachées sans penser une seule seconde à tout le mal que ça pouvait faire. Tu te justifies en disant que c'était pour l'empêcher de se tuer, tu te dis que tu l'as fait pour elles, pour sauver l'une et éviter l'orphelinat de mère à l'autre. Mais c'est faux. Rien ne justifie d'envoyer tes larbins capturer une femme et sa fille, rien ne justifie de les séquestrer dans ton foutu manoir au fin fond de la Bourgogne.

Tu l'as fait par pur égoïsme. Tu les voulais pour toi tout seul. Dis-moi, ça fait combien de temps que t'as envie d'elle ? Tu t'en es rendu compte avant ou après m'avoir dit qu'on était amis, avant ou après avoir fait de moi ton cousin ? J'ai toujours su que la famille c'était de la merde et pourtant, je pensais pas avoir autant raison. T'es pire que ma sœur et c'est pas peu dire. J'aurais dû me méfier de la mention « presque » annexée à votre relation fraternelle.

Tu l'as fait par jalousie. T'aurais voulu être le seul parrain et sûrement le papa.
Mais laisse-moi te dire une bonne chose, Diego est le seul parrain qu'Anna aura jamais et c'est MA fille. Le seul gosse que t'auras sera de la famille des palmipèdes, le seul « papa » que t'entendras sera traduit en un « coin coin ». Dans un accès de colère, tu finiras par déplumer ce fameux canard sur le lit d'une auberge, auprès d'une catin que tu auras elle aussi tuée par sociopathie profonde.

T'es aussi instable qu'un château de cartes exposé à une tornade.
T'es plus taré que tous les patients d'un asile réunis.
T'es du poison, du genre insidieux qui tue lentement et détruit tout ce qu'il touche.
T'es qu'un clébard -et c'est faire insulte à ces braves bêtes-, tes maîtres auraient dû te laisser crever ou tout du moins te garder en laisse et continuer à te rouer de coups.
T'es plus dangereux qu'une armée de Huns et plus nocif que du cyanure.
T'es qu'une merde, Gab.
Et tu t'imagines sincèrement que t'es l'homme qui lui faut ? Est-ce que tu crois, ne serait-ce qu'une seule seconde que je vais te laisser devenir son mari et le beau-père d'Anna ? Jamais je ne laisserai une telle chose arriver. Tu lis bien ? JAMAIS.

J'ai été très loin d'être le mari parfait et je suis pas tout à fait le père idéal. Mais jamais je n'ai levé la main sur une femme et on sait tous que c'est un passe-temps récurrent chez toi.
Si tu les aimes autant que tu le dis, laisse-les partir et ne t'approche plus jamais d'elles.

J'arrive et je peux t'assurer qu'après nos retrouvailles, il te manquera quelques appendices supplémentaires.

Haineusement,

Niallan.



Ouh putain, ce que ça fait du bien. Inspirant profondément, je fais craquer mes doigts qui ont couru vitesse grand V sur le parchemin. Je suis calme, du moins pour le moment, ce qui me permet de me lancer dans un atelier créatif. Durant plusieurs heures, je travaille le bois d'un chêne jusqu'à obtenir un petit cheval de bois que j'ajoute à la missive précédente, accompagné d'un post-scriptum.

Citation:
P.S : J'imagine que tu préféreras l'utiliser comme petit bois mais j'aimerai que tu donnes ce petit cheval à Alaynna, pour notre fille, histoire qu'elle ait au moins quelque chose de son père.


Il paraît qu'il faut dire « s'il te plaît », mais faut pas pousser. La colère repointe le bout de son nez et augmente mes péchés -tmtc-, je me dépêche d'expédier mon coursier pour aller me mettre en quête de défouloirs humains.

Une précision reste à apporter à cette histoire. La petite figurine de bois a été pensée comme un cheval de Troie. Une petite ouverture sous le ventre de l'animal, du style casse-tête un brin relou a été laissé. A l'intérieur, une minuscule missive destinée à l'italienne :

Citation:
Je vous laisserai pas tomber, je serai bientôt là.
T'en fais pas, ça va aller.
Je vous aime. Vous me manquez comme la vue manque à un aveugle et l'audition à un sourd.
Embrasse-la pour moi, prends soin de vous. J'arrive.
Niallan.


J'y aurais bien ajouté des thunes mais fort malheureusement pour moi, les billets n'ont pas encore été inventés et l'ouverture reste bien trop petite pour contenir un nombre suffisants d'écus.


*Paroles et traduction Rilès - Brothers

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Bannière réalisée par les grands soins de JD Calyce.
Gabriel.louis
-I’m just a soul whose intentions are good.-

Ne dit-on que l’Enfer est pavé de bonnes intentions ? C’était peut-être là toute la difficulté de mon existence. Des bonnes intentions, j’en avais plein mes tiroirs. Le problème résidait surtout en leur mise en application. Il faut dire que ma caboche trouvait toujours le moyen de ne surtout pas le faire faire en ligne droite, tout était forcément toujours tortueux.

Affaires courantes. Je détestais ça, mais il fallait bien que j’y passe. Quoi de neuf à Baarsen ? Des petits délits. Franchement, qu’est-ce que j’en avais à foutre des maraudeurs et des conflits entre paysans parce que l’arbre de l’un avait les branches d’un arbre qui dépassait sur les terres de l’autre et que l’élevage de l’autre puait jusque chez le premier ?




Pour les voleurs, on ne peut pas tous les pendre sinon on n’aura plus personne à faire travailler à force. Pour une fois suivons les attentes ducales, mettez ça en procès, que d’autres s’occupent de leur cas, mais veillez à grossir les faits reprochés, histoire qu’ils gardent mon bon souvenir. Quant aux deux nigauds, doublez leurs taxes en leur précisant que c’est pour couvrir les frais que nous coutent les juristes se penchant sur leurs difficultés en quête d’une solution équitable. Vous verrez qu’il ne leur faudra pas longtemps pour qu’ils résolvent leurs problèmes tout seuls comme des grands.


Dossier suivant. Regards sécuritaires posés vers le sud, rassemblements de population à risque, mouvements armés… Ils n’étaient pas même fichus de me faire parvenir des informations que je n’eus déjà en ma possession. Si Pyrmont avait été en danger, mon suzerain aurait été le premier à m’interpeller sur le sujet. Bande de couards bons à rien, ni plus compétents ni plus braves que d’autres conseillers d’autres duchés. Certes, si c’était pour me plaindre, j’aurai tout aussi bien pu siéger moi-même au conseil plutôt que de m’y faire représenter. Mais j’avais fait un choix, celui de laisser ma place à un autre et de rester tranquillement en France auprès des miens. Il ne tenait plus qu’à moi d’en assumer aussi les inconvénients.
Et il attendait ma position sur le sujet…. Ma position sur le sujet ? Rien à foutre.




Je suis tout à fait en accord avec l’avis de Son Altesse Sérénissime Ducale Starkel sur ce sujet, quel qu’il puisse être. Confortez-le dans ses décisions et assurez-le de notre soutien plein et entier.


Je repoussai le tout pour le remettre à plus tard afin de m’intéresser aux affaires familiales. Pardieu, encore une journée qui n’allait pas en finir.

Trouver une solution pour apaiser les choses avec Ayane. Des fleurs ? Misère… Dossier suivant.
Sebast toujours paumé dans son verger. Tout va bien.
Niallan est désinscrit des registres familiaux. Moment de flottement. Dossier suivant.
Tobias… Dossier suivant.
Draugaran. Je dépliai la missive pour commencer à la parcourir. Expéditive, comme à son habitude.


Si Monsieur me permet.
Qu’y a-t-il ?
Cela vient d’arriver.
Merci Eugène. Vous pouvez disposer… Et par pitié, changez-vous. Vous faisandez l’ail.


Je secouais la tête, dépité, en songeant aux excentricités de l’Italienne dont le pauvre Valet faisait les frais, quand mon regard s’arrêta sur le petit cheval en bois qui accompagnait le pli qu’il venait de déposer. Je remisais à plus tard le courrier de ma Tante pour m’intéresser à l’objet, intrigué. La dernière personne que j’avais vue sculpter le bois était justement Draugaran. Mais pourquoi m’aurait-elle envoyé ça, et pourquoi deux lettres à la suite ? Je dépliai le parchemin pour vérifier qu’elle en était bien l’auteur.

Citation:
Haineusement,

Niallan.


J’avais beau m’évertuer à essayer de ne pas penser à lui, son ombre me collait décidément à la peau. Cela devait arriver tôt ou tard, et le moment était venu. Je m’attendais à ses fureurs, mais je boudais l’idée de me retrouver face à celles-ci. Les sourcils froncés, je parcourus ses mots par trois fois avant de prendre la plume avec une forme de détachement presque politique pour lui répondre.




Chalon, le Deuxième de septembre 1465.
A Niallan Ozera von Znieski,

Mon cher cousin,
Le bonjour te va.

Je ne connais pas cet « art » que peut représenter une partie de jambes en l’air. Je crains d’être un peu trop respectueux de ma personne pour cela. Et puisqu’il faut rendre à César ce qui est à César, ce serait mentir que de m’approprier cette compétence-là, dès lors que c’est décidément toi qui excelles en la matière. Cela dit en passant, je te souhaite bien du plaisir parmi les froideurs Slaves. Pour ma part, je leur préfère de loin les brasiers Italiens. (Comment as-tu pu y renoncer ? Je te savais atteint, mais là, cela dépasse mon entendement !)

Il faudra que tu m’explicites un peu plus clairement en quoi je te les ai arrachées. J’ai beau avoir mes heures de démence -Je ne m’en cache pas.- elles ne sauraient pour autant me tromper au point de m’avoir fait imaginer que TU as préféré ta maîtresse à ta femme et votre fille. Oui, VOTRE fille. Pas la mienne, pas la tienne, pas la sienne, mais bel et bien la VOTRE. En outre, permets-moi de te détromper sur un autre point : Je n’envoie jamais de larbins. En revanche, ces deux précieux trésors ont pu bénéficier d’une escorte qualifiée, tant par leur aptitude à les protéger, mais également à celle de veiller sur un bébé, qui d’autant plus n’est pas n’importe lequel. Je dois tout de même avouer que la crevure d’ordure que je suis n’aurait jamais eu le cœur de laisser Alaynna et Anna-Gabriella traverser seules des centaines de lieues en dépit des dangers. Le pourrais-tu, toi ? Ah, oui, maintenant cela me revient. Si je ne me trompe pas, c’est bien toi qui leur as fait faire seules le trajet depuis la Provence jusqu’en Bretagne. De mémoire, cela leur aura valu trois attaques sur les routes tandis que tu étais débordé par d’autres amours. Une chance qu’elles en soient sorties vivantes.

Mais le jour où tu auras décidé d’accorder cinq minutes de ton précieux temps à votre fille plutôt qu’aux fessiers que tu croises, saches que tes appartements au manoir sont toujours prêts à te recevoir.

Depuis quand. Voilà qui ferait une bonne question si seulement tu étais en mesure de me croire quelle que fut ma réponse. Alors nous dirons qu’en fait, cela remonte à avant même que je vous aie rencontrés. Il y a ainsi des choses inévitables dans une vie. Destinés. On était tous les deux destinés.

Ma jalousie, vouloir être le seul parrain, pis encore, vouloir être le père de cette enfant, ce que tu peux en sortir des conneries quand même quand tu t’y mets. Et étonnamment, entre temps, je te découvre des instants où il semblerait que tu sois touché d’un éclair de lucidité. Il est presque dommage que tu en reviennes à la bassesse de vouloir frapper sous la ceinture. Cela gâche tout le contexte dans lequel je t’aurais presque attribué une pointe de génie.

Oui, Niallan, toi tu es un exemple de stabilité.
Oui, Niallan, tu es sain d’esprit.
Non, Niallan, jamais tu n’as détruit ce que tu touchais.
Quelque chose me dit que tu sauras bientôt achever ce que mes anciens maîtres n’ont pas su terminer.
C’est amusant, Alaynna aussi me dit que je suis dangereux. Pitié, ne me dis pas qu’à toi aussi ça te fait de l’effet !
Si je ne suis qu’une merde, fais attention de ne pas marcher dans les déjections, ça glisse et je ne voudrais pas que tu te blesses.

En somme, tu as raison sur toute la ligne. L’homme qu’il lui faut, ce n’est pas à elle de le choisir, mais plutôt à toi, toi qui dois sans doute être celui-ci. Tu as prouvé à quel point tu étais à la hauteur dans ce rôle. Il n’y a qu’à voir le résultat aujourd’hui. Oui, vraiment, je te trouve extrêmement bien placé pour pouvoir prétendre savoir ce qui la rend heureuse.

Heureusement que tu reconnais avoir été loin d’être le mari parfait ou encore le père idéal. Pour ce qui est de ton rôle de père, tu as encore une chance de te rattraper. Comme je te l’ai dit la dernière fois que nous nous sommes parlés, Anna-Gabriella est encore petite, elle ne se souviendra pas. Mais le temps passe vite, et les enfants grandissent encore plus vite. N’attends pas qu’il soit trop tard et qu’elle soit en âge de réaliser pour faire bien les choses. Tu sais être un bon père quand tu t’en donnes la peine. Alaynna aussi en a conscience, et même lorsque certains lui ont prétendu le contraire, je l’ai vue te défendre bec et ongles sur ce sujet. Ne la fais pas mentir.

Pour ce qui est du mari, il aurait tout de même été plus réaliste d’avouer que tu as été plus que lamentable. Tu n’as peut-être jamais levé la main sur une femme. Moi, j’ai déjà giflé Alaynna par deux fois, pour lui remettre les idées en place. Mais aucun coup ne saurait détruire plus que ce que tu as été capable de lui infliger. Sais-tu seulement comme j’ai les tripes qui se tordent et la honte que je traine lorsque je l’entends conter tes maitresses, tes ceintures de chasteté étouffant publiquement tes ardeurs, tes trahisons, et j’en passe. Détruite, suicidaire, retrouvée étendue sur une tombe, prenant son ventre pour un cimetière, se trouvant laide, mauvaise épouse, craignant d’être trahie, trompée, humiliée, et là encore, j’en passe. Alors, ne me parles pas d’appendices, quand je vois toutes les horreurs qui découlent du fait que tu n’as jamais su contrôler le tien.

Du reste, hais-moi autant que tu le voudras. Je ne trouve à rougir de rien me concernant. Je ne regrette rien. Et elle est déjà libre depuis longtemps. Il ne tient qu’à elle de faire atteler un charriot et préparer des vivres pour leur trajet. Mais là encore, tu n’es pas obligé de me croire. Viens faire ton propre constat si cela te chante, et cela permettra à la petite de pouvoir profiter de son père.

D’ici là, prends soin de toi.
Gabriel.
PS : Ne t’inquiète pas, je vais donner le cheval à Alaynna et bien lui préciser que c’est de ta part, pour Anna-Gabriella. J’espère seulement qu’elle ne m’interrogera pas quant à la nature de notre échange. Je n’ai absolument pas envie de lui faire subir des tensions supplémentaires, car je sais à quel point elle tient encore à toi.


Au plus je m’étais avancé dans la lettre, au plus j’avais recouvré ma sensibilité. Cela faisait partie de ce que j’aimais autant que je détestais chez l’Italienne, cette façon qu’elle avait de me ramener toujours à mon humanité, de me rendre fragile et faible, démuni de ma carapace impassible. Je ne sus m’empêcher de lire encore et encore les mots de Niallan. Si je m’attendais à ses fureurs, je ne m’attendais pas à ce qu’il sache autant de choses. Cela ne pouvait être qu’Elle.

Jusqu’alors, je ne m’étais pas interrogé sur le contenu de ses missives, pas plus que sur l’identité de leurs destinataires. C’était comme si l’histoire se répétait, comme si je n’avais rien appris de mes erreurs. Je savais pourtant où pouvaient mener l’excès de confiance et la liberté. J’avais été idiot, une fois de plus. Je savais pourtant, qu’elle l’aimait encore. Les vrais fantômes n’étaient pas les chimères qu’elle pourchassait dans le manoir. Les fantômes, c’était tout ce passé qu’elle transportait avec elle et qui me rongeait de l’intérieur. J’avais beau conserver une attitude impassible à chaque fois, je n’étais pas aveugle à cette omniprésence dans son attitude comme dans ses mots, et je recevais chaque référence à ses « anciennes » amours à l’instar d’une lame tranchante.

Peut-être fut-ce cette douleur qui engendra ma compassion et mon geste, peut-être fut-ce la nécessité de ne pas toucher à ceux qu’elle aimait, peut-être fut-ce parce que j’étais homme à assumer ses actes, quoi qu’ils puissent lui en coûter, ou peut-être fut-ce simplement dû à cette passion déchirante et autodestructrice qui me ramenait de même à l’esprit l’existence de cette corde dans le placard. En réalité, ce fut tout ceci à la fois.

Le coin de la lettre que je venais d’écrire rejoignit la flamme de ma chandelle, puis le parchemin enflammé, une place libre sur mon bureau, rongeant et noircissant une partie de son bois sous mon regard attentif à ce que tout soit consumé.

Lorsque je repris la plume, celle-ci resta un moment dans les airs avant de finalement rejoindre un nouveau vélin.




Niallan,

J’ai donné le cheval en bois à Alaynna en lui précisant qu’il est de ta part pour Anna-Gabriella.

Gabriel.


Ces quelques mots rejoignirent la main d’Eugène, qui les transmit à celle de l’émissaire pour qu’il s’en retourne auprès du cousin … poto … enfin, de celui qu’Alaynna aimait encore. De mon côté, ma main s’empara du cheval en bois, et bientôt, la transmit à celle de ma promise … presque sœur … enfin, de celle qui ne saurait jamais être totalement mienne.

De la part de Niallan, pour Anna.

La deuxième partie de ce prénom composé ne parvint pas à passer la barrière de mes lèvres, comme une retenue, une distance nécessaire que je posais inconsciemment, comme si je venais de réaliser que je n’aurais peut-être jamais dû avoir aucune place dans cette histoire qui ne m’avait finalement jamais été destinée. Ces mêmes lèvres s’entrouvrirent, désireuses de lui dire qu’il venait la chercher et que si tel était son choix, je ne la retiendrais pas. Mais à la place de lui prononcer des mots, elles se contentèrent de lui dessiner un sourire. Et puis de se faire papillon protecteur en se déposant à son front, protectrices de par leur silence, se faisant reflet de ce geste ressurgissant de ce temps où je n’étais que l’attentif, trahissant mon émoi de par leur infinie tendresse. Et pourtant, tout s’incrustait parfaitement à ce décor de couple quand un homme porte une attention à sa belle avant de retourner vaquer à ses occupations.

Je vais sortir Apollo, c’est son heure. A tout de suite.

Habile au cœur de mon existence brodée de faux semblants, je regagnai la porte pour m’exécuter. Après avoir couru, je m’en reviendrai plus léger.
_________________
En cours de reconstruction.
Alaynna
[Il faut vivre.] - Shy'm -

Sous une pluie d'étoile, j'ai hurlé mon amour.
Je l'aimais comme si plus rien n'existait autour.
Peu importe que la nuit tombe, peu importe, je cours.
J'ai dans l'âme une lueur, donc j'attends ton secours.
Plongée dans le noir, j'ai hurlé mon espoir.
Le temps s'était arrêté, mon amour envolé.
Peu importe que mon coeur gronde, peu importe, je cours.
Même si nous étions deux, avant que la nuit tombe.
Entre nous il y a ce monde.
J'attendrai toujours.


Un enlèvement. Une épreuve. Mais y'a t'il une signification à tout ceci ?..

J'étais si heureuse après ma première descente et remontée des Enfers.
C'est juste après que la descente aux enfers a recommencé. Pire encore que la première. Mon monde a été chamboulé par l'abandon de Niallan.
Il a volé en éclat lorsque j'ai découvert Loras. Mort.
Un véritable raz de marée s'est emparé de tout mon être. Et la nuit est venue. Pas une nuit habituelle no. Une nuit étrange, sonnant le début d'une longue attente. Une attente calme. Une attente ouatée et inquiétante. Dans le noir, et le froid.
Je voulais finir mes jours mais Il ne m'en a pas laissé le loisir, me faisant enlever. Alors que j'étais bien, très bien dans ma nuit, auprès de Loras, sur la tombe du Serbe.

Depuis, je me comportais en bonne victime, ayant pris la décision de ne pas bouger.
Parce que le premier réflexe de défense c'est la fuite. Mais je sais, en bonne chasseuse, que la fuite déclenche la Traque. Dénicher une piste, traquer, patienter et attendre le bon moment, c'était ma spécialité. Que les proies soient animales ou humaines, le plaisir était le même : chercher, trouver, tuer. Et plus les adversaires étaient rusés, plus la partie était intéressante.
Et donc j'en étais arrivé à mon second réflexe : faire la morte. Même si je me suis ratée. Acquérir le maximum d'informations sur l'environnement, avant de tenter quoi que ce soit.
Mais voilà. Un évènement imprévu avait surgi. Gabriel m'avait prise de court.
Et ce n'est pas parce que j'allais épouser Gabriel, que j'en avais oublié les conséquences de mon enlèvement. Les yeux bandés par un sac puant sur la tête, le baillon sur la bouche. Sans doute pour éviter que je reconnaisse quelqu'un. Tous ces jours passés dans cette carriole, à même le sol, sur une couverture. Les cordes rugueuses qui retenaient mes poignets que j'avais meurtri à force de tenter de me libérer. La panique en sus du sac m'aveuglant, qui rendait ma respiration saccadée et difficile.

Je ne suis plus la même depuis que Loras n'est plus. Je me suis fait des promesses lorsque je l'ai bordé pour son dernier sommeil. Mais Gabriel n'est pas n'importe qui. Et tous ces points communs...font que j'en suis là où j'en suis aujourd'hui. Gabriel ou pas, il n'en reste pas moins qu'il est un kidnappeur. Un homme dangereux et agaçant. Et j'aime les hommes dangereux et agaçants. De par son comportement, j'avais compris que Gabriel était un monstre. Je n'aurai pas du me laisser ...attendrir. Attendrie, étais-je vraiment attendrie ? Ce mot là surgit dans ma tête, sorti de nulle part, pour s'installer dans mes pensées.
Mince. Je ne les ai pas inventés ces gestes du Polonais. Les mêmes que ceux du Serbe. Folle. Voilà, je suis en train de devenir folle. En plus, voilà que je trouve que Gabriel est beau. Enfin ça n'est pas nouveau, je l'avais déjà remarqué depuis longtemps, l'air de rien.
M.ierda. Comment j'avais pu en arriver là ? Trouver mon ex presque-frère, mon ravisseur, beau, désirable et pour couronner le tout, souligner ses similitudes avec Loras.
Mais depuis quelques temps, c'est une toute autre théorie qui a germé dans mon esprit, quand je note ces points communs entre les deux Slaves. Et de cette théorie, s'ensuit le retour de celle que je pensais avoir détruit. Bien sûr que je le sais qu'elle est là et je fais tout pour qu'elle reste loin de moi.
Je ne veux pas que ça recommence. J'empêcherai ça.
Le souçi, c'est que le seul qui peut m'aider dans cette entreprise, c'est le Polonais. J'ignore si le Serbe aurait pu, il n'a pas connu cette facette là de ma personne. Niallan en a peur lui. Mais Gabriel, même si elle lui a fait du mal, n'a jamais semblé vraiment effrayé par elle.
Je n'en suis pas sûre, mais je crois qu'elle le fascine. Et moi Gabriel me fascine. De la même façon que Loras. Et c'est ça qui m'a perdu. Parce que la fascination a toujours engendré l'amour chez moi.

J'aime le Salaud de ma vie. J'aime un mort, Loras. J'aime Gabriel.

Diego bordel, il faut que tu entendes ça ! Il faut que tu m'aides.

Je n'en demandais pas tant quand j'ai vu surgir Gabriel devant moi, dans le petit salon.


De la part de Niallan, pour Anna.

Mon visage est resté impassible, mes mains se saisissant de l'objet. Un petit cheval de bois, sculpté par les doigts de Niallan, à n'en pas douter. Je sais qu'il aime à travailler le bois. Avant, mes yeux auraient sans doute brillés de joie, mon coeur se serait emballé au rythme des tambours de guerre. Avant.
Entre Niallan et moi maintenant il y a un Loras. Et un Gabriel.
Alors, ce sont mes doigts qui se font caressants sur le petit cheval de bois, comme pour retrouver l'empreinte des doigts de Niallan. Inconsciemment. Et c'est ainsi que mon index a ripé sous le ventre du cheval, décelant la cachette et la minuscule missive que je porte à mes yeux et relis plusieurs fois.

Je vais sortir Apollo, c’est son heure. A tout de suite.

Je glisse le petit jouet entre les mains d'Anna - Gabriella.

" - Tiens ma chérie, c'est un cadeau de papà."


Je la regarde avec émotion, porter l'objet directement à sa bouche et débiter après moi un Pa-pa.

Elle est la seule qui arrive encore à déclencher en moi autre chose qui n'est pas un semblant d'indifférence. Gabriel y parvient aisément aussi, à ses heures. Je me suis tourné vers lui, et j'ai claqué:


" - No. Ce n'est pas l'heure d'Apollo. Et j'ai besoin de toi."

J'ai tendu ma main tenant le petit bout de vélin vers lui.
_________________
Gabriel.louis


Serait-elle, à ma place, plus forte qu’un homme
Au bout de ces impasses où elle m’abandonne
Vivre l’Enfer. Mourir au combat. Faut-il pour lui plaire aller jusque-là ?
Se peut-il que j’y parvienne ? Se peut-il qu’on nous pardonne ?
Se peut-il qu’on nous aime pour ce que nous sommes ?
A ma place – Zazie/Axel Bauer



La suite logique : Un Gabriel furibond et revanchard face à la supercherie Niallanesque. Mais qui a prétendu que toutes mes réactions semblaient suivre la logique de tout un chacun ?

La main posée à la poignée, je tus un soupir en m’arrêtant. Elle devait le savoir, impossible autrement. « J’ai besoin de toi. » Formule implacable dont elle n’abusait certes pas, mais à chaque fois qu’elle l’avait utilisée depuis que nous nous connaissions, j’avais répondu présent. Je me souviens encore de la première fois. Je me séparais du groupe de Kachina pour prendre ma propre route. Niallan devait se rendre auprès d’Alicina, à Narbonne. Cette étape s’annonçait brutale pour Alaynna. Je n’avais pas dérogé à ma parole, et à leur arrivée, je l’y attendais déjà pour la soutenir durant cette épreuve. « J’ai besoin de toi. » Quelques mots qui pourraient si aisément être jetés à la moindre occasion, et qui, pourtant, révélaient chez elle une profondeur bien particulière. Parfois, le problème était assez évident, d’autres fois, il me fallait sonder bien plus loin pour en déterminer la nature et l’ampleur.

Je me retournais pour m’adosser à la porte, et mon regard se posa sur le morceau de parchemin, brièvement. Il ne me fallut que ce coup d’œil pour en relever l’auteur. Lui offrant un sourire détaché, je ne voulais pas en prendre connaissance, mais elle ne l’entendait pas de cette oreille.


Lis-le. Que tu vois tout comme moi jusqu'où il est capable d'aller.

Là elle venait de piquer ma curiosité, et je n’hésitai plus longtemps pour lire. De fait, je m’attendais à quelques termes qui tournaient autour de mon futur décès. Etrangement, il n’en était rien. Alors pourquoi ce « jusqu’où il est capable d’aller » ? L’impassibilité dans le ton comme dans l’attitude de l’Italienne, jurait avec ses propos, d’autant plus quand elle enchaina en me demandant de l’empêcher de balancer son poing dans la gueule de Niallan lorsqu’il serait là. Plus encore lorsqu’après avoir récupéré son message, elle le brûla sans plus y porter le moindre intérêt.

Pourquoi me l’avait-elle montré ? Pourquoi, elle qui l’aimait encore, n’était-elle pas en joie aux mots du blond, et les lui reprochait ? Et pourquoi me prétendait-elle que tout ce qui l’importait c’était qu’il se comporte en père avec leur fille. Certes, je pouvais comprendre qu’elle puisse trouver que ce discours arrive un peu tard, mais elle, pourtant si sanguine, me laissait une impression de m’avoir demandé de lui passer le pot de sel. La main glissée à sa hanche, j’inclinai la tête en l’observant comme elle s’en revint à moi. Sous ses questionnements, j’éludai rapidement le contenu du message que j’avais moi-même reçu, me contentant de lui dire qu’elle devait bien se douter qu’il n’était pas content.


Et j'ai des choses plus importantes que lui en ce moment qui me tiennent à cœur.

Là, sa paume contre ma joue, je pensais qu’elle parlait de moi, du moins, je l’espérais très très fort. J’en nichais même le nez au creux de son cou. Sauf que… non. Elle enchaîna sur les conditions de vie de Bloodwen.

Tel était mon quotidien auprès de l’Italienne : une suite sans fin d’une logique complètement tordue n’appartenant qu’à elle. Autant dire qu’entre la sienne et la mienne, rien n’était jamais simple. Ainsi, une troupe était en route pour « la sauver » des griffes du grand méchant Gabriel, c’est à moi qu’elle demandait de l’empêcher de frapper son ex qui lui-même n’avait qu’une seule envie, celle de me faire la peau. Tout ceci la laissait de marbre, mais par contre, le confort de la boniche me valait un esclandre.


J’avais beau lui rappeler que nous vivions dans un manoir et non dans un château, elle ne démordait pas. Elle voulait absolument que je trouve une solution alors que, primo, j’avais bien d’autres préoccupations dans la vie que de régler les problèmes d’intendance des domestiques ; secundo, s’il y avait un confort dont je n’avais absolument rien à foutre, c’était bien celui de l’albinos ; et tertio, c’était quoi franchement cette menace d’aller dormir par terre comme elle et avec elle ? Je vous épargne les histoires de la pauvre petite qui en plus n’aurait pas suffisamment à manger pour sauter directement au passage des chauves-souris. Oui, les histoires de fantômes n’étaient visiblement plus suffisantes, elle s’imaginait désormais des chauves-souris.

Mi-agacé, mi-blasé, je la regardais fuir de mes bras et commençais à énumérer sur mes doigts.


Wiktoria a à peine de la place pour sa couche ses affaires et son chevet, les autres chambres sont occupées par Eugène et Ludry, la dernière est à Abbygaelle, je ne vais quand même pas dire à ma Tante lorsqu'elle rentrera que sa Gouvernante ne peut plus dormir sous le même toit ! Quant aux autres, ils ne résident même pas ici parce que je-n'ai-pas-la-place ! Je fais quoi, moi ? Je demande à Eugène de partager son lit avec elle ? Il aurait tôt fait de l'étrangler si ce n'est lui qui trépasse avant rien qu'à l'idée. A Ludry, peut-être ? Je doute fortement qu'elle préfère cette option à celle de dormir là où elle est actuellement ! Non, vraiment, je n'ai aucune solution, et tu auras beau chercher, tu ne trouveras rien de plus.

Il n’aurait plus manqué qu’elle me demande de libérer des appartements familiaux ou des chambres d’amis. Mais finalement, ce qui retint mon attention, ce fut ce geste d’une main lui passant au front, et je n’en fronçais que davantage les sourcils. Les rampes féminines passèrent au-dessus des flammes et je cédai subitement à toutes ses requêtes en un seul mot.

D’accord.

Ainsi, les rations quotidiennes de Bloodwen seraient revues à la hausse. Celle-ci partagerait la chambre de Ludry. Je confierais plus de missions à ce dernier pour que l’Italienne n’ait plus à trop devoir supporter sa présence. Et je veillerai de même à envoyer l’homme sur Marseille pour récupérer Epo.

Tant bien même elle s’esquivait lorsque je lui demandais ce qui la tracassait réellement, tant bien même j’en avais presque fait mon deuil, je venais de percevoir une partie de son problème.

Au soir, nous parlions de son frère et elle m’évoquait des terres brûlées. Pour ma part, je n’étais plus l’attentionné, et à son insu, j’étais redevenu l’attentif, calculateur. Le roi noir devait mettre la dame blanche en échec pour que s’élève la reine afin que le jeu retrouve son équilibre. Chaque coup devait être étudié, et cela débuterait demain : je nous positionnerais sur les vestiges du passé.

_________________
En cours de reconstruction.
Alaynna
[Qu'as tu fait ?] - Within Temptation -



Dirais-tu quelque chose si je te tuais ?
Dirais-tu quelque chose si j'essayais ?
Car tu t'es transformé en mon pire ennemi
Tu portes la haine que je ne ressens pas
Que viens-tu de faire, qu'as-tu fais ? ...
Je ne chuterai pas, ne laisserai pas cela s'en aller
Nous serons libre quand ce sera fini


Tout au long du trajet les menant aux vestiges de ce passé dont l'Italienne avait parlé, et qui avaient retenu son attention, Gabriel ne lui a pas lâché la main. Tantôts caressants, tantôt massants, ses doigts n'avaient de cesse d'en travailler les chairs, à la fois pour rappeler sa présence protectrice, mais aussi comme s'il voulait, en tentant de détendre les rampes, apaiser l'esprit d'Alaynna. Lorsque le véhicule s'arrête, il met pied à terre et l'invite à descendre, tandis que le cocher commence à descendre leurs bagages. Bientôt, ce dernier les abandonnera pour ne s'en revenir que le lendemain, ainsi qu'il en a reçu les instructions.

Je suis nerveuse bien que je refuse de me rendre à l'évidence. Peut-être aurais-je du laisser cette part là de mon passé dans l'ombre, comme je le fais depuis des années. Mais bien que je sois silencieuse sur le sujet, l'absence, la disparition de mon frère, mon jumeau, me reste cruelle et il me manque terriblement. Les attentions de Gabriel ne me sont pas passées inaperçues. Et même que je ne lâcherais sa main pour rien au monde. Plus on se rapprochent et plus je sens comme un étau se resserer autour de ma gorge. Quand le véhicule s'immobilise, je descends, à la suite de Gabriel, dardant un œil sur nos bagages.

Doucement, il se glisse derrière elle, cernant la taille à deux bras et la picorant du creux du cou jusqu'à l'oreille. Puis sur un ton amusé, comme il tente de la distraire.
Tu vas pouvoir me découvrir un nouveau talent.

Je me détend quelque peu contre lui, ne prêtant guère attention à ce qu'il se passe autour de nous. “ - Lequel ?”

Monteur de tente, madame ! Le meilleur qu'ait jamais connu ce siècle ! ... ou pas.

“ - Ah effectivement, je ne te connaissais pas ce talent, ou du moins je ne t'ai jamais vu à l'œuvre.”
Ne t'en fais pas, je suis l'homme de la situation ! Je vais nous sauver ! Alors que le véhicule s'en retourne d'où il vient, Gabriel la libère en clamant Je vais même te montrer ça immédiatement. sauf que s'en vient alors déjà le premier point rassurant. Euh... le bagage ressemble à quoi déjà ?

Je suis du regard le véhicule qui s'en repart et déglutit. Me tourne un peu dans tous les sens, me passe une main sur le front, la relaisse tomber pour fixer Gabriel un instant.

“ - Je n’en sais foutre rien à quoi ça peut ressembler, regarde dans les bagages les plus légers.”

Sitôt dit, sitôt fait, il commence à soupeser les affaires les unes après les autres, entrouvrant ce qui lui semble être plus léger, et à force de persévérance, finit bien par trouver. D'un regard circulaire, il inspecte le terrain pour trouver l'endroit le plus propice, et y traîne sa charge avant de commencer à tout sortir et étaler autour de lui, visiblement perdu au milieu du fatras.

Je l'observe un petit moment, me demandant si je vais le laisser se dépatouiller tout seul ou pas. Me rapproche et me baisse pour regarder le barda qu'il a étalé au sol. Me penche pour faire rouler jusqu'à lui une première toile, zyeute les pieux au sol et trie les plus grands et les plus petits.
“ - D'abord étendre la toile du sol et après planter les pieux les plus grands, ceux de l'armature de la tente. “
Se redresse tout en le regardant. Ce n'est pas comme si je n’avais jamais monté de tente.

Il se gratte la joue en la regardant faire, puis se résigne en l'entendant : en fait, l'homme de la situation, c'est sa femme. Mais fierté oblige, il crispe un léger sourire sous son regard. Exactement. Qui oserait lui dire qu'il n'en savait rien ? Il se redresse à son tour et se penche pour étendre la toile comme explicité.

Je continue d'inspecter ce qu'il y a au sol et lui dit simplement
“ - Les petits pieux c'est pour faire tenir la grande toile de la tente, et les tapis là, c'est pour mettre au sol.” Se redresse et se recule un peu. “ - Je dormais sous la tente l'hiver, quand je me suis enfuie de chez moi pour retrouver Julian.” Là encore, une période dont je ne parle quasiment pas, qui imaginerait que j’ai pu passer deux années sur les chemins à chercher mon frère avant que je ne reçoive enfin de ses nouvelles. Et pourtant aujourd'hui, j’ai ce sentiment d'être revenue au point de départ, même si je ne le cherche plus. Il n'est pas là, auprès de moi.

Cette nouvelle évocation ne manque pas de retenir son attention, et continuant à suivre ses instructions, il rebondit avec un air qui se veut pourtant détaché.
Tu vivais de quoi ?

Tout en l'observant, lui répond. “ - De mes économies et de l'argent de ma dot que j'ai volé dans le bureau de mon paternel en partant. Il voulait me faire épouser un vieux baron malade et vicieux. Et je dressais quelques chevaux ou m'en occupais contre le couvert et un toit quand il faisait vraiment trop froid dehors. Jusqu'à la nuit où je me suis retrouvé face à mon frère et qu'il redisparaisse pour m'écrire quelques mois plus tard qu'il m'attendait à Pau.”

Il fronce les sourcils, figeant un instant ses gestes pour ramener les aciers sur elle. Tu as fait tout ça pour le trouver et lui a disparu à nouveau ?

Je ferme un instant les yeux, me passe encore une main sur le front et prend le parti d'éviter les aciers, gardant la tête obstinément baissée au sol. “ - Je..hum..je ne me souviens pas de tout cette nuit là. Je sais que j'ai vu Julian surgir devant moi et que je suis tombé inconsciente. Je me suis réveillée dans un lit, Julian était là. Et..et il m'a dit qu'il fallait que l'on continue notre chemin chacun de notre côté, que l'on devait faire nos propres vies. Que c'était mieux pour...nous. Pour lui. Il m'a fait promettre de me trouver un homme et que lui se trouverait une femme. Lui, c'est ce qu'il a fait. Il s'est marié, il a eu des enfants. Deux jumelles. Et quand sa femme et ses filles sont mortes, il a quitté l'Helvétie pour aller vivre à Pau et il m'a écrit pour que je le rejoigne.” Garde le regard obstinément détourné de celui de Gabriel, car j’ai mis très longtemps à comprendre pourquoi mon jumeau avait agi ainsi. Mais je pense le savoir aujourd'hui.

Ses hésitations, cette façon qu'elle a de fuir son regard, le trouble pesant des non dits, rien ne lui échappe. Songeur, il détache pourtant les aciers et conserve le silence en reconcentrant ses efforts sur son ouvrage tandis que lentement, les informations du passé lui reviennent, se mêlent aux présentes et tissent leur toile pour laisser présumer quelques scénarios comblant les zones sombres de son histoire. Mais la seule réponse qu'il émet pour le moment n'est jamais que superficielle.


Je suis navré pour sa femme et tes nièces.
“ - Je ne les ai pas connu. Il m'en a parlé quand je l'ai rejoint sur Pau. Ils se sont mariés en Bretagne et ils sont repartis en Helvétie. Elle a eu les petites, il en était fou. Et un beau jour elle s'est fait la malle, il a réussi à retrouver leur trace, elle se faisait toujours appeler par son nom à lui mais elle était repartie avec un de ses anciens amants. Julian l'a re-séduite. Exprès. Pour mieux la laisser tomber ensuite. Mais en se vengeant ainsi, il n'avait pas du tout prévu qu'elle tuerait leurs filles et se donnerait la mort ensuite.”
Décidément, la vie n'épargne personne… Il se redresse en tirant sur la toile pour la fixer. Et toi, qu'as-tu fait entre le temps où il a disparu et celui où il t'a dit qu'il était à Pau ?
“ - Je m'étais arrêté dans un village en Auvergne. J'y suis restée quelques mois. Deux, trois, je ne sais plus. Et puis j'ai repris la route, je me suis remise à le chercher. Et c'est sa missive qui m'a trouvé.” Finit par se laisser happer par les aciers.
Là tu me donnes les banalités géographiques. Ce que je veux savoir, c'est comment tu l'as vécu.

Une fois son ouvrage achevé, il commence à rassembler les affaires près de l'ouverture, glissant les couvertures de laine par dessus les tapis, suivies des coussins. Mais les aciers, eux s'en reviennent invariablement se fondre aux bleus, attentifs.

Le corps se fige à la question. En arrêt, comme tétanisé. Voilà que ça se met à secouer là-dedans, et je prends une longue inspiration.


“ - Moi je l'ai bien vécu. J'espérais qu'il ait trouvé ce qu'il cherchait et qu'il soit heureux.” La dextre se porte sur le front, le masse du fond de la paume de sa main. Une certaine fébrilité dans la voix alors qu'elle demande “ - Veux tu de l'aide ?”

Se redressant, il élude complètement sa question et s'en vient vers elle. Tu as été battue maintes fois pour avoir tenté de le retrouver. Dieu sait quels moments pénibles tu as dû vivre en plus de ce que tu as bien voulu me concéder en me parlant de ta petite escapade menant à lui. Les conditions de vos retrouvailles laissent entendre que le contexte de celles-ci devait être assez particulier. Lui s'en va aussi sec en décidant que c'était mieux pour vous. Et tu l'as bien vécu.

Le regarde arriver et d’instinct, sent le danger qui pointe. Se recule légèrement, accuse chacun de ses mots en blêmissant, recule encore, manque trébucher sur une pierre, fait encore quelques pas en arrière. “ - Tais toi ! Ne me parle pas de toutes ces fois où j'ai été battue. Ne me parle plus de lui, ne me parle plus d'eux. Arrête.” Plaque ses mains sur ses tempes et grogne “ - Et toi, dégage de là ! Vattene !*” Se recule un peu plus encore pour faire un demi-tour sur elle-même et se met à courir à travers les arbres.

Il la suit des yeux tandis qu'elle fuit, et la tête s'incline lentement vers l'épaule. Si elle le voyait à cet instant, nul doute qu'elle pourrait apercevoir la lumière prédatrice redorer les aciers, à l'instar des lèvres s'étirant d'un fin rictus satisfait. Elle aurait pu aussi le surprendre à faire quelques pas lents dans sa direction, comme s'il s'amusait à lui laisser prendre un peu d'avance, avant de finalement s'élancer à sa poursuite.

Italienne en mode détalage complet, qui court vite et saute par dessus les obstacles, mais qui sait très bien qu'il y en a un qui court plus vite qu'elle et qui va me traquer. Bifurque une première fois tout en continuant de seriner des
“ - Vattene” à tout và, file tout droit sans prêter attention aux petites branches que je me prends de temps à autres sur le visage et qui me griffent, bifurque une seconde fois et m'immobilise en découvrant les hautes pierres calcinées qui émergent dans toute leur splendeur. Réalisant où je me trouve, regarde l'endroit avec dans les yeux une lueur de haine et de panique mêlées qui y flamboient, tout en cherchant à retrouver mon souffle. Puis sans crier gare, je me mets à hurler le prénom de mon frère. “ - Julian ! Sors. Montre toi Julian, je sais que tu es là. Tu n'avais pas le droit de me laisser toute seule. Sei un malato figlio di puttana, E tu... sei solamente uno "termine offensivo", con cui dobbiamo regolarci.”**

Les foulées masculines sont aussi amples que rapides, le regard voguant entre son environnement proche et la silhouette italienne en mouvement. L'avant-bras dressé de sorte à ce que la main lui reste proche du front lui permet de n'avoir pas à se préoccuper et à ralentir face aux branchages jonchant son chemin. Bientôt les pieds dérapent sur les dernières zones terreuses au sortir de la forêt. Si Elle interpelle son frère, ce n'est pourtant pas lui qui surgit derrière elle, d'un pas recouvrant toute sa sérénité. Mains jointes dans le dos, il évolue ainsi vers elle.

Non, il n'aurait pas dû te laisser seule, mais il l'a fait. Et tu auras beau t'égosiller, il y a peu de chances qu'il soit là. Mais peut-être a-t-il des raisons de te fuir. Peut-être que c'est le même genre de raison qui te pousse souvent à la fuite, toi aussi. Ca s'appelle la peur.

Un bras se tend en direction de Gabriel, le regard toujours haineux et paniqué se pose sur lui et la voix se fait dure alors que la lueur paniquée s'estompe, ne laissant place qu'à la haine et un sourire cynique.

“ - Toi, ne nous approche pas, reste en dehors de ça. Il ne me fuit pas, il ne m'a jamais fui. On ne fuit pas ce que l'on veut. Il m'a toujours voulu, il me veut encore, il refuse toute relation parce qu'il n'y en a qu'une seule qu'il veut. Il a mis le feu à cet endroit et s'est fait passer pour mort, il a changé de nom, uniquement pour me retrouver. Parce que sans moi il est perdu, tout comme je le suis sans lui. Il n'a jamais eu peur de moi. Je n'ai jamais eu peur de lui. Elle avait peur de lui, mais pas moi. Toi tu vas épouser la froussarde, celle qui veut se donner la mort. Moi je veux vivre, pour le retrouver. Lui. Et tu...ne me fais pas peur.”

Bien sûr que je sais quelle partie de moi n'a pas peur de Gabriel et quelle autre le craint. Mais là en l'occurrence, la main ne va plus frotter le front et l'attitude de la silhouette féminine se fait victorieuse. J’ai eu le dessus cette fois et cela faisait quelques temps que ce n'était plus arrivé.

Il t'a tant et si bien toujours voulu qu'il est présent, là, maintenant. Continuant d'évoluer vers elle, il jette un regard à droite, un autre à gauche, puis s'en revient à elle. Ah, tiens, non, il n'est pas là, étrange. Sais-tu ce qui m'amuse le plus dans tout ça ? C'est que tu crachais sur l'idée qu'elle puisse courir après un Niallan qui s'évertuait à la fuir. Mais lui ce n'était pas par peur, c'était par vice. N'était-ce pas son acceptation d'une situation intolérable qui la rendait si faible à tes yeux ? Et maintenant, que fais-tu, toi ? Tu cours après un homme qui n'a de cesse de partir ailleurs dès que votre regard se pose sur un autre homme. Mais je suis ravi de savoir que tu n'as pas peur de moi, parce que cela veut dire que tu n'as aucune raison de fuir. Après tout, je ne suis pas si dangereux.
“ - Toi dangereux ? Non mais laisse moi rire. Je n'ai jamais compris pourquoi elle te trouve dangereux. Tu n'es pas dangereux. Tu es un démon. Tout comme moi. Pourquoi voudrais tu que j'ai peur de ce qui me ressemble ? Et il n'est pas parti ailleurs à cause de moi, il est parti ailleurs à cause d'elle. C'est elle qui a posé le regard sur d'autres hommes. Pas moi. Tu as conscience qu'elle aimera toujours Niallan malgré tout ce qu'elle a subi par sa faute ? Tu as conscience qu'elle adule un mort ? Qui te dit qu'elle ne joue pas avec toi pour gagner du temps à l'heure actuelle ? Ah non. C'est ma spécialité ça. Pas la sienne. Je la soupçonne de vraiment t'aimer. Elle serait bien assez idiote pour s'amouracher de toi. Parce que tu lui rappelles Loras peut-être ? Ou bien est ce toi qu'elle a vu en lui ? Elle ne s'inquiète pas de Julian, elle ne le cherche même pas. Elle le croit mort. Moi je sais qu'il ne l'est pas. Et qu'un jour ou l'autre, il va ressurgir.”

J’esquisse quelques pas vers lui, pour lui montrer que je n'ai pas peur. Mais ne m'approche pas aussi près qu'Elle le ferait. Garde une petite distance entre nous.
Cette dernière distance, c'est lui qui la rompt, et la main glisse à la taille féminine avec la fermeté d'un contact trahissant son avidité.


Tu sais, Niallan avait caché un message pour elle, il veut jouer le sauveur, mais elle me l'a montré. Et ce que j'ai réalisé alors, c'est que s'il y a quelqu'un qui s'évertue à me fuir depuis tout ce temps, ce n'est pas vraiment elle, c'est plutôt quelque chose d'autre qui l'y pousse. Quelque chose qui fait aussi qu'il la croit toujours prisonnière. Et je suis intimement convaincu que cette même chose ne crève pas seulement d'envie d'être auprès de Julian, mais également d'être auprès de moi. Sauf que Julian est rassurant parce qu'il y aura toujours cet interdit qui ne saurait être levé, quand avec moi, cet interdit n'était pas si infranchissable. Mais il est trop tard, elle m'appartient, et de fait, tu m'appartiens. Tu auras beau lutter, tu ne pourras plus jamais parvenir à vous éloigner de moi.

De cynique, le sourire se fait carnassier, alors que je ne cherche pas à m'extirper de cette main qui étreint ma taille. J’ai vu la lueur dans les yeux masculins. “ - Je ne pourrais plus jamais parvenir à nous éloigner de toi ? En es tu bien certain ? Laisse moi coincer Niallan et c'est ce que l'on va voir. A ton avis ? Qui d'elle ou de moi le fait venir ? Aussi étrange que cela puisse paraître, ce n'est pas elle, mais c'est moi. Elle aurait bien été foutu de lui écrire qu'elle t'aime. Tu sais qu'il l'aime toujours ? Si c'est moi qui lui cause alors qu'il pensera lui causer à elle, tu crois vraiment qu'il ne l'embarquera pas hors de tes pattes ? Une chance que Diego ne connaisse pas mon existence. Il n'y a vu que du feu et il a foncé tête baissé courrant prévenir son super poto qu'Elle court un grand danger auprès de toi. Ce n'était pas bien malin non plus de ta part de l'enlever. Quoique si, je dois reconnaître que tu m'as facilité la tâche pour ne pas qu'elle se tue. J'ai bien cru qu'elle allait y arriver cette idiote.”

L'autre main s'élève et le pouce épouse les lèvres féminines.

Et tu penses sincèrement que je ne m'en doutais pas ? Et tu crois que tout se passera comme tu l'espères ? Et tant bien même. Elle ne saurait rester loin de moi, et même toi, cela finirait par te ronger. Mais il va falloir que je t'explique une petite chose ou deux. Tu pourras bien jouer l'indifférence et la haine aussi longtemps que tu le voudras. Ce qui est certain, c'est que tu ne m'échapperas plus, et autant je lui fais l'amour à elle, autant je te prendrai comme tu le mérites, parce qu'elle et toi, vous n'êtes qu'une et vous êtes miennes. Vous porterez mes enfants, et peut-être même plus tôt que tu ne le penses. Et de lui murmurer à fleur d'oreille. Si tu venais à t'évader en portant mon enfant en toi, crois-tu que toi, ou Niallan, ou Diego seriez capable de résister à toute ma famille, à tous mes proches, ainsi qu'à tous nos alliés et soutiens ? Tu n'aurais plus un seul endroit où te cacher, j'aurai toujours des yeux derrière toi pour t'épier, et des bras pour te ramener. C'est fini, tu as perdu.
“ - Nous porterons tes enfants ? Alors là, n'en espère pas trop parce que ça n'arrivera jamais. Et quand bien même ce fait hautement improbable se produirait, je ne donnerai pas cher de leurs vies si j'étais toi. Parce que je m'arrangerai pour qu'ils crèvent. Tous autant qu'ils sont. Après tout, nous sommes douées pour faire crever la vie que l'on peut porter. Et ce n'est pas parce qu'elle est tienne que moi je le suis, et je ne le serai jamais, quand bien même tu t'y emploierai. Je n'ai en rien perdu, je n'ai pas peur de toi, contrairement à elle pour qui tu comptes tant, moi, tu m'es totalement indifférent. Je te la laisse bien volontiers, il faudra te contenter de ce que tu as.” D'un geste de l'index, repousse le doigt masculin qui est à ses lèvres. “ - Cela fonctionne peut être avec elle mais pas avec moi. Ne me touche pas.”

Il aurait pu rétorquer à nouveau, mais à cette façon dont elle lui repousse le doigt, les lèvres s'étirent en un nouveau sourire. Les mots ne sont jamais que des mots, avec leur influence comme leur limites. Et s'il avait voulu s'étendre en débats, il ne serait pas ici présentement, mais sur la scène politique. Non, pour l'heure il nourrit d'autres projets, d'autres désirs, et il ne lui échappe pas qu'en sa rébellion, la belle nourrit les mêmes. Si la main s'est trouvée repoussée, elle n'en revient pas moins pour autant à la charge, empoignant cette fois la chevelure à plein chignon.

Mais qui t'a demandé ton avis ?
“ - Lache ce chignon tout de suite ! N'y touche pas, tu n'as aucunement le droit d'y poser ta main dessus ! Et je me moque que tu me demandes mon avis, je te fais part des choses telles qu'elles seraient. Mais cela ne se produira pas, parce que c'est impossible.” Essaie de libérer ma chevelure des mains intrusives alors que les bleus lui lancent des éclairs de haine.
Tu apprendras que lorsque je veux vraiment quelque chose, rien ne m'est jamais impossible.

Les aciers restent profondément fichés aux bleus, dédaignant leur expression haineuse, tandis que l'autre main rejoint le chignon pour lui ôter avec précaution sa fibule, avant de lui concéder sa libération. Et tranquillement, il s'éloigne de quelques pas pour déposer l'objet en sécurité.
Je suffoque à la fois de rage et de panique quand je m’aperçois du geste qu'il ose avoir. Même si ce n'est pas le seul objet que je possède de la main de Loras, c'est le geste en lui-même qui vient de m’arracher le cœur. Les narines frémissantes de colère, je le suis.
” - Tu te prends pour qui pour te permettre de démolir ce qu'un autre a construit ? Tu crois peut-être que ça va nous faire l'oublier ? Tu as tout faux. Alors remets cette fibule en place tout de suite ! Tu n'avais pas le droit d'y poser ne serait-ce qu'un doigt dessus.

Il fait volte face et s'avance vers elle, encore et toujours plus, au risque qu'elle se voit dans l'obligation elle-même de reculer. Je me prends pour celui qui ne prendra pas le risque de briser un présent de valeur aux yeux de ma femme. Une fois de plus, je ne t'ai absolument pas demandé ton avis, et je te déconseille de tenter à nouveau de me donner des ordres. Est-ce bien clair ?

Le fixe sauvagement et sans le quitter du regard, crache en sa direction. Ce n'est pas parce que j'entends ce que tu dis, que je suivrai tes conseils. Et elle n'est pas ta femme, vous n'êtes pas mariés. Détourne le regard et va s'asseoir sur une pierre, les mains perdues dans ses cheveux, le visage enfoui contre ses genoux, incapable de maîtriser les tremblements qui viennent de la saisir. Les mêmes que ceux qu'elle a eu lorsqu'elle a découvert Loras, gisant sur cette terre, le cœur percé et souillé de tout ce sang poisseux qu'elle avait mis des heures à lui nettoyer.

Il ferme les yeux face à cet affront, le temps de s'en défaire négligemment d'une main coulant au visage, les commissures des lèvres brisées d'un pli mauvais. Au vu de la colère qui darde à lui en faire ressortir les veines, seule la posture qu'il lui découvre ensuite permet à l'Italienne d'échapper de justesse à ses fureurs. Mais la limite est désormais mince, et la mordre serait aisé. Il la considère longuement, tout à sa réflexion. Il sait que ce n'est pas la seule douleur qui saurait leur être profitable. Il sait aussi que la consoler maintenant ne servirait à rien, et la regarder souffrir lui est juste insupportable. Non, ce qu'il faut c'est de la colère, et rien que de la colère. Il décide de tenter le tout pour le tout, dans l'espoir de la faire réagir.


Bien. Je vois que tout ceci ne mène à rien, alors inutile d'insister.

Et de tourner les talons comme pour s'éloigner. Mais il a bien conscience également que s'il ne fait que de partir, elle restera prostrée là, alors sur son passage, il n'a d'autre choix que de ramasser à nouveau l'objet du délit, pour l'emporter avec lui.

Redressant lentement la tête, c'est pour mieux le voir ramasser MON trésor et se carapater avec. Le sang italien ne fait qu'un tour, la rage reprenant le dessus et ne faisant qu'ajouter aux tremblements déjà bien présents. Senestre s'en vient cueillir le stylet toujours soigneusement caché là où nul ne peut le déceler et Italienne emboîte le pas au Polonais, serrant son arme avec force, réduisant la distance entre eux avec l'intention de frapper non pas dans le dos, ce serait trop hasardeux et encore moins glorieux, mais plutôt là ou la vie pulse, et si je suis assez rapide, si le geste est vif et précis, cette fois, je ne le manquerai pas. Reste à trouver le moyen d'atteindre cette gorge qui parle bien trop à mon goût.

Il ne s'arrête, ni ne ralentit, ni n'accélère. Il ne cherche pas même à se dérober, tant bien même, sans avoir besoin de la voir, il sait, il s'y attendait. La haine qu'il a lue dans son regard était sans doute même plus grande qu'au jour où elle lui a percé le flanc. Il a pris le risque, a allumé un brasier, et l'affronte à sa manière. Le feu, il le connaît, il sait jouer avec. Pas même agressif, pas même inquiet, le ton est aussi impassible que la cadence de son pas.


Ne me rate pas. Je mourrai, et elle aura eu raison de redouter que cela m'arrive. Alors tu ne sauras plus l'empêcher de se tuer, et tu mourras avec nous. Peut-être même qu'elle le fera sur ma tombe. Et je n'aurai plus à lutter pour me faire une place parmi votre passé, je l'aurai définitivement acquise. Oh oui, je t'en prie, ne me rate pas.

Je fronce les sourcils en le voyant ...jouer ainsi...Dans l'esprit torturé de l'italienne, Gabriel est actuellement en train de jouer avec la mort. On ne joue pas avec la mort. C'est trop facile. Loras ne voulait pas jouer avec et pourtant lui il est mort. On l'a sauvagement assassiné. Tué. J’ai vu les blessures de mes propres yeux. Agenouillée auprès de lui, j’ai eu le loisir d'imaginer, maintes et maintes fois la scène, les différentes frappes auxquelles il a pu être soumis. Un corps mort, a beau être cadavérique, il est aisé de le faire parler, surtout lorsque l’on procède à sa toilette. Et voilà que le Polonais lui demande de ne surtout pas le rater. Ah mais c'est que ça ne va pas se passer comme ça. Le pas s'accélère, jusqu'à le dépasser et se retourner pour lui faire face et lui bloquer le passage. Et dans la foulée, le stylet s'en vient lacérer la tunique, dévoilant le torse masculin, sur lequel elle pointe et s'en vient appuyer le stylet, à un endroit bien précis. Il y a dans les bleus une rage bien ancrée qui domine mais une autre lueur vient d'y luire. Les lèvres s'humectent, face à la peau masculine et la voix se fait tranchante et dure alors que le corps féminin tremble encore et que senestre s'en vient appuyer fermement sur le stylet jusqu'à ce qu'une fine goutte de sang naisse sur la lame. “ - Tu es un lâche. Comment oses tu réclamer la mort quand un autre ne la voulait pas et l'a rencontré de plein fouet ? Tu n'es pas Loras, et tu ne le seras jamais. Cesse donc de causer de ta tombe.”

Les bleus semblent se satisfaire de suivre le parcours de cette goutte de sang qui coule sur le torse masculin et ne réfrénant pas son envie, l'italienne se penche pour, d'un coup de langue, venir faire mourir cette goutte de sang, celui de Gabriel, dans sa bouche. Alors que le stylet lui, s'en descend se tracer lentement un chemin vers le bas ventre, non pas de manière agressive, mais avec une sensualité à fleur de peau. “ - Pourquoi veux tu être notre passé, alors que tu es notre présent et notre futur ? Tout du moins, les siens. Que peut-elle te trouver de plus que n'avait Loras, pour avoir rompu cette promesse que nous lui avions faite quand nous l'avons accompagné dans sa dernière demeure ?”



* Va t'en !

** Tu n'es qu'un malade d'enfoiré, un enfoiré de plus dont il va falloir s'occuper.


4 mains JD Gabriel/JD Alaynna.

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Gabriel.louis


Tout le monde cherche quelque chose.
Certains veulent t’utiliser ;
Certains veulent être utilisés ;
Certains veulent t’abuser ;
Certains veulent être abusés de toi.
Sweet Dreams - Eurythmics



Gabriel s'arrête et retrouve les profondeurs de son regard pour ne plus le quitter, tant bien même le pincement de la lame s'en vient inciser la peau. Mais au contact de ses lèvres, ce sont les siennes qui s'entrouvrent. Et leur affrontement reprend enfin, elle se targuant de colère et de pseudo-rejet, lui affichant désormais une parfaite imperméabilité à l'appel qu'elle lui crie au travers de sa lame. Il lui faut pourtant se libérer les mains de la fibule, et hésite un instant à s'en servir pour s'attacher les cheveux. Mais lorsqu'elle se trahit à nouveau en sa formule, se joignant à son présent et son futur, lui vient une toute autre idée. C'est dans la chevelure Italienne qu'il la glisse derechef.

Excuse-moi, mais en fait, à te voir pleurnicher comme ça assise sur ton caillou, j'ai réalisé à quel point tu étais faible et inintéressante. Ce sera donc son présent et son futur. Toi, tu n'auras jamais droit à rien d'autre que des restes, et encore, si je suis d'humeur généreuse, et tout le monde sait que la générosité n'est pas mon fort.

Alors que la fibule reprend finalement sa place initiale, un sourire se dessine sur les lèvres italiennes. Satisfaite d'avoir récupéré son bien. Mais là où la rage aurait dû s'apaiser, elle ne fait en fait que s'amplifier en l'entendant. Le stylet joue un instant sur le nombril avant de s'éloigner pour s'en aller, lui aussi, reprendre sa place initiale. Le front se plisse dans un pli de mécontentement. Ainsi donc, l'une aura tout et l'autre non. Le menton se redresse d'un air frondeur et les épaules se haussent. “ - Parfait. Je ne veux pas de tes restes de toute manière. J'irais me servir ailleurs, j'en connais un qui n'attend que cela.” Le regard se visse sur la silhouette du polonais, pour finalement s'en détacher. “ - Dans l'attente de mettre ce fabuleux projet à exécution, je sais que ce n'est pas poli, mais je vais te laisser et m'en aller visiter les lieux. Je suis curieuse de voir où vivait Julian, même si ce n'est plus qu'un amas de ruines.” Tapotant d'un geste plus que satisfait la fibule Serbe dans ses cheveux, s'en tourne les talons en direction des ruines. Et lance par dessus ses épaules  “- De toute façon, Loras n'a rien à t'envier. Absolument rien. Tu ne fais que passer après lui..Tu sais...les restes…” et de s'éloigner, sourire carnassier sur la trombine.

C'est ainsi que la limite est dépassée, et certainement de la pire des façons. Oh non, il ne va pas courir, elle reviendra, ou pas. Dans un cas comme dans l'autre, le résultat risque d'avoir un goût amer. Sans même un mot, il reprend son évolution en direction de leur tente désormais proche, se passant brièvement les doigts à la plaie. Le pas est ferme et décidé, et l'expression qu'il arbore est définitivement celle du purificateur. Là où c'est sale, il nettoie, et il ne faut pas longtemps pour s'emparer de son baluchon et battre le briquet. Autant dire que des couvertures en laine n'auront aucun mal à prendre.

Une silhouette qui surgit quelques temps plus tard non loin des flammes et qui s'en approche, tendant les mains vers elles. Ma visite des ruines ne m’a rien apporté de satisfaisant, aucunes traces de Julian, rien qui ne vaille réellement la peine de continuer à chercher. C'est l'odeur de la fumée qui m'a incommodée avant que je ne mette tout en œuvre pour me cacher et laisser celle qui ne craint absolument pas le feu refaire surface. Je sais qui a mis le feu, je sais que mes mensonges ont dû porter leurs fruits, mais ce n'est pas moi qui vait trinquer, mais l'autre. Moi, je regarderai,  juste pour me faire du mal encore, sachant que je n’aurais que des restes, alors que l'autre aura tout. Mais je viens de l'avoir ma vengeance, il n'y a qu'à sentir cette odeur de fumée. La silhouette brune qui tend sa main vers les flammes a t'elle conscience de ce qu'elle vient de faire ? Même si ce n'est pas vraiment elle, c'est elle tout de même. La silhouette longe les flammes tout en appelant Gabriel. Je ne cherche pas à éteindre le brasier qui prend de l'ampleur. C'est Gabriel que je cherche.

Avant de s'éloigner, il n'a laissé que la nourriture et l'eau à l'écart, les abandonnant là pour l'Italienne. Lui n'a emporté que les flasques d'alcool, enfouies dans son baluchon. Il est ensuite parti s'installer au pied du saule pleureur qu'ils avaient croisé sur la route, à moins d'une centaine de mètres en aval. Les jambes lui sont complètement coupées, tant et si bien qu'il n'a pas le goût de courir. Aucune course ne saurait être suffisante à le soulager en réalité. A défaut d'avoir un être méritant purification sous la main, la wódka peut-être, finira par avoir raison de cette douleur lancinante. Cette première flasque, touchant à son terme, a seulement permis d'atténuer la nervosité de ses muscles, pour le reste, il lui en faut définitivement plus.

Italienne qui, les yeux braqués sur les flammes, ne voit ni l'eau, ni la nourriture, pourtant non loin d'elle. Une main sur son front brûlant, je cherche à comprendre. Ce n'est pas moi qui ait allumé le feu. Donc c'est Gabriel. Reste à savoir pourquoi il a fait ça. Je tourne et retourne sur moi-même, laissant les flammes venir me lécher les bottes, sentant la panique m'envahir alors que j’appelle encore Gabriel mais n'obtient pas de réponses.
“ - Sei tu ! È la tua opera. Che cosa gli hai fatto? Ti prevengo, se gli hai fatto l'inferiore male, ti uccido. C'uccido ma ti ucciderò tu. Ti avevo vietato di avvicinarlo di nuovo.”* En panique, je continues de le chercher, me mettant à courir sur le chemin désert avant de s'immobiliser et de tourner sur moi-même plusieurs fois, cherchant si je l'aperçois. Mais c'est en pure perte et au moment où je vais pour reprendre ma route, les bleus se fixent soudain sur quelque chose de familier. La forme de cet arbre là-bas lui en rappelle un autre. Celui qui veille sur la tombe du Serbe. Celui qui veille sur la mère de Gabriel. Happée par la vision, je m’en prends la direction de l'arbre pour y découvrir l'homme que je cherche. Soulagée de le retrouver, je me laisse choir à genoux devant lui, avançant une main pour lui caresser la joue. “ - Qu'est ce que tu fais ? Qu'est ce que...qu'est ce qu'elle t'a...Qu'est ce que je t'ai fait ?”
Les aciers suivent le mouvement de la main féminine, et même s'il ne s'en défend pas, la tension qui se forme au contact n'en est pas moins présente. La flasque est balancée négligemment, puis la main revient s'enfouir dans le baluchon pour en extraire une autre.

As-tu trouvé ce que tu cherchais ?
“- Je t'ai trouvé toi. Tu aurais pu me dire que tu voulais mettre le feu, on se serait épargnés de monter la tente. Se passe la main sur le front tout en prononçant un flot d'injures en italien à l'intention d'elle-même.  “ - Je ne .. Je ne voulais pas qu'elle fasse ça. Si elle t'a fait du mal, il te faut la punir. Je ne veux pas qu'elle recommence. Tu m'entends ? Je ne veux pas encore te faire du mal. Fais ce qu'il faut pour que je ne recommence jamais plus. Sinon c'est moi qui le ferai. Je la tuerai.”

Il prélève une nouvelle gorgée, et, accoudé aux genoux, conserve le regard ancré sur le goulot. Je n'ai rien de Niallan, je ne suis pas Loras, je ne le serai jamais. Mais je finirai bien par me faire à l'idée de n'être que celui qui passe après, qui fait penser à l'un ou à l'autre et qui ne vit finalement que dans leur ombre. Quant à toi, tu n'as pas d'autre choix, il ne reste que moi. Et tu auras beau t'acharner, je ne me passerai pas de toi, parce que je t'aime, toute entière, que cela te plaise ou non. Alors il va falloir que tu t'y fasses.
“ -  Ce n'est pas toi qui vit dans leur ombre. C'est toi qui leur a imposé la tienne. Sans qu'ils n'en sachent rien. Sans que toi même tu ne le saches. Tu m'aimes toute entière mais tu veux quand même laisser des restes. Je ne veux pas des restes. Je peux me faire à tout ce que tu veux. Mais jamais je n'accepterai d'avoir des restes.” Toujours agenouillée devant lui, laisse ses bleus se perdre sur la plaie qu'elle a causé un peu plus tôt.

La main libre se lève doucement et les doigts se dirigent vers la fibule en vue de l'extraire lentement.

La senestre se lève pour venir se poser sur la main masculine qui œuvre vers la fibule, le cœur s'emballe, la gorge s'assèche et se noue, la peur, le désespoir se lisent dans les bleus. Je le tait. Mais quand il touche à cette fibule c'est comme s'il tuait de nouveau le Serbe, de ses propres mains cette fois. Les larmes et les gémissements sont retenus, ceux là ne sortiront pas , s'en allant mourir dans le fond de ma gorge. Senestre s'en retombe près de mon corps et je le laisse faire.

Ce flot de tourments qui inonde le regard féminin lui arrache un grognement de rage tandis qu'il se résigne à laisser l'objet en place. Tant pis s'il se brise, elle ne viendra pas pleurer, et tant pis si elle ne lui laisse jamais la place qu'il voudrait, il se fera celle qu'il peut, coûte que coûte, de gré, ou de force. Et de relâcher la flasque sans même la refermer, pour la saisir à la gorge et l'embrasser, le corps fondant brutalement sur le sien jusqu'à ce que les deux basculent.

Je ne m’attendais pas à me retrouver saisie à la gorge, son baiser est à la fois terrible et divin, le corps qui plonge brutalement sur le mien a le goût de l'enfer et du paradis mêlés. Et lorsque les corps basculent et que ma langue vient chercher la sienne avec avidité, une main glissant dans le dos masculin, sous le tissu, pour y laisser l'empreinte de mes ongles, l'autre main elle, retrouve le torse masculin et s'en vient s'échouer à la plaie causée un peu plus tôt. Mes jambes elles, viennent se nouer autour de leurs jumelles Polonaises, et, sachant pertinemment ce qu'elles font, les émaillées s'en viennent mordre les lèvres de Gabriel et attiser sinon son feu à lui, son feu à elle.

Si par ses griffes et ses crocs elle ne fait que l'attiser d'autant plus, il se détache malgré tout de ses lèvres en la tailladant du regard de la colère, et sans libérer son cou, la main libre lui saisit la ceinture pour la défaire sans ménagement avant de s'intéresser aux poignets en vue de les lier avec.

Le regard qu'il lui lance la glace à l'intérieur. Je retiens une plainte quand la ceinture vient cingler ma taille et entrouvre les lèvres sous la surprise, laissant échapper un murmure angoissé quand il se met en œuvre de me lier les poignets, ce qui me rappelle inévitablement mon enlèvement.
 “ - Oh no tu ne va pas faire ça ?” Tente une ruade pour se dégager de son corps, commençant à paniquer en sentant les liens sur mes poignets.

Les pieds se plantant contre le sol pour y prendre appui et forcer des épaules contre elle afin de la contenir, il achève son lien en tirant dessus avant de s'enrouler le cuir autour de la paume en grinçant :
Oh oui je vais le faire. Puis de se lever avant de l'enjoindre par sa prise à se lever de même.

Le réflexe est le même que celui que j’ai eu avec mes ravisseurs. Le corps se raidit sous la pression du sien et quand il tire sur le lien, l'obligeant ainsi à se lever, les bleus se posent sur la paume masculine autour de laquelle le lien de cuir est entouré, avec un rien d'incompréhension au début puis l'esprit se met à enrager de nouveau et le regard italien s'assombrit.

De l'autre main, il récupère son baluchon et se prépare à avancer pour reprendre le chemin inverse, en direction des flammes. Les bleus ne sauraient le tromper. S'attendant à ce qu'elle ne se montre pas très coopérante, les talons prennent d'ores et déjà un appui ferme contre le sol, et le premier à coup est donné pour lui intimer de le suivre.

Pour le moment, même si je suis en fureur et qu'il tire rudement, je le suis, n'ayant aucune idée de l'endroit où il m'emmène. Et je me fais silencieuse, les dents serrées.

Et ainsi d'évoluer en direction de la tente en flammes, et plus précisément d'un arbre non loin.


Toi qui voulais que nous fassions un grand feu, tu vas pouvoir en profiter pleinement.

A la mention du feu la silhouette féminine se statufie sur place, avant de peser comme un poids mort et d'ancrer ses pieds au sol, pour ralentir l'avancée vers les flammes. Le regard lancé est haineux avant de tenter de se concentrer pour se cacher derrière celle qui ne craint pas les flammes. Mais Elle semble avoir décidé de ne pas me faciliter la tâche. “ - C'est elle qui voulait un grand feu, c'est donc elle que tu dois contenter, pas moi”. Et les pieds de s'arc bouter un peu plus au sol afin de lui donner du fil à retordre et se laisser traîner.

Elle, toi. Toi, elle. Je n'ai pas l'intention de m'épancher sur ce genre de considérations.

Et comme il s'attendait bien à sa petite rébellion, pour les derniers mètres, il abandonne son baluchon pour venir en sus cerner la taille féminine. Il aurait bien pu la porter, mais voir et sentir sa lutte éveille en lui un étrange plaisir. Lorsqu'ils arrivent enfin à destination, le cuir est détouré de la paume, pour être sanglé à une branche dont les ramifications ne lui permettront pas de s'extraire, et menant les mains à y être liées à peine plus haut que sa tête.

Vous n'avez pas su trouver un terrain d'entente, mais cela ne m'empêchera pas de mettre tout le monde d'accord.

Je me débats quand les mains viennent à ma taille, gronde sourdement avant de comprendre que je ne pourrai pas fuir. Me penche en avant, tirant sur ses liens. “ -  Il n'y aura jamais de terrain d'entente, inutile de te fatiguer à nous mettre d'accord. Et je suis curieuse de voir comment tu vas t'y prendre.”

Du revers des doigts, il dessine lui souligne la joue, un léger rictus au bord des lèvres. Je suis navré ma Douce, je crois qu'on s'est mal compris. Présentement, je me contrefiche de votre bonne ou mauvaise relation. Là, maintenant, il n'y a que votre cohabitation qui m'intéresse. Puis de tâter l'étoffe qu'elle revêt. Où l'as-tu acheté ? Parce que bien entendu, avec face à lui l'Italienne attachée, derrière lui, les flammes lui chauffant le dos, c'est tout à fait le moment de parler chiffon.

A le palpitant qui s'emballe davantage sous le doigt masculin et ne s'en raidit que plus encore.
“ - Elle vient d'Italie, et c'est peut-être vieux mais on y tient, pour une fois, on était toutes les deux d'accord pour tenir tête à Julian qui détestait ces habits là. Nous les vestures de pirate, on aime.” Redresse la tête pour le fixer droit dans les yeux. “ - Toi non plus tu n'aimes pas.”
Si, détrompe-toi, c'est même tout à fait charmant. Sais-tu ce que j'aime également ? Se pinçant la manche, il écarte légèrement la lanière sous celle-ci pour laisser la miséricorde lui glisser dans la main. La tenue que tu viens de me lacérer. Ce n'était pas gentil. Pas gentil du tout, même. Et voilà comment on se retrouve avec un bustier et un chemisier largement ouverts en quelques passages de lame.

Les lèvres se pincent et le regard se fait furibond.
 “ - Et bien voilà, au lieu de n'acheter qu'une seule tenue pour remplacer la tienne, tu vas devoir en racheter deux pour remplacer celle-ci aussi. Ce n'est pas malin, pas malin du tout.”
L'observe d'un air provocant, pas vraiment dérangée par le fait de me retrouver à demi dénudée devant lui. Contrairement à ce que certains peuvent croire, je ne suis pas ce que l'on pourrait appeler une prude et sans verser dans la vulgarité, je sais néanmoins jouer de mes atouts quand je le désire. Mais là, il n’en est rien. S'il me veut il faudra qu'il vienne me chercher, contrairement à l'autre qui elle n'hésite pas à aller le chercher lui. Puis de toute manière, les restes, je n’en veux pas. Aussi je reste immobile, les sens aux aguets dans ce qui ressemble fort à une partie de chasse.  Mais je ne suis pas gentille moi.

Très lentement, le tissu est lacéré, morceau après morceau, libérant le derme doré sous les aciers envoûtés, et s'échouant au sol. Une fois le haut défait, c'est le bas qu'il épluche à son tour, tranchant d'abord le lacet avant de tracer de longues bandes. Bon Diable, sur fond enflammé, après s'être repu du paysage Italien, s'en revient aux bleus, sourire cruel au bord des lèvres.
Maintenant que j'y pense, ne sont-ce pas nos vêtements qui sont en train de brûler ?

Je frémis sous les aciers mais j’essaie de le réfréner, même si, sans me l'avouer, la lame qui tranche, par sa main à lui, éveille des putains d'étincelles. Le visage se fige sous le regard d'acier et les paupières se plissent sous le sourire cruel.  “ - C'est bien, tu as eu l'idée du siècle. Et maintenant que fait-on ? On fait la ronde pour célébrer les idées délirantes du baron Gabriel-Louis ? Et demain on rentre nus, comme si de rien n'était ? Ne s'affole pas outre-mesure, pour les habits du moins.
Moi, rentrer nu ? Noooon ! Toi en revanche… Et finalement de la planter ainsi, récupérant juste une bande de tissu au sol, puis s'éloignant pour aller récupérer son baluchon, entre autres.
“ - Dis moi, faut croire que la castration ne te réussit pas. Je crois plutôt qu'ils ont du se rater quelque part. En fait, tu es pire qu'un homme qui ne le serait pas. Mais tant que tu ne fais que te rincer l'œil après tout, je serai idiote de t'ôter ce petit plaisir là. Tu trouverais n'importe quel prétexte pour assouvir ton voyeurisme.” Tire sur  ses liens tout en s'inquiétant du fait qu'une partie de sa castration a été ratée.  “ - Si je crève de froid cette nuit, faudra pas venir te plaindre ensuite si je suis malade !” Grimace en sentant la chaleur des flammes devant elle. “ - Quoique si tu veux me jeter au feu, vas y, fais le tout de suite que l'on en finisse.” Laisse échapper un soupir agacé.  Et dire qu'elle aime ça elle, quand tu joues au voyeur.

Aussitôt, il s'en revient d'un pas plus vif que prévu, jetant baluchon, branche et tissu au sol, pour se diriger vers elle, défiguré par la fureur. Et de lui asséner une gifle magistrale avant de la saisir à la gorge d'une main, dressant de l'autre un index menaçant devant elle, grinçant entre ses mâchoires serrées. Plus jamais !

Le choc de la gifle allié à la poigne dure qui m’enserre la gorge et m'étouffe petit à petit n'ont de cesse de me rappeler d'autres mains et la fureur s'empare de moi , décuplée par la peur et ce sont des coups de pieds qui tentent de le surprendre afin de lui faire lâcher prise. Ce n'est plus lui que je vois  dans le brouillard qui commence à l'étreindre, mais les hommes de mon père, le paternel lui même. Et peu à peu les coups de pieds s'estompent pour en venir à ce que les jambes restent immobiles un instant, avant de ployer lentement. Les bleus se sont fermés, revivant dans le secret de leurs écrins les gestes et les sensations qui ne s'oublient pas. Le corps féminin tremble tout en ployant sous la poigne de Gabriel, les épaules s'affaissent, alors que le "plus jamais" sonne pour moi comme un ultime rejet. Son index dressé, je le sens, plutôt que je ne le vois. Alors que de la bouche féminine ne sort aucun son, aucune plainte, juste le souffle qui s'étiole, mais la fierté de la gamine d'antan est toujours la même lorsque les coups pleuvent, c'est son silence qui en provoquait d'autres, car son mutisme ne faisait que redoubler l'ardeur de ses "bourreaux". Et là, face au bourreau aimé, la réaction enfantine prend le pas sur tout le reste. La fureur a cédé la place à une presque inertie. Seules les larmes et le souffle rauque qui s'épuisent se font entendre.

Si les coups, marquant sa rébellion, n'ont fait que décupler la rage masculine, il reçoit de prime abord l'inertie dont elle fait preuve comme une forme d'acceptation. Mais les larmes, elles, sont assassines, et l'étau se libère avant qu'il ne fasse deux pas en arrière, terrifié. Il n'a fallu que ces quelques perles salées pour qu'il réalise son geste et finisse par se pétrifier. Non, il n'a jamais voulu ça. Tout est allé trop loin, et il le sait. Niallan avait raison, et lui se retrouve désœuvré, peinant à réagir. Finalement, il s'en revient pour l'enlacer d'un bras, l'autre main s'empressant de défaire la boucle de la ceinture afin de la libérer. Sous ses pieds, c'est tout un gouffre qui semble s'ouvrir. Jamais il n'aurait pensé lui faire du mal un jour, et pourtant, cette fois, ce n'était pas une simple gifle pour la raisonner, non, c'était la violence du monstre qui s'était éveillée et abattue sur l'être aimé. Pas un mot ne sort, ni pour s'excuser, ni pour tenter de se justifier. Cette fois, il sent qu'il vient de la perdre, et si elle le quitte, cela ne sera qu'à juste titre. Mais pour l'heure, c'est la paume qui glisse à la joue féminine, et les aciers qui s'enquièrent du résultat de ses excès.

La joue se détourne, les yeux aussi et la main se porte au cou, je n’ai pas besoin de tâter longuement pour sentir les cordes vocales gonflées et la douleur qui me vrille le fond de la gorge. Les tremblements ne s'apaisent pas et le corps s'en rampe jusqu'aux flammes et à plat ventre, la tête vient s'en reposer au sol, les bleus ouverts dans le vague, s'en voient disparaître doucement le brouillard. Le souffle se reprend avec difficulté, en petites lampées d'abord, puis en plus longues goulées d'air. Etrangement, les flammes semblent réveiller le brasier qui couve et l'italienne fixe un instant Gabriel, avant de s'y reprendre à deux fois pour se relever. Je passe une main dans mes cheveux, tout en avançant vers lui sans le quitter du regard. Fibule est ôtée du vestige qu'il reste de mon chignon et soigneusement déposée au pied de l'arbre, près des liens de cuir qui gisent au sol. La joue douloureuse et sans doute marquée, s'en vient, alors que je me rapproche de lui, se lover un instant fugace contre la plaie qui suinte encore sur le cœur de Gabriel.

Mais quand les bleus remontent jusqu'au visage masculin, la rage et la fureur ont fait place à une détermination sauvage. L'index féminin vient se planter sur le cœur polonais, alors que la masse de cheveux féminins court, indisciplinée sur les épaules italiennes.


“Je te veux Toi, Maintenant, et à Jamais.”  Martèle alors lentement les mots qui suivent. “ - Je-ne-veux-pas-des-restes. Je te veux Toi. Et je veux Tout de toi. Tu auras beau me frapper ça ne changera rien. Toi et moi on ne va plus se quitter. Et ton "plus jamais" je l'envoies se faire foutre en beauté. Et si j'ai envie de te refaire un compliment je le ferai que ça te plaise ou non.”

La pommette tuméfiée, le cou auréolé d'un rouge violacé n'ont plus de prise sur elle, comme déjà oublié. Tout ce qui compte pour l'italienne, c'est d'effacer ce " plus jamais".

Sa peau lui échappe, puis son regard, et s'en vient le tour de ce corps qu'il laisse fuir sans pour autant le quitter des yeux. Oui, regarde Gabriel, vois ce que tu lui as fait. Tu ne vaux pas mieux que ton père. Tu es comme lui, et peut-être pire. Et il se redresse tandis qu'elle tente de se relever, mais il ne s'approche pas, pas même pour l'aider. Ne plus la toucher pour ne plus la blesser. Il admire sa ténacité, cette force dont elle fait preuve. Alors qu'elle ôte la fibule, il s'attend à ce que la sanction tombe : cette fois, c'est elle qui se prépare à la brutalité de l'échange. Assumant toujours ses actes, il ne bouge pas, prêt à recevoir les coups sans s'en défendre. Mais ce premier contact lui fait froncer les sourcils. Quelque chose lui échappe sur l'instant, mais celui d'après, ce regard-là ne lui échappe en rien. Les lèvres s'entrouvrent à ses mots. S'est-il fourvoyé sur la teneur de ses propos ? Leur langage et leur vision du monde seraient-ils aussi différents que les compliments de l'un seraient insultes pour l'autre ? Mais ses questionnements rapidement s'étiolent face à l'Egérie.

Pardieu ce qu'elle peut-être belle, splendide, plus grande et plus majestueuse qu'une Reine. La senestre glisse au creux de son dos pour la caler contre lui, tandis que la dextre se fond dans la chevelure et l'empoigne.
Moja Suka...** Et de s'emparer de ses lèvres avec autant de fièvre que de déraison, la rage passionnée de ses sentiments se distillant à nouveau dans ses veines. C'est Elle. Ca a toujours été Elle. Il l'a eue si longtemps sous le nez et il a fallu tant de temps pour le réaliser. Elle est sa Folie, pleine de superbe.



*C'est toi, c'est ton œuvre. Que lui as tu fait ? Je te préviens que si tu lui as fait le moindre mal, je nous tue. Je me tuerai mais je te tuerai toi aussi. Je t'avais interdit de l'approcher de nouveau.
**Ma Chienne/Garce


4 mains, JD Alaynna/JD Gabriel.

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En cours de reconstruction.
Alaynna
Envolé. Disparu.

Je l'ai attendu des heures et des heures, des jours, des nuits, des semaines. Mais je ne l'ai pas cherché. No. Parce que je refuse de revivre " ça " une fois encore.

J'ai cherché Loras, mais lui, je ne le cherche pas. D'une parce que Gabriel n'est pas Loras. De deux, parce que je sais d'expérience qu'il aura effacé toute trace ou senteur qui puisse aider Apollo à le pister. Et enfin et surtout, parce que l'inquiétude latente et la terreur que j'ai pu éprouver les premiers temps, se sont peu à peu transformées en une espèce de froideur, de détachement, de je m'en foutisme aigüe.

Il avait promis alors que je ne lui extorquais aucune promesse. Il m'avait enlevé à ma vie d'avant sous prétexte qu'il voulait m'empêcher de me tuer. Mais aujourd'hui je sais. J'ai compris que la raison véritable de cet enlèvement n'était pas celle qu'il m'a dite.

J'ai compris. Gabriel ne supporte pas d'être contredit. Il veut avoir raison. Toujours. Sous un visage et un corps d'Ange Supplicié, Gabriel est en fait le Diable. Le Sans Nom. La Bête. Manipulateur. Menteur. Violent. Il a beau être noble, il a beau être libre, il a beau être érudit, j'ai compris que Gabriel sera toujours esclave de cette condition d'Esclave dans laquelle il a vécu durant de longues années.

Il avait promis de ne jamais m'abandonner. Et il a disparu. Du jour au lendemain. Et ce n'était pas la première fois que cela se produisait. Il m'avait déjà fait le coup. En m'accusant d'être la responsable de sa première disparition. Parce qu'il n'avait pas supporté, à Marseille, que je le traite d'Ordure, quand Loras m'a appris ce qu'il avait fait. Loras m'avait prévenu que si jamais Gabriel relevait la main sur une femme, il le tuerait.

Sans doute l'aurait-il fait s'il avait su que quelques mois après sa mort, Gabriel lèverait la main sur moi, et ce, à différentes reprises. C'est bien d'ailleurs la première fois que j'avais été soulagée de la mort du Serbe, car je me disais que de là où il était, il n'avait rien vu, il ne savait pas.
Sans aucun doute, Loras aurait tué Gabriel de ses propres mains s'il avait su. Alors, quoi qu'en dise Gabriel, je ne peux pas en vouloir à Niallan de lui être tombé dessus comme il l'a fait. Je ne peux pas en vouloir à Eliance d'avoir été de la partie ce soir là. Je ne peux pas en vouloir à mon meilleur ami, Diego, de me tirer la gueule aujourd'hui, parce que j'ai fini par épouser mon tortionnaire.

L'épouser. L'ai-je vraiment fait d'ailleurs ? Une cérémonie de baptême tronquée. Celle du mariage en fut de même. Pas de curé, pas de véritable mariage no ? J'ai été à bonne école avec Gabriel, puisque c'est lui-même qui m'a longuement seriné le tout, quand j'avais épousé Niallan. Ce n'était pas un mariage qu'il disait, c'était une blague.

Et donc aujourd'hui Gabriel, si tu étais là, comment qualifierais-tu notre union ? Une nouvelle blague ? Que tu es incapable d'assumer puisque ta petite protégée et toi avez disparus en même temps de la circulation ?
Si tu crois que je vais attendre un retour improbable, que je vais accepter des explications merdiques, tu te mets le doigt dans l'oeil.
Quand bien même tu reviendrai, quand bien même tu me retrouverai, quand bien même tu me frapperai encore et encore pour me faire céder et me faire rompre pour devenir marionnette désarticulée qui dirait Amen à toutes tes revendications.

Je ne sais pas dire Amen. Je ne sais pas faire semblant. Contrairement à toi. Tu es un Monstre. Et je refuse que notre fille à Niallan et moi soit élevée dans le sillage du Diable.

Alors je vais faire ce que je sais faire le mieux dans mes moments perdus. Je vais fuir. Loin. Très loin de toi et de ton emprise infernale. Tu étais même jaloux d'un mort ! M.ierda ! Tu as osé alors que tu m'as empêché de faire mon deuil, tu es allé jusqu'à me faire enlever sur SA propre tombe. Que tu sois jaloux de Niallan je pouvais le comprendre. Mais d'un Serbe mort ! JAMAIS je ne te le pardonnerai.

Tu fais chier Gabriel. Tu fais vraiment chier. Finalement, tout ce que je t'ai écrit sur cette missive, quelques semaines avant que tu ne me fasses enlever était vrai. Je te hais. Je te déteste. Et je ne veux plus que tu m'approches. Ni de près, ni de loin.
Si tu me cognes encore, je fais le serment que je te tuerai. Si tu tentes de m'approcher, je te crèverai.

La Russe a fait de toi le monstre que tu es devenu. Je reste persuadée, malgré tes mots et tes dénis, que tu l'aimes toujours.

Tu avais promis. Tu as beau cracher sur Niallan en fait, tu es comme lui. Pire que lui même. Niallan m'a humiliée et à demi détruite mais jamais il n'a levé la main sur moi. Toi..Toi. Tu m'avais promis de ne jamais m'abandonner. De ne jamais m'humilier.
Tu m'as cognée. Tu m'as menti. Tu m'as abandonnée. Tu m'as humiliée. Tu m'as renvoyée dans mes Enfers. En fait tu ne mentais pas quand tu me disais que j'étais ta chienne. Mëme Apollo, je le traite mieux que toi tu ne m'as traitée.

Bien sûr, tous ces mots, je ne suis même pas arrivée à les coucher sur un vélin avant notre départ du manoir avec Anna. Le vélin est resté étalé sur ton bureau. Vierge de toute écriture. Seule la broche lunaire que tu m'as offerte pour mon anniversaire est posée dessus.

Alors que depuis des jours, de nouveau, j'ai perdu le sommeil et que je ressasse encore et encore tout ce qu'il s'est passé ces dernières semaines.

Eugène a essayé de me retenir, mais rien n'y a fait.

J'ai pris ma fille, mon chien et ses chiots, et c'est sur le dos d'Epo, que j'avais enfin pu faire rapatrier de Marseille en Bourgogne que j'ai, sans un regard en arrière, refermé la porte sur tout ce que tu avais détruit. Je n'ai même pas fait suivre le poney que tu as offert à Anna pour son anniversaire. Je lui en offrirai un autre, ce qui ravira sans doute son père. Tous ces vêtements que tu m'avais acheté après mon enlèvement, je n'en ai pris aucun. Je porte seulement cette vesture de pirate que tu m'as racheté après avoir détruit la mienne.

Hormis mon frère et les consignes que je lui ai laissé si jamais on l'interroge à mon propos, je n'ai prévenu personne de notre départ.

Ainsi va la vie. Fallait pas jouer, tu as perdu.

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Gabriel.louis
Parfois, il suffit d’une fraction de seconde pour que toute une vie bascule.

La poussière flottant au travers d’un filet de lumière, telle une nuée d’étoiles dansante sur fond brun du vieux bois des murs ; telle fut la première image qui s’offrit à mes yeux. Je ne savais absolument pas où j’étais, et ignorais davantage comment j’y étais arrivé.

Dans mes derniers souvenirs, je chevauchais à vive allure, il y avait eu cette douleur lancinante me traversant subitement, et puis, plus rien. Attirés par un bruit, mes aciers glissèrent pour se poser sur un dos, celui d’un homme attablé, mangeant son bouillon clair. Puis ils se posèrent sur un profil féminin au visage marqué par le temps et la rudesse de la vie. Je n’interpellai personne, préférant me concentrer sur mon environnement, y quêtant mes réponses.

Une vieille chaumière aux fenêtres fermées par un cadre couvert de parchemin huilé pour toute isolation ; un mobilier sommaire et des paillasses vétustes au cœur de ce qui semblait être une pièce unique. Combien de temps avais-je dormi ?

Ma femme, ma belle-fille ; tentant brusquement de me redresser avec l’idée de les retrouver immédiatement pour seul credo, j’échappais un hurlement sous le joug de la douleur de chairs se déchirant de la couche qui avait commencé à les ronger. Ce n’est qu’après l’intervention de mes hôtes qui se voulait apaisante, que je réalisais mon inaptitude à bouger les jambes. Je ne sentais plus mes membres par-delà ma ceinture.

Quelques jours plus tard, dans l’idée où après avoir appris le départ de ma femme, seul mon cousin aurait une chance de triompher de mon laisser-aller, Eugène me fit conduire à Saulieu plutôt qu’au manoir chalonnais. Plongé dans un profond mutisme, quelque médecin s’acharnait à remuer les jambes incapables d’un propriétaire dénué d’envie.

Parfois, il suffit d’une fraction de seconde pour que toute une vie bascule, c’est ainsi que j’avais tout perdu.

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