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[RP] "Brocéliande", demeure d'Eoghann

Eoghann
      | Quelques heures plus tard. |


L'installation était faite. Eoghann avait choisi de laisser sa soeur prendre le temps de s'installer, de faire ses marques. Entre-temps, Aemon qui était revenu de ses occupations, entreprit de préparer le dîner. Ce n'était pas plus mal, il était bien meilleur cuisinier que le maître des lieux. La journée passait vite, et quoi qu'une nouvelle ère s'ouvrait pour les Dénéré-Malines, ventre creux mérite d'être rempli.
Ainsi, l'invasion avait été propice à prendre un jour de repos vis-à-vis de ses obligations, ce qu'Eoghann fit avec plaisir et soulagement. La fin d'après-midi avait été propice, sous un temps assez clément, à l'entrainement physique. Exercices basiques corporels, puis répétitions de divers mouvements d'épée contre un buste en bois abimé qui lui servait de cible. Le tout avait été terminé par quelques exercices de souplesse là-aussi des plus basiques, et les courbatures du lendemain lui ferait regretter de ne pas avoir repris l'entraînement quotidien bien plus tôt. Ensuite, une heure avait été passé dans la salle d'eau le temps de se préparer, s'occupant tantôt de ses cheveux que de sa barbe, prenant soin de profiter d'une eau chaude et savoureuse avant de s'habiller élégamment mais point trop pour leur "premier repas familial".

Petit à petit, le fumet des cuisines attira le jeune homme vers les pièces du rez-de-chaussée. Un foyer pour réchauffer des fraîcheurs du soir laissait crépiter de douces flammes, et le Dragon s'assit par terre, en face, fixant cette âtre apaisante et entêtante, attendant que la Châtaigne ait fini ses occupations pour faire servir le dîner.

C'est qu'il en avait, des questions à lui poser. Et un dîner ne serait pas suffisant pour ça, mais c'était un bon commencement.

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Adenora
[Le logis, c'est le temple de la famille.]
Le Corbusier

Il ne lui aura fallut que peu de temps pour ranger ses petites affaires, bien que de façon très ordonnée, dans la chambre.
La sienne désormais.
Le reste de l'après midi châtaigne l'a occupé par une promenade dans le jardin puis alentours, recueillant pâquerettes et autres fleurs des champs, surprenant sur le retour l'entrainement de l'If.
Elle s'est attardé à le regarder, sans manifester sa présence, admirative de l'énergie dépensée comme de son savoir faire.

Un peu avant l'heure du dîner, Adenora est remonté soigner sa mise, tout comme l'a sans doute fait, le pense t-elle, Eoghann.
Une jolie robe très simple a obtenu ses faveurs. De couleur écru, agrémentée d'un bandier noir et d'un tassel de la même couleur afin de diminuer le large décolleté de celle-ci, qui ne cache somme toute qu'un maigre relief.
Ses cheveux, longuement brossés, laissés libres cascadent sur ses frêles épaules lorsqu'elle descend enfin pour le retrouver.
Il est là.
Assis à même le sol, devant l'âtre.
Qu'il est bel homme son frère! Et sa posture à l'instant ne le rend que plus charmant.
D'un pas léger elle s'approche, pique facétieusement une fleur dans la chevelure du dragon et s'assoit sans mot dire, et sans considération aucune pour sa vêture, à ses côtés.
Un sourire étire ses lèvres lorsqu'elle lâche soudain.


Nous pourrions nous entraîner ensemble. Enfin, tu pourrais m'apprendre à me servir convenablement d'une épée.

Constatation, demande?
L'un est l'autre sans doute, ce qui lui importe à dire vrai c'est de pouvoir partager quelque chose avec lui. En tout cas, nulle envie de faire carrière une arme à la main même si elle n'hésite pas à la brandir en cas de besoin.

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Eoghann

Les flammes avaient perdu son esprit, comme d'accoutumé. Cependant, la sensation d'une chose étrangère dans sa tignasse et la présence nouvellement arrivée à ses côtés lui avaient valu de revenir dans ce monde si froid et triste qu'était la réalité, ben que la réalité fut moins désagréable depuis quelques temps qu'une ébauche de famille semblait renaître.

Nous pourrions nous entraîner ensemble. Enfin, tu pourrais m'apprendre à me servir convenablement d'une épée.

La commissure des lèvres remonte légèrement en un essai de sourire sous la très habituelle barbe. Ainsi, la Châtaigne l'avait vu. Oh, rien d'étonnant, Eoghann ne se cachait pas de ça, mais le fait que ce soit les premiers dont elle l'abreuve avant le repas avait une certaine pertinence. Quelques secondes passèrent avant que le frère ne donne la réplique.

Je pourrais, en effet.

Les mots étaient simples, dénués de tout ce qui aurait pu être superficiel. Le maniement des armes avait pour lui un sens tout particulier qu'il n'aurait su expliquer. Aussi, celui qui était plus If que Dragon à ce moment-là ne dérogea pas cette simplicité.

Pourquoi veux-tu apprendre le maniement de l'épée ?

Il observa les flammes de ses vertes prunelles une dernière fois avant de les tourner, tout comme son visage, en direction d'Adenora.

C'est un apprentissage long, qui demande une certaine rigueur, et autant de volonté dans l'esprit que dans le corps.

Le visage d'Eoghann, lorsqu'il parlait de cela, s'habiller de quelques traits durs et sévères.

Et si je t'entraîne, je ne prendrais pas en considération le fait que tu es une femme. Tu devras te battre comme un homme. Si tu acceptes mes termes, alors je serais ton maître d'armes.

Le maniement de l'épée était un long chemin, dur, long, mais qui faisait éprouver une satisfaction incomparable lorsque l'objectif était atteint.
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William.tourbiere
    Une proposition, tout débuta ainsi. Assise dans le coin d'une taverne, à se plaindre de son ennuie et de sa cloisivité dans la capitale. D'une proposition est ensuite venue la réflexion. Quelques jours, puis le tout oublié, ou presque. De cette réflexion est alors devenue une nouvelle invitation à le suivre. Il attendait une réponse. Et après consultation avec l'aînée Ozta et de son autorisation, la réponse s'était fait entendre. Le lendemain, l'Ivoire serait prête pour la découverte plus approfondie d'Argentan. On laissera les détails ailleurs de leur chemin jusqu'à cette petite bourgade, alors qu'il fut la première chevauchée de la jeune fille. C'était dans les éclats de rire certains qu'ils étaient arrivés au matin ici-lieu. Rapide passage au manoir du Dénéré-Malines ou elle avait été invité à loger le temps de déposer leur affaire respective et qu'on lui explique rapidement qu'elle aurait l'une des chambres à l'étage. Sans rien de plus, chacun partirent de leur côté. Le Breton à ses occupations ducales, et Ilianna à la découverte du village.

    L'Ivoire avait ainsi jeté son dévolu sur le verger, après quelques heures de marche aux alentours. Le tour avait été fait rapidement et les scènes s'offrant à l'oeil artistiques absentes d'intérêt, contrairement aux arbres fruitiers. Après en avoir récolter quelques uns, dégustant les autres et récoltant sur ses doigts le jus des fruits, elle s'était adossée contre l'un des troncs, face au soleil. Ilianna appréciait tout particulièrement que son visage lui chauffe par la chaleur des rayons de l'astre. Ça lui rappelait probablement le temps chaud de la Provence. Ainsi, calepin et fusains en main, elle se laissait aller au gré des traits du noir. Un dessin simple dans lequel elle se perd, tentant de rendre hommage aux arbres fruitiers de son mieux. Le soleil baissait peu à peu, l'obligeant à cesser et de reprendre sa route, la fraîcheur lui glaçant les os. Ilianna avait trouvé son refuge dans la taverne municipale, ou elle avait fait charmante rencontre d'une Cerise et de son petit fruit et trouver de quoi se remplir la panse avant de poursuivre son intérêt contre les pages.

    Étourdie comme elle était quand elle se trouvait en création, Ilianna ne l'avait pas entendu prendre place dans la taverne ou elle se trouvait. C'était avec surprise qu'elle le découvrait là, pas très loin d'elle. Les conversations fusent, jusqu'au départ envers le manoir. La cadette des Ozta n'avait pas raté l'occasion d'attraper le bras de son hôte pour retourner au manoir. Elle ne voulait pas l'avouer, mais elle avait quelques difficultés à se repérer si elle ne s'était pas mise de points de repères. Et puis, il va sans dire que la proximité ne lui déplaisait guère, lui faisant même plaisir. Quelques indications sur le domestique des lieux et du reste du manoir fut mise à jour durant la promenade courte les menant au domicile en question. Cette fois, la jeune fille pris le temps de se mettre des repères visuels pour être en capacité de revenir ici sans le propriétaire des lieux. Ilianna, moins nerveuse qu'à sa première entrée dans le manoir, pouvait accorder de son attention aux lieux et à la décoration. Le sourire contre ses lèvres révélaient qu'elle semblait satisfaite, tout comme lorsqu'elle découvre la chambre qu'il lui avait réservé. C'était au mieux de ce qu'elle avait connu depuis les dernières années.

      -Vous n'aviez pas menti, c'est tout à fait coquet et agréable. La vue est aussi jolie que la chambre est accueillante ?


    L'Ivoire se retourne envers Eoghann pour lui offrir un sourire qui ne pouvait mentir sur sa joie. Elle se permit de venir poser les doigts contre l'avant-bras, comme pour le retenir avec qu'il ne la quitte pour regagner sa propre chambre. Elle du même prendre une inspiration avant de se lancer.

      -Vous pensez que vous pourrez m'accorder un peu de votre temps malgré votre longue journée au château ducal ? J'aimerais que vous me fassiez découvrir un endroit que vous aimez tout particulièrement...


    Et aux azurs de se plonger dans les pupilles forestières du breton.

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Chimera
    [Quelques jours plus tard - Tôt dans la journée]

Elle était arrivée de bon matin, suivant sans trop suivre. Une fois encore, elle était réticente à l'idée de se trouver dans un proche rayon de qui causait noces. Le sujet est toujours difficile, et ce malgré un instant d'oubli, la veille, en la capitale.
Alors que sa monture passe les murs d'Argentan, elle pose les yeux sur la nuque de Mheil. Hier, le duc avait eu étrange attitude à son égard, regard fuyant, mots brefs. Elle n'avait pas cherché à élucider la raison de ce changement, mais curiosité était piquée au vif. Peut-être était-ce là la conséquence de sa rudesse antérieure. En ce cas là, elle s'en excuserait, à l'occasion. Pour l'heure, les tripes frétillent d'impatience, à l'idée de se trouver face à l'ainé. Elle se dresse sur ses étriers, la main en visière, guettant l'éventuelle présence du chef blond. Della l'avait-elle averti plus précisément que ce qu'elle-même avait écrit?

" Une surprise est en cours, alors ne bouge pas de chez toi, et range tes chaussettes sales. "

Surprise, donc.
Etait-il chez lui? Elle n'y déboulerait pas, non. Aussi, assise quelques moments après sous une fenêtre de la taverne municipale, rédige-t-elle un bref pli.


Citation:
Aedhan, mon cher fils,

Je suis en ville pour deux jours. Tu me trouveras au verger, voilà bien longtemps que je ne me suis pas dans arbre perchée. Je réclame la primauté! Ce n'est pas par égoïsme, seulement j'ai eu la folle idée de présenter ma candidature à la mairie d'Alençon, et les votes s'achèvent sous peu, je ne peux donc m'éloigner trop longtemps. Je tenais malgré tout à être là, avant peut-être de devoir demeurer un mois en le sein de la capitale. Dinons, ce soir? Si le temps te manque, car je te sais bien occupé, buvons un verre ensemble?

Le premier jour de juin,
C.


PS: Pendant que j'y pense, tu as le bonjour de la jeune Ilianna.


Verrait-elle le maire ce jour? Ses échanges récents avec l'homme l'avaient conduite à souhaiter s'entretenir de vive voix avec lui. Peut-être lui ferait-elle parvenir un pli, tiens.
Mais d'abord...
Salade de fruits. Jolie, Jolie, Jolie.

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Anyel_plantagenet
Petit baluchon en main , Goliath a ses coté , c'est après maintes recherche qu'elle trouva.

La maison de son barbare.

Elle lui avait écrit ,mais sans lui dire qu'elle passerait le voir directement.

Arrivée devant , elle hésita un instant puis appela ...


Eoghann vous êtes là ? hou houuuuuuuuuu y a quelqu 'un ?

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~~EN DEUIL ~~
--Chimeradedm


A l'aube d'un jour comme les autres, Beilhal, fidèle soutien de l'ancienne duchesse de Cholet se présente à cheval à la demeure Argentanaise du Seigneur de Hauterive-en-Seignelay. Ainsi, cela pourrait passer pour un simple transmission de message en provenance de Dénéré-Mère, mais là, le message est tenu par la bride. Coursier de bonne taille, gris pommelé, nez relevé et oreilles dressées, il trotte fièrement au côté de son porteur. Malgré tout, Beilhal est en possession d'un pli, qu'il remettra au Prévôt en livrant l'animal.

Citation:

A Eoghann de Dénéré-Malines,
Seigneur de Hauterive en Seignelay,
Prévôt du Duché d'Alençon


    Aedhan,
    Bonjour.

    Il s'appelle Ouranos.
    Il est à toi.
    Le cheval, hein, pas l'homme qui te l'amène.

    Il a neuf ans. Il a reçu l'éducation de l'Ordre Equestre Royal du Saint Sépulcre et fut acquis lors de la récente vente organisée par les chevaliers membres. Il est vif et endurant, répond à la voix, à la main ainsi qu'aux jambes, et tient son nom du grec qui désigne la céleste divinité du ciel étoilé. Un coup d'oeil à sa robe et tu sauras pourquoi il est ainsi nommé, et pourquoi, fils de Beltane, j'ai choisi cette monture pour t'en faire présent.

    Je suis coincée quelques temps à Mortagne, pour le duché. Je suppose qu'il vaut mieux me priver du plaisir de te voir le découvrir, pour mieux hâter la construction d'un lien qui, je l'espère, fera de vous deux une paire digne des plus vaillants centaures.

    Puisse-t-il te porter fièrement, de jour comme de nuit, dans tes projets présents et futurs.
    A te voir, ou te lire, bientôt,

    C.

    PS: Si tu constates le regard peiné ou jaloux du Capitaine d'Alençon sur ta monture, saches que Savian a enchéri. Je compte sur toi pour faire preuve de l'attitude adéquate, cas échéant, car j'ai cet homme en grande estime.


Eoghann
Le cadeau avait été surprenant et agréable savouré. L'attention lui avait fait chaud au coeur, car depuis quelques temps, depuis les dernières élections en fait, il avait l'impression de décevoir sa mère et la distance qu'elle avait mis entre l'avait un peu blessé.
Le cadeau comme la lettre avait donc éloigné ces doutes. Mais, fils occupé avec sa charge de prévôt et des élections à préparer, la réponse à la missive avait attendu, attendu, attendu... Ce ne fut que 3 semaines après qu'il se rendit compte qu'il n'avait pas répondu à la missive maternelle.
Avant d'aller préparer le stand SAMER et sachant qu'il passerait au stand de ROARRR, il prit soin d'écrire une missive qu'il donnerait ensuite après en mains propres à Chimera.


Citation:
    Maman,

    Tout d'abord, excuse-moi du temps que j'ai mis pour répondre. N'y voit juste que le manque de temps.

    Moi qui avait toujours souhaité un cheval, je ne pouvais rêver plus beau cadeau. Lorsque je l'ai rencontré, je n'ai eu guère de difficulté à lui flatter le museau, et j'espère en faire un compagnon de vie qui sera toujours un rappel de ce que représente la famille pour nous.
    Pour quelques temps, je l'ai laissé aux écuries du château d'Alençon, le temps que les ouvriers finissent les travaux de mon manoir pour l'accueillir, ce qui ne devrait pas tarder.

    Que dirais-tu, plutôt qu'une lettre, que de se voir lors d'une balade à cheval ? Ca nous laissera un peu de temps ensemble, nous n'en avons que trop peu ces derniers temps. Et puis, je ne m'imagine pas autre chose qu'être avec toi pour ma première monte avec Ouranos.

    Je t'embrasse.

    E.

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Eoghann
Une missive accompagnée d'un paquet furent introduits dans la demeure désormais ducale du jeune Dénéré-Malines. Avant d'ouvrir le paquet, missive fut lue. Il manqua de mourir de rire à ladite lecture. Décidément, cette normande avait un don pour dérider Eoghann et aussi le surprendre. Dames des Atours Royaux ? Mon dieu, il ne savait même pas que ça existait ! Fichtre rustre que tu fais, vil barbare alençonnais.

Il ouvrit le paquet, et découvrit ledit cadeau. Il essaya la tenue, se regardant dans un miroir. Ca lui faisait un drôle d'effet, mais il la garderait précieusement. Une fois déshabillé et la tenue soigneusement rangé, il entreprit de répondre.


Citation:



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Citation:
De nous, Eoghann de Dénéré-Malines, Duc d'Alençon,
À vous, Geneviève Mary-Lisa de Courcy, Dame d'Aussillon, Maitre des Atours Royaux ;


    Salut & paix.

    Je me doute bien qu'on ne vous fait pas faire de telles horreurs pour le plaisir. Diantre, qui voudrait faire cela ? Enfin bon, vous êtes professionnelle, c'est au moins cela !

    Je le porterais, de temps en temps, pour honorer la Couronne. Mais bon, ce sera forcément parce que j'ai pas le choix, pas parce que j'aime, ne vous y méprenez pas. Je ne voudrais pas que vous pensiez que j'apprécie ce que vous qualifiez de "travail".

    Enfin bon, si jamais vous êtes toujours à Argentan, venez en ma demeure, je vous offrirais l'hospitalité. Le fait que vous êtes normande, délavée et désagréable ne m'empêche guère d'être poli !

    Cordialement.




D'une rencontre en taverne, une nouvelle recrue était attendue à la maisonnée Dénéré, qui était désormais d'un vide absolu. Son intendant étant parti dans le Sud pour une durée indéterminée afin de s'occuper de son oncle, il ne restait personne au duc pour gérer ses affaires privées à Argentan, Brocéliande comprise.
Tey, une jeune nouvelle venue, l'avait intrigué avec sa nature joviale, ouverte et volontaire. C'est de quelqu'un de cette trempe dont il avait besoin ici, le fait qu'elle soit aveugle n'étant qu'un obstacle tout à fait surmontable aux yeux d'Eoghann. Cela faisait bien longtemps qu'elle vivait ainsi, il ne voyait pas pourquoi elle ne pourrait s'adapter ici non plus !

Une missive lui fut donc envoyée au taudis, accompagné par un page qui serait là pour lui lire la missive et la conduire au manoir.


Citation:



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Citation:
De nous, Eoghann de Dénéré-Malines, Duc d'Alençon,
À vous, Tey, future intendante de notre logis ;


    Salut & paix.

    Excusez-moi du retard pour la missive. Des affaires m'ont tenu éloigné d'Argentan pendant quelques jours.
    J'y suis rentré, désormais. J'ai préparé votre chambre de fonction comme je le pouvais, et le page qui vous lit cette missive est là pour vous accompagner jusqu'au manoir dit Brocéliande, le mien. Il vous aidera à prendre vos affaires.

    Nous parlerons du reste dès que vous serez là.

    Cordialement.



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Alaynna
[A bout de souffle.] Saez

Définir des possibles pour défier l'impossible.
Et m'exploser le coeur, j'en ai plus rien à foutre...
Tu le sais bien on est vivant, tant qu'on est inconscient.
A bout de souffle...
Rien ne sert de penser, immortelle est la plaie,
D'éviter le combat.
Mais toi, toi, tu connais ça, atteindre des sommets.



A bout de souffle, je l'étais très certainement. Pas par mon voyage no. Contrairement à la dernière fois où je m'étais déplacée seule avec ma fille et mon chien pour rejoindre le père de la petite, l'année passée. Anna n'avait que quelques semaines et je m'était tapé un aller simple Provence-Bretagne pour rejoindre Niallan, ignorant totalement ce qui m'attendrait par la suite. Sans doute alors aurais-je du me méfier par les trois attaques successives de brigands que j'avais essuyé. Mais j'avais beau être superstitieuse, je n'avais pas tourné les talons. Cela m'avait valu un mariage en Bretagne, les tromperies du père de ma fille avaient débutées en Bretagne, et désormais, Bretagne était synonyme pour moi d'humiliation. Mais je gardais néanmoins bien précieusement le bien immobilier dont j'avais fait l'acquisition, ainsi que certains autres d'ailleurs. Négociations, tractations, patrimoines immobiliers et trésoreries n'ont aucuns secrets pour moi. Même si je hais mon paternel, je dois bien reconnaitre à mon corps défendant, que j'ai du hériter tout cela de lui. Néanmoins, tout le reste, je le tiens fièrement de ma mère.

Mais aujourd'hui, c'est sans n'avoir subi aucunes attaques que j'arrivais enfin à destination, depuis ma cachette hivernale, sur les hauteurs enneigées de Genève. Néanmoins, alors qu'un peu plus tôt dans la matinée, j'avais fait une halte dans une taverne dont je n'ai pas retenu le nom, faute de m'y être intéressée, c'est l'esprit bien moins tranquille que j'en étais ressortie...La fameuse broche au croissant de lune doré que j'avais laissé sur le bureau de Gabriel au manoir, bien étalée au milieu d'un vélin vierge, venait subitement de refaire surface sous mon nez, dans cette taverne.
Occupée avec les chiots, je n'avais évidemment pas eu loisir de voir qui me l'avait laissé bien en évidence, mais le fait était là. Quelqu'un savait que je me trouvais en ces lieux. Me serai-je faite piégée et ai-je été suivie malgré toutes mes précautions ? Gabriel aurait-il des espions dans le coin ? Je sais que mon mari disparu a le bras long et je le sais capable de tout mais là, je reste vraiment dans l'expectative.

La missive du Baron en main, je la relis encore une fois, comme si je ne la connaissais pas déjà par coeur. Cette annonce était une opportunité de premier choix. Parce que tout ce qui touche à l'Intendance, je connais bien. Avant la disparition de Gabriel, je m'occupais de l'intendance de la baronnie impériale et du manoir. Autant dire que je ne suis donc pas en terrain inconnu. Sauf que j'en concluais d'évidence que le Baron de Cui n'était pas marié, parce que s'il l'était, il aurait confié la gestion à sa femme. Après tout, c'est ainsi qu'avait pratiqué Gabriel. Ce qui m'avait interpellé également depuis que j'avais mis les pieds dans la région, c'est que, tout comme mon époux disparu, le baron était prévôt. Donc en fait, même si je n'avais pas déjà rencontré le Baron de Cui il y a quelques années, je me serai de toute façon sentie un peu déjà comme à la maison.

No la seule chose qui m'ennuyait vraiment, c'est la ré-apparition de cette broche. Qui avait forcément voyagé de Bourgogne jusqu'en Alençon dans la main de je ne sais qui, mais ce je ne sais qui, savait pertinemment que cette broche m'appartenait.
D'un coup de poing rageur, j'enfonçais le bijou dans le fond de la poche de mon mantel avec la ferme intention de remettre à plus tard la résolution de cette énigme.

Dans l'immédiat, j'avais chose bien plus importante à faire. Un dernier coup d'oeil sur la missive du Dénéré avant de la replier et de la ranger soigneusement. Des idées, pour faire fructuer ses terres, j'en avais à lui proposer. J'étais tout de même surprise par la générosité de ce noble-ci pour qui il semblait normal de prendre tous nos frais à sa charge. J'osais espérer que lui au moins, ne m'insulterait pas parce que mes origines n'ont rien de françoys. En effet, je n'avais toujours pas compris pourquoi mon supposé futur suzerain - qui n'était pas au courant de mon départ, quoiqu'avec l'apparition de la broche surprise je n'étais plus sûre de rien), voulait m'annoblir alors qu'il ne cessait de m'insulter lorsqu'il me voyait. D'autant que je n'avais rien fait de spécial pour mériter cela et je m'estimais heureuse, d'avoir pris la poudre d'escampette.

Je n'aime pas les nobles. Et ce n'est pas parce que j'ai du sang noble maternel dans les veines que je me considère comme telle. Et encore moins parce que mon supposé époux est noble impérial. Je sais qu'il n'a pas aimé que je refuse le titre consort. Mais ça m'est égal. J'ai mes propres valeurs, que cela plaise ou pas, je m'en contrefiche.


Et aujourd'hui, en l'occurrence, c'est une nouvelle vie qui s'ouvre à moi. Si tout va bien, d'ici quelques minutes, je serai définitivement à l'abri avec ma fille et nous allons nous créer une nouvelle vie ici. Je suis de toute façon persuadée que nous allons être bien.

Une inspiration plus tard, je pénètre dans les lieux et dépose pied à terre. Anna-Gabriella dort paisiblement tout contre moi bien à l'abri sous mon mantel. Une main tenant fermement la bride d'Epo et à mes pieds, Apollo mon Danois s'est mis à l'arrêt, les cinq petites boules de poils en ont fait autant.

Je libère Epo le temps de me saisir du heurtoir et frapper quelques coups à la porte. En espérant que le baron sera présent, car j'ai préféré m'arrêter directement en sa demeure sans le prévenir de mon arrivée. Parce que de toute façon, étant donné que j'ai appris qu'il est prévôt, je me doute qu'il doit déjà être au courant que nous sommes là.

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Eoghann
Un mandat qui se finit, encore, à la tête de la prévôté. Cela le mettait dans une sorte d'angoisse. Petit à petit, la prévôté était devenue son domaine. Il y avait pris ses habitudes, croisant les mêmes gens, faisant les mêmes choses, établissant ses rapports, cherchant à améliorer petit à petit les choses. Depuis son mandat de duc, le désir politique s'il ne s'était pas éteint s'était transformé en autre chose, en un désir plus sourd de faire les choses différemment. Alors, à l'angoisse du résultat des élections, il avait peur. Peur de devoir laisser tomber cela, sa prévôté, son travail pour lequel il s'investit corps et âme. La victoire ou le défaite de sa mère lui importait moins que ce qu'il laissait croire. C'est le ressentiment envers elle de ce qui s'était passé durant son mandat de duc qui parlait pour lui. À vrai dire, il savait au fond de lui qu'elle ferait une très bonne duchesse. Non, ce n'était pas ça qu'il remettait en cause, c'est juste qu'il ne voyait plus la mère en elle. Lui avait dû faire disparaître le fils pendant qu'il était duc pour être sûr d'être toujours juste et équitable dans son action et dans ses mots, elle, elle avait pris cela comme le fruit d'une forme de partisanerie à la haine de la duchesse Ozta à son égard.

Il se secoue la tête.

Il se lève de son secrétaire dans sa chambre, s'étirant. Sa chambre donnait sur le jardin, grand et non visible depuis la cour d'entrée. Ce jardin était un peu à l'abandon. Un peu comme lui, à vrai dire. Il était devenu une sorte d'automate qui ne ressentait plus rien ou presque. Si le terme burn-out avait existé à l'époque, cela aurait été pour lui. Et le pire dans tout cela, c'est que personne ne le voyait. Il tenait aussi bien éloigné ses quelques amis que sa famille. Oh, pas volontairement, c'était inconscient. Pourtant par moment, il sentait que quelque chose n'allait pas, une sorte de sentiment intérieur profond et incompréhensible, sourd et lancinant.
Un instant, il pose son front sur la vitre. Le temps est froid, couvert mais pas pluvieux. Un peu comme lui, en somme. Sa respiration est lente, et une buée informe se pose sur le verre. Il essaie d'écouter quelques bruits de vie, chez lui, mais rien. Sa demeure était vide, vide de toute vie et toute âme, à son image. Les yeux un instant fermés se rouvrent. Son lapin gambade joyeusement dans les herbes folles, toujours aussi énergique. Un léger sourire se dessine sur les lèvres un peu cachée par sa moustache et sa barbe à la vue de l'animal, vestige d'un moment partagé de manière indirecte avec sa sœur Adenora. Que devenait-elle, d'ailleurs ?

Ses pensées n'ont pas le temps de davantage prendre forme qu'il entend le bruit claquant du heurtoir qui fait son office sur la lourde porte d'entrée en bois massif. Il se redresse, intrigué, et se dirige vers le couloir du premier avant de descendre au rez-de-chaussée. Il ne voyait pas bien qui cela pouvait être... ? Son écuyer, peut-être ? Non, il n'était pas censé être là aujourd'hui. Il lui laissait encore pas mal de liberté jusqu'à leur emménagement proche au château de Cui.
Enfin arrivé devant la porte d'entrée, le nom de sa future intendante qu'il avait sur le rapport des douanes lui sauta aux yeux. Evidemment ! Que tu es tête en l'air, Dénéré, bon sang. Il secoue la tête pour lui-même. De ses mirettes vertes foncées, il regarde si sa tenue est correcte. Chemise, gilet, braies et de grosses pantoufles en peau lapin bien rembourrées. Bon, il ne sortirait pas comme ça, mais le baron avait vu pire comme mise, et puis son apparence, hein... Il avait plus l'allure d'un barbare mal fagotée entre sa tenue, sa tignasse blonde et sa très fournie barbe blonde-rousse, mais après tout, cela participait du mythe selon lequel il serait méchant. Soit, cela l'amusait. Il ouvrit donc la porte, et vit qu'il ne s'était pas trompée sur l'identité de la visiteur.


    « Alaynna. Entrez donc avec votre fille vous réchauffer. Laissons vos animaux dehors, les écuries ne sont pas loin et vides, ils trouveront à s'abriter seul, si cela ne vous gêne pas. Il y a un baquet d'eau là-bas déjà. »

Joignant le geste à la parole, il la fit entrée et ferma la porte. Il n'avait pas envie que ses chiens ne salissent tout l'intérieur. Il leur apporterait à manger un peu après, et écuries - petites mais entretenues - étant toutes proches, il ne doutait pas de leur intelligence à aller s'y poser.
D'un pas assuré, il la guida jusqu'au salon qui faisait office de bibliothèque sur tout un pan de mur. Le Dénéré-Malines avait toujours été érudit et compilait manuscrits et parchemins quitte à y passer une trop grande partie de ses revenus. La plupart de ses visiteurs étaient toujours étonnés de voir autant d'ouvrages et de parchemins chez lui.


    « Asseyez-vous, je vous prie. Le voyage n'a pas été trop long ? Voulez-vous une boisson chaude ? Quelque chose pour votre fille ? »

Il avait beau avoir une allure de barbare dépenaillée, il ne souffrait pas que la jeune femme puisse ne pas se sentir à son aise maintenant qu'elle était ici. Un coup d'oeil vers l'âtre qui semblait vive et crépitait de tout feu permettant d'avoir une atmosphère chaude.
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Alaynna
Alors que je jetais un bref mais perçant regard par dessus mon épaule, histoire de m'assurer qu'aucune silhouette ne rôdait dans les parages, non pas que l'épisode de l'auberge un peu plus tôt m'avait affolée, mais ma vigilance s'en était accrue, je reportais mon regard en direction de la porte qui s'ouvrait.
Si je m'attendais à voir apparaitre la face d'un majordome un brin coincé et pédant il n'en fut rien et je me trouvais face au Dénéré lui-même. Mes bleus eurent tôt fait leur inspection, notant les chaussons en peau de lapin, avant de remonter jusqu'au visage de mon interlocuteur. Assurément, de l'adolescent pré-pubère que j'avais connu, il n'en restait rien. Physiquement du moins. Je fis un rapide calcul dans ma tête. Combien d'années s'était écoulées ? Environ six. Si je n'avais jamais prêté attention auparavant à ce genre de détails, je me rendais à l'évidence, c'est que six années ça vous change un ado en homme.
Et si jusqu'à présent, mon esprit n'avait pu s'empêcher de jouer au jeu des ressemblances entre baron Impérial et baron Alençonnais, il était indéniable que les deux n'avaient au final strictement rien en commun physiquement. D'un imberbe à un fourni du poil il n'y avait assurément qu'un pas que je venais de franchir.
Je me serai cru face à l'un de ces sauvages vikings dont j'avais lu les prouesses dans des ouvrages. Néanmoins, je reconnus aisément l'éclat des prunelles vertes.
Et déjà, je redressais Anna-Gabriella qui, dans un rire joyeux, se penchait dangereusement vers notre hôte dans l'espoir d'aller fourrager ses petites mains dans la barbe blonde qui lui rappellait certainement celle de son père. Quoiqu'en y regardant mieux, quelques nuances de roux venait étayer le menton du baron.
Et ce qui ne manquait pas de me soulager, c'est que le baron n'avait rien, du moins, à sa mise, des ces péteux nobles arrogants et prétentieux, comme j'en avais rencontré en Bourgogne. Au moins celui-ci ne passerait peut-être pas son temps à m'insulter à chaque fois qu'il me verrait.
Et déjà je me voyais invitée à entrer. Je me retournais un instant vers Apollo, glissant une main sur sa tête, lui signifiant ainsi silencieusement que tout allait bien.
Et quand le baron évoqua les écuries, j'acquiesçais d'un mouvement du menton.


" - Apollo va se charger de son petit monde, il a l'habitude."

Effectivement, Apollo était bien plus qu'un simple chien à mes yeux, mais cela, le baron serait sans doute amené à s'en rendre compte avec le temps.

Je suivis donc mon hôte jusqu'à un salon dans lequel je me sentis tout de suite à mon aise en découvrant une bibliothèque qui ornait tout un pan de mur. Le crépitement des flammes dans l'âtre venaient ajouter à une ambiance quelque peu rustre mais feutrée, de celles qui me mettaient en confiance, de celles que j'aimais.

Je m'asseyais donc à l'endroit indiqué, tout en souriant à Anna qui ne semblait nullement apeurée par cette nouvelle situation , et bien qu'elle se soit blottie contre moi, je voyais ses petits océans grands ouverts qui semblaient partir à la découverte des lieux.


" - Je vous remercie Baron, nous nous sommes arrêtées quelques lieues avant d'arriver pour nous sustenter. Mais un peu de lait pour Anna ne serait pas de refus. Et notre voyage s'est bien passé, nous avons voyagé de nuit essentiellement. Mais je suis soulagée que nous soyons enfin arrivées."

Oui. Soulagée était le mot adéquat, mais je n'en laissais absolument rien transparaitre, l'esprit focalisé sur ma nouvelle charge à venir.
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Eoghann
Dénéré acquiesce, un peu perturbé. C'est qu'il en fallait peu pour le perturber lorsqu'il s'agissait de rapports sociaux. Le jeune homme n'était guère enclin aux allégresses des jeunes de son âge. On ne le voyait jamais sortir pour s'enivrer, jamais on ne l'invitait aux soirées pleines de beau monde, et souvent il déclinait les diverses offres de joutes ou de salons qui lui parvenaient, lorsqu'il en parvenait. Et recevoir quelqu'un chez lui... Diantre, une éternité que ça n'était pas arrivé !
Alors, voilà, lorsqu'elle mande un peu de lait en réponse, seul l'acquiescement lui paraît une réponse approprié. N'ayant guère encore engagé de personnel, c'est lui qui se charge de tout. Le voilà donc disparaître du salon pour les cuisines. Sans être immense, elles étaient d'une taille tout à fait acceptable pour le manoir qui pouvait loger une demi-douzaine de personnes en même temps, si on exceptait les domestiques. Le voilà donc à chercher du lait frais dans la réserve. Heureusement, le lait était une chose dont il raffolait, ce qui faisait que tous les jours, il payait un jeune garçon pour qu'il lui rapporte une à deux bouteille du breuvage. C'était un jeune garçon venant d'une famille désœuvrée et qui faisait le tour du quartier chaque matinée pour y gagner quelques monnaies. Hans, qu'il s'appelait, car le père était d'origine germanique, lui semblait-il.
Il ébroua ses pensées du garçonnet, et mis à chauffer le lait durant 3 petites minutes. Il le servit dans trois tasses une fois qu'il eut vérifié qu'il était chaud mais point trop. Par précaution, il prépara quatrième, froid, au cas où que la fille d'Alaynna le préférait ainsi. Il disposa quelques gâteaux au miel - son péché mignon - sur le plateau, et revint ainsi avec un plateau bien plus chargé que prévu. Il le déposa sur la table basse, et offrit un maigre sourire à son invitée :


    « Je nous en ai préparé aussi. Chaud, vu la rigueur de l'hiver. Mais si votre fille le préfère froid, il y en a un godet exprès. Et puis, j'avais envie de gâteaux au miel. Vous verrez, ils sont délicieux ! »

Les yeux aux reflets verts se posèrent sur Anna auquel il offrit un sourire chaleureux. La jeune enfant semblait éveillée et curieuse de tout, et c'était agréable à voir. Un instant, il se demanda ce que penserait Alaynna que ce soit lui-même qui fasse tout cela, mais la pensée disparut bien vite. Cela faisait longtemps que le baron ne s'inquiétait plus de ce qu'on pensait de lui. À ses dépens, parfois. Installé au fond de son fauteuil, il avait lui-même déjà en main gâteau et tasse de lait chaud.

    « Ne craignez rien, ce n'est pas moi qui les ai préparé. Je suis bien piètre cuisinier, si vous saviez ! »

Le jeune homme offrit un large sourire à la future intendance, franc et direct. Il fallait dire que le breton était assez paradoxal dans sa manière d'être. Oh, il n'était guère bipolaire, mais il était capable d'être aussi enjoué et souriant que taciturne et nostalgique, résultat de sa capacité à s'enfermer et à s'isoler un peu trop développée. Le sourire était toujours marqué par ses lèvres, mais il prit un air un peu plus sérieux.

    « Mais vous n'avez pas fais tout ce chemin pour m'entendre parler cuisine. Je suis heureux de vous avoir ici. J'ai besoin d'une intendante. Vous m'aviez marqué, voilà quelques années, et le hasard nous fait nous retrouver. Cependant, je ne crois pas au hasard, mais je crois aux gens.
    Ma question va vous paraître brute, mais... Pourquoi dois-je croire en vous, pour cette fonction ? »

Enfoncé dans son siège, il fixait son vis-à-vis, une étincelle dans le regard. Plus que toute autre chose, c'était les réactions physiques et les mimiques qu'il aimait observait chez les gens pour avoir réponses à ses questions, car souvent elles étaient bien plus vraies que les mots qui sortaient de leur bouche.
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Alaynna
A peine installées, et voila notre hôte qui disparait pour revenir un instant plus tard, les mains chargés d'un plateau dont émane une agréable odeur de lait chaud et de miel. J'ai profité du laps de temps de l'absence du baron pour laisser mon regard dériver vers cette imposante bibliothèque, qui, bien loin de m'effrayer, me rappelle des souvenirs d'enfance et d'adolescence. Pour un peu, je me serai levé pour aller à la découverte des ouvrages mais je me dis que j'aurai sûrement plusieurs occasions, plus tard, d'y jeter un oeil.

Je le vois revenir et note le sourire affectueux qu'il adresse à Anna. Celle-ci, même si elle reste sagement blottie sur mes genoux, ne semble nullement intimidée par notre hôte. Et c'est une petite menotte qui se tend tout de même un brin timidement vers les gâteaux qui doivent lui sembler alléchants.
Je glisse un petit gobelet de lait tiède entre les mains d'Anna, veillant à ce qu'elle boive correctement quelques gorgées puis je satisfais à sa demande en prenant un biscuit que je partage en deux avant d'en donner une moitié à ma fille, gardant l'autre dans le creux de ma main, tout en écoutant mon vis à vis, et en levant mes bleus vers lui.

Aussi, lorsque je reçois en pleine face, ce sourire qu'il m'adresse, j'en reste un moment le souffle coupé. Non pas que j'en sois gênée, mais j'en suis légèrement perturbée, parce que j'ai perdu l'habitude que l'on m'adresse des sourires de cette teneur là. Je suis moi même devenu assez radine en matière de sourires, les réservant depuis quelques temps exclusivement à ma fille.
Mais, j'ignore encore le pourquoi du comment, mais ce sourire là réussit le tour de force de me dérider et de m'apaiser.
Chose étrange, moi qui n'ait plus confiance en grand monde, il semblerait qu'auprès du Dénéré, mon quota de confiance remonte quelque peu et surtout, je me sens sécurisée et je n'éprouve rien de ce que je pouvais ressentir dans le manoir en Bourgogne.

Ici, tout semble paisible, du moins, du peu que je sois en mesure d'en voir pour l'instant. Mais il est certain que par la suite, l'une des premières choses que je ferais, c'est de m'assurer que les lieux ne sont pas hantés et que l'on n'entend pas des voix qui s'élèvent par les conduits de cheminée.

Dans l'immédiat, je bois une gorgée de mon lait, tout en écoutant attentivement le baron. Question qui semble paraitre abrupte pour lui, alors que pour moi, elle passe tout naturellement. Cet homme est quelqu'un de foncièrement droit. Il ne semble pas y avoir trace chez lui de la moindre mesquinerie, et encore moins de trait de folie. Et je relève en silence le fait qu'il ne croit pas au hasard mais aux gens. A la différence de moi qui ne croit ni au hasard, ni aux gens. Ou tout du moins, j'ai perdu cette faculté de croire en eux Mais avec lui, il y a quelque chose de différent. Et je me rends compte au travers de ses paroles, que chacun de nous a été marqué par la rencontre de l'autre, il y a quelques années de cela.
C'est donc tout naturellement que je me laisse aller à converser et à répondre à ses questions.


" - Pour ma part, je sais essentiellement cuisiner des plats italiens et le poisson. Ainsi que quelques pâtisseries et certains gibiers. Mais il y a longtemps que je n'ai plus eu l'occasion de le faire. Bene. Vous souhaitez donc que je vous dise pourquoi vous devez croire en moi pour cette fonction. Je pense qu'il y a des personnes qui sont faites pour faire telles choses et d'autres qui ne le sont pas.
L'intendance d'un ou plusieurs domaines n'est pas quelque chose d'aisé. Apprenez moi vos terres, racontez-moi leur histoire et je vous assure que je saurai faire en sorte de les entretenir, vous aider à les gérer, et les faire fructifier. Je vous serai loyale et fidèle.
Bien entendu, je n'ai pas une immense expérience de cette charge. Mais au fil des ans, j'ai acquis une passion pour tout ce qui est immobilier, négociations, tractations, commerce et je peux être diplomate tout comme je peux tout aussi bien rentrer dans le lard d'une personne. J'ai reçu une éducation stricte et dure, et je connais, bien que n'étant pas noble, l'étiquette et les usages.
Je ne suis pas quelqu'un que l'on peut qualifier de sociable de prime abord. J'observe bien plus que je ne cause, et je peux être une vraie plaie quand je n'ai pas l'envie de causer. Néanmoins, j'aime parler pour aller à l'essentiel. Et je n'ai pas mon pareil pour vous organiser une réception, ou un bal ou même des enchères et ce, au pied levé s'il le faut.
Donc, vous pouvez croire en moi parce que je vous serai loyale et dévouée, que je ne m'engage pas à la légère et que j'aime à relever les défis, même les plus improbables ou ceux qui paraissent insurmontables.
D'autre part, j'ai géré une compagnie commerciale avec mon frère, et si j'ai déjà quelques idées en tête, j'aimerai vous en faire part une fois que vous m'en aurez un peu plus appris sur vos terres. Histoire de savoir ce qu'il sera possible d'envisager et de mettre en oeuvre."


Si j'avais eu un miroir sous la main, j'aurai certainement pu m'apercevoir que mes bleus brillaient de passion contenue au fil de mes paroles.

Puis comme je souhaitais être tout à fait honnête auprès du baron, quitte à ce que cela me coûte la charge, j'ajoutais quelques mots en fixant Eo droit dans les yeux.


" - J'ai eu une vie...difficile... ces derniers mois. Et j'ai besoin de retrouver de la sérénité, de la stabilité, et une certaine...sécurité dans ma vie personnelle. Je me dois également d'assurer la sécurité de ma fille et son bien-être. Et vous êtes une des rares personnes en qui j'ai confiance et que je ne voudrai surtout pas décevoir. Alors vous n'aurez pas meilleure intendante que moi."

Je l'ignorais encore, mais Eoghann et moi avions nombre de points communs, notamment dans notre façon d'être. Autant lorsque je suis en confiance je peux être une vraie pipelette et avoir le sourire aisé, autant il est des moments où je suis renfermée sur moi-même dès que la confiance s'estompe où qu'une tête ne me revient pas. Sauf qu'actuellement, il y a ce sentiment d'insécurité, de peur, et de méfiance, notamment suite à la missive reçue de Gabriel, de ses adieux et de mes agissements imperturbables qui ont suivis. Une délivrance. Une renaissance auprès du Dénéré. C'est ce que je suis en train de vivre actuellement, sans forcément en avoir pleinement conscience. Un nouveau lieu de vie, de nouvelles perspectives. Bien sûr le baron l'ignore car je n'arrive toujours pas à m'épancher sur ma vie et je n'ai pas dit un mot sur ce que j'ai vécu.
Mais je sais que cette charge d'intendante est ce qui est en train de nous sauver Anna et moi.

Alors oui, il ne trouvera pas intendante plus loyale et fidèle que moi.

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