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[RP] Un silence plein de mots

Pierre...
[Quand on ne peut pas parler en taverne, on écrit]

Citation:
Gy.

J'ai pas eu le temps de te l'annoncer hier parce que ça n'était pas encore sûr. Pas de mariage ni d'enfant, mais bien une femme, même si je gage qu'elle n'est pas baisable. J'ai répondu à l'annonce d'une donzelle qui cherchait un garde du corps. Isaure Von Frayner. Tu dois la connaître, elle possède une auberge à Limoges. Une grenouille de bénitier, conne à en bouffer son missel et qui me parle comme si j'étais sénile, mais foutrement riche. Si elle m'agace de trop, je serais au moins bien placé pour la faire taire définitivement et empocher l'argent.
Je pars demain pour la rejoindre en Guyenne.

Je t'abandonne pas. Je sais pas si c'est à toi ou à moi que j'essaie de faire croire ça. Mais je reviendrai souvent sur Limoges et je compte sur toi pour ne pas te foutre dans la merde quand j'aurais le dos tourné. Et quand ça arrivera (quand et non si, je te connais bien), écris-moi, je viendrais. Peu importe que cette nobliarde soit en train de se faire poignarder dans son pieu ou violer au coin d'une rue, je viendrais pour toi. Et si j'apprends que tu t'es foutue dans la merde et que tu n'as pas osé me le dire, je viendrais aussi. Et je te torturerais moi-même, ça ira plus vite.
Ta Marie-Louise, là, qui rote encore le lait de votre mère a intérêt à bien s'occuper de toi.

Je t'embrasse,

Pierre

P.S. : si Elise continue à faire sa casse-burnes avec son obsession pour le meurtre, envoie-la-moi comme apprentie. Sauvegarder la vie de quelqu'un plutôt que de le zigouiller même quand on en a très envie devrait pouvoir l'occuper.

_________________

Avatar : AaronGriffinArt
Pierre...
[Le 10 février 1466]

Départ M-5. Tout est prêt. La vieille carne est sellée, les affaires empaquetées.
Une lanière de bœuf séché pour la route et...

Un éclair roux, une douleur aiguë. Pierre retira la pogne de sa sacoche de selle, réprimant un grognement de surprise. Du sang se mit à perler sur le dos de sa main. Le grand muet fronça les sourcils, contemplant une goutte vermeille courir le long de son poignet. Quelqu'un aurait-il piégé son bagage ?
Il recula d'un pas et, tirant une lame de sa ceinture, s'en servit pour soulever avec précaution le rabat de son sac de voyage. Prêt à frapper.

Des tréfonds du bagage, Oseille, la minette borgne de Gysèle lui lança un regard torve depuis les profondeurs du bagage et feula. Le greffier n'était pas là par hasard, la missive qu'il couvait jalousement en attestait. Pierre se détendit, les épaules secouées d'un rire râpeux, presque silencieux.

Quel coup de pute ! Littéralement. Si Gygy mettait autant d'ardeur à l'ouvrage avec ses clients qu'à le faire chier, elle devrait augmenter le prix de ses passes.

Le taiseux dut s'y reprendre à plusieurs fois avant d'attraper le pli qui accompagnait l'animal sans se faire lacérer les doigts à nouveau. Il secoua la sacoche pour faire partir la bête rousse, mais celle-ci n'était pas prête à interrompre sa sieste pour si peu. Tant pis, il n'avait pas le temps de brosser le monstre dans le sens du poil. Il faudrait embarquer le passager clandestin. Et dire que le muet avait réussi à refourguer Casse-toi, son propre désagrément félin, à la petite Élise ! Les chats étaient comme les Ponthieu, on ne pouvait jamais s'en débarrasser complètement. Et, ajouta-t-il en son for intérieur, on n'est jamais sûr de le vouloir vraiment.

Sur la route, profitant du pas indolent de sa monture, Pierre parcourut le courrier.

Citation:

Pierre,

Je ne sais pas trop comment t'écrire cette lettre parce que je n'ai encore jamais eu à te dire au revoir. En fait, je me sens un peu démunie et perdue. Mais j'imagine qu'il est temps pour moi de sortir de tes "jupons" et je savais que je ne pouvais pas te garder éternellement auprès de moi. 
Tu me connais, j'ai une grande gueule, mais je ne sais jamais comment formuler ce qui me touche et je deviens vite confuse. Alors, au lieu de tenter maladroitement de te remercier pour toutes ces années, de te dire combien je t'aime et combien tu vas me manquer, au lieu de tout ça, je vais te dire ce qui ne va absolument pas me manquer : j'ai hâte de ne plus avoir tes foutus expériences fumatoires, tes odeurs de bottes qui fouettent, tes ronflements, tes airs blasés quand tu crois/sais que j'ai fait une connerie ou tes foutages de gueule. 

Je dis ça, mais tu vas voir que dans un mois ou deux, je pleurnicherais peut-être pour ravoir tout ça.

Quoiqu'il en soit, je t'interdis de me délaisser. J'ai toujours besoin de toi quelque part dans ma vie, même si c'est une petite dose. Ecris-moi, raconte-moi les frasques isauriennes, tes nouvelles expériences, tes plaisirs et déplaisirs. Je veux que tu me dises tout ce que je ne peux plus voir. 

Je te souhaite une belle route, de belles aventures et du succés dans ton entreprise. Que tu t'enrichisses et trouves l'intérêt que tu es parti chercher. 
Tu m'abandonnes Pierre, mais ne culpabilise pas pour ça, j'ai au moins autant de vies qu'un chat et je crois que grâce à toi et tes enseignements, je sais retomber sur mes pattes et éviter les coups trop durs. Merci. Merci mille fois pour tout ce que tu as fait pour moi. Je ne te le dis jamais assez, mais tu sais que je suis qu'une sale petite peste arrogante et sans coeur.

Beau voyage,

Gy'

P.S. : Parce que je t'aime, je te laisse un souvenir plus sûr qu'une mèche de cheveux. J'imagine que tu l'as trouvé avant cette lettre et que tu es déjà en train de râler.


Un gribouillis maladroit ornait le bas de la page. Un crapaud.
Le muet esquissa un sourire qui ressemblait à une grimace douloureuse. Il n'y avait personne d'autre qu'une bestiole rousse et mal embouchée pour le voir, et elle ne remplaçait pas la vraie.


[Le lendemain, dans la salle d'une auberge]
Citation:

Gy,

Tu voulais des nouvelles, en voilà. Je suis arrivé sans encombres à ma première étape.
Tu me le paieras. Je te rendrais ta chatte morceau par morceau enveloppés dans mes bottes qui refoulent. Tiens, voilà déjà une moustache.

Pierre

_________________

Avatar : AaronGriffinArt
Pierre...
[13, 14, 15 février 1466 – Pluie de courriers du cœur ou... pas]
    | L'otage sera exécuté |

Tiens-toi tranquille ou bien... a écrit:

...Je viens te coller aux bottes jusqu'à ta mort.

Pierre,

Touche plus aux moustaches d'Oseille, la pauvre, elle n'a déjà pas grand chose pour elle !
Où es-tu ? Tu vas bien ? Tu n'as pas fait de mauvaises rencontres ?

Gy' (sereine qui tient un otage elle aussi).

Des poils blancs cachés dans un bout de papier replié et une trace de patte de chat trempé dans l'encre maladroitement laissés en guise de sceau.

Citation:
Gy,

Oseille n'a pas (encore) perdu de morceau supplémentaire, mais ça ne saurait tarder si elle continue à dégueuler des souris dans mes bottes. Si tu veux un coupable pour l'odeur...
Tu serais pas capable de faire du mal à mon chat. J'espère qu'il ira dormir dans tes affaires maintenant que tu t'en es servie comme pinceau, ce serait bien fait pour ta gueule, quoique tu risques de lancer une nouvelle mode à Paris...

Je n'ai pas encore vu l'ombre du museau d'Isaure qu'elle me fait déjà chier. Elle est en chasse de deux tourtereaux qui ne devraient apparemment pas l'être, et me balade de partout. ''Va à Bordeaux'', ''Attends-moi à Saintes''... Tu sais assez bien que j'aime pas courir après les gens. Pour lui rendre la pièce, j'ai accepté d'escorter pendant quelques jours un cureton périgourdin, un gamin à peine sorti de l'enfance et blanc comme le cul d'une nonne. Un drôle de gaillard mais qui paie bien. Ça fera les pieds à la grenouille de bénitier, elle ne pourra pas me reprocher de protéger un homme d'église.

Et toi, que racontes-tu ? J'ai besoin de tes nouvelles autant que toi des miennes.

Pierre

P.S. : Tu me manques. Et tu as ma pipe. Ne pas fumer me rend grincheux. C'est de ta faute. Tu me dois une pipe.


Citation:
Pierre,

J'aime le talent que tu vois en moi. Mais penser que je vais pouvoir lancer une quelconque mode avec les pattes de ton affreuse bestiole, c'est tout de même un peu me surestimer.

Isaure est gentille, mais Isaure a ses petits caprices. Si tu croyais que j'étais la pire des capricieuses, je suis ravie que tu découvres d'autres femmes à protéger pour te faire une idée ! Non mais. 
C'est bien que tu te sois trouvé un gus à escorter, mais prends pas de risques pour lui si il se fait attaquer hein, au pire, aide le brigand et prends-lui ses sous. Je préfère qu'on ne t'abime pas, toi. En plus, tu sais que je déteste les gens d'église. 
Cela dit, tu as raison sur un point : Isaure ne pourra JAMAIS te contrer là dessus, même si je ne doute pas qu'elle en aura envie !

Quant à moi, j'ai déjà plusieurs choses à te raconter. Elise m'inquiète, elle voit les jumeaux partout. Elle a déboulé en taverne hier, couteau en main, persuadée qu'ils étaient en ville. Elle avait un drôle de regard, un peu fou, tu sais. J'en ai vu souvent de ces yeux là aux Miracles, j'espère vraiment que ce n'est qu'une phase. 
Et en parlant de jumeaux... Oui je sais tu vas me tuer. Judicaël m'a écrit. Il veut que j'aille le voir aux Miracles, il me dit qu'il se construit un empire, qu'il veut me montrer, que je dois le pardonner. Je t'avoue que je suis déjà en train d'hésiter. Mais tu en sauras plus à mon prochain courrier.

Pour finir, j'ai encore plus ou moins blessé Louis-Marie. Il a décidé qu'il en avait marre d'espérer que je lui sois.. dévouée corps et âmes. Et pourtant je te jure que j'essaie. M'enfin du coup il a changé de comportement, il préfère s'en foutre et ne plus me lier les ailes. Ainsi il sera moins déçu. C'est en tout cas ce qu'il m'a dit dans une lettre joliment écrite.

Voilà en quelques jours les nouvelles de Limoges ! Tu vois tout est calme quoi !

Bonne route avec ton homme d'église !

Gysèle

P.S. : Ne mets pas tout sur le dos d'Oseille pour l'odeur.
P.S. bis : Tu me manques aussi et ta pipe est moins bien que la mienne. Mais parce que je suis sympa, tu trouveras la mienne dans le paquet à côté...si le coursier ne se la garde pas pour lui.

Le pli s'accompagne d'une pipe et d'une petite bourse contenant de l'opium.

    | Une opportunité à marquer d'une pierre blanche |


Citation:
Messire fleur bleue,

Je gage que les démons du vin vous martèlent le crâne de l'intérieur encore ce matin, avec tout ce que vous avez ingurgité. Avez-vous passé une agréable nuitée avec cette minuscule demoiselle ? J'espère que vous ne lui avez pas rendu dessus ce que le bon Dieu vous a donné, elle a beau vouloir se vouer à l'église, ça n'est peut-être pas un dépucelage des plus appropriés.

Si l'escorte tient toujours, rejoignez-moi à l'auberge municipale. Nous partirons à La Rochelle en direction de Niort en fin d'après-midi. Je risque d'être difficile à joindre aujourd'hui, ma monture a besoin d'être referrée et il me faudra bien faire le tour de la ville pour trouver un maréchal-ferrant qui ne considère pas ses fers en or massif...
N'oubliez pas les quatre cents écus.

Pierre le muet


Citation:
Pierre le muet,

je n'ai rien rendu, je n'avais pas tant bu que cela vous savez, d'ailleurs je me sens frais et dispo pour partir ce jour... Je ne sais pas trop ce que vous avez imaginé avec cette jeune fille, mais gagez qu'un homme de Dieu tel que moi ne s'abaissera jamais à convoiter une ... Fille. Pucelle ou non, d'ailleurs. Par contre, pour votre gouverne, la gourgandine d'hier avec son accent horrible, Catalayna, m'a demandé si vous étiez marié et a fortement insisté pour que je vous fasse savoir que vous lui plaisez et qu'elle cherche épousailles... Je vous passerai le couplet sur la solitude et l'amour tendre, voyez je suis curé, pas entremetteur, tout au mieux je pourrais vous marier, et encore. J'ai bien compris que vous n'êtes pas là pour badiner et tant mieux. Je dois absolument arriver au sacre avant qu'il n'ai commencé. Au diable les mièvreries de femmes esseulées.
Comme je me sens en sécurité avec vous, j'en ai profité pour enlever ma soutane et redevenir civil avec les vêtements que je portais avant d'entrer dans les ordres. Je suis certain que même vêtu ainsi, personne ne cherchera à me dépouiller grâce à vous. Je n'oublie pas les quatre cent écus, à condition d'arriver entier à Niort... 

Nicolas de Montfort Toxandrie.


    | Le regard qui tue |


Citation:
Pierre, 

Je ne sais pas ce qui me prend, de vous écrire. Je me le suis permis, et je vais même envoyer ce courrier.
Vous vous souvenez peut-être de moi, quoi que sinon, je serais vexée. En taverne, tout à l'heure, une des rousses qui vous fixait. 

C'est donc pour cela que je vous écris. Pour m'excuser de vous avoir fixé de la sorte. Je crois que ce n'est pas convenable. Vous me faisiez penser à quelqu'un que j'ai connu, c'est pour ça, et aussi parce que je me demandais si vous l'étiez vraiment, muet. 

Peu importe, 
Je vous souhaite une bonne route, et une bonne soirée.

Catalyna. 


Citation:
Catalyna,

Je me souviens de vous. Votre accent est assez acéré pour clouer quiconque sur place, à l'instar de votre regard.
J'ai dû paraître bien rude pour que vous teniez à vous excuser par écrit... Ou bien votre missive a-t-elle un autre dessein ? Quoiqu'il en soit, ne me confondez pas avec quelqu'un de votre passé, c'est un genre d'illusion qui ne fait jamais de bien par où il passe.
Sachez que je ne vous tiens pas rigueur pour hier. Je n'ai pas l'habitude d'être ainsi dévisagé, appréciant la discrétion, et la surprise de cet intérêt m'a simplement rendu un peu méfiant.

Je suis bel et bien muet. Par pitié, ne me demandez ni pourquoi ni si c'est guérissable. Si je gagnais un écu chaque fois qu'on me posait ces questions, on me nommerait Sieur le Mutique en son château de marbre. Oh. Et on ne m'a pas coupé la langue, elle me sert simplement à d'autres choses qu'à parler.

Pierre


Citation:
Pierre, 

Et dire que j'ai du demander à des amis ce que voulaient dire les mots "dessein" et "mutique". Vous voyez que mon françoys laisse encore à désirer, et pourtant cela commence à faire, que je traîne sur les sentiers déserts de ce Royaume.Que l'hiver moscovite me manque, je vous assure.

Je ne saurai vous expliquer cet intérêt si soudain, ce n'est pas vraiment dans mes habitudes, je vous rassure là. Enfin, je ne sais pas si c'est réellement rassurant. Vous faites bien, cependant, de vous méfier. On ne se méfie jamais assez, selon moi. 

A quoi peut donc bien vous servir cette langue alors? Si ce n'est pour manger, certainement. Quelle chose étrange de vous savoir muet. Sans doute cela qui a attisé ma curiosité. C'est d'autant plus déplacé, remarquons bien. Mais je suis quelqu'un d'honnête, peut-être trop spontanée, j'ai un peu de mal avec ça encore. J'étais bien pire avant, je vous laisse imaginer. 

Si d'autres desseins se tapissent derrière cette missive, je n'en sais que trop rien. J'avais sûrement J'ai envie de faire de nouvelles connaissances, certainement. Je n'ai pas beaucoup d'amis, les seuls qui disent l'être, je ne les aime pas tous et je me méfie de beaucoup. Peut-être est-ce ainsi que mon envie d'amitié de relation sociale s'est manifestée de la sorte? Les femmes ne sont pas très faciles à comprendre, et voyez, je ne me comprends pas toujours moi-même. J'aime écrire, et je n'ai personne à qui le faire. Cela rajoute un peu d'action à cette vie! 

Et puis, qui ne tente rien n'a rien. 

Je n'imaginais pas votre écriture ainsi. Elle est jolie, soignée et étudiée. C'est un plaisir à lire. 

Veuillez m'excuser -de nouveau- si je parais pour quelqu'un de désespéré. C'est la dernière fois que je m'excuse, ce n'est pas dans mes habitudes non plus. 

Alors, dîtes-moi, vous la faites cette escorte? J'espère qu'elle va vous rapporter, je l'aurai fait à votre place, mais les obligations sont de mise. 

Oh, et faites attention. Les brigands sont en action autour de Saintes. Ce serait malheureux qu'il arrive quelque chose au trésor de Blanche Chevelure (je n'ai pas retenu son prénom). 

Catalyna.


Et déjà, la plume se dresse à nouveau, prête à explorer l'étendue de parchemin vierge de tout délié.
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Avatar : AaronGriffinArt
Pierre...
En correspondance. D'une personne à une autre. D'un lieu à un autre.
Caillou se sent plus bavard qu'il ne l'a jamais été. S'éloigner des gens les rapprochent-ils ?


    | Rousse |

Par endroits, le papier est roussi, légèrement brûlé.
Citation:
Gy,

Merci pour la pipe, et le sachet qui va avec. Comme tu vois, je m'en sers au moment même où je t'écris. Ce qui, pour être honnête, est juste une façon de dire que je l'ai oublié allumée sur ma pile de courrier à écrire. Si un jour je meurs, ce sera dans un incendie. Un magnifique brasier de chanvre et d'opium, qui rendra les gens heureux.

Tu t'illusionnes avec Elise. Ça passera pas. Je l'aime bien, la gamine (lui dis pas, ça ferait que la vexer), mais je crains que son obsession ne tourne mal. Tu sais bien toi-même qu'il y a des fêlures qu'on ne peut réparer. Tout juste les camoufler sous une jolie couche de vernis. Si c'était un chien fou, on aurait parlé de l'abattre. Que fait-on des chats sauvages ?

Si tu vas retrouver ton roux, c'est pas moi qui te tuerais. J'en aurais pas besoin. Ta nièce t'aura avant moi.

L'escorte du cureton pâlichon s'est bien passé, je n'ai même pas eu besoin de le soulever à bout de bras pour le jeter sur des brigands avant de m'enfuir. Quel dommage, hein ? Toujours est-il qu'il a payé, et grassement. Pour deux jours, j'en ai presque eu des remords (je dois m'attendrir, c'est pas bon. On va dire que c'est ta faute, il faut bien trouver une coupable).

Pour Isaure, c'est autre chose... Figure-toi que cette gourdasse a trouvé le moyen de se faire brigander quand je lui ai faussé compagnie pour accompagner le prêtre. La merde. J'ai essayé de l'embobiner avec une histoire de destin divin, mais je sens qu'elle va tellement m'en rebattre les oreilles que je serais muet ET sourd la prochaine fois qu'on se verra.

Si chaque donzelle est aussi chiante que vous deux à protéger, je ferais aussi bien de retrouver les bonnes vieilles habitudes et de passer les gens au fer plutôt que les maintenir en vie. Ça me ferait moins de soucis.

Pierre

P.S. : T'as raison, ta pipe est mieux. Elle est à moi maintenant.
P.P.S. : Oseille te passe le miaou. Très fort et très souvent. Tu lui manques.


    | Russe |

Citation:
Catalyna,

Au moins nos échanges vous permettent-ils d'étendre vos connaissances de la langue françoyse. C'est toujours ça de pris. Ça n'est certes pas en rase campagne que vous trouverez à qui parler. Les routes sont-elles aussi dénudées d'où vous venez ? Il m'est arrivé de parcourir des lieues sans croiser personne d'autre qu'un bouseux esseulé, et encore. De toute manière, la cambrousse ne vaut rien. Rien ne vaut Paris.

Dois-je me méfier de vous ? C'est une question stupide à vous poser, je vous l'accorde, bien que je ne puisse m'en empêcher. J'imagine que 'non' est la seule réponse que je souhaite lire, même si je ne la croirais pas. Vous ne semblez pas faire grand cas de l'amitié des autres, et de vous-même. Moi non plus, fut un temps. Je me laisse difficilement aller à la confiance et je suis si lent à l'attachement que j'ai longtemps cru posséder quelque carence en la matière. On m'a fait découvrir qu'il y avait des exceptions, rare, et précieuses.

Ne soyons pas amis, et voyons où cela nous mène ? Peut-être alors vous expliquerais-je ce que je fais de ma langue.

J'escorte. Ne craignez rien pour le trésor de notre pâlichon cureton... Tant que ma solde fait partie de ce fameux magot, je ferais ce que je dois faire pour ne laisser personne y poser ne serait-ce qu'un œil.

Pierre

P.S. : Pour l'écriture, on va dire que c'est la force de l'habitude.
P.P.S. : Et cessez de vous excuser, c'est fatigant.


L'écriture est plus tremblante, à la lumière d'une lanterne, on y voit moins bien.
Citation:
Pierre,

Je vous en prie, appelez-moi Cat', comme tout le monde le fait, ennemis ou amis. La russe, sinon. Je me reconnaîtrais. Mais ce prénom commence à m'insupporter, je ne sais pas vraiment pourquoi.

De là où je viens, certainement que les routes sont peu peuplées, du moins pour l'hiver. Chez nous, il fait si froid qu'il ne vaut mieux pas s'aventurer dehors. Nous y sommes habitués, certes. Beaucoup meurent en cette saison, c'est triste à dire. Je n'ai pas beaucoup voyagé. Là-bas, nous étions chez nous, au chaud, et gamine nous ne sortions peu. J'accompagnais mon père dans ses visites pour son commerce, il fallait bien apprendre les ficelles du métier, mais jamais bien loin de notre habitat. Je me plais si bien ici, que je commence à oublier ma vie d'avant. C'est sans aucun doute pas plus mal.

Si vous devez vous méfier de moi.C'est une question étrange, en effet. Je serai quelqu'un d'honnête, comme j'aime l'être quelques fois, et je vais vous dire ce qu'on dit de moi, et ce que je pense de moi. On dit de moi (mes amis) que je suis difficile, méchante et tordue. Aussi, on dit de moi que je suis loyale, rancunière, fidèle et attachante. Selon moi (et je pense être objective), je ne suis pas quelqu'un de bien. Je suis loyale, fidèle et honnête, ce sont mes devises pour mon entourage et les gens que j'apprécie.

J'essaie de détailler comment je suis, et vous pourrez juger de votre méfiance. Je suis une mercenaire, sans nul doute. Si j'ai traîné avec les Corleone, ce n'est pas un hasard. J'aime le combat et l'argent facile. J'ai été entraînée pour, autant s'en servir. J'aime manipuler les gens, ceux que je n'apprécie pas, ceux qui m'ont déçue, ceux qui m'ont blessée. Je ne suis pas si coriace que ça, et le fait de ne pas me lier d'amitié ou quoi que ce soit d'autre m'agace. Je suis colérique et sans doute chiante. Je ne comprends pas souvent l'humour, et je n'aime pas les jeux que font les gens ivres. Je déteste les pommes. Je reste convaincue, qu'au fond de moi s'y trouve un peu de lumière. Oh, et je ne comprends que rarement les allusions de chaire (je ne sais pas si c'est compréhensible), je n'ai pas été éduquée de ce côté-là, ce qui me rend sans doute difficile.

Si je suis digne de confiance pour ce qui est de vous, je pense que ce n'est pas trop risqué. Vous ne me connaissez pas, et de toute façon, je n'ai personne à qui parler. Ceux qui me font confiance n'ont jamais été déçus. Aussi rares soient-ils.

Et vous? Comment êtes-vous? Dois-je me méfier? Ce que je viens de vous dire et quelque chose de personnel, et pourtant, l'envie me prend de coucher ces mots sur le papier. Sans doute parce que je suis un peu folle et qu'il n'y a rien de tel que le goût du risque.

Vous voyez, votre lettre m'a encore appris des mots. C'est une plaisir de vous lire. Je saurai mieux parler. Si je sais écrire, c'est que je me fais aider pour certains mots. Mais ma fierté me rappelle que cette lettre ne doit être lue par personne d'autre.

Je vous prie de m'excuser. Bon je rigole, j'essaie de faire preuve d'humour de temps en temps, ne me rappelez pas mon échec cuisant, je me montrerai susceptible.

Je vous écris sous les étoiles, guettant les proies.

Catalyna.


Citation:
Cat, donc (cela m'économisera de l'encre),

J'ai du mal à imaginer une enfance telle que la vôtre. Ça va paraître con, mais quand j'essaie, je vous vois, vous et votre famille, blottis en hiver comme des souris dans leur nid en attendant le redoux. Je suis sans doute trop habitué au dédale gigantesque des rues glauques et surpeuplées dans lesquelles il m'a toujours semblé évoluer. Le silence me paraît assourdissant, les campagnes vides d'un ennui mortel.

Vous êtes honnête, mais aimez manipuler les gens. Loyale et tordue. Attachante, mais vous avez du mal à vous lier d'amitié. Vous avez l'air de choisir soigneusement qui peut se fier à vous, et ceux qui n'en ont pas le privilège ne sont pas avertis. Soit. La confiance est quelque chose à gagner pas après pas, qui se mérite, et non pas acquis au tout venant.

Je vais donc jouer le jeu. Essayer. Je n'ai jamais eu pour habitude de m'épancher. Je ne suis même pas sûr de savoir comment on fait. Pour ce qui est de se méfier de moi, tout dépend des circonstances, j'imagine. De mes intérêts, de vos intérêts. Je ne fais rien, ou presque, si je n'ai pas à y gagner. J'ai appris tôt qu'il valait mieux être celui qui a l'argent que celui qui se met à genoux pour le quémander. Qu'il fallait être celui qui tient le couteau plutôt que celui qui l'a sous la gorge quand les ressources viennent à manquer. Je n'ai que peu de loyautés, mais celles que j'ai sont à jamais acquises, et même l'appât du gain ne saurait les défaire. En comparant vos mots aux miens, j'y vois un écho. Nous semblons nous ressembler sur ces points.
Je n'ai pas eu d'enfance. Je suis apparu comme ça, d'un claquement de doigts, déjà grand, beau, fort et intelligent (et modeste, cela va de soi). On me croit calme parce que je ne parle pas, et je me sens constamment en colère sans jamais savoir pourquoi. Je suis fier, et impatient. J'aimerais noyer ceux qui se disent désolés lorsqu'ils apprennent que je suis muet. J'aime les jeux d'alcool, surtout celui de faire boire ceux qui ne veulent pas boire, parce que leur faiblesse alors est intéressante à contempler.

« Je vous écris sous les étoiles, guettant les proies. »
Il me semblait bien vous avoir vue à l’œuvre, mais de loin je n'étais pas sûr de vous avoir reconnue. Maintenant, je sais. Vos inquiétudes concernant le trésor du prêtre m'apparaissent sous un jour nouveau. Je suis heureux de ne pas avoir dû vous jeter le bonhomme dessus pour m'enfuir avec l'argent, comme quelqu'un de cher me l'a conseillé en cas de grabuge. Il ne vous aurait pas fait trop de mal en vous tombant dessus de toute façon, trop maigrichon.
Dites-moi que ce n'est pas vous qui avez brigandé l'employeuse à qui j'ai fait faux bond pour accompagner le cureton. En ce cas, je vous hais, parce qu'elle me pourrit la vie en représailles (à moins que ce ne soit que l'expression de son caractère naturel...).

Pierre

P.S. : encore une excuse et je vous frappe. Je ne plaisante pas. Bon, vous êtes un peu loin pour ça. Je collerai un piège à mulots dans mon prochain courrier.


    | Éléphant bleu |

Citation:
On m'a appris vos déconvenues en chemin. Je suis embarrassé de vous avoir fait faux-bond juste quand vous aviez besoin de mes services. C'est vraiment con peut-être la volonté divine : grâce à votre sacrifice, un homme d'église a passé les tourmentes du voyage sans encombres. D'ici à écrire que le Très-Haut fait du favoritisme...Vous serez peut-être soulagée d'apprendre donc que votre ami le curé pâlichon est bien arrivé jusqu'à Niort où j'avais convenu de le mener, et je vous suis maintenant tout dévoué. Où dois-je vous retrouver ?

Pierre le muet

Citation:
A vous, Pierre.

J'ignore comment la nouvelle a pu vous parvenir. Nous souhaitions rester discret sur notre mésaventure. Vous êtes cependant le plus pitoyable garde du corps que la terre ait porté ! Nous partons ce soir pour Périgueux où ma jeune cousine se trouve. Dès que nous l'aurons retrouvée, et convaincue de nous suivre, nous prendrons la direction de la Provence, où doit se trouver le cortège royal.

Tâchez de me rejoindre au plus vite.

Isaure Beaumont-Wagner

PS: Vous avez beau être muet, il me semble entendre une voix que j'imagine vôtre, et pleine de sarcasme.

Citation:
Isaure,

J'ai eu vent de vos mésaventures par une tavernière à La Rochelle, dont le nom m'échappe. Calisson, quelque chose comme ça. J'ignore comment elle a su pour cette affaire, sinon qu'elle semblait vous connaître.
Me faire courir à travers tout le Royaume est-il une punition pour vous avoir faussé compagnie ? Je marche dans vos pas, donc...

Pierre

P.S. : Sarcastique ! Que nenni !

_________________

Avatar : AaronGriffinArt
Pierre...
    | Rousse trouée |

Citation:
Pierre,

Elle m'a plantée. Pas plantée comme une plante, pas plantée comme on oublie quelqu'un. Non. Elise, cette petite garce, m'a mis une dague dans le ventre. T'inquiète pas. Je suis en vie, même si je ne suis pas passée loin. Heureusement pour moi, Flora, qui est médecin, n'était pas loin. Elle, Louis-Marie et Guise ont réussi à gérer et la blessure et mon sale caractère. C'est te dire ! Bref elle est complètement folle, elle nous a pris, LM et moi, pour les jumeaux. Manquait plus que ça. Je n'ai qu'une envie, c'est de la buter avant qu'elle ne tue l'un de nous.

Fallait pas que tu partes Pierre, tu vois bien que je ne vais pas survivre sans toi. Et non je ne veux pas te faire culpabiliser, c'est juste que tu me manques.

Je suis contente que tu te sois fait de l'argent. Et pour Isaure... ma foi... ça lui fera les jambes. J'ai plus le coeur à avoir pitié des gens, j'ai trop mal pour être compatissante.

Je te laisse, j'en peux plus de douleur, je crois que je vais mourir et tu ne seras pas là pour le voir. C'est bien, tant mieux.

Je t'aime mon roc.

Gy'

P.S. : prie pour mon âme.
P.S. bis : je te lègue ta pipe.


L'écriture est moins soignée que d'ordinaire, nerveuse, et quelques taches d'encre parsèment la page.
Citation:

Merde.

Merde, quoi ! Tu fais chier. Élise fait chier. Vous faites chier. Je suis parti depuis quoi ? Dix jours ? Dix jours sans ma pomme pour vous surveiller, c'est le temps qu'il vous faut pour vous entre-tuer. Bravo. Du grand art.

Tu vas bien ? Question con, oublie. Que dit ton fameux médecin ? Tu t'en sortiras ? Au moins, tu peux tenir une plume, ce qui signifie que tu n'es pas si près de la tombe que tu veux me le faire croire. Il y a intérêt. Je suis mort d'inquiétude. Je voudrais courir à ton chevet, je voudrais ne plus jamais te revoir, imaginer ton corps pourrir sous les pissenlits. Je suis trop loin pour l'un, trop lâche pour l'autre.

Me fais pas culpabiliser. T'es dégueulasse et tu le sais. Ne fais pas en sorte que ce soient les dernières paroles que je t'adresse.

Ton Roc, comme tu dis. Qui s'effrite.

P.S. : Crève pas. Je te déteste.
P.P.S. : Garde ma pipe. Je la récupérerai quand j'irai pisser sur ta tombe.


    | Russe croisée |

Citation:
Pierre,

Mon enfance est maintenant lointaine. Je me souviens de la neige et du froid mordant qui l'accompagnait. Je me souviens aussi des feux de cheminée et de la chaleur qui s'en dégageait. Je voyais aussi beaucoup les enfants des rues jouer avec la neige de toutes les façons, de leur rire, et de la vie ralentie par les intempéries. Beaucoup étaient comme de souris prises au piège dans leur trou, à attendre la belle saison. Beaucoup d'autres n'en avaient que faire du mauvais temps et continuaient à vaquer à leurs occupations. Les enfants sont souvent protégés et lorsque je suis devenue suffisamment âgée, on m'a envoyée ici.

Croire que vous n'avez pas eu d'enfance me semble improbable. On ne nait pas adulte et muet, ce serait invraisemblable. La modestie n'a pas l'air d'être de mise, dites-moi, mais il faut bien savoir se faire briller, sinon personne ne le fera pour vous, n'est-ce pas?
Il semble que vous êtes quelqu'un d'intéressé, d'opportuniste (on m'a appris ce mot, aujourd'hui). J'espère que vous êtes sincère en quelques occasions, tout de même. C'est déjà une grande chose que de le reconnaître. Je le suis aussi, à ma façon, il faut bien savoir tirer son épingle du jeu (ça aussi, c'est une expression que l'on m'a apprise). Vous avez aussi appris la loi du plus fort, mais l'être humain garde quelques faiblesses, je crois et il suffit de les trouver et on se retrouve aussitôt bien bas. Certainement que ma loyauté est une grande faiblesse.

Il est probable que vous m'ayez vue à l'oeuvre, ce qui n'est pas une bonne chose quand on veut faire bonne impression. D'autant plus quand on fait quelque chose d'illégal. C'est tout de même amusant, non? A moins que vous m'ayez confondue. Des rousses comme moi, nous nous ressemblons toutes. C'est ce que je disais à la naine de l'autre jour, j'ai une allure banale.
J'espère cependant que ce n'est pas celle que vous avez laissé en plan qui s'est faite racketter, et si j'en suis la responsable, ne me haïssez pas, je balancerai la faute sur quelqu'un d'autre. Je trouverai bien une rousse crédule dans le coin.

Ce voyage est fructueux mais lassant. Les gens sont heureux et c'est exaspérant de les voir niais d'amour. Heureusement que ma soeur m'accompagne, en mal d'amour, elle aussi d'ailleurs, je me sens moins seule. Je ne comprends pas grand chose à la route que nous faisons, nous qui devions aller à La Rochelle, nous nous retrouvons à Angoulêmes, et on ne me la fait pas à moi, ce n'est pas le bon chemin!

Les gens qui s'excusent lorsque vous leur dites que vous êtes muets sont d'un ridicule, si vous voulez mon avis (et même si vous ne le voulez pas). Ce n'est pas de leur faute, et ils ne peuvent rien y faire pour y remédier. Ce sont des crétins. Si vous voulez de l'aide pour en noyer quelques uns, vous pouvez compter sur moi, ça m'exaspère aussi. Les gens qui s'excusent tout court devraient être noyés je crois.

Quant aux jeux d'alcool, ils amenaient souvent les femmes à se dénuder et les hommes à les regarder, des paris sur qui embrassera qui, et qui finira en couche avec qui. Ca ne m'intéresse pas, je trouve ça crétin. Il n'y a plus aucune sincérité dans ces jeux-là et je n'aime pas ça. Faire boire quelqu'un qui n'y est pas habitué, en revanche c'est très amusant. Surtout quand ils racontent n'importe quoi. Il n'y a rien de mieux que l'alcool pour amadouer quelqu'un.

Vous en êtes où vous? Bientôt arrivés?

Cat'.

PS : je ferais bien attention en ouvrant la prochaine lettre, pour le piège à mulot. Ce serait dommage d'y perdre un doigt.


Citation:
Cat,

Voyez ? Pas de piège à mulot. Vous ne vous êtes pas excusée cette fois, et je tiens parole (ça n'aurait pas marché de toute façon, puisque que je vous avais prévenue). Vous pourrez y voir un gage de ma capacité à la sincérité. Je suis quelqu'un d'intéressé et d'opportuniste, comme vous dites. Ce serait vain de le nier, mais cela ne m'empêche pas de pouvoir être franc. L'un et l'autre ne sont pas contradictoires.

À propos de sincérité. Cela vous arrangerait-il que je fasse semblant de ne pas vous avoir reconnue, ce soir-là ? Vous avez raison après tout. Ce ne sont pas les rousses qui manquent. Jetez un caillou n'importe où dans le Royaume, dans n'importe quelle direction, et vous en trouverez une qui se frotte la caboche en criant « ouille ! ». Pour peu que le projectile ait frappé assez fort, vous pouvez même vous arranger pour lui faire croire qu'elle a elle-même détroussé le passant.
Après tout, peu m'importe que vous soyez la responsable ou non de cette rapine... La donzelle qui m'emploie aurait sûrement trouvé d'autres raisons pour me taper sur les nerfs. Je suis loin d'être arrivé, elle me fait courir dans tout le Royaume.

C'est une bonne chose que votre voyage et vos 'non-activités' vous soient enrichissants. Nous avons failli nous croiser à nouveau, je devais faire route vers Angoulêmes, mais mon chemin a dévié. C'est peut-être une chance pour ma bourse, mais j'avoue qu'il aurait été agréable de croiser un visage connu. J'ai beau me targuer de ne pas rechercher la compagnie d'autrui, je n'ai plus l'habitude de voyager seul, et le morne de la campagne m'apparaît plus écrasant encore qu'à l'ordinaire. Seules l'amertume et l'inquiétude m'accompagnent, dans la salle de relais d'où je vous écris, et elles ont un caractère épouvantable. Je ne cesse de me demander si j'ai fait le bon choix.
Vous avez de la chance d'être auprès de quelqu'un qui vous importe. Ne soyez pas trop dure avec les gens heureux. Ça ne leur ferait que plus plaisir de vous jeter leur bonheur à la face.

Je n'ai pas eu d'enfance, je le réitère. Ou du moins, elle m'a paru si courte que c'est comme si elle n'avait jamais existé. On grandit vite à la Cour, ou on meurt jeune. Le reste n'était qu'une boutade (sauf la modestie), mais il paraît qu'il ne faut pas expliquer les blagues. Celle-ci devait être mauvaise. En revanche, je suis bel et bien né muet. Pas un cri n'est sorti de ma bouche, à ce qu'on m'a raconté. Il paraît que c'est mauvais signe, que cela apporte la mort. Les gens qui affirment ça devraient peut-être partager une noyade avec les curieux et les imbéciles heureux, mais je les soupçonne d'avoir raison.

Qu'est-ce qui vous a poussée à choisir les chemins de ce Royaume plutôt que le vôtre ? Vous posez-vous parfois quelque part, entre deux excursions sur les chemins ?

Pierre


    | Éléphant bleu paumé |

Citation:
A vous, Pierre.

Nous avons repris la route, plus forts de la garde de Nemours, et en compagnie des jeunes gens dont je vous avais parlé. Vous n'avez donc plus à interroger les gens que vous croisez. Je vous préconise de parcourir à bride abattue les quelques toutes petites lieues nous séparant. Nous avons atteint la Guyenne et nous rendons à Nîmes, pour l'heure. Tout dépendra de l'avancée du cortège royal.

Et comme vous vous posez la question, n'est-ce pas !, je vais mieux, bien que je sois encore un peu douloureuse, et mon aristotélicisme me pousse à vous pardonner votre manquement. Tâchez de vite nous rejoindre, car il a cependant des limites en ce qui concerne votre solde !

A très vite,

QUe le Très Haut guident vos pas,

Isaure Beaumont-Wagner

Ecrit au dos du précédent pli :
Citation:
PS: Où en êtes-vous ? Dans quel état est la bourse que je vous avais confiée ?


Citation:
Isaure,

La prochaine fois, cachez-vous derrière quelqu'un, comme vous avez désormais une compagnie plus conséquente, un bouclier humain ne devrait pas être difficile à trouver. Ou faites la morte (pour plus de vraisemblance, n'oubliez pas que les morts se conchient). Je vous imagine déjà me faire les gros yeux. Vous m'avez embauché comme garde du corps, je ne suis pas assez près de votre corps pour le garder, et je fais ce que je peux à distance. Ça n'arriverait pas si vous ne baguenaudiez pas à droite à gauche quand j'ai la bonté d'escorter un homme de Dieu.

Où êtes-vous exactement en Guyenne ? Cela m'aiderait à trouver un chemin plus court pour vous rejoindre.

Je suis à Saintes actuellement, et à moins de faire une mauvaise rencontre moi-même, j'aurais les fonds nécessaires pour mon voyage.

Pierre

_________________

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Pierre...
Citation:
Pierre,

Faut-il que vos jambes soient aussi faibles que votre langue ? Si la seconde semble incapable de produire des sons intelligibles, les premières pourvoient également bien mal leur rôle : ne peuvent-elles vous porter plus rapidement ?

Où êtes-vous, et que faites-vous ? Me voilà à Nîmes et je serai demain à Arles, point final de cette aventure, puisque nous aurons retrouvé le cortège. Et je serai toujours sans ce garde du corps que je finance pourtant. Vous êtes un fantôme, alors même que vous êtes vivant et me coûtez. Je m'impatiente. Vous devriez avaler les lieues qui nous séparent sans une seule halte. Vous devriez épuiser votre monture pour me retrouver et qu'elle s'écroule à mes pieds, en gage de votre implication dans votre rôle de garde du corps.

Mais au lieu de ça, je suis certaine que vous traînez d'auberge en taverne, de taverne en tripot et de tripot en bordel établissement de mauvaise vie ! Votre vie doit être dissolue, comme le sont celles des gardes du corps. Et si pour cela je devrais vous renvoyer, rassurez-vous, je n'en ferai rien, car je vois en vous une petite brebis galeuse à conduire dans la lumière. Nous redresserons votre âme tordue et si vous revenez dans la lumière, qui sait, peut-être la parole vous reviendra-t-elle. Vous êtes-vous déjà dit que c'était sans doute une punition divine ?

Comme j'imagine que vous avez dû jouer - et perdre - les sous que je vous avais fait parvenir, vous trouverez ci-joint une nouvelle cassette contenant 400 écus, cela devrait être suffisant pour rallier ma position de la vôtre.

Que le Très-Haut vous garde,

Isaure Beaumont-Wagner


Dans la grande pogne tachée d'encre, la lettre est réduite à l'état de boulette de papier, le sceau bleu à l'éléphant craquelé. Quelle putain d'emmerdeuse.
Répondre, pas répondre ? Le muet passa en revue tous les jurons dont il pourrait agonir la grenouille de bénitier dans sa prochaine missive. Puisqu'elle le prenait pour un con et un coureur de bordels, elle n'avait qu'à mariner, tiens, et croire qu'il avait pris l'argent et filé. Elle ne s'attendait apparemment qu'à ça. Faites donc des efforts pour vivre honnêtement, une fois dans votre vie, et personne ne vous croira...

Fourrant le pli malmené dans sa poche, le barbu se pencha sur le reste de sa correspondance.


Citation:
Pierre,

Au moins, je constate que vous êtes un homme de parole, je saurais désormais ne plus jamais m'excuser, ça m'évitera d'y perdre des bouts de doigts, sans doute. J'ai tout de même du mal à distinguer la franchise lorsque quelqu'un est intéressé. Enfin, je peux certainement être surprise!

Peu m'importe, d'ailleurs, que vous m'ayez reconnue ou non. J'ai simplement une question. Pourquoi ne pas m'avoir reconnue alors?
Sans nul doute ce serait amusant de manipuler un esprit (d'une femme rousse, qui plus est) pour lui faire croire que c'est elle la responsable. Ainsi, ce serait elle qui irait en geôles à ma place, et ce serait pour le plus pratique, les lits dans ces trous ne sont pas bien confortables. En plus, on n'y mange pas bien. Heureusement qu'il n'y a plus trop de place en ce moment, ça me soulage d'un poids.

Etre sous les ordres de quelqu'un c'est désagréable, et d'une femme qui vous fait courir sur tous les chemins du Royaume, je n'imagine même pas à quel point ça doit l'être. Enfin, si vous avez l'occasion de vous remplir copieusement la bourse, c'est plutôt un bon point. Mais, ça empêche les libres mouvements et d'aller où bon vous semble. Vous vous demandez si vous avez fait le bon choix par rapport à cet engagement? Ce n'est jamais bon quand on commence à se poser des questions. Du moins, c'est ce que je me dis.

Les gens avec qui je traîne sont plus ou moins agréables, plus ou moins hypocrites. Mais je pense que nous le sommes tous, d'une certaine façon. Notamment quand je crache qu'ils m'énervent avec leur bonheur. C'est certainement de la jalousie.

Vous êtes né à la Cour? C'est intéressant, vous avez du en apprendre des choses ici-bas. Mais c'est étonnant que vous sachiez écrire, lire et détailler de la sorte. Je me demande bien comment vous avez fait pour sortir de ce trou. Sachez que j'aime beaucoup cet endroit, même si y circulent innombrables crapules et meurtriers. Ces lieux me sont familiers. Comment avez-vous fait pour partir? Pour vous en sortir? Et apprendre l'écriture? Comment avez-vous fait pour survivre?

Ce qui m'a poussée à sortir de chez moi et de venir ici? La réponse officielle est que je cherchais ma famille (normande) pour les rencontrer et sans doute à la quête d'un peu d'aventures. La réponse officieuse est que j'ai été envoyée par mon employeur pour aller secouer quelques personnes pour des questions d'argent ou autre. Mais ce temps est révolu. Je n'ai ni employeur, ni contrainte et je m'en porte bien.

J'aimerai me poser un peu, être sur les chemins commence à me lasser. J'ai besoin de fonder quelque chose sans doute. J'aime Limoges. Je m'y sens bien mais j'y retrouve souvent les gens que je n'aimerais pas voir. Je n'aime plus être seule, et je finis toujours par me retrouver seule. C'est drôle, non? Je ne me vois pas non plus avoir une vie banale et rondement menée. J'aime l'action.

Souhaitez-vous poser bagages vous? Revenir à Paris? Ou dans une autre ville? Avez-vous déjà pris le bateau?

Je vais en Bretagne, là-bas mon groupe prendra le bateau. Je ne sais pas si je les suivrai, j'hésite mais je n'ai pas de meilleurs plans. Advienne que pourra!

Cat'.


Citation:
Cat,

J'aime les raisons de votre venue en France. Elles me paraissent vraies. Une raison officielle, une raison officieuse. Les choses semblent bien marcher comme ça, et tout le jeu est de réussir à trouver l'officieux derrière l'officiel.

Pourquoi ne pas vous avoir reconnue ? Parce que la nuit faisant, je vous avais laissé le bénéfice du doute et que, comme je vous l'ai écrit, ce ne sont pas les rousses qui manquent ici bas. C'est la mention de proie dans une précédente lettre qui m'a fait rappeler la scène, et incité à penser que vous ne chassiez pas les animaux. N'y voyez là aucun reproche de ma part. Nous faisons tout ce qu'il faut pour vivre, ou nous sentir vivre.
Je vous trouve très sévère envers la bectance de taule. Le rat, s'il fait suffisamment sombre pour oublier que c'en est, est une chair qui sauve plus d'un oublié au fond de ses oubliettes, et lui fait faire de l'exercice pour l'attraper.

Je ne suis pas né aux Miracles, mais j'y ai grandi, et les réminiscences (un cadeau pour votre collection de mots, je gage que vous ne connaissiez pas celui-là) d'un petit village dans les montagnes sont si fragiles, effacées par la pestilence de la Cour, que je crains n'avoir fait que le rêver. Pourtant, je sais que ce lieu, et moi dedans, a existé : c'est là-bas qu'un curé m'y a appris les lettres. Peut-être est-ce un peu pour cela, en plus de l'appât du gain, que j'ai décidé d'escorter le prêtre à Saintes, lorsque nous nous sommes rencontrés. Une vieille faiblesse, en souvenir d'une gentillesse. Savez-vous ce qu'est d'apprendre à écrire, pour un gamin incapable de prononcer le moindre mot ? C'était la première fois que l'on m'offrait un moyen de communiquer, que l'on reconnaissait en moi un être humain. Bien sûr, cela ne m'a plus servi à rien dans les basses-fosses parisiennes, alors que j'étais le seul instruit. Et le seul à ne pas retrouver l'usage de la parole, une fois la nuit tombée, quand les culs-de-jatte récupéraient l'usage de leurs jambes et les lépreux perdaient leurs stigmates.

Si vous vous posez un jour à Limoges, nous avons des chances de nous y recroiser. J'y vis, quand je ne suis pas à Paris, ou à courir derrière une écervelée qui se jette sous les semelles du premier brigand venu.

Bon voyage (ou ''bon vent'', comme il semble d'usage de dire lorsqu'il s'agit d'une virée maritime) si vous décidez de suivre votre groupe. Je n'ai jamais pris le bateau, il n'y a même pas si longtemps que j'ai vu la mer pour la première fois. Elle m'est apparu comme un chaos à la fois terrifiant et curieusement apaisant. Je ne sais pas si j'aimerais m'y faire ballotter sur une coquille de noix.

Vous me raconterez ?

Pierre

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Pierre...
    | Rousse |

Citation:
Mon Roc,

Bien sûr que je vais bien. Pour qui me prends-tu ? Crois-tu que je suis de celles à clamser au premier coup de couteau ? J'ai le coeur tendre, mais le cuir encore un peu solide et je compte bien te faire chier encore quelques années. L'heure d'abreuver ma tombe de ta pisse n'est pas encore venue, je cicatrise et je vais déjà mieux. Je note néanmoins que tu ne seras pas revenue pour moi, foutu sans-couilles.

LM s'est occupé de moi, mais il n'arrive pas à s'occuper du cas d'Elise. Je fais quoi à ton avis ? Je la tue ? Je la plante aussi ? Moi je penchais pour l'obliger à se barrrer de Limoges, mais elle semble déterminée à y rester.

Que deviens-tu ? Où es-tu ? Qui vois-tu ? Tu me manques, j'aimais bien trop entendre tes pas dans le couloir. J'ai plus ta chambre à squatter pour me plaindre, ou tes genoux pour me confier. A défaut, c'est ce foutu vélin impersonnel qui se charge de te transmettre des phrases maladroites qui ne savent pas trop exprimer ce que je veux dire.

J'espère que tu vas bien, que tu es heureux et riche.

Gy'

P.S. : La prochaine fois que je crève, merci de te bouger le cul.
P.S. bis : La pipe je la léguerai au premier clampin qui passera à mon chevet !


Citation:
Putain, Gy !

Ça te crèverait de donner des nouvelles plus souvent ? Ça fait une bonne semaine depuis ta dernière lettre où tu m'écrivais être à l'agonie. T'avises plus de me faire mariner comme ça. Un peu plus et je te croyais clamsée pour de bon. Pardon d'avoir douté de ta pugnacité et de ton cuir épais de grosse bourrique increvable. Pardon de n'avoir pas été là une fois de plus quand tu avais besoin de moi.

Au moins, ce petit con de LM se révèle moins inutile que je le croyais. Il a intérêt à te remettre vite sur pieds, et à te protéger la prochaine fois que votre nièce tarée refera des siennes. Te servir de bouclier humain, par exemple. Mieux vaut lui que toi.
Pour Élise, je sais pas quoi te dire. Je t'avais proposé de la prendre en apprentissage lors de mon départ, mais c'est trop tard. Elle est pourrie. Je crains que ce ne soit irrémédiable, elle est dangereuse, et restera toujours dangereuse. Si ça ne tenait qu'à moi, je l'aurais noyée.

Tu me manques aussi. Chaque fois que j'entre dans une taverne, je cherche des yeux ta tignasse rousse par réflexe, et je suis immanquablement déçu quand je la trouve pas, ou que c'est un autre minois que le tiens en dessous. Je sais pas ce que je ferais si un jour, je n'avais plus l'espoir de la revoir, et ta vilaine tronche avec. J'ai passé ces derniers jours à ne surtout pas y penser.

Ce que je deviens ? Je meurs d'ennui. Isaure gambade toujours hors de ma portée et je fais route avec son benêt soupirant pour la retrouver avant qu'elle ne mette le pied sur un autre brigand. Je n'aurais plus de solde si elle distribue sa fortune à chaque péquenot armé d'une fourche qu'elle croise.
Je me suis lié d'amitié (je crois ?) avec une russe croisée à Saintes, elle est plus prompte que toi à répondre aux courriers.

Pierre

P.S. : File ma pipe à quelqu'un et je refourgue ton chat au boucher du coin !
P.P.S. : Je suis vraiment heureux de ne pas avoir eu à pisser sur ta tombe en fin de compte. Vraiment. Déjà, j'aurais eu peur de ce qui aurait pu y pousser.


    | Russe |

Citation:
Pierre,

Je me permets de vous répondre rapidement, le temps se fait long ici.

Ma venue en France ne pas apporté que du bon. Des rencontres, certes et peut-être quelques amitiés. Une fois arrivée, ma cousine est morte quelques temps après. J'ai fait la rencontre d'un homme intéressant, un castré. J'ai appris à aimer comme ça, chose étrange me direz-vous. Puis, il a voulu me tuer. Je vous épargne les détails. Ainsi, je suis partie. A partir de ça, les choses sont allées de pire en pire, et souvent les gens finissent par partir. Quand bien même je me fais à l'idée, c'est toujours difficile et décevant. Je parais certainement pour une de ces "donzelles désespérées", à croire que c'est dans la nature humaine.
Pourtant, oui, j'ai envie de nouveau dans ce Royaume. Je n'ai pas envie de ce voyage en bateau, j'ai envie de voyager avec des nouvelles têtes, de rire au coin du feu, et peut-être de me poser en ville. Mais Limoges n'est pas une ville où je suis très appréciée, les ragots vont vite. Ils m'apparentent aux Corleone, mais je n'en suis pas. Je ne sais pas quoi faire, je ne connais personne à vrai dire.

Votre apprentissage à la Cour a du être instructif, de voir comment fonctionnait ce monde, c'est toujours instructif. Je n'y avais pas pensé, que c'était votre seul moyen de communication. C'est idiot, je sais, je n'ai pas souvent la lumière à tous les étages. Vous avez du être reconnaissant de ce religieux, ils savent se montrer utiles. Ca fait de vous un homme instruit et donc forcément intéressant. Des choses à raconter et à transmettre, avec le plaisir de lire. Je vous assure, c'est un plaisir de vous lire. J'aimerais bien en faire autant.
Il n'empêche qu'une croissance à la Cour (je ne sais pas si ça se dit), ça ne doit pas être facile, d'autant plus pour un muet. Certainement que vous devez connaître une multitude de secrets et qu'ils sont bien gardés. C'est pratique. Vous avez aussi du voir des milliers de choses sans ne pouvoir en dire un traitre mot à quiconque. J'aurai du mal à ne plus parler, j'aurais trop de mal à garder mes émotions.

Je suis actuellement à Limoges, jusqu'à mardi. Ce serait amusant que vous veniez à la mer avec moi. C'est un beau paysage. J'ai appris à barboter dans les lacs, mais la mer c'est autre chose. Nous passions par la mer, depuis la Moscovie. J'ai appris à y être rassurée. De ne pas être maitre total de ses déplacements n'est pas joyeux, mais on s'y habitue.

Je vous écris aussi parce que ce soir, j'ai appris une nouvelle triste. Même si je ne tiens pas à épiloguer (voyez, je connais de jolis mots), ça me fait du bien de parler à quelqu'un de sympathique. Je dois vous paraître perdue, sans doute, mais sachez que je le suis. Totalement déboussolée, parce que ce soit, on m'a enlevé ma lumière.

Dites-moi, Saintes c'est drôlement loin, j'espère que vous passez une bonne route. Il y a sûrement des poutrages, faites attention. Nous avons du faire demi-tour, au moins je sais qu'à Limoges, nous sommes protégés. Plus pour longtemps, certainement.

En attendant de voir la mer avec vous.

Cat'.


Citation:
Cat,

Je peine à m'imaginer comme le confident qui vous distraira de vos malheurs, et encore moins quelqu'un qui vous instruira sur je-ne-sais-quelle grande vérité de la vie. Je ne suis pas un exemple à suivre, et vous pouvez me croire : je me suis souvent, et le regrette sans cesse. Mais si vous me promettez de ne pas écouter l'éventuel conseil foireux égaré entre mes lignes, je serais un œil attentif et peut-être même compatissant à vos épanchements épistolaires. Vos missives elles-mêmes m'apportent un souffle bienvenu dans cette quête d'une patronne qui m'insupporte avant même de l'avoir vue, dans l'ennui déchirant des patelins traversés, dans le regret d'une loyauté blessée par l'appât du gain.
Que s'est-il passé, que vous avanciez dans le noir, à me prendre pour un phare ?

Si vous êtes encore à Limoges à l'heure où vous lisez ces mots, pourriez-vous faire quelque chose pour moi ? Il y a là-bas Gysèle, une rousse comme vous, qui tient une auberge du doux nom de ''Ta mère la catin !'' (entre autre commerce). Elle est blessée, au ventre si je ne m'abuse. Cela doit être aisé de déterminer où : les gens qui souffrent, comme vous le savez sûrement, ont tendance à se replier autour de leur douleur, comme pour la protéger. Si vous la croisez, j'aimerais que vous appuyiez sur cette blessure de ma part, doucement, juste assez pour lui tirer une bonne grimace. Je me suis inquiété comme jamais je ne l'aurais cru possible, je l'ai même crue morte, et c'est un sentiment que je déteste éprouver. Je lui en veux, et je m'en veux.
J'imagine que c'est une requête étrange, mais je ne suis pas habitué à demander. Si vous y parvenez, je vous jure que je partirais voir la mer avec vous. Ma parole est donnée, la même qui ne glisse pas de piège à mulot dans votre courrier.

Votre passé semble ne rien avoir à envier au mien en malheureux enseignements. Cela explique peut-être notre convergence de tempérament. Je m'étonne cependant que vous prêtiez l'oreille aux ragots, vous m'aviez l'air de quelqu'un qui ne s'abaisse pas à faire autant cas de l'avis d'autrui, surtout si vous le dites erroné.

Saintes est loin, pour moi comme pour vous. Je fais route vers Nîmes, où mon emmerdeuse professionnelle semble avoir fait halte. Assez longtemps, j'espère, pour la rejoindre. J'ai ramassé en chemin (à moins que ce ne soit l'inverse ?) deux gus dont l'un est le soupirant de la donzelle en question. Pauvre gars ! Je ne sais pas dans quels abîmes de désespoir amoureux il est plongé pour se retrouver si épris, mais c'est assez douloureux à voir.

Pierre

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Pierre...
Citation:
A vous Pierre,

Faut-il qu'on vous ai coupé les mains pour que vous ne puissiez répondre à mes courriers ? Que vous soyez incapable d'articuler des mots intelligibles passent encore, mais que vous ne daignez prendre la plume pour me dire votre position m'agace au plus haut point. Aussi, dans notre intérêt à tous deux, je vais me convaincre que vous n'avez pas reçu ma précédente lettre. N'est-il pas que vous n'avez pas reçu ma précédente lettre ?

Cependant, l'idée de savoir des centaines d'écus perdus dans la nature ne m'enchante guère. Vous serez responsable de ma ruine, Pierre. Car si vous n'aviez pas manqué à votre poste dès le départ, nous serions encore riche de nos écus et mon visage et mon corps n'auraient pas eu à subir les outrages d'un fou furieux !

Priez donc pour que je sois de douce humeur le jour où enfin vous paraîtrez devant moi.

Je serai à Montpellier bientôt. Tâchez donc de m'y rejoindre au plus vite.

Isaure Beaumont Wagner


Ah !
Un bruit - à défaut d'une véritable exclamation - s'échappa des lèvres du grand muet. L'exaspération qu'il sentait dans les pleins et les déliés de la Beaumont était un délice sans nom à ses mirettes, qui ne cessaient de s'en repaître. Contrevenant à ses aspirations de la laisser ruminer encore, il ne put s'empêcher de lui répondre.


Citation:
Isaure,

Mais comment pouvais-je vous répondre ? J'avais les mains bien trop pleines. Une putain dans l'une, la bourse pour ses gages dans l'autre. Si toutes deux sont assez charnues, croyez-moi qu'il n'y a guère de place ni de temps pour une plume et un encrier. Tout juste si j'aurais pu y glisser le vélin.
Quant à se hâter, n'y pensez pas. Après quelques nuits dissolues, certaines parties de l'anatomie masculine se prêtent fort mal à des cavalcades endiablées (sur un cheval, du moins).

Mais rassurez-vous : vous aurez bientôt le plaisir de ma compagnie.

Je vous ai trouvé un cadeau dans un de ces bouges où je me vautre dans le stupre et la luxure. Je gage qu'il vous plaira. Il me semble qu'en échange d'un baiser, il se change en prince charmant.

Pierre


Puis, tant qu'il avait la plume en main (à défaut d'une croupe dodue), il s'attela tranquillement au reste de sa correspondance.
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Pierre,

Je vous rassure, je peine à imaginer qui que ce soit comme mon confident. Si vous n'êtes pas un exemple à suivre, je ne sais pas trop ce que je suis. En vérité, je prends souvent, trop souvent, tout le temps les mauvaises décisions. Hier encore, on m'a dit "mais que fais-tu paumée dans un groupe d'enfoirés?". Même lorsqu'il s'agit de mes amis, je crois que je prends la mauvaise décision.
L'histoire est assez compliquée, et je ne voudrais pas vous embêter avec ces sottises. Je viens tout bonnement de perdre la relation complice que j'avais avec un ami, sa femme est jalouse, de ce que j'ai compris. Je suis tout autant jalouse du bonheur qu'ils ressentent. De le contempler ne me suffit pas, alors il a bien fallu que je prenne mes distances. Si je me sentais triste dimanche au soir, je pense que ça ira mieux. On m'a conseillé d'arrêter de paraître désespérée, ainsi sûrement les choses s'arrangeraient. Je pense que c'est un bon conseil.

Dîtes-moi, si votre patronne vous insupporte autant, qu'est-ce qui vous contraint à rester à son service? L'argent? Si ce n'est que ça vous trouverez certainement une autre façon de gagner votre pain. Comment s'appelle-t'elle? Et dire qu'elle trouve tout de même un soupirant, il y en a qui ont de la chance. Mais l'amour est une vaste connerie. Qui ne dure jamais éternellement et qui fait bien mal. Du moins, c'est la vision que j'en ai. Je plains ce pauvre homme, alors. Si je me fie à votre jugement.

Quant à Gysèle, je vois qui c'est oui. Une courtisane, non? Je crois même que ma soeur l'a payée si je ne m'abuse, mais je n'y comprends trop rien à ces histoires. Gysèle est sympathique, ça doit être une amie formidable. Je n'ai pas encore pu l'approcher, mais je le ferai ce soir si l'occasion s'y prête. Vous savez, j'aimerais même vous rejoindre. Mais je crois que ma tête est mise à prix dans beaucoup de duchés que je devrais traverser. Façon de parler, mais j'ai quelques procés en cours. Une fois que j'aurais rempli ma mission, vous aurez une parole à honorer, et je me dis que nous pourrions aller à Montpellier, une fois que votre patronne aura cessé de vous enquiquiner, une fois que je vous aurais rejoint et que les procès seront oubliés.

Mon groupe à moi est composé de beaucoup d'enfoirés comme ils le disent si bien. Je crois que je fais tâche, c'est ce qu'ils m'ont fait comprendre. C'est amusant aussi, de sortir du lot.

Je vous tiens au courant pour votre amie rousse.

Cat'.


Citation:
Cat,

Il s'agit bien de cette Gysèle-là, bien qu'elle n'ait pas toujours eu appellation aussi flatteuse que ''courtisane''. Ne me dites pas que vous ne savez pas ce que c'est, ni ce qu'elle fait pour vivre ? Je me moquerai pas. Peut-être un peu. J'ignorais qu'elle avait eu affaire avec votre sœur. Voyez, c'est presque la famille. Elle l'est pour moi en tout cas.

Avez-vous pu vous acquitter de ma requête ? Si c'est le cas, va pour Montpellier. C'est d'ailleurs ma prochaine étape, je n'en suis qu'à un jour à cheval. Dommage que vous ne puissiez m'y rejoindre, j'en serais sûrement parti d'ici que vous échappiez aux procès qui vous courent après. Je ne suis donc pas le seul à vous avoir reconnue lorsque vous faites des emplettes sur les routes.

Ma... charmante employeuse se nomme Isaure de Beaumont, entre autres noms. Les nobles collectionnent les blazes comme les lits d'auberge les punaises et celle-ci a l'air de les enfiler comme... Je vais arrêter là les métaphores. Pourquoi est-ce que je m'acharne à rester à son service ? C'est une question à laquelle j'essaie de répondre chaque jour, chaque minute, chaque seconde depuis le début de mon voyage. L'appât du gain n'y est pas pour rien, je pensais que ce serait de l'argent facile. La donzelle est aussi riche qu'idiote, bien qu'elle semble dévoiler des trésors d'ingéniosité quand il s'agit de faire chier quelqu'un – moi en l'occurrence. Peut-être un peu de fierté, aussi. Je m'étais vraiment dit que j'allais faire un travail honnête. Pour une fois. Ça aussi, ça n'était pas aussi facile que je l'espérais. Et si je me débinais, j'aurais abandonné ceux auxquels je suis attaché pour rien.

Les aimez-vous, au moins, vos enfoirés d'amis ? Un peu trop, à ce que je crois lire. Vous avez raison, les ragots sur des gens que je ne connais même pas ne sont pas mes affaires (quoique j'ai l'impression de copieusement vous en abreuver avec mes aventures). Et eux, vous aiment-ils ? Pour quelqu'un qui se targue de n'avoir aucun maître à suivre, vous semblez tout de même entravée par la réputation et les pas de votre entourage.

Pierre

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Pierre...
Du poil à gratter a été glissé dans le pli.
Citation:
Mon roc,

Quoi, ça gratte ? T'aimes pas ça ?
Figure-toi que je n'ai pas aimé le coup dans mon bide non plus. Catalyna a bien transmi ton message quoiqu'il en soit. M'étonne pas que tu te sois "lié" d'amitié avec elle tiens. Mais j'espère rester LA rousse référente dans ta foutue trogne de sadique. Quant à sa rapidité à t'écrire, elle semble être plus libre de ses mouvements et moins ennuyée par une nièce folle ou un époux exigeant (tu sauras pourquoi plus bas).
Foutue russe qui est bien trop sympathique pour mériter ma vengeance retour.
Du coup, j'ai dû innover. Tu risques d'en avoir partout si tu te grattes trop attention !

Si tu veux savoir, je vais beaucoup mieux. La cicatrice n'est pas belle, m'enfin je suis plus à ça près et je rivaliserai jamais avec toi !

SCRAT-SCRAT-SCRAT ( ça démange ? Tiens le coup, tu vas pas aimer la suite !)

Arrête de dire des méchancetés sur Louis-Marie, je ne me serais jamais remise si il avait servi de bouclier et puis.. là tu peux être sûr que je t'aurais envoyé des bouts d'Elise sans remords. La noyer tu dis ? C'est une idée. Figure-toi que mon "gentil" mari lui a pardonné, lui et il lui donne même des conseils pour que j'en fasse autant. Alors Elise m'a écrit un pseudo poème aujourd'hui, absolument ridicule. Ca m'étouffe de l'avoir si près de moi, je te jure, j'ai des pulsions violentes qui me viennent à chaque fois qu'elle approche avec son air de chien battu. En parlant de chien... elle s'est même trouvée une chienne de garde, une rousse qui semble manier les armes à la perfection et qui la protège...de moi visiblement. C'est vrai que ça lui donne moins l'air coupable ainsi... (ironie).

Tu me reverras ! Je finirai par te manquer assez pour que tu reviennes me voir. Mais, tu risques de me trouver changée. Mes potions n'ont encore pas marché, je suis à nouveau enceinte. Tu sais, comme les deux dernières fois quand j'étais allée voir la faiseuse d'anges. Mais là, c'est différent, LM veut pas que je fasse passer la chose. Il veut pas devenir père non plus. D'ailleurs, le père ça peut être lui... ou un de mes clients, on ne sait pas trop. Mais il est furieux et il m'interdit de m'en débarrasser. C'est fou ce qu'un homme peut avoir comme main mise sur nos corps à nous les femmes ! Ca se voit que ce n'est pas lui qui va subir la chose et risquer de crever en couche. Bref, quand tu me reverras soit je serai grosse, soit j'aurais vendu le truc à une famille de riches. Avec un peu de chance il se décrochera avant et le problème sera réglé.

SCRAT-SCRAT-SCRAT (t'arrache pas la peau.. ou les yeux ! Je survivrai même à ça).

Où te trouves-tu ? Tu suis toujours l'un des nombreux prétendants d'Isaure ? Tu parviens à la rattraper ? Tu n'as pas essayé d'herbes étranges ? Pas consommé de boisson nouvelle ? Tabassé un mec louche ou embrassé une femme vérolée ? Je lis tes râleries et je ne peux pas m'empêcher de sourire et de me dire que tu vas donc bien. Car si ce n'était pas le cas, tu me dirais beaucoup moins de choses. Que vous racontez-vous avec ton amie russe ?

Prends soin de toi,

Gy'

P.S. : File-mon chat au boucher et je reviens hanter tes nuits sous la forme d'un gros matou blanc.
P.S. : Je t'aurais fait pousser le meilleur chanvre qui soit... A foison !


Quelques petites taches brunes, comme du sang séché, parsèment la page.
Citation:
Gy,

Ton horrible chat et toi êtes de mèche ou quoi ? La sale bête m'a sauté sur les genoux au moment où j'ouvrais ta lettre et tout m'est tombé sur les mains. C'est quoi cette saloperie que tu y as mis ? Je me suis gratté jusqu'au sang, et ça me démange encore. Heureusement que ça n'est pas tombé ailleurs, ou je l'aurais très mal pris et tu en aurais 'entendu parler' jusque sur ton lit de mort, dans lequel je serais allé te border de bonne heure. Mais c'est équitable, j'imagine...
Brave Cat ! Je suis content qu'elle ait réussi. Malgré ta vengeance basse et sournoise, ça valait le coup. J'aurais aimé le faire moi-même. Je t'en ai voulu, tu sais, quand tu m'as appris ce qui était arrivé. J'ai eu peur. C'est un sentiment qui me déplaît au plus au point, et c'est à cause de toi. Tu peux prendre ça comme le gage que, où que je sois, avec qui que je sois, t'es la seule putain de rousse qui compte à mes yeux (rassure-moi, j'ai pas besoin de ton autorisation pour me faire des blondes ou des brunes ? Bon !).

Élise t'a doublement fait défaut en te plantant cette lame... Elle aurait pu mieux viser, et te débarrasser de ton désagrément en même temps.
Ne pas être méchant avec LM, mais comment faire quand il tend des perches si longues qu'il se tape lui-même la tête avec ? Il pardonne votre nièce d'essayer d'assassiner sa sœur et sa femme à la fois. Refuse d'être père mais t'empêche de te débarrasser du truc. Comment vas-tu bosser, avec un bide de phoque échoué ? Quel client voudra de toi ? Il va subvenir à tes besoins, peut-être ? Il n'a déjà pas réussi à te protéger. Enfin... Tu dois bien avoir un habitué plus riche et plus demeuré que les autres, tu devrais lui faire gober que c'est de lui, et le faire raquer pour le faire chanter ou je-ne-sais-quoi.

T'inquiètes-tu de mes mœurs et de mes consommations ? Non seulement ça te ressemble pas, mais c'est l'hôpital qui se fout de la charité. Seraient-ce tes entrailles de mère en devenir qui te travaillent ? Sache que je suis un grand garçon, avec du poil aux pattes et tout, pas assez désespéré pour aller se fourrer quel organe que ce soit dans celui d'une de tes consœurs vérolées. Je suis muet, pas aveugle, je sais reconnaître un con en bonne santé. Quant à mes autres vices, je suis bien marri d'avoir fini l'opium que tu m'as envoyé la dernière fois. J'ai enfin retrouvé Isaure, à Montpellier, avec ses gens. Une petite heure en sa compagnie, et je me dis qu'il me faudra plus qu'un peu de chanvre pour lui survivre. Elle veut m'attifer d'une livrée à ses couleurs et d'une épée pour, je cite, « faire viril ». Viril ! Quelle connerie. La merde lui dégoulinerait par les yeux que je m'en étonnerais même pas. Je lui en ferais voir, moi, de la virilité !

Et ma correspondance avec la russe regarde pas ton museau de fouineuse. Sinon que je lui dois un séjour à la mer pour un certain service rendu.

Ne fais rien d'inconsidéré,

Pierre

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Pierre...
[Méfait accompli]
Citation:
Pierre,

Figurez vous que si. Je sais ce que veut dire courtisane! Je ne devrais certainement pas l'écrire avec autant de fierté, mais qu'importe, pour une fois que je comprends quelque chose. J'ai un ami qui le fut, courtisan. J'aurais personnellement beaucoup de mal à m'imaginer dans ce rôle, et je pense que mon entourage est du même avis. Les gens font bien ce qu'ils peuvent pour survivre.

Je m'en suis acquittée, oui. Je l'ai mise drôlement en rogne et elle a dit : "Je vais me le faire". Ca n'en reste pas moins amusant. Elle m'a conseillé aussi de ne plus vous obéir. Et ça m'a bien faite réfléchir.
Je ne sais pas si Montpellier est une bonne option, si ce n'est pour les bordels, m'a-t'on dit. Enfin, c'est pour cela que la ville est connue. D'ici à ce que les choses se tassent, j'ai le temps de réfléchir à une destination, enfin si vous ne comptez pas oublier votre parole!

Isaure de Beaumont. C'est amusant! Sur la route, nous avions rencontré un homme dont je ne me souviens plus le nom mais qui s'acharnait de défendre sa réputation alors qu'une personne de mon groupe s'amusait à la descendre. Ce doit être lui, le soupirant que vous avez retrouvé! Comme quoi, nos routes ne font que se croiser d'une certaine façon.

Je crois avoir compris ce que voulait dire "métaphore" et j'ai même ri en lisant les votres. Les travaux honnêtes n'ont jamais été pour moi, et ce n'est pas faute de m'y être essayée. Mais je vous comprends, on se demande un jour ou l'autre si on est capable de rentrer dans le droit chemin, nous aussi. Je pense tout de même que c'est faisable, avec de la volonté et de l'envie. Je trouve ça bien d'avoir de la fierté, mais je pense que si vous vous débinez, vos proches seront ravis de vous retrouver.

Vous avez vu juste, je les aime un peu trop, au point que ça me fait mal. Ca ne se passe pas toujours comme on le voudrait, et de les suivre, ça me lasse, puisque ce n'est jamais moi qui suis écoutée. Voilà pourquoi j'ai pris la décision de les abandonner avant qu'ils prennent le bateau et de les revoir à leur arrivée. Ca me fera du bien.
Je me targue, mais je ne suis pas forcément objective. Peut-être est-ce ce dont j'ai toujours rêvé, cette liberté et dès lors je me vante à qui veut bien l'entendre. Mais nous avons tous des chaines que nous le voulions ou non.

J'allais oublier, mais Gysèle m'a dit que vous saviez vous servir de votre langue à merveille. Ca m'a faite rire.

Comment va la mer? Il fait beau? Avez-vous tremper vos pieds dans l'eau? Il fait un peu froid tout de même.

Cat'.


Debout, la plume dans une main, le vélin plaqué contre les portes d'une église de Montpellier. L'encrier, lui, gît sur les marches comme un enfant mauvais, prêt à se renverser au moindre mouvement inconsidéré. L'encre bave, coule, et le muet claque la langue avec agacement de voir son courrier tout dégueulassé. Mais hors de question d'entrer dans la maison de Dieu sans y avoir été traîné.

Citation:
Cat,

Merci d'avoir tenu parole et de m'avoir rendu ce service. J'ai eu la confirmation par une missive, comment dire... Irritée ? Enflammée ? Douloureuse en tout cas (Gysèle a elle-même tenu sa promesse de m'en faire baver en représailles), que vous aviez en effet mis à bien cette mission. J'espère qu'elle n'en a pas profité pour se venger sur vous pour une chose dont je suis le seul instigateur. Quant à son conseil de ne plus vous laisser dicter par mes caprices, il est bon... mais vous le saviez déjà, non ?

Si Montpellier ne vous sied finalement pas, je vous laisse choisir une autre destination. Je ne vois pas ce que vous avez contre les bordels, ce sont des endroits où il fait bon s'y vider les bourses. Cela dit, ça a engendré une tradition des plus étranges : lorsqu'un homme et une femme se trouvent seuls en taverne, les autochtones qui y entrent se cachent les yeux et sortent en disant « désolé », alors même que tout un chacun est vêtu de la tête aux pieds et ne fait rien d'autre que deviser. Pour y être encore (à Montpellier, pas dans une maison de passe), il y fait froid, c'est vrai, rien qui ne donne envie d'aller courir à poil dans les vagues. Non pas que j'y sois enclin par beau temps.

De toute manière, je n'aurais pas eu le temps de baguenauder. En compagnie du godelureau énamouré (je gage que c'est lui que vous avez croisé. Je n'ose imaginer un deuxième type assez perché pour s'éprendre d'Isaure), j'ai fini par retrouver mon employeuse en question. J'ai donc l'indicible honneur de supporter ses admonestations et autres lubies en direct plutôt que par courrier interposé. Je suis joie. Pardonnez si mes lettres se raccourcissent, je n'ai plus l'heur d'y consacrer beaucoup de temps : je vous écris présentement debout, appuyant la présente missive contre les portes de l'église où elle se recueille.

Nos chemins semblent se croiser souvent, directement ou indirectement. C'est amusant comme les vies s'entremêlent, comme le monde paraît à la fois grand et petit. Qu'allez-vous faire endant que vos amis prennent la mer ? Allez-vous voyager, travailler seule ?

Pierre

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Pierre...
Tap. Tap-tap. Tap. Tap-tap-tap. Tap.

Un long doigt taché d'encre tapotait nerveusement le bois de la table. Son précédent tête-à-tête en taverne avait laissé le grand muet d'humeur massacrante, et il peinait à reprendre son calme. Comme s'il n'avait pas déjà assez d'une emmerdeuse, il s'en coltinait à présent deux pour le prix d'une, et qui semblaient se partager le même quart de cervelle.

Son exaspération enfla, et il manqua écraser la brève missive qu'il parcourait des yeux.
Ce n'était pourtant pas la faute de son auteur, qui n'y était pour rien, sinon en lui rappelant l'objet de sa contrariété.

Citation:
Au garde du corps le mieux payé de France,

Pierre, le bon jour,

J'ai cru comprendre qu'à défaut de parler, vous maitrisiez l'art des lettres.

Je me refuse à prendre des nouvelles directement auprès de votre employeuse, tant il me semble qu'elle doit être encore fâchée de mon dernier courrier. Ou bien qu'elle m'a oublié. On oublie si facilement un "lui".

De mon côté, l'ennui aidant, je me demande si vous n'avez pas rencontré de difficultés lors de vos trajets. Je ne doute pas que vous ayez - enfin - empli votre office si tel était le cas, mais j'aimerais m'en assurer. Je serais ennuyé de la savoir - de nouveau - blessée.

Enfin, j'avais cru comprendre que vos pas se dirigeaient vers la Guyenne. Pourriez-vous me préciser où ? Puisque j'ai prévu d'y passer prochainement, autant que j'en profite pour vous payer un verre, histoire de compenser votre quotidien qui ne doit pas être des plus... reposants.

Bon courage dans votre fonction,

Octave de Beaupierre


La réponse ne tarda pas à sécher sur le vélin.

Citation:
"Lui", 

L'ennui vous ronge-t-il à ce point la cervelle que vous envisagez rejoindre Isaure à nouveau ? 
Elle se porte bien, si cela peut soulager votre conscience. 

Elle ne me rebat pas les esgourdes en permanence à votre sujet, si ce n'est pour sous-entendre que je suis un piètre acheteur de poires en comparaison de vous. J'en déduis qu'elle ne vous en veut pas (trop) et qu'elle n'a (presque) pas oublié votre existence. 

Nous moisissons actuellement à Agen. Pour combien de temps, je ne sais. 

Fuyez. 

Pierre 

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Pierre...
Pierre arque un sourcil à la vue de son courrier du matin, tandis qu'un rictus ni encore sourire, ni tout à fait grimace naît à la commissure de ses lèvres. Le Beaupierre se fout de sa gueule. Le taiseux a assez d'expérience en la matière pour le savoir, sauf que d'ordinaire il se trouve de l'autre côté de la plume. Il n'arrive pas à décider si cela lui plaît, ou s'il s'en trouve agacé.
Citation:
Au muet le plus bavard que je connaisse

J'arrive vous soulager de votre charge - rémunérée - d'ici deux jours pour un après midi. Veillez à ne pas l'avoir énervée juste avant, on sait qui en fait les frais.

Vous me voyez flatté, ravi et honoré d'avoir su choisir des poires. Je vous montrerai à l'occasion. Mais pas les mêmes, de celles qui se boivent.

J'en conclus cependant qu'elle est égale à elle-même.

Je peux profiter de ses bons côtés quelques heures, et suivre votre conseil ensuite, quand elle sera de bien bonne humeur, comme nous la connaissons vous et moi. Une fois que j'aurai fui, je n'aurai qu'à me souvenir des bons moments, tandis que vous subirez les autres.

Promis, le verre tient toujours. Voire la bouteille, vous m'avez l'air désespéré.
Octave de Beaupierre


Bah, après tout...

Citation:
À vos risques et périls.

Pierre

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Pierre...
[Une petite taverne de Rochechouart]

On passe le temps en rattrapant les courriers.

    |Russe|

Citation:
Pierre,

Je me serais bien excusée de ne pas vous avoir donné de nouvelles pendant un si long moment, mais paraît-il qu'il ne faut pas s'excuser. Alors, je vous envoie simplement de mes nouvelles, comme ça, ni vu, ni vu.

Je suis chez les soeurs en ce moment. J'en sortirai peut-être bientôt, du moins je l'espère. Je me suis trouvée malade, c'est pour ça. Du coup, la solution s'est trouvée d'elle-même. Mon groupe est parti, à travers les flôts, et je suis seule à l'autre bout du monde. C'est amusant, parce que je crois que je leur en veux de ne pas m'avoir attendue, ni envoyé de missive, alors qu'au fond de moi, j'espèrais ne pas partir avec eux.

Et vous comment ça se profile votre voyage? Toujours à souffrir de votre charmante noble? J'espère bien que ça s'arrangera en tout cas.

Dites, auriez-vous une idée d'un endroit agréable? Où je pourrais y trouver du monde de préférence. Il faut sans doute que je me repose encore un peu avec tous ces événements, mais j'espère reprendre la route bientôt, à la recherche de quelque chose mais je ne sais pas encore quoi.

Etes-vous toujours à Montpellier? Il me semble que vous me devez un voyage à la mer.

J'espère que vous allez bien, vous savez, vos missives me manquent je crois. Mais ne prenez pas ça pour un compliment, je ne suis pas de ce genre-là.

Cat'.


Citation:
Cat,

Voilà longtemps que je n'avais pas eu de vos nouvelles, j'ai cru que vous vous étiez lassée de ma prose. J'espère que vous vous rétablirez vite, ou qu'au moins vous mourrez rapidement, sans souffrance. Mais puisque vous êtes assez alerte pour tenir une plume, et que vous me semblez aussi coriace qu'une mauvaise herbe, j'ai bon espoir de votre survie si les nonnes n'essaient pas de vous achever à coup de prières.

Je vous dois toujours une excursion au bord de l'eau, je n'ai pas oublié. J'ai quitté Montpellier il y a quelques temps, voyageant au gré des caprices de mon emmerdeuse en chef, qui semble se découvrir des trésors de pénibilité chaque jour que Dieu lui heurte la caboche. Nous avons moisi un moment à Agen, et faisons route vers Limoges, chassés par les conflits du moment (qui contre qui, pour quoi, ne me demandez pas, ces conneries me dépassent).
Nous avons recroisé le prêtre que j'escortais à notre rencontre, dans cette petite taverne de Saintes. Il m'a copieusement taquiné à votre propos, et ne semble pas lâcher l'idée de me confesser.

Un endroit agréable ? Ça n'est pas à moi qu'il faut demander ça. Je ne sais même pas si j'en connais vraiment. Ça dépend souvent de la présence ou de l'absence d'autrui à mes côtés.

Pierre

P.S. : je me fous des genres que vous vous donnez. Je vais le prendre comme un compliment.


    |Rousse|

Citation:
Gy,

Pas de nouvelles de toi depuis ton courrier piégé. Soit tu fais la gueule, soit tu es trop occupée à fondre d'amour pour le machin qui te grandit dans le bide, si t'as pas encore réussi à le décrocher. Soit ta teigne de nièce a appris à mieux viser depuis la dernière fois.

T'es encore à Limoges ? Je dois y être sous peu, pour quelques jours. Je lâcherai ta saleté de chat à l'auberge si je te trouve pas.

Je t'embrasse, poule pondeuse.

Ton roc

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Pierre...
[Dans la salle de "Ta mère la catin !", on s'envoie des p'tits mots]

Citation:
Mon Roc,

J'ai cru apercevoir ta carcasse dans le coin.
Désolée si je ne t'ai pas répondu, mais rassure-toi, je ne faisais pas la gueule et je ne pourrissais pas dans une tombe du coin.
J'étais un peu préoccupée par le truc qui pousse dans mon ventre et dont j'arrive pas trop à me débarrasser.
C'est pas faute de faire des bains de camomille ou de longues chevauchées dès que LM a le dos tourné.
Le parasite reste accroché, y'a rien à faire et je grossis à vue d'oeil !

T'auras le plaisir de pouvoir te foutre de ma gueule comme ça.

J'espère te croiser. Combien de temps restes-tu ?

Gy'


Citation:
Gy,

Je reste au moins jusqu'à dimanche, ensuite, ce sera au gré des caprices de l'emmerdeuse en chef. J'espère bien avoir l'occasion de te voir te dandiner comme une grosse barrique ivre d'ici là. Tu passes encore la porte, au moins ? Ça doit valoir le détour.

Ici, la plume hésite. Le taiseux n'a pas à s'en mêler. C'est des affaires de bonnes femmes. Mais il s'agit de Gysèle.
Citation:
Je peux t'aider à tomber dans les escaliers. On accusera Casse-toi de s'être faufilé dans tes jambes.

Pierre

P.S. : j'aime bien ta nouvelle fille de salle, pas radine sur le vin.

Finissons sur une note plus guillerette.
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